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Rapport d'enquête aéronautique A98W0043

Collision avec un objet
All West Air Services Ltd.
Piper PA-34-200 Seneca 1 C-GRFE
Grande Prairie (Alberta)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le pilote d'un Piper Seneca 1, immatriculé C-GRFE, numéro de série 347350249, a quitté Calgary (Alberta) pour un vol selon les règles de vol aux instruments (IFR) à destination de Grande Prairie (Alberta), à 7 h 55, heure normale des Rocheuses (HNR)Note de bas de page 1. Le pilote avait loué l'avion pour un vol privé afin de transporter quatre passagers à Grande Prairie pour la fin de semaine. Le vol vers Grande Prairie s'est déroulé à 8 000 pieds au-dessus du niveau de la mer (asl), et une autorisation d'approche au système d'atterrissage aux instruments (ILS) pour la piste 29 à été communiquée au pilote, qui en a accusé réception alors que l'avion approchait de sa destination. Le bulletin météorologique indiquait alors un plafond de 200 pieds et une visibilité signalée de 1/8 mille terrestre (sm) dans du brouillard. Pendant l'approche, l'avion a heurté un lampadaire sur le bord d'une autoroute, a amorcé un virage serré à gauche et s'est écrasé au sol. L'avion a fait la roue sur le nez et s'est immobilisé à l'endroit, dans le sens opposé au vol. Les cinq occupants ont péri dans l'accident qui s'est produit à 10 h 33.

This report is also available in English.

Renseignements de base

Le pilote a commencé sa formation de pilote en 1995 et a obtenu sa licence de pilote privé en décembre de la même année. Il a alors poursuivi son entraînement et obtenu sa licence de pilote professionnel et, le 30 novembre 1997, il avait obtenu des annotations pour une qualification multimoteurs, une qualification aux instruments et une qualification d'instructeur de classe quatre. Il avait totalisé 428 heures de vol sur monomoteur et 60 heures de vol sur multimoteurs. Le carnet du pilote indique que les vols sur multimoteurs avaient tous été faits sur Piper Seneca. Au cours de son entraînement pour l'obtention de sa licence de pilote professionnel et de sa qualification aux instruments, le pilote avait effectué 46 heures de vol aux instruments avec dispositif d'occultation et 2.3 heures de vol réel aux instruments. Au moment de l'accident, le certificat médical du pilote n'avait pas été renouvelé pour le maintien de sa licence de pilote professionnel. Les privilèges de pilote privé d'une licence de pilote professionnel sont prolongés de six mois au-delà de la date d'expiration de la licence dans ce cas. Il n'avait jamais effectué d'approche en conditions météorologiques de vol aux instruments (IMC) avant le jour de l'accident.

Le pilote avait pris des arrangements pour louer l'avion plus tôt cette semaine-là. Le Seneca devait être ravitaillé en carburant et prêt à partir tôt le matin du 14 mars. À 5 h 34, le pilote a appelé la station d'information de vol (FSS) à Springbank (Alberta) pour un exposé météorologique et pour déposer un plan de vol IFR. Le spécialiste de la FSS a fourni un exposé général, les conditions actuelles pour Calgary, Red Deer, Whitecourt et Grande Prairie, des rapports de pilote sur du givrage ainsi qu'une prévision de givrage dans les nuages ainsi que les vents. Pour Calgary, on signalait un plafond de 700 pieds dans un ciel couvert avec des visibilités de 8 à 10 milles terrestres. Il y avait un ciel couvert à 2 500 pieds à Red Deer avec un visibilité de 15 milles terrestres dans la neige. Pour Whitecourt, il y avait des nuages épars à 1 400 pieds, un ciel couvert à 2 000 pieds avec une visibilité de 4 milles terrestres dans la neige, et Grande Prairie avait fait l'objet d'un rapport spécial à 5 h 23 au sujet d'un ciel couvert à 400 pieds et une visibilité de 2 milles terrestres dans le brouillard. Il était prévu que les conditions à Grande Prairie s'améliorent plus tard dans l'après-midi. La prévision d'aérodrome pour Grande Prairie n'envisageait pas la dégradation des conditions avant l'émission du rapport spécial. Le pilote n'a pas reçu la prévision d'aérodrome. Le plafond et la visibilité ont commencé à diminuer à 5 h 23 et ont continué à décroître jusqu'à 13 h 20, moment où les conditions ont commencé à s'améliorer. Le pilote a appelé la station afin de changer son heure de départ pour 7 h 05, mais il n'a pas demandé ni reçu de mise à jour sur les conditions météorologiques. Le rapport à 6 h donnait les conditions suivantes : vent calme, visibilité de 3/4 de mille terrestre dans de la brume, visibilité verticale de 200 pieds, température de moins 7 degrés Celsius et point de rosée de moins 9 degrés Celsius. À 7 h, la visibilité avait baissé à 1/4 mille terrestre dans un brouillard givrant, et la visibilité verticale était de 100 pieds.

À 7 h 48, le pilote a appelé pour obtenir son autorisation IFR, suivie des instructions de roulage, puis de l'autorisation de décoller de Calgary. L'appareil a décollé à 7 h 55. Les communications avec les contrôleurs de la circulation aérienne sur la partie en route du vol ont semblé normales, sauf pour quelques messages radio qui ont dû être répétés. Quand il a reçu l'autorisation d'approche à Grande Prairie, le pilote a confirmé qu'il avait le rapport du service automatique d'information de région terminale (ATIS) pour Grande Prairie. Lorsqu'on lui a demandé quelles étaient ses intentions en cas d'approche interrompue, le pilote a indiqué qu'il monterait à 4 300 pieds asl et qu'il retournerait à la radiobalise QU, ce qui correspond à la procédure décrite sur la carte d'approche pour Grande Prairie dans le Manuel des cartes d'approche (Canada Air Pilot). En rapprochement de l'aéroport, lorsque le spécialiste de la FSS lui a demandé s'il avait l'ATIS, le pilote a répondu qu'il avait l'information D. À ce moment-là, la partie météorologique de l'information D de l'ATIS précisait :

Aéroport de Grande Prairie, information D, météo à 17 h : vent calme; visibilité 1/8 dans le brouillard; visibilité verticale de 200 pieds; température moins 6, point de rosée moins 8; altimètre 29.98.

La FSS de Grande Prairie a reçu du pilote un rapport de passage de la radiobalise sur l'alignement de descente, puis un appel de détresse (MAYDAY) suivi, cinq secondes plus tard, du signal d'une radiobalise de secours (ELT).

À 8 h 28 et à 9 h 05, deux autres avions avaient effectué une approche ILS sur la piste 29, mais avaient dû interrompre l'approche et se diriger vers leur aéroport de dégagement respectif. Les équipages avaient indiqué qu'ils étaient entrés dans des nuages à environ 900 pieds au-dessus du sol (agl), et qu'ils ne voyaient pas le sol à la hauteur de décision de 200 pieds agl. Cette information n'avait pas été communiquée au pilote de l'avion accidenté.

Un pilote qui effectue une approche ILS dans des conditions aux instruments consulte les instruments de l'avion pour garder l'avion dans l'axe de la piste et sur l'alignement de descente jusqu'à la hauteur de décision, où il doit décider s'il poursuit l'approche ou s'il applique la procédure d'approche interrompue. L'équipement ILS capte les signaux radio émanant des radiophares d'alignement de piste et de descente situés au sol. Ces signaux sont représentés sur l'instrument de bord par des aiguilles verticales et horizontales; si le pilote maintient les aiguilles centrées, l'avion descend sur une pente de 3 degrés et sur le prolongement de l'axe de piste. Les données radar montrent qu'à partir de la radiobalise de Grande Prairie, une aide qui sert de radioborne extérieure pour une approche ILS sur la piste 29 et qui est située à 3 milles marins (nm) de la piste, le pilote ne suivait pas avec précision l'alignement de piste en rapprochement. Des virages à gauche et à droite durant la descente montrent que l'aiguille de l'alignement de piste n'était pas centrée. Le taux de descente a semblé normal pour la vitesse de l'avion.

L'examen du sillon laissé par l'épave et de l'avion a montré que le côté gauche du moteur gauche a percutéun lampadaire à une d'environ 18 pieds au-dessus du sol (agl). Ce lampadaire se trouvait du côté sud d'une autoroute à deux voies, à environ 1 200 pieds de l'extrémité de la piste et à 1 400 pieds à la gauche du prolongement de l'axe de piste. L'avion a amorcé un virage serré à gauche, et l'aile gauche a labouré le sol selon une inclinaison de 90 degrés. L'avion a alors fait la roue sur le nez et s'est immobilisé dans le sens opposé du vol. La section du nez a été écrasée jusqu'au tableau de bord, le fuselage arrière s'est déformé par flambage derrière la cloison de la cabine, et l'empennage s'est déplacé vers le haut et l'avant sous l'impact. Les réservoirs de carburant se sont rompus et ont été écrasés. Le train d'atterrissage et les volets semblaient être en position rentrée. Compte tenu des dommages subis par le fuselage et des forces de décélération présentes au moment de l'impact, il était impossible de survivre à cet accident.

Le Piper Seneca était exploité par All West Air Services Ltd comme plate-forme d'entraînement pour la formation sur multimoteurs et aux instruments ainsi que pour les vols d'affrètement. Les dossiers indiquent que l'avion était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. Il n'y avait aucune réparation différée pertinente aux circonstances de l'accident dans les carnets de maintenance. La masse et le centrage de l'avion se trouvaient dans la plage normale. L'avion n'était pas équipé ni certifié pour voler dans des conditions de givrage connues.

All West Air Services Ltd. dispose d'un ensemble de lignes directrices et de règlements pour le programme d'entraînement au pilotage. La Section 2, qui traite des limites météorologiques, stipule que pour les vols effectués en vertu d'un plan de vol aux instruments, en double commande ou en solo, le pilote commandant de bord doit être titulaire d'une qualification IFR et :

  1. Décollage : 1 mille terrestre ou plus le jour et 2 milles terrestres ou plus la nuit
  2. Vol en croisière : aucun vol exécuté dans des conditions de givrage prévues ou connues
  3. Approche et atterrissage en VFR
  4. Météo à l'aéroport de dégagement : VFR

Avant le départ de Calgary, le chef instructeur de pilotage a demandé au pilote ce qu'il en était de la météo à Grande Prairie, et le pilote a indiqué que la météo était acceptable. On n'a rapporté aucun autre échange sur le vol. On n'a pu retrouver les lignes directrices ni les règlements dans la trousse de vol personnelle du pilote.

Analyse

Bien que la prévision d'aérodrome n'aient pas indiqué que le plafond diminueraient à 100 pieds et la visibilité à 1/8 mille à Grande Prairie, les conditions prévues pour la matinée étaient IFR et inférieures aux limites d'atterrissage. Avant le départ de Calgary, le plafond était tombé à 200 pieds, et la visibilité à 1/4 mille. Le pilote n'a pas demandé de mise à jour des conditions météorologiques du moment pendant le vol vers le nord. Tant le contrôleur de la circulation aérienne que le spécialiste de la FSS avaient demandé au pilote s'il avait l'ATIS avant qu'il n'amorce son approche, et le contrôleur a demandé au pilote quelles étaient ses intentions en cas d'approche interrompue. Les réponses permettent de croire que le pilote savait les conditions météo et que la procédure d'approche interrompue serait celle qui figure sur la carte d'approche de la piste 29.

Le fait que deux avions qui avaient exécuté des approches plus tôt avaient dû remettre les gaz et se rendre à leur aéroport de dégagement respectif n'avait pas été communiqué au pilote de l'avion accidenté. Rien n'oblige à communiquer ce type d'information. Le pilote n'avait pas demandé la météo lorsqu'il avait révisé son heure de départ; par conséquent, il ne savait pas que les conditions s'étaient détériorées. Pendant le vol au nord, une mise à jour sur les conditions météorologiques aurait pu être obtenue du contrôleur ou du spécialiste de la FSS. À la lumière des conditions météorologiques qui prévalaient et de la prévision qui avait été fournie, des pilotes expérimentés auraient normalement demandé une mise à jour à chaque occasion afin de les aider à prendre leurs décisions. Il n'a pas été possible de déterminer pourquoi le pilote n'avait pas profité des services offerts.

L'information fournie au pilote lorsqu'il a appelé la FSS indiquait que la visibilité à Grande Prairie était de 2 milles, et le plafond, de 400 pieds dans un ciel couvert, mais que les conditions s'amélioreraient en après-midi. Le pilote a manifesté sa préoccupation au sujet des conditions de givrage dans les nuages qui avaient été signalées pour la région de Calgary. De la neige était signalée à Red Deer et à Whitecourt, mais le sommet des nuages prévu indiquait que le vol vers le nord à 8 000 pieds asl se trouverait entre les couches. Pour rester conforme aux lignes directrices publiées par l'entreprise, le vol n'aurait dû quitter Calgary que plus tard dans la journée.

Les inscriptions dans le carnet du pilote indiquent que l'approche à Grande Prairie était sa première approche en IMC. L'avion est probablement entré dans les nuages à environ 900 pieds agl, juste après le passage de la radioborne extérieure pour l'approche sur la piste 29. Les données radar montrent l'avion virant à gauche, puis à droite pendant la descente, alors que le pilote tentait de suivre l'alignement de piste. Le taux de descente a semblé constant. L'avion a franchi la hauteur de décision de 200 pieds agl et a continué à descendre jusqu'à la collision avec un lampadaire. Il n'a pas été possible de déterminer pourquoi le pilote a poursuivi sa descente au-dessous de la hauteur de décision ni pourquoi il a exécuté une approche dans les conditions météorologiques en présence.

Après avoir heurté le lampadaire, l'avion est entré dans un virage serré à gauche sous l'effet combiné de la traînée sur le côté gauche résultant du contact du lampadaire avec le moteur gauche et de la poussée produite par le moteur droit. La phase du vol n'a pas été clairement déterminée, mais comme il semble que le train d'atterrissage était rentré et que le brusque virage à gauche laisse croire que le moteur droit développait beaucoup de puissance, il est probable que tout juste avant de heurter le lampadaire, le pilote était en train de remettre les gaz.

L'appel MAYDAY émis par le pilote, environ cinq secondes avant que ne se déclenche la radiobalise de détresse, aurait été envoyé après que l'avion eut heurté le lampadaire.

Faits établis

  1. Le pilote était certifié et qualifié pour le vol, conformément à la réglementation en vigueur.
  2. Les conditions météorologiques à Grande Prairie étaient sous les minima réglementaires pour une approche ILS sur la piste 29.
  3. C'était la première approche du pilote en conditions météorologiques aux instruments.
  4. Le pilote n'a pas interrompu la descente lorsque l'avion a atteint la hauteur de décision de 200 pieds agl.
  5. L'avion a heurté un lampadaire à environ 18 pieds agl.
  6. La maîtrise de l'avion a été perdue après la collision avec le lampadaire.
  7. Le pilote tentait probablement une remise des gaz avant de heurter le lampadaire.

Causes et facteurs contributifs

L'avion s'est écrasé après que le pilote a descendu sous la hauteur de décision pour une approche ILS sur la piste 29 et qu'il a heurté un lampadaire. Il n'a pas été possible de déterminer pourquoi le pilote a entrepris approche dans les conditions météorologiques en présence ni pourquoi il apoursuivi sa descente au-dessous de 200 pieds agl.

Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisée le par le Bureau qui est composé du Président Benoît Bouchard et des membres Maurice Harquail, Charles Simpson et W.A. Tadros.