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Rapport d'enquête aéronautique A07Q0014

Panne d'alimentation carburant
du DHC-2 Beaver C-GUGQ
exploité par Propair Inc.
à 25 nm au nord de La Grande-4 (Québec)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le DHC-2 MKI Beaver sur skis, immatriculé C-GUGQ, numéro de série 400, a décollé vers 11 h 30, heure normale de l'Est, de la Pourvoirie Mirage située à 60 milles à l'est de l'aéroport La Grande-4 (Québec), avec à son bord le pilote et quatre passagers, pour localiser des troupeaux de caribous. Environ 40 minutes après le départ, le moteur s'est arrêté à la suite d'une panne d'alimentation carburant. Le pilote n'a pu rétablir la puissance moteur et a effectué un atterrissage forcé sur un terrain accidenté. L'appareil a été lourdement endommagé; deux passagers ont subi des blessures graves. Le pilote a utilisé un téléphone satellite pour demander de l'aide. Les premiers secours sont arrivés par hélicoptère environ une heure et demie après l'accident. Le système d'alimentation en carburant avait été modifié à la suite de l'installation d'ailes fabriquées par Advanced Wing Technologies Corporation.

Renseignements de base

Propair Inc. détient un certificat d'exploitation valide émis par Transports Canada et exploitait le DHC-2 à partir de la Pourvoirie Mirage pour le transport des chasseurs. Le vol avait pour but de localiser les troupeaux de caribous et devait durer environ 30 minutes. Les conditions météorologiques étaient propices au vol à vue et la température extérieure était de moins 22 °C. Avant le vol, le pilote a rempli le réservoir ventral (réservoir auxiliaire) d'une capacité de 29 gallonsFootnote 1. À l'aide d'une jauge artisanale en bois, il a mesuré le niveau d'essence dans les réservoirs d'aile et a jugé que chaque réservoir d'aile contenait 20 gallons. Selon la quantité estimée de carburant (69 gallons), l'appareil avait une autonomie d'environ trois heures de vol.

Le pilote utilisait un système de positionnement mondial (GPS) Garmin 296 comme aide à la navigation. Les données GPS indiquent que l'appareil a décollé de la Pourvoirie Mirage vers 11 h 30, heure normale de l'EstFootnote 2 et s'est dirigé vers le nord-ouest du réservoir La Grande-4 à une altitude moyenne d'environ 1850Footnote 3 pieds au-dessus du niveau de la mer (asl). Vers 12 h 6, alors que l'appareil était à 1800 pieds asl, soit 560 pieds au-dessus du sol, le voyant de basse pression carburant s'est allumé, mais le pilote a d'abord cru à un reflet du soleil. Quelques secondes plus tard, le moteur a eu des ratés. Le pilote a noté que la pression carburant était à zéro.

Il a sélectionné le réservoir ventral (réservoir auxiliaire), ramené la manette des gaz vers le tiers et actionné la pompe manuelle. Le moteur, qui continuait à être entraîné par l'hélice, a toussé à quelques reprises, mais la puissance n'a pu être rétablie. Le pilote a tenté sans succès d'atteindre un lac en vol plané. Il n'a pas eu le temps de sortir les volets à fond et ils sont restés sortis à 10 degrés. L'appareil a atterri sur un terrain peu boisé mais accidenté. Au premier contact, les skis et le train d'atterrissage principal ont été arrachés. L'appareil a glissé sur le ventre sur environ 100 pieds avant de s'immobiliser. L'aile droite s'est rompue et l'appareil s'est incliné à gauche. La cabine n'a pas subi de déformation importante mais les ancrages de deux sièges de la deuxième rangée ont été arrachés ainsi que la fixation de la ceinture de sécurité d'un troisième siège. Le passager assis derrière le pilote a subi de graves blessures au dos; le passager du siège avant a subi des blessures à la tête entraînant la perte d'un oeil.

Le pilote a utilisé un téléphone satellite pour demander de l'aide. Un hélicoptère au service d'Hydro-Québec a d'abord évacué trois passagers, dont les deux blessés graves, environ une heure et demie après l'accident. Un des occupants de l'hélicoptère est demeuré sur le site avec le pilote de l'avion accidenté et l'autre passager jusqu'au retour de l'hélicoptère qui est revenu environ 40 minutes plus tard.

Après l'accident, l'extrémité des ailes touchaient le sol; de ce fait, l'essence résiduelle s'est déplacée vers la partie extérieureFootnote 4 des réservoirs. Ces réservoirs contenaient une quantité d'essence inférieure à la quantité d'essence inutilisable. Le filtre carburant ayant été brisé durant l'accident, le contenu du réservoir ventral (réservoir auxiliaire) s'est écoulé au sol.

Photo 1. Vue de la position des ailes
Photo of Vue de la position des ailes

L'information recueillie indique qu'au départ, le triple indicateur de niveau carburant affichait un peu plus de la ½ pour le réservoir gauche et un peu moins de la ½ pour le réservoir droit. L'indicateur du centre (pour le réservoir auxiliaire) affichait plein. Juste avant l'arrêt moteur, un des passagers a remarqué que l'indicateur de droite (réservoir droit) affichait vide alors que les deux autres indicateurs (réservoir auxiliaire et réservoir gauche) n'avaient pas bougé.

Le pilote possédait la licence et les qualifications nécessaires au vol et en vertu de la réglementation en vigueur. Il était titulaire d'une licence de pilote professionnel (avion) depuis mars 2002 et d'une qualification de vol aux instruments depuis avril 2006. Il totalisait 1200 heures de vol sur Beaver, dont 400 heures sur le C-GUGQ.

Modifications à l'aéronef

Les dossiers indiquent que l'appareil était entretenu selon la réglementation en vigueur. L'avion avait subi plusieurs modifications depuis sa mise en service en 1950, dont l'installation d'ailes fabriquées par Advanced Wing Technologies Corporation (AWT) selon le certificat de type supplémentaire (STC)Footnote 5 SA97-88, numéro 6. AWT avait retenu les services d'Aero Consulting Services (ACS) pour documenter et préparer toute l'information qui devait être présentée à Transports Canada pour la certification. Avec les nouvelles ailes, l'envergure de l'appareil est passée de 48 pieds à 52 pieds et 2 pouces.

Un réservoir intégralFootnote 6 d'une capacité de 66 gallons est installé dans chaque aile. Ces réservoirs mesurent environ 10 pouces en largeur et en hauteur et ont une longueur approximative de 10 pieds. Ils sont constitués de sept compartiments séparés par des cloisons ajourées qui empêchent le ballotement excessif du carburant.

Le système d'alimentation en carburant d'origine du Beaver comprenait trois réservoirs indépendants situés sous le plancher de la cabine. Une pompe entraînée par le moteur aspire l'essence et un sélecteur permet de choisir le réservoir. Une pompe manuelle dont le levier est situé sur la console centrale assure l'alimentation en carburant en cas de bris de la pompe moteur. Le nouveau système ne conserve que le réservoir ventral avant d'une capacité de 29 gallons et qui est devenu un réservoir auxiliaire. Le système comprend deux sélecteurs de réservoir. Le sélecteur original situé à gauche du tableau de bord est réaffecté à l'opération de valves situées à l'emplanture de chaque aile. Un premier câble flexible transmet la commande du sélecteur à la valve de gauche. De celle-ci, le mouvement est transmis à la valve de droite par un câble secondaire qui est de moindre calibre. Ce dernier passe entre le toit de la cabine centrale et la finition intérieure. La rotation du sélecteur ouvre une des valves et ferme l'autre. Une plage rouge sur l'affichette du sélecteur des réservoirs d'aile entre la position gauche et la position droite interdit de placer le sélecteur sur cette position médiane. La photo 2 montre la position du sélecteur et l'affichette tels que trouvés dans l'avion. L'emplacement et l'apparence de l'affichette ne sont pas conformes au dessin MF001-003, et l'affichette indique à tort que le réservoir contient 79 gallons américains de carburant utilisable alors qu'elle devrait indiquer 76 gallons américains (voir l'annexe B). Le deuxième sélecteur, appelé AUXILIARY FUEL CONTROL, est situé sur le plancher, à l'avant gauche du siège du pilote. Il permet de sélectionner soit les réservoirs d'aile, soit le réservoir ventral (auxiliaire). Un témoin lumineux AUX TANK ON confirme cette sélection. Le supplément au manuel de vol pour la modification AWT stipule qu'un seul des trois réservoirs peut être sélectionné à la fois.

Photo 2. Sélecteur des réservoirs d'aile
Photo of Sélecteur des réservoirs d'aile

En opération hivernale, la sélectute; comme pratique de placer le sélecteur des réservoirs d'aile en position médiane, ce qui était le cas lors du vol quion d'un réservoir d'aile à l'autre s'est révélée aléatoire à cause du gel du câble secondaire. En raison de cette difficulté, les pilotes de la compagnie ont adopté a mené à l'accident. Cette position place les deux valves en position semi-ouverte et a démontré, au cours de plusieurs centaines d'heures d'exploitation, pouvoir fournir un débit d'essence suffisant au moteur. Comme cette procédure ne respectait pas les exigences du supplément au manuel de vol, l'opérateur aurai dû protester et s'assurer que les pilotes exploitaient l'aéronef conformément au manuel de vol amendé.

Des pilotes ont rapporté qu'à cause des ailes plus longues, l'appareil était plus exigeant à garder en vol coordonné qu'un DHC-2 conventionnel. Dans ce cas, l'ouverture partielle des deux valves permettait le transfert du carburant vers l'aile basse. Du fait de la longueur des réservoirs, l'essence peut se retrouver du côté extérieur d'un des réservoirs, laissant à découvert la prise d'alimentation, particulièrement lorsque le niveau d'essence est bas.

Le passage de l'essence d'une aile à l'autre devrait être arrêté au premier compartiment de chaque réservoir où est située la prise d'alimentation (voir l'annexe A). Ces compartiments sont munis d'un clapet de non-retour restreignant le retour de l'essence dans les compartiments extérieurs. Le clapet est constitué d'un matériau souple similaire au néoprène. Il est riveté sur la cloison extérieure, derrière un garde (référence MW14-99) qui en restreint le mouvement et en assure le bon positionnement. L'enquête révèle que la fabrication des gardes n'est pas conforme aux dessins (figure 1); en effet, deux ouvertures circulaires d'environ un pouce de diamètre n'ont pas été percées (photo 3). Normalement, les ouvertures permettent à l'essence d'exercer une pression sur le clapet pour favoriser la fermeture du clapet. Sans les ouvertures, le flux d'essence contourne le garde et peut soulever le côté du clapet. De plus, la cloison est montée à angle droit avec l'aile. Comme l'angle de dièdre est de 2° et que le seul facteur retenant le clapet contre la cloison est la gravité, le maintien du clapet contre la cloison n'est pas assuré. En conséquence, l'essence peut retourner vers les compartiments extérieurs.

Figure 1. Vue du dessinFootnote 7
Figure of Vue du dessin
Photo 3. Garde du clapet tel qu'installé
Photo of Garde du clapet tel qu'installé

L'ensemble des modifications apportées à l'appareil a été terminé en juin 2002. Six mois plus tard, AWT a fait faillite. À cause des procédures judiciaires, Avionnerie Val-d'Or n'est devenue propriétaire de la définition de type qu'en novembre 2006. Afin de prendre des mesures affectant la définition de type, le nouveau propriétaire doit satisfaire à des exigences spécifiques du Règlement de l'aviation canadien (RAC) avant de pouvoir être qualifié comme titulaire du STC. Au moment de l'accident, le processus pour devenir conforme n'avait pas été amorcé; toutefois, des démarches à cet effet sont en cours.

Le voyant de basse pression carburant s'allume lorsque la pression est inférieure à 2 ou 3 lb/po² (livres par pouce carré). Lorsque la pression tombe à zéro, l'essence cesse d'être transférée au carburateur. À ce moment, l'essence contenue dans la cuve du carburateur continuera d'alimenter le moteur pendant plusieurs secondes en fonction de la puissance utilisée. Des essais réalisés à la suite de modifications ont démontré que l'alimentation en carburant continuait pendant 13 secondes à 1800 tours par minute et à 28 pouces de mercure de pression d'admission. Depuis les modifications, l'appareil a subi plusieurs pertes de puissance, toutes survenues en été. Dans certains cas, les pertes de puissance étaient dues au retard à changer la position du sélecteur des réservoirs d'aile après avoir épuisé un réservoir. Dans d'autres cas, il restait amplement d'essence dans les réservoirs d'aile, et la cause des pertes de puissance n'a pu être déterminée. Chaque fois, le moteur a repris de la puissance dans les secondes qui ont suivi la sélection du réservoir auxiliaire.

Le manomètre de pression carburant et le capteur d'indication de basse pression carburant ont été vérifiés au Laboratoire technique du BST. L'aiguille du manomètre était coincée à 3,3 lb/po² dû aux dommages de l'accident. Des essais sur le capteur ont démontré qu'il était calibré pour activer le voyant basse pression carburant à 2,82 lb/po² et qu'il le désactivait à 2,83 lb/po². Par contre, son fonctionnement s'est avéré intermittent en deçà de 3,0 lb/po².

La modification du système d'alimentation en carburant incluait le remplacement de l'indicateur de niveau carburant d'origine par un triple indicateur de niveau carburant fabriqué par Westach. Les indicateurs de niveau sont identifiés FUEL LEFT, AUX FUEL et FUEL RIGHT. Les trois réservoirs étaient munis de jauges de type transducteur (modèle 395-5S-1B-5-24) également fabriquées par Westach. Deux jauges sont installées à mi-hauteur de la paroi arrière de chaque réservoir d'aile (figure 2). La jauge extérieure transmet le niveau d'essence pour la moitié supérieure du réservoir, et la jauge intérieure, pour la moitié inférieure. Le dessin d'AWT, MF001-005 rev IR, spécifiait que les jauges devaient être pliées en forme de U inversé. Toutefois, selon Westach, le modèle de jauge spécifié au dessin ne peut pas être plié en forme de U inversé; il peut seulement être plié près de son ancrage à un angle allant jusqu'à 90°. En conséquence, la forme des jauges était confome aux instructions de Westach, mais le dessin d'AWT ne l'était pas. Le numéro de pièce WS34T13 spécifié sur le dessin pour le triple indicateur de niveau carburant est incorrect. Ce numéro de pièce n'est pas connu de Westach. Seul l'índicateur portant le numéro de pièce A3T13-IV est recommandé pour utilisation avec les jauges de Westach. L'indicateur installé dans l'aéronef portait ce numéro.

Figure 2. Orientation des jauges dans les réservoirs d'aile
Figure of Orientation des jauges dans les réservoirs d'aile

La tige de la jauge extérieure du réservoir gauche avait tourné dans son ancrage jusqu'à une position quasi horizontale, sa rotation ayant été arrêtée par le contact avec une cloison. Plusieurs marques de frottement sur la cloison indiquent que la tige s'était déplacée avant l'accident. Comme la jauge était immergée jusqu'à ce que le niveau du réservoir atteigne environ la moitié, le signal transmis à l'indicateur de niveau carburant restait celui d'un réservoir plein.

La réglementation canadienne exige que les produits aéronautiques soient certifiés selon les normes en vigueurFootnote 8. Le modèle de jauge et d'indicateur de niveau carburant utilisés n'avaient pas été soumis par Westach aux normes de certification de conformité. Par conséquent, les testsFootnote 9 requis auraient dû être effectués par AWT. Comme aucune documentation attestant de leur certification n'a été présentée au cours de l'enquête, la certification de ces composantes n'a pas pu être confirmée.

Contrairement aux instructions de Westach qui indiquent qu'une seule jauge doit être reliée à l'indicateur de niveau carburant, le STC spécifie que le câblage électrique des deux jauges pour chaque réservoir doit être installé en parallèle et relié à l'indicateur de niveau carburant.

Le projet de certification (Fuel System Functional Test Plan and Report)Footnote 10 présenté à Transports Canada a été modifié par un addendumFootnote 11. Le système d'alimentation en carburant existant est conforme en partie à l'addendum. Cependant, ce document fait référence à des jauges à flotteurs câblées en série, alors que les dessins représentent des jauges de type transducteur reliées en parallèle. De plus, contrairement au rapport de calibrationFootnote 12, un système totalisateur prévu pour accommoder les deux jauges par réservoir n'apparaît pas sur les dessins. Selon Westach, l'utilisation d'un système totalisateur exige un indicateur apte à lire des voltages plus élevés que ceux du triple indicateur de niveau carburant utilisé. Le rapport Fuel System Functional Test Plan and Report indique que les essais ont démontré que le système a correctement indiqué les niveaux suivants : ¼, ½ et ¾; toutefois, le rapport ne fournit aucune corrélation entre ces indications et la quantité correspondante d'essence en gallons.

Les jauges installées sur l'appareil sont conçues pour accepter des voltages de 9 à 28 volts c.c. (courant continu). À la sortie, le courant varie entre 0 et 5 volts selon le niveau d'immersion de la jauge dans l'essence. L'indication est linéaire de sorte que 2,5 volts donne une lecture de ½ à l'indicateur. Lors de l'essai, la jauge intérieure du réservoir gauche ne produisait que 1,69 volt lorsque complètement immergée. Les deux jauges ont été câblées en parallèle, selon les dessins du STCFootnote 13, et immergées dans de l'essence, avant d'être progressivement retirées pour simuler la consommation d'essence. En simulation de réservoir plein, le voltage maximum obtenu a été de 3,9 volts, ce qui donnait une lecture de ¾ à l'indicateur. En simulation de demi-réservoir, l'indication était de 5/8. L'ensemble des lectures ne s'est pas avéré linéaire, et la seule indication juste obtenue a été la simulation de réservoir vide. Il a aussi été noté que, si l'extrémité de la tige était en contact avec de l'eau ou de la glace, l'indication variait très peu et demeurait autour de ¾, peu importe le niveau du réservoir.

Des pilotes qui ont volé sur cet appareil ont rapporté que les indicateurs de niveau carburant des réservoirs d'aile étaient peu fiables. L'exploitant n'a pas réussi à corriger le problème. Lorsqu'une anomalie ne peut être corrigée, lors de l'exécution d'une procédure de maintenance approuvée, un rapport de difficultés en service (RDS) doit être soumis à Transports Canada, et le fabriquant est informé du problème. Si un STC reconnu par Transports Canada devient orphelin, Transports Canada devient responsable de tout problème de sécurité qui lui est signalé. En raison de la faillite d'AWT et de l'imbroglio judiciaire, l'exploitant n'a pas tenté de révisé les procédures d'utilisation et n'a pas signalé les difficultés de calibration des jauges d'essence.

La procédure de redémarrage du moteur, décrite dans le supplément au manuel de vol de l'appareil, qui a été préparée à la suite du remplacement des ailes, est identique à la procédure du manuel de vol original, sauf en ce qui concerne la nécessité de sélectionner le réservoir auxiliaire. Entre autres, le pilote doit ramener la manette des gaz au tiers, placer l'hélice au grand pas, actionner la pompe d'amorçage et utiliser la pompe manuelle s'il n'y a pas de pression carburant. Le pilote a gardé l'hélice au pas de croisière et n'a pas été en mesure d'actionner la pompe d'amorçage située sur le plancher de l'appareil à sa gauche. Si le démarrage n'est pas réussi, le supplément au manuel de vol indique de placer les volets à la position « Cruise flaps ». Cette position était applicable aux ailes originales, mais elle n'existe pas sur les nouvelles ailes.

Les sièges du pilote et du copilote étaient munis de baudriers avec enrouleur automatique à inertie. Lors du vol de l'accident, les baudriers de ces sièges n'ont pas été utilisés, ce qui est contraire aux dispositions du paragraphe 703.69 du RACFootnote 14. L'information recueillie indique qu'à l'occasion, l'enrouleur bloquait et pouvait empêcher le pilote d'atteindre le levier des volets. Le système d'inertie dans l'enrouleur est conçu pour bloquer l'enrouleur s'il est soumis à une brusque décélération ou à un déroulement rapide. L'examen de l'appareil a révélé que les baudriers étaient rangés sous le revêtement intérieur des parois latérales de l'avion, qu'ils n'étaient pas visibles pour le passager et que le passager n'avait reçu aucune consigne de sécurité concernant le baudrier à sa disposition. Aucune anomalie n'a été documentée sur le fonctionnement des enrouleurs, et aucune n'a été décelée à l'examen.

Les ceintures de sécurité sont boulonnées à leurs sièges respectifs. À l'impact, l'attache du pied arrière gauche de la banquette derrière le siège du pilote s'est brisée et l'ancrage du pied arrière droit du siège derrière le siège du copilote a été arraché du plancher. Les occupants de ces sièges ont été projetés sur les dossiers des sièges pilote et copilote, et les dossiers de ces sièges se sont fracturés. Le siège arrière est resté ancré au plancher, mais les attaches des ceintures fixées au plancher ont cédé. Une analyseFootnote 15 faite antérieurement par le BST sur le même type d'attache de siège a conclu que les bris avaient été causés par des charges dépassant la limite de conception.

Analyse

Comme les indicateurs de niveau carburant des réservoirs d'aile étaient peu fiables, le pilote s'est servi d'un bâton de bois étalonné pour établir la quantité d'essence dans les réservoirs d'aile. Cette méthode, bien que reconnue, n'est pas toujours d'une grande précision. Si on bouge le bâton, l'essence peut humecter une plus grande partie du bâton et on peut obtenir une lecture supérieure à la réalité. Compte tenu de la longueur des réservoirs, une petite erreur de lecture peut correspondre à une différence de plusieurs gallons. Considérant que l'avion n'a effectué que 40 minutes de vol avant l'arrêt du moteur, on peut conclure que l'avion a décollé avec une quantité d'essence dans les ailes inférieure à celle estimée par le pilote.

Le moteur s'est arrêté parce qu'il n'était plus alimenté en carburant, alors qu'une partie de l'attention du pilote était dirigée vers la recherche de piste de caribous. Lorsqu'il a vu le voyant de basse pression carburant allumé, le pilote a d'abord pensé à un reflet du soleil et n'a pas changé de réservoir avant la perte de puissance. Compte tenu du fonctionnement aléatoire du capteur de basse pression carburant, il est également plausible que le voyant n'ait pas indiqué ponctuellement la baisse de pression carburant. Comme le moteur a continué à tourner, le fait de ne pas avoir changé le pas de l'hélice n'a pas eu de conséquence sur le redémarrage.

Il est probable que l'utilisation de la pompe d'amorçage, surtout par temps froid, aurait favorisé la reprise du moteur. Cependant, le vol à basse altitude a réduit le temps disponible pour exécuter la procédure d'urgence. Étant donné que le levier de la pompe manuelle était situé sur la console centrale, que le levier des volets était situé au plancher à droite du siège du pilote et que la pompe d'amorçage se trouvait sur le plancher à la gauche du pilote, il a été difficile pour le pilote d'activer simultanément ces dispositifs tout en gardant une main sur les commandes.

Les pieds des sièges de la deuxième rangée se sont rompus; les occupants de ces sièges ont été protégés par les dossiers des sièges avant. Comme le pilote et le passager avant ne portaient pas leur baudrier, le risque de blessures était plus grand. D'ailleurs, le passager avant a subi des blessures à la tête entraînant la perte d'un oeil.

Après la faillite d'AWT, Propair ne pouvait plus compter sur les services du titulaire du STC pour obtenir du support technique pour solutionner les difficultés d'indication du niveau carburant et de sélection des réservoirs d'aile par temps froid. Bien que la sélection de la position médiane du sélecteur permette d'annuler le risque de bloquer les câbles de commande par temps froid, le supplément au manuel de vol n'autorise pas cette sélection, et l'exploitant aurait dû signaler ce problème et chercher une solution de rechange. Cependant, la position médiane permettait à l'essence de passer d'un réservoir d'aile à l'autre. Normalement, les clapets auraient dû retenir l'essence dans le premier compartiment. Toutefois, la non-conformité du garde et l'angle de montage du clapet ne favorisaient pas l'efficacité du clapet. Il est possible que les pertes de puissance antérieures aient été causées par un manque d'alimentation en carburant à la suite d'un vol non coordonné qui aurait pu permettre à l'essence de se retrouver du côté extérieur d'un des réservoirs.

Les tests sur les composantes du système d'indication du niveau carburant ont établi que la seule indication exacte pour les réservoirs d'aile était celle de réservoir vide. Par contre, toute présence d'eau ou de glace sur une des deux jauges pouvait faussement conserver l'indication de niveau carburant aux environs de ¾.

Avec le sélecteur des réservoirs d'aile en position médiane, le moteur était simultanément alimenté par les deux réservoirs d'aile. Par conséquent, le niveau d'essence de chaque réservoir aurait dû baisser de façon égale. L'indication du niveau du réservoir gauche n'a pas bougé durant le vol et affichait un peu plus de la ½. Il est vraisemblable que la lecture du réservoir gauche ait été faussée par la présence de glace dans l'essence. L'erreur d'indication n'a pas permis au pilote d'effectuer le changement de réservoir avant d'avoir épuisé toute l'essence des réservoirs d'aile.

Aucun document n'a été fourni attestant que les jauges ou le triple indicateur de niveau carburant avaient fait l'objet d'un processus de certification. Lorsque la modification à la définition de type a été approuvée par la délivrance du STC, Transports Canada n'a pas relevé le fait que ces pièces, décrites aux plans, ne répondaient pas aux normes de navigabilité. Les anomalies suivantes n'ont pas été relevées non plus :

En conséquence, Transports Canada a délivré un STC qui présentait plusieurs lacunes.

L'enquête a donné lieu aux rapports de laboratoire suivants :

On peut obtenir ces rapports en s'adressant au Bureau de la sécurité des transports du Canada.

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Le moteur s'est arrêté à la suite d'une panne d'alimentation carburant; la quantité d'essence dans les ailes était inférieure à la quantité estimée par le pilote; les jauges d'essence donnaient une lecture erronée et le voyant de basse pression carburant pouvait s'allumer de façon aléatoire.
  2. L'arrêt du moteur s'est produit à basse altitude, ce qui a réduit le temps nécessaire pour exécuter la procédure d'urgence. Le pilote n'a pas pu atteindre le lac en vol plané et il a fait un atterrissage forcé sur un terrain qui ne convenait pas à l'atterrissage, ce qui a causé des dommages importants à l'appareil et des blessures aux occupants.

Faits établis quant aux risques

  1. Le système de sélection des réservoirs d'aile était sujet au gel par temps froid, et les pilotes avaient adopté comme pratique de placer le sélecteur des réservoirs d'aile en position médiane, ce qui est contraire aux instructions figurant dans le supplément au manuel de vol et affichées sur le tableau de bord.
  2. Lorsque la modification à la définition de type a été approuvée par la délivrance du certificat de type supplémentaire (STC), Transports Canada n'a pas relevé le fait que les jauges et le triple indicateur de niveau carburant ne répondaient pas aux normes de navigabilité; Transports Canada a délivré un STC qui présentait plusieurs lacunes.
  3. Les baudriers étaient rangés sous le revêtement intérieur des parois latérales de l'avion, ce qui les rendait inaccessibles; comme le pilote et le passager ne portaient pas leur baudrier au moment de l'accident, ils étaient moins bien protégés.

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .

Annexes

Annexe A - Schéma du système d'alimentation en
carburant

Ce document n'existe pas en français.

Annexe B - Dessin MF001-003

Ce document n'existe pas en français.