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Rapport d'enquête aéronautique A04C0064

Dislocation en vol et collision avec le relief
de l'hélicoptère de construction amateur
Baby Belle C-FZQN
à Ralph (Saskatchewan)
le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 20 mars 2004, l'hélicoptère de construction amateur Baby Belle, immatriculé C-FZQN et portant le numéro de série BB2066, décolle d'une ferme située près de Ralph (Saskatchewan) pour un vol local selon les règles de vol à vue. Le pilote effectuait ce vol pour voir s'il y avait des accumulations de neige aux intersections entre les routes de section et une autoroute.

Peu après le décollage, des débris commencent à tomber de l'hélicoptère pendant qu'il vole en direction nord-ouest à environ 500 pieds au-dessus du sol. L'hélicoptère chute verticalement, le nez s'incline vers le bas, et l'hélicoptère, alors dans un piqué prononcé, s'écrase dans un champ de ferme. Le pilote, seul occupant à bord, est mortellement blessé, et l'hélicoptère est détruit par un incendie après l'impact. L'accident s'est produit vers 10 h, heure normale du Centre.

Renseignements de base

Le pilote était titulaire d'une licence de pilote privé d'hélicoptère valide avec annotations pour Baby Belle et RH22, valide de jour seulement, et il était certifié comme il se doit pour le vol prévu. Le pilote, qui avait construit et entretenu l'hélicoptère, totalisait 208 heures de vol, dont 137 sur type. L'hélicoptère était un aéronef de construction amateur construit à partir d'un ensemble préfabriqué (kit). La construction avait été terminée en 2003, et l'hélicoptère avait accumulé 169 heures de vol depuis sa mise en service initiale.

Le bureau météorologique le plus proche se trouvait à l'aéroport de Regina, à environ 75 milles au nord-ouest du lieu de l'accident. À 10 h, heure normale du CentreNote de bas de page 1, les conditions météorologiques enregistrées à l'aéroport de Regina étaient les suivantes : plafond illimité, visibilité de 15 milles terrestres, température de −10 °C, vent du 350°C à 11 noeuds, en rafales à 16 noeuds, et calage altimétrique de 30,60. Les conditions météorologiques étaient similaires sur le lieu de l'accident, où le temps était clair avec un fort vent soufflant en rafales vers le nord-ouest.

L'hélicoptère a heurté le sol en position très inclinée. En raison de l'incendie qui a suivi l'impact, les enquêteurs n'ont pas pu prélever d'échantillons de carburant ni relever les indications des instruments. Les pales du rotor principal se sont détachées de la chape du pylône principal et ont été retrouvées sur le lieu de l'épave principale. Des marques d'indentation sur la chape indiquaient qu'il y avait eu heurt du pylône, et les pales du rotor principal étaient fortement repliées vers le bas. Le longeron d'une pale de rotor s'était rompu en surcharge. Les dommages relevés sur le ventilateur de refroidissement du moteur entraîné par ce dernier indiquaient que le moteur développait peu ou pas de puissance au moment de l'impact. Les commandes de vol ont été inspectées, et aucune anomalie avant impact n'a été découverte.

Plusieurs recherches ont été menées sur le lieu de l'accident et dans le voisinage immédiat. Des morceaux éparpillés de la verrière en goutte d'eau et de la structure tubulaire de la poutre de queue en acier 4130 ont été trouvés à un demi-kilomètre de l'épave principale. La section de la structure de la poutre de queue comprise entre les références 214 et 241 a été trouvée avec le boîtier d'engrenages du rotor de queue toujours fixé à son attache, à 40 mètres de l'épave principale. Le rotor de queue, qui s'était détaché au niveau de l'arbre du boîtier d'engrenages, a été trouvé à environ 100 mètres de l'épave principale. L'analyse de l'arbre rompu a révélé une défaillance en surcharge. La structure de fixation du stabilisateur (photo 1) s'était rompue de la poutre de queue et elle a été trouvée près de la section de la structure de la poutre de queue comprise entre les références 214 et 241. Un morceau de longeron du stabilisateur était toujours relié à la structure de fixation. Ce morceau de longeron de stabilisateur présentait une fracture complète au premier trou de rivet de l'emplanture. Malgré plusieurs recherches dans la zone située sous la trajectoire de vol et autour de celle-ci, le stabilisateur lui-même n'a pas été retrouvé. Une analyse de la fracture a révélé la présence d'une crique de fatigue sur 75 % de la circonférence du tube longeron (photo 2); le reste s'était rompu en surcharge. On n'a pas trouvé le stabilisateur, mais celui-ci était toujours fixé à l'hélicoptère à la fin du vol précédent.

Photo 1. Structure de fixation du stabilisateur et morceau de longeron
Photo of Structure de fixation du stabilisateur et morceau de longeron
Photo 2. Fracture du tube longeron du stabilisateur
Photo of Fracture du tube longeron du stabilisateur

Le stabilisateur est un plan aérodynamique symétrique de 22 pouces de longueur, monté selon un angle d'incidence positif de 2 degrés du côté opposé au rotor de queue, à la référence 241 (voir l'annexe A). Le stabilisateur comprend un tube longeron en acier 4130 et il est percé de trous pour permettre la fixation du plan au moyen de rivets. Au cours des vols en translation en croisière, le stabilisateur aide à la maîtrise de l'hélicoptère. À des vitesses inférieures à 70 milles à l'heure, le stabilisateur soulève la queue, et à des vitesses supérieures à 70 milles à l'heure, il force la queue vers le bas. À des vitesses supérieures à 70 milles à l'heure, l'écoulement aérodynamique autour de la verrière en goutte d'eau fait piquer le nez de l'hélicoptère et soulève la queue. Lorsque la queue se soulève, l'extrados du stabilisateur est exposé à l'écoulement aérodynamique, ce qui produit une force vers le bas qui permet de conserver un équilibre. Le stabilisateur amortit aussi les vibrations causées par le rotor de queue.

La structure de fixation du stabilisateur trouvée sur le lieu de l'accident était équipée d'une plaque d'extrémité en aluminium qui était montée perpendiculairement au plan aérodynamique au niveau de l'emplanture (photos 1 et 2). Un examen des dessins de construction et un échange avec le producteur du kit ont révélé que le stabilisateur est équipé d'une plaque d'extrémité du côté extérieur du plan aérodynamique et qu'il n'est pas conçu pour recevoir une plaque d'extrémité du côté emplanture.

L'hélicoptère avait déjà subi un détachement de pale de rotor de queue et deux impacts de rotor de queue lors de manoeuvres en stationnaire. Un examen des dossiers de maintenance a indiqué que le rotor de queue avait été remplacé 111 heures de vol avant le vol en question. Aucune indication d'impact de rotor de queue n'a été trouvée. Le Règlement de l'aviation canadien exige que les détails relatifs à tout événement anormal subi par un aéronef soient inscrits dans le carnet technique de cet aéronef.

Le détachement d'une pale du rotor de queue qui s'était produit avant le vol en question avait eu pour effet de plier le tube longeron du stabilisateur. Par la suite, le tube longeron avait été redressé à froid au moyen d'une presse. Ce procédé de redressement d'un tube longeron de stabilisateur n'est pas une pratique de maintenance recommandée. Aucune indication de réparation au tube longeron n'a été trouvée dans les dossiers de maintenance de l'hélicoptère.

Analyse

Au cours du vol en question, il est probable que le stabilisateur s'est détaché lorsque la vitesse en croisière était supérieure à 70 milles à l'heure, ce qui a soulevé la queue de l'hélicoptère et fait perdre la maîtrise de ce dernier par le pilote. Les forces exercées par un brusque mouvement vers le haut de la poutre de queue ont défléchi les pales du rotor principal vers le bas, et le disque rotor principal a alors heurté la structure de la poutre de queue (photos 3 et 4). Les pales du rotor principal ont continué à tourner, il s'en est suivi un heurt du pylône, la verrière en goutte d'eau a été détruite, et l'hélicoptère s'est disloqué en vol. Il est probable qu'au moment de l'impact avec le sol, la pale avançante du rotor a été forcée vers le haut, rompant ainsi en surcharge le tube longeron du stabilisateur.

Photo 3. Reconstruction de l'épave montrant le contact de la poutre de queue avec le rotor
Photo of Reconstruction de l'épave montrant le contact de la poutre de queue avec le rotor
Photo 4. Positionnement de tous les composants selon leur position normale sur l'hélicoptère
Photo of Positionnement de tous les composants selon leur position normale sur l'hélicoptère

Le détachement du stabilisateur lors du vol en question est probablement lié au détachement antérieur d'une pale du rotor de queue et à la réparation qui a suivi. Le détachement de la pale du rotor de queue a induit des vibrations excessives dans le stabilisateur qui, combinées à un bras de levier de 22 pouces du plan aérodynamique, ont plié le tube longeron à l'emplanture. Le redressement à froid du tube longeron du stabilisateur, allié aux vibrations excessives, aurait pour effet de concentrer les contraintes au premier trou de rivet du côté emplanture. Les deux impacts de rotor de queue qui ont suivi auraient alors aggravé les concentrations de contraintes localisées. Les vibrations induites par le détachement de la pale du rotor de queue et les impacts de ce dernier ont amorcé une crique de fatigue. L'hélicoptère a continué à être utilisé, la crique de fatigue a continué à progresser, et le tout s'est soldé par une défaillance en surcharge du tube longeron du stabilisateur. Le montage d'une plaque d'extrémité en aluminium à l'emplanture du plan aérodynamique du stabilisateur ne permettait pas d'inspecter la zone, ce qui a effectivement masqué la crique de fatigue.

L'enquête a donné lieu au rapport de laboratoire suivant :

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Le détachement d'une pale du rotor de queue au cours d'un vol précédent avait induit des vibrations excessives dans le stabilisateur, ce qui a eu pour effet de plier le tube longeron de ce dernier.
  2. Le redressement à froid du tube longeron du stabilisateur, qui n'était pas une pratique de maintenance recommandée, a concentré les contraintes au premier trou de rivet et donné naissance à une crique de fatigue. Les impacts subséquents du rotor de queue ont aggravé les concentrations de contraintes localisées.
  3. Le détachement du stabilisateur a causé une perte de maîtrise et un brusque mouvement vers le haut de la poutre de queue, ce qui a défléchi les pales du rotor principal vers le bas, lesquelles sont alors entrées en contact avec la structure de la poutre de queue.

Fait établi quant aux risques

  1. Le montage d'une plaque d'extrémité du côté emplanture du tube longeron du stabilisateur a masqué la crique de fatigue.

Autre fait établi

  1. Aucune indication de la réparation apportée au tube longeron du stabilisateur n'a été trouvée dans les dossiers de maintenance, contrairement à ce que prévoit le Règlement de l'aviation canadien.

Mesures de sécurité

Le BST a rédigé et envoyé un bulletin sur l'événement au producteur du kit et aux organisations de l'aviation de loisir, les avisant de la défaillance du stabilisateur.

Le producteur du kit du Baby Belle a publié un bulletin technique informant les utilisateurs de l'événement et des critères d'inspection recommandés. Le bulletin avise aussi les utilisateurs de se conformer à la conception en retirant toute plaque d'extrémité montée du côté emplanture, le cas échéant.

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .

Annexes

Annexe A - Diagramme du stabilisateur