Collision avec le relief
Westland Helicopters Inc.
Bell 206 BIII JetRanger (hélicoptère) C-GRAH
2,5 mi au nord de Houston
(Colombie-Britannique)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
L'hélicoptère (Bell 206) transportait un pilote et quatre passagers. Il effectuait un vol d'affrètement entre Houston (Colombie-Britannique) et un chalet de ski situé sur le mont Morice, à 10 milles au sud de Houston. Il s'est écrasé à environ 2,5 milles au nord de son point de départ. L'hélicoptère a été détruit; le pilote et les quatre passagers ont subi des blessures mortelles.
Le Bureau a déterminé que le pilote, alors qu'il tentait de traverser en montée une couche de brouillard en suivant le relief comme référence visuelle, a fort probablement perdu les repères visuels nécessaires pour voler dans des conditions météorologiques de vol à vue (VMC). L'hélicoptère a heurté une crête, probablement alors que le pilote tentait de retrouver ses références visuelles avec le sol.
La décision du pilote de se servir du relief comme référence visuelle dans les conditions de visibilité qui prévalaient a contribué à l'accident.
1.0 Renseignements de base
1.1 Déroulement du vol
1.1.1 Progression du vol
Vers 12 h, heure normale du Pacifique1 (HNP)2, un hélicoptère Bell 206 BIII (C-GRAH) exploité par la Westland Helicopters Inc., a décollé de sa base de Houston, en Colombie-Britannique. L'appareil effectuait un vol d'affrètement à destination d'un chalet de ski sur le mont Morice, situé à environ 10 milles terrestres au sud3 de Houston. L'hélicoptère transportait le pilote, quatre passagers et environ 100 livres de bagages. Le vol avait pour objet de transporter quatre passagers et leur équipement en vue d'une excursion de ski de fond dans la région du mont Morice.
Afin de monter au-dessus de la couche de brouillard se trouvant dans la région de Houston, le pilote avait l'intention de se diriger au nord-est de Houston en suivant le relief du mont Harry Davis comme référence visuelle. Une fois au-dessus de la couche de brouillard, il avait l'intention de se rendre au mont Morice en suivant les crêtes de montagne (voir la figure 1).
- Les heures sont exprimées en HNP (temps universel coordonné [UTC] moins huit heures) sauf indication contraire.
- Voir l'annexe C pour la signification des sigles et abréviations.
- Les coordonnées géographiques sont indiquées par rapport au Nord vrai. La déclinaison est de 24 degrés Est.
L'hélicoptère a été vu quittant Houston à basse altitude en direction nord-est vers le relief du mont Harry Davis. Dans la région du mont Harry Davis, on a entendu l'hélicoptère voler en direction nord-est, puis vers l'ouest avant que le bruit ne s'arrête brusquement. Certains témoins ont déclaré avoir entendu le bruit étouffé d'un impact quelques secondes plus tard.
L'hélicoptère a heurté le relief par 54° 24′ de latitude Nord et 126° 40′ de longitude Ouest, vers 12 h 15 HNP, à une altitude de 2 369 pieds-mer (voir l'annexe A).
1.1.2 Renseignements opérationnels supplémentaires
Le vol devait normalement quitter à 8 h 30 ce matin-là et devait comprendre deux allers-retours de suite dans la région du mont Morice pour transporter les membres de deux familles. Les deux familles devaient passer la nuit au mont Morice et skier jusqu'à leurs véhicules, qui étaient garés au pied de la montagne.
Le matin de l'accident, le pilote avait été informé que les membres d'une même famille ne pouvaient quitter avant 16 h 30. De plus, il avait été informé que les membres de l'autre famille seraient aussi retardés et qu'ils ne pourraient se présenter pour le départ de 8 h 30. À cause de ce changement dans les plans, le vol de 8 h 30 a été retardé à 12 h, et il a été entendu qu'un deuxième départ aurait lieu à 16 h 30. Rien n'indique que les clients aient exercé des pressions sur le pilote pour qu'il effectue ce vol payant.
Le pilote avait déjà pris des arrangements avec des amis pour voler vers un lieu de pêche une fois son vol du matin terminé. Vers 10 h ce matin-là, lorsqu'il s'est rendu compte que son vol d'affrètement serait retardé, le pilote a invité ses amis à l'attendre à l'héliport, le temps de terminer son vol d'affrètement, qui selon lui devait prendre environ 40 minutes. Il avait l'intention d'effectuer quand même ce voyage de pêche non payant entre ses deux vols d'affrètement.
1.2 Victimes
Équipage | Passagers | Autres | Total | |
---|---|---|---|---|
Tués | 1 | 4 | - | 5 |
Blessés graves | - | - | - | - |
Blessés légers/indemnes | - | - | - | - |
Total | 1 | 4 | - | 5 |
1.3 Dommages à l'aéronef
L'hélicoptère a été détruit par l'impact.
1.4 Autres dommages
Aucun.
1.5 Renseignements sur le personnel
1.5.1 Généralités
Pilote
Âge - 39 ans
Licence - pilote professionnel
Date d'expiration du certificat de validation - 1er mai 1994
Nombre total d'heures de vol - 2 993
Nombre total d'heures de vol sur type en cause - 1 899
Nombre total d'heures de vol dans les 90 derniers jours - 58
Nombre total d'heures de vol sur type en cause dans les 90 derniers jours - 58
Nombre d'heures de service avant l'événement - 3
Nombre d'heures libres avant la prise de service - 16
1.5.2 Renseignements sur le pilote
Le pilote avait commencé sa carrière en septembre 1977 et avait obtenu une licence de pilote professionnel d'hélicoptère en avril 1978.
À l'automne de 1985, il avait pris un cours de pilotage sur avion à Moncton, au Nouveau- Brunswick. Sa formation comprenait 19,2 heures de formation sur les techniques de vol aux instruments. Cette formation ne comprenait aucune instruction en vol dans des conditions météorologiques de vol aux instruments (IMC) et ne constituait que la seule formation aux instruments connue que le pilote ait reçue.
Le pilote avait piloté divers types d'hélicoptère et avait de l'expérience dans le vol en montagne. La plus grande partie de son expérience de vol avait été acquise sur le Bell 206.
De nombreuses inscriptions relatives à la météo dans le carnet du pilote permettent d'affirmer que le pilote possédait une vaste expérience dans le pilotage des hélicoptères en vol à vue (VFR) et dans des conditions de visibilité réduite. On n'a par contre rien découvert qui indiquait que le pilote avait l'habitude de voler dans des visibilités inférieures à celles permises par la réglementation en vigueur.
Il s'était joint à Westland Helicopters Inc., le 30 mai 1993 comme gestionnaire de la base de Houston, en Colombie-Britannique, et il avait décollé régulièrement de cette base depuis qu'il s'était joint à l'entreprise.
Au moment de l'accident, le pilote était titulaire d'une licence de pilote professionnel d'hélicoptère en état de validité et il était titulaire d'un certificat médical de catégorie 1 sans restrictions. La licence du pilote n'était pas annotée pour le vol en IMC.
1.6 Renseignements sur l'aéronef
1.6.1 Généralités
Constructeur - Bell Helicopter Textron
Type - 206 BIII
Année de construction - 1981
Numéro de série - 3304
Certificat de navigabilité - valide
Nombre total d'heures de vol cellule - 6 068,1
Type de moteur (nombre) - Allison 250-C20B (1)
Type de rotor bipale, semi-rigide - (1)
Masse maximale autorisée au décollage - 3 200 lb
Type de carburant recommandé - Jet B
Type de carburant utilisé - Jet B
1.6.2 Certification de l'hélicoptère
L'hélicoptère était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées.
L'hélicoptère n'était pas équipé pour le vol aux instruments ni certifié pour le vol dans des conditions IMC.
1.6.3 Masse de l'hélicoptère au moment de l'impact
Selon le manuel de vol du Bell 206 BIII, le poids maximal admissible de l'hélicoptère pour le vol était de 3 200 livres.
Le pilote avait fait le plein de l'hélicoptère le matin du vol, mais il n'existe aucun document sur la quantité de carburant versée dans l'hélicoptère. L'examen du carnet de bord de l'hélicoptère a révélé que le pilote avait l'habitude de ne mettre que 500 livres de carburant avant de commencer une journée de vol.
L'hélicoptère était équipé d'un réservoir de carburant de grande autonomie, ce qui aurait porté la capacité maximale en carburant à 91 gallons américains. À raison de 6,78 livres par gallon, le poids maximal de carburant qui aurait pu se trouver à bord de l'hélicoptère était de 616,98 livres. La consommation de l'hélicoptère Bell 206 BIII est d'environ 23 gallons (156 livres) par heure. Si l'on compte 45 minutes pour le démarrage et le vol plus tôt ce matin-là pour vérifier le temps, et 15 minutes supplémentaires pour le vol qui s'est soldé par l'accident, l'hélicoptère aurait consommé environ 156 livres de carburant avant l'accident.
Compte tenu du poids des occupants et de leurs bagages, et si l'on suppose que le pilote avait rempli le réservoir de l'hélicoptère à ras bords plus tôt ce matin-là, l'hélicoptère se serait trouvé à sa masse totale maximale au moment de l'accident.
Compte tenu des habitudes de ravitaillement en carburant du pilote, toutefois, on a jugé qu'il était plus probable que le pilote aurait versé
500 livres de carburant dans le réservoir de l'hélicoptère avant d'entreprendre le vol. Dans ce cas, la masse de l'hélicoptère au moment de l'accident aurait été inférieure d'environ 150 livres à la masse totale maximale.
1.6.4 Performances du Bell 206 à la masse totale maximale
Le lieu de l'accident se trouve à une altitude de 2 369 pieds-mer. On a déterminé que la température à cette altitude au moment de l'accident était aux environs de zéro degré Celsius.
Selon les tableaux de performances de l'hélicoptériste, aux masses mentionnées précédemment et pour une température extérieure de zéro degré Celsius, l'hélicoptère était en mesure de monter hors de l'effet de sol jusqu'à une altitude d'environ 6 000 pieds-mer.
1.7 Renseignements météorologiques
1.7.1 Généralités
Il n'y avait aucune prévision ni observations météorologiques pour l'aviation fournies par le Service de l'environnement atmosphérique (SEA) pour Houston, en Colombie-Britannique. L'aérodrome le plus proche pour lequel une prévision et des observations météorologiques réelles pour l'aviation ont été fournies était Smithers, en Colombie-Britannique, situé à 31 milles terrestres au nord-ouest de Houston.
1.7.2 Conditions météorologiques connues
À 8 h 15 le matin de l'accident, le pilote a appelé la station d'information de vol (FSS) de Smithers pour s'informer des conditions météorologiques. Le spécialiste de la FSS de Smithers lui a dit que les conditions météo à cet endroit étaient les suivantes : plafond indéfini à 400 pieds et visibilité de 5/8 mille dans le brouillard. En outre, le spécialiste a informé le pilote qu'en raison du temps il n'y avait aucun mouvement d'appareils à l'arrivée ou au départ de Smithers et qu'il n'y avait aucun rapport sur l'épaisseur du brouillard.
Le pilote a indiqué au spécialiste de la FSS qu'il estimait que la visibilité à Houston était de 3/4 mille dans le brouillard.
Plus tard ce matin-là, à 9 h 15, le pilote a encore appelé la FSS de Smithers et signalé qu'il venait tout juste de terminer un vol pour vérifier les conditions météorologiques dans la région de Houston. Il a indiqué que la visibilité en surface à Houston était d'environ deux milles dans le brouillard et que le plafond était obscurci à environ 300 pieds.
Il a en outre affirmé que, pendant son vol, il avait été en mesure de monter au-dessus de la couche de brouillard en suivant le relief du mont Harry Davis et en se servant des arbres comme référence visuelle. Il a indiqué que, pendant la montée, il avait été en mesure de voir à une distance «d'environ quatre ou cinq cimes d'arbre» (ce qui voudrait dire qu'il pouvait voir quatre ou cinq cimes d'arbre devant lui pendant le vol) et qu'il était sorti du brouillard à une altitude de 3 800 pieds-mer. Il a déclaré que ces conditions étaient des conditions «VFR pour hélicoptère». Les conditions au-dessus du brouillard ont été décrites comme étant un ciel dégagé avec des nuages épars en altitude.
1.7.3 Prévisions après coup par le Service de l'environnement atmosphérique (SEA)
L'analyse météorologique préparée par le SEA après l'accident a permis d'établir que, le jour de l'accident, une zone de haute pression arctique de 1048 millibars centrée sur le sud-est du Yukon avait généré un léger courant à basse altitude en direction nord-est au-dessus du centre de la Colombie-Britannique. La masse d'air était stable et assez humide à basse altitude, mais sèche en altitude. Des images satellites prises une heure et demie après l'accident ont révélé que la vallée dans laquelle se trouvait Houston était recouverte de brouillard et de stratus. Cette couche de stratus produisait des plafonds locaux compris entre 300 et 800 pieds et s'étendait jusqu'à 3 500 pieds d'altitude. Le ciel était dégagé au-dessus de cette couche de stratus.
Le brouillard réduisait la visibilité à moins d'un demi-mille en certains endroits. La température dans la couche de stratus était proche du point de congélation, mais inférieure à ce dernier, et de la gelée blanche pouvait se produire dans les nuages.
La prévision mentionnait qu'il y avait un risque de pluie verglaçante pour Smithers jusqu'à 12 h et qu'une très fine pluie verglaçante avait été signalée pour la nuit à Smithers; toutefois, la prévision avait pris fin six heures avant l'accident et avait semblé très localisée. La température en surface et le point de rosée à Smithers au moment de l'accident étaient de zéro degré Celsius.
Les vents à basse altitude soufflaient généralement du nord-est à moins de 10 noeuds, et toute turbulence n'aurait été que légère.
1.7.4 Renseignements météorologiques additionnels
Environ une demi-heure après l'accident, un hélicoptère a quitté sa base de Houston pour se mettre à la recherche de l'appareil manquant. Le pilote de l'hélicoptère de recherche a indiqué qu'en raison de la visibilité réduite dans l'épais brouillard, il devait circuler en stationnaire au- dessus des arbres le long du versant du mont Harry Davis. Il a signalé que la visibilité était d'un quart de mille ou moins et que le brouillard avait une épaisseur d'environ 1 500 pieds. De plus, il a indiqué qu'il avait remarqué du givre sur la cellule alors qu'il se trouvait dans le brouillard, mais qu'il n'y avait pas de givre sur le pare-brise.
1.8 Communications
Il n'y a eu aucune communication du pilote avec les Services de la circulation aérienne (ATS); aucune n'était requise.
Avant le départ, le pilote avait laissé une radio portative à ses amis qui l'attendaient à son retour. La radio était réglé à 159,72 mégahertz (MHz), une fréquence couramment utilisée par l'industrie forestière locale. Le pilote avait effectué sans problème une vérification radio avec ses amis sur cette fréquence avant de décoller. Aucun autre message du pilote n'a été entendu sur cette fréquence.
1.9 Enregistreurs de bord
L'hélicoptère n'était pas équipé d'un enregistreur de données de vol (FDR) ni d'un enregistreur phonique (CVR). La réglemention en vigueur n'imposait pas l'emport d'enregistreurs de bord pour ce type d'aéronef.
1.10 Observations des témoins
Des amis du pilote ont observé l'hélicoptère décoller vers le nord-est, en direction du mont Harry Davis, jusqu'à ce qu'ils le perdent de vue dans le brouillard. L'altitude du point de départ était de 1 903 pieds-mer.
Un témoin, qui se trouvait à environ un demi-mille au nord-est du point de départ de l'hélicoptère, a entendu l'hélicotère le survoler en direction nord-est. Il avait écouté l'hélicoptère manoeuvrer pendant ce qui a semblé être une période de 30 secondes, lorsque le bruit s'est brusquement arrêté. Peu après, il a entendu un bruit d'impact étouffé.
Une autre personne qui se trouvait chez elle à environ deux milles au nord-est du point de départ de l'hélicoptère a entendu l'hélicoptère approcher du sud-ouest à basse altitude. Ce témoin se trouvait au niveau des 2 500 pieds du mont Harry Davis. Elle a entendu l'hélicoptère se diriger vers le nord-est en montée sur le mont Harry Davis, puis revenir directement vers sa maison par l'est. Elle a eu l'impression que l'hélicoptère descendait directement vers elle le long de la montagne. La proximité de l'hélicoptère et sa faible altitude l'ont quelque peu inquiétée jusqu'à ce qu'elle entende l'hélicoptère virer en direction ouest et à l'écart de sa maison. À ce moment, l'hélicoptère volait vers une petite vallée. Le témoin a affirmé que la visibilité dans cette direction, à partir du point où elle se trouvait, était inférieure à 300 pieds. Le témoin a entendu l'hélicoptère se diriger vers l'ouest jusqu'à ce que le bruit s'arrête brusquement. Environ trois secondes plus tard, le témoin a entendu un éclatement étouffé.
Un autre témoin qui se trouvait à un demi-mille à l'ouest du témoin précédent et à une altitude d'environ 2 400 pieds-mer a entendu l'hélicoptère se diriger vers l'ouest. Ce témoin a évalué que la visibilité au sol était de 150 pieds dans le brouillard.
Tous les témoins auriculaires ont indiqué qu'ils pouvaient entendre clairement l'hélicoptère même s'ils ne pouvaient pas le voir à cause du brouillard.
1.11 Recherche et sauvetage
1.11.1 Généralités
La radiobalise de détresse (ELT) a été détruite dans l'accident.
Vers 12 h 20, un témoin qui a crû entendre le bruit d'un hélicoptère qui s'écrase a communiqué ce renseignement aux personnes qui attendaient le retour du pilote au hangar. Les tentatives pour communiquer avec l'hélicoptère au moyen de la radio portative ont été infructueuses.
À 12 h 45, un hélicoptère de l'endroit est parti de Houston à la recherche de l'hélicoptère porté disparu. L'hélicoptère de recherche a suivi la route projetée du premier hélicoptère en remontant le mont Harry Davis et, une fois au-dessus d'un nuage à une altitude d'environ 4 000 pieds-mer, il s'est rendu au chalet de ski sur le mont Morice. Il n'y avait aucune trace de l'hélicoptère. La mauvaise visibilité causée par les nuages et le brouillard n'a pas permis de faire de recherches dans la région de Houston aux altitudes inférieures à 4 000 pieds-mer. Vers 14 h 5, l'hélicoptère de recherche est revenu au hangar pour attendre que la météo s'améliore.
À la suite de ce vol, l'équipage de l'hélicoptère de recherche a informé le détachement local de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et le centre de coordination de sauvetage (RCC) de Victoria, en Colombie-Britannique, de la disparition de l'hélicoptère. La GRC a alerté l'équipe de recherche au sol du Programme provincial des mesures d'urgences (PEP) de Houston. Le RCC de Victoria a dépêché deux appareils de recherche militaires à partir de Comox, en Colombie-Britannique. Diverses personnes, dont des membres du détachement local de la GRC, ont patrouillé des chemins forestiers à bord de véhicules moteurs, mais en vain.
Vers 15 h 15, après une amélioration des conditions météorologiques, l'hélicoptère de recherche de l'endroit a redécollé dans l'espoir de retrouver l'hélicoptère porté disparu. Il a localisé le lieu de l'accident vers 15 h 30.
1.12 Renseignements sur l'épave et sur l'impact
1.12.1 Généralités
L'hélicoptère a heurté le sol le long d'une ligne de crêtes présentant une pente ascendante de 6,5 degrés. On a déterminé que l'angle de la trajectoire de vol avant l'impact était de 12 degrés en piqué par rapport à l'horizon. L'appareil a laissé un sillon de 443 pieds de long sur 190 pieds de large; le sillon était orienté au cap de 181 degrés vrai.
Au moment de l'impact, l'hélicoptère accusait un mouvement de lacet de 17 degrés vers la gauche; il était incliné à 9 degrés sur la gauche et présentait un angle de piqué de 2 degrés. Selon la répartition des débris, on a estimé la vitesse de l'hélicoptère à 100 mi/h (estimation prudente) et on a établi son taux de descente à plus de 1 000 pieds par minute (pi/min).
Bien que tous les principaux composants de l'hélicoptère aient été récupérés, la neige épaisse a empêché de retrouver certaines des plus petites pièces de l'hélicoptère. Les pièces retrouvées ont été envoyées pour subir un examen plus poussé.
Les quatre ensembles de skis de fond et les bâtons, qui avaient été fixés au patin d'atterrissage de l'hélicoptère, ont été retrouvés sur les lieux de l'accident.
1.12.2 Tableau de bord et tableau annonciateur
Le tableau de bord et le tableau annonciateur ont été envoyés au Laboratoire technique du BST pour examen (LP 35/94). La face des cadrans des instruments et les mécanismes de commande internes ont été examinés, mais n'ont fourni que peu de renseignements utiles. Aucun des voyants récupérés du tableau annonciateur ne présentait de signes indiquant qu'ils étaient allumés au moment de l'impact.
1.12.3 Système de commande de vol
La plupart des parties des commandes de vol ont été retrouvées, sauf certains fragments de pièce moulée ou de tube dans le bloc de la commande de pas cyclique. Toutes les fractures ont été examinées et, malgré des signes évidents de dommages importants attribuables à l'impact, on n'a découvert aucun signe de dommages antérieurs à l'impact.
1.12.4 Groupe propulseur
Le turbomoteur (Allison 250-C20B, numéro de série CAE-833728) a été examiné par le personnel du BST à une installation de révision de moteurs certifiée par Transports Canada.
Des corps étrangers avaient endommagé les aubes du compresseur, du premier au troisième étage. Il y avait une usure importante du matériau abrasable (qui s'use par frottement) du carter du compresseur axial. Le rouet avait grugé le carter en aluminium. Des particules d'aluminium étaient fondues sur les aubes et les carters des turbines. La quatrième roue de turbine présentait des signes de frottement.
Les constatations énumérées ci-dessus révèlent que le moteur tournait et qu'il était en mesure de produire de la puissance au moment de l'impact.
1.12.5 Boîte de transmission
Le fonctionnement de la boîte de transmission avait été porté de 1 500 à 1 600 heures avec l'accord de Transports Canada; au moment de l'accident, la boîte totalisait 1 584 heures.
À l'examen, les arbres d'entrée et de sortie ont tourné normalement, et toutes les roues dentées et tous les roulements internes étaient en excellent état et ne montraient aucun signe d'usure ou de lubrification insuffisante. Les points de fixation de la boîte de transmission ne présentaient aucun signe de déséquilibre.
1.12.6 Boîtier d'engrenages du rotor de queue
À l'examen, les arbres d'entrée et de sortie du rotor de queue ont tourné librement. Les cannelures d'entrée et de sortie étaient intactes. Les roues dentées et les roulements présentaient quelques signes d'usure, mais cette usure a été jugée dans les limites d'un bon fonctionnement.
1.12.7 Servocommandes hydrauliques
Les trois servocommandes hydrauliques ont été examinées à une installation de révision certifiée par Transports Canada. Les deux servocommandes du pas cyclique ne présentaient rien de particulier; toutefois, 18 particules d'un matériau ferreux ont été trouvées dans la servocommande du pas collectif. Ces particules et la servocommande du pas collectif ont fait l'objet d'un examen plus poussé au Laboratoire technique du BST.
Ce composant avait été fabriqué en 1979, et au moment de l'accident, il totalisait 6 000 heures en service. On a conclu que les particules trouvées dans la servocommande étaient des résidus provenant probablement d'un processus de fabrication quelconque. Les résidus avaient probablement été entraînés à l'intérieur des conduites de la tige du piston, et ces résidus se sont dégagés plus tard pendant la durée de vie en service de la servocommande. On a examiné la possibilité que les particules avaient pu, d'une façon ou d'une autre, entraver le fonctionnement de la commande de pas collectif.
Le composant avait été installé sur l'hélicoptère accidenté en 1989, et il n'y avait aucune inscription dans les livrets techniques de l'appareil selon laquelle la commande de pas collectif aurait posé des problèmes.
L'examen a révélé qu'au moins trois particules étaient entrées en contact avec la valve du tiroir de vérin pendant la durée de vie en service du composant
(LP 80/94). Les tests et l'analyse ont permis de conclure que, compte tenu des caractéristiques physiques des particules trouvées et de la conception et de la fabrication de la servocommande et du système de commande de pas collectif, il est fort probable que toute entrave au bon fonctionnement de la valve du tiroir de vérin qui aurait pu survenir aurait pu être surmontée en agissant sur la commande de pas collectif avec une force que le pilote pouvait très bien exercer.
1.13 Renseignements médicaux
Rien n'indique qu'une incapacité ou des facteurs physiologiques aient pu perturber les capacités du pilote.
1.14 Incendie
Il n'y a pas eu d'incendie après l'écrasement.
1.15 Questions relatives à la survie des occupants
On a déterminé que tous les occupants portaient leur ceinture de sécurité avant l'impact. Les ceintures se sont toutes rompues au niveau de leurs points de fixation.
On a jugé que l'accident n'offrait aucune chance de survie, en raison de l'importance des forces de décélération.
1.16 Autres facteurs opérationnels
1.16.1 Règles de vol à vue
Le vol devait se dérouler dans un espace aérien non contrôlé et conformément aux minima météorologiques de vol à vue (VFR). Ces minima sont détaillés dans l'Ordonnance sur la navigation aérienne (ONA), série V, no 3.
Cette ONA précise que, dans un espace aérien non contrôlé, un hélicoptère peut être piloté à moins de 700 pieds verticalement au-dessus du sol ou de l'eau pourvu que la visibilité en vol ne soit pas inférieure à ½ mille. En outre, l'ONA précise que lorsque l'hélicoptère est piloté par visibilité réduite, il doit l'être à une vitesse suffisamment réduite pour permettre au pilote commandant de bord de voir à temps les autres aéronefs ou les obstacles afin d'éviter une collision.
Selon les dossiers de conformité à la réglementation de Transports Canada, aucune mesure réglementaire n'a été prise par la région du Pacifique de Transports Canada contre des pilotes qui auraient enfreints cette ONA dans les 10 dernières années.
La réglementation ne permet les vols par faible visibilité que dans des circonstances précises, notamment les vols nécessaires pour sauver des vies humaines, comme le vol de l'hélicoptère de recherche mentionné précédemment.
1.16.2 Procédure de percée des nuages par suivi du relief
L'enquête a révélé que la technique utilisée par le pilote de l'hélicoptère accidenté pour monter au-dessus d'un nuage ou d'une couche de brouillard à basse altitude est très connue dans les milieux commerciaux de l'hélicoptère au Canada.
La procédure exige essentiellement que le pilote maintienne le contact visuel avec le relief pendant qu'il vole à vitesse réduite. Cette vitesse, selon le relief ou les conditions météorologiques, doit être aussi lente que le pas de marche. La manoeuvre exige souvent que l'hélicoptère soit piloté dans son domaine critique hauteur-vitesse jusqu'à ce qu'il se trouve au- dessus du nuage ou de la couche de brouillard.
Pendant l'exécution de cette procédure, il est essentiel que le pilote ne perde pas le contact visuel avec le sol et que la manoeuvre ne dépasse pas les limites d'exploitation de l'hélicoptère.
On sait que le pilote de l'hélicotère accidenté avait utilisé cette technique la veille de l'accident, qu'il s'en était servi le matin pour vérifier les conditions météorologiques et qu'il avait l'intention de s'en servir plus tard cette journée-là pour un vol non payant prévu après le vol fatidique. La compagnie a déclaré ne pas être au courant que le pilote de l'appareil accidenté utilisait cette procédure et que la compagnie déconseillait sérieusement à ces pilotes de «braver le mauvais temps». Lorsqu'on les a questionnés à ce sujet, divers pilotes d'hélicoptère expérimentés ont déclaré qu'ils connaissaient la procédure de percée des nuages utilisée par le pilote de l'hélicotère accidenté. Toutefois, il n'a pas été possible de déterminer la fréquence à laquelle cette procédure était utilisée par le pilote de l'hélicoptère accidenté et par l'ensemble des pilotes d'hélicoptère.
1.16.3 Vitesse de translation
La technique mentionnée ci-dessus comme procédure de percée des nuages ou d'une couche de brouillard exige souvent que l'hélicoptère soit piloté à des vitesses inférieures à la vitesse de translation (environ 10 à 15 noeuds).
Lorsque l'hélicoptère vole à une vitesse inférieure à cette dernière, en stationnaire par exemple, l'hélicoptère exige beaucoup plus de puissance que s'il se trouvait en vol de croisière. En stationnaire, une bonne partie de l'énergie du rotor est utilisée pour monter dans une colonne d'air que le rotor déplace déjà vers le bas. En vol vers l'avant, l'air se trouvant devant le rotor n'a pas été amené à se déplacer au préalable, et il s'ensuit que le rotor agit sur de l'air plus stable, son énergie est utilisée plus efficacement, et il produit plus de portance.
1.16.4 Voile blanc
La Publication d'information aéronautique.(A.I.P.) de Transports Canada décrit le voile blanc comme étant un phénomène atmosphérique optique dans lequel un observateur semble être enveloppé dans une lueur blanche uniforme. Il n'est possible de discerner ni les ombres, ni les nuages, ni l'horizon; on perd tout sens de la perspective et de l'orientation; seuls les objets très sombres et proches peuvent être aperçus. Le voile blanc se produit au-dessus d'une étendue enneigée unie et sous un ciel uniformément couvert. Le brouillard, les chutes de neige et la poudrerie peuvent aussi accentuer ou causer le voile blanc. L'A.I.P. recommande aux pilotes d'éviter ces conditions, à moins qu'ils disposent des instruments de bord appropriés et qu'ils aient suffisamment d'expérience.
Un certain nombre de personnes ayant participé aux recherches, observé le départ de l'hélicoptère, ou entendu l'hélicoptère en vol ont été interrogées. Toutes ont affirmé que la visibilité était réduite à quelques centaines de pieds dans le brouillard. Les personnes ayant participé aux recherches au sol ont indiqué que les routes secondaires de la région étaient recouvertes de neige et offraient peu de contrastes avec le relief environnant, et que les arbres dans la région du mont Harry Davis étaient recouverts de neige et de givre. Certaines des personnes interrogées ont décrit les conditions comme étant propices au voile blanc.
1.16.5 Désorientation spatiale
La désorientation spatiale est l'incapacité pour un pilote de percevoir correctement la position, le mouvement ou l'assiette de son appareil ou de lui-même par rapport à un point dans l'espace, habituellement la surface de la terre.
Conserver son orientation grâce à de bonnes références visuelles présente normalement peu de difficultés pour le pilote. Par contre, lorsqu'il perd tout repère visuel extérieur, le pilote doit s'en remettre aux instruments de bord pour obtenir de l'information fiable et pertinente qui lui permettra de conserver son orientation et la maîtrise de son appareil.
Dans une telle situation, le pilote doit être en mesure de faire abstraction de perceptions sensorielles contradictoires en ce qui a trait à la référence à l'horizon et à la gravité. Bien qu'il n'existe aucune méthode à toute épreuve, le fait de pouvoir faire abstraction de ces données sensorielles erronées est directement lié à la formation, au temps et à l'expérience. Les pilotes qui ne possèdent pas d'expérience du vol aux instruments ou les pilotes ayant peu volé aux instruments sont particulièrement vulnérables à la désorientation spatiale lorsqu'ils se trouvent confrontés par inadvertance à une perte de référence visuelle extérieure relative à l'assiette.
1.16.6 Évaluation des risques
Lorsqu'un pilote réussit à exécuter dans son travail une activité qui comporte des risques, son attitude ou sa perception face aux risques changent souvent. À mesure qu'il s'habitue à exécuter des tâches dangereuses et qu'il y réussit, il en vient à croire que rien ne lui arrivera. Sa perception de ce qui constitue un risque peut diminuer, et il peut même commencer à croire que ces activités ne sont pas dangereuses.
Le sentiment de sécurité et de confiance que génère cette attitude encourage la personne à répéter une activité risquée. Plus souvent elle exécutera la tâche sans conséquences fâcheuses, plus justifié lui semblera son sentiment de sécurité. Conforté dans ce sentiment d'invulnérabilité, cette personne réduit encore plus sa marge de sécurité et prend de plus grands risques.
Et si le pilote observe que d'autres exécutent la même manoeuvre, il devient d'autant plus convaincu qu'il a raison d'agir ici; c'est ainsi qu'une manoeuvre devient la norme. Malheureusement, à mesure que la perception du risque diminue, les risques d'accident, eux, augmentent.
2.0 Analyse
2.1 Introduction
Les données factuelles rassemblées au cours de l'enquête ont permis d'établir avec certitude certains événements.
L'hélicoptère a entrepris le vol dans des conditions météorologiques de vol à vue à la limite de l'acceptable. Le pilote a tenté de traverser la couche de brouillard en suivant le relief comme référence visuelle durant la montée.
À mesure que l'hélicoptère montait en suivant le relief au nord-est de son point de départ, il s'enfonçait dans une zone dont la visibilité était réduite à quelques centaines de pieds dans un brouillard épais. Selon les observations des témoins auriculaires, l'hélicoptère n'a pas réussi à monter au-dessus de la couche de brouillard. L'hélicoptère se trouvait dans la région du mont Harry Davis lorsque des témoins ont entendu le bruit de la collision avec le relief. À un moment donné avant l'accident, l'hélicoptère s'est mis en descente. La descente, notamment si elle était accompagnée d'une diminution du pas collectif, aurait modifié le bruit que fait habituellement l'hélicoptère pendant le vol vers l'avant. Ceci correspond à la description faite par certains témoins auriculaires voulant que l'hélicoptère ne faisait pas de bruit avant l'écrasement.
À l'impact, l'hélicoptère faisait cap vers le sud, essentiellement à l'opposé du mont Harry Davis et de retour vers sa base de Houston.
Deux situations pourraient expliquer l'accident : une défectuosité technique de l'hélicoptère ou la perte par inadvertance de toute référence visuelle avec le sol par le pilote.
Dans l'analyse, nous examinerons ces deux possibilités ainsi que la gestion des risques en fonction des circonstances de l'accident.
2.2 Défectuosité technique
L'examen de l'épave n'a révélé aucune défaillance du moteur, des commandes ou des instruments, avant l'impact. L'examen des livrets techniques de l'hélicoptère a permis de constater que l'hélicoptère était entretenu conformément à la réglementation en vigueur et qu'il n'y avait aucune inscription selon laquelle les commandes posaient des problèmes.
On a examiné l'hypothèse que les particules trouvées dans la servocommande du pas collectif auraient entravé le bon fonctionnement de la soupape du tiroir de vérin au cours du vol en question et que cette situation serait une des causes de l'accident. Bien que trois des particules aient de toute évidence entravé le bon fonctionnement de la soupape du tiroir à vérin à un moment donné, il a été impossible de déterminer exactement quand, au cours des 6 000 heures de vie en service du composant, cette situation serait survenue. Cependant, les tests et l'examen indiquent que si cela était survenu au cours du vol qui s'est soldé par l'accident, le pilote aurait très bien pu exercer la force nécessaire pour surmonter ce qui entravait le bon fonctionnement de la soupape du tiroir à vérin, et sectionner les particules.
Bien qu'une défectuosité de l'avion, notamment un blocage de la soupape du tiroir de vérin de la servocommande du pas collectif, n'a pu être complètement écartée comme étant la cause principale de l'accident, on a jugé qu'une telle situation était très peu probable. On considère qu'il est plus probable que le pilote a perdu ses références visuelles avec le sol pendant qu'il évoluait à proximité du mont Harry Davis.
2.3 Perte de repères visuels
Alors qu'il volait dans les conditions opérationnelles et environnementales qui prévalaient à ce moment-là, le pilote de l'hélicoptère courait de grands risques de perdre tout repère visuel avec le sol.
Compte tenu de la haute vitesse et du profil de vol à l'impact, il est raisonnable de conclure que le pilote n'a probablement pas vu le sol avant la collision.
Plusieurs facteurs peuvent avoir contribué à la perte des références visuelles extérieures.
Par exemple, le pilote avait l'intention de monter le long du versant du mont Harry Davis alors que son appareil se trouvait à la masse maximale totale, ou proche de celle-ci. L'hélicoptère pouvait voler en stationnaire, mais la marge de puissance additionnelle nécessaire à la poursuite de la montée au-dessus du relief était limitée. Par conséquent, le pilote aurait pu vouloir maintenir une vitesse à peine au-dessus de la vitesse de translation, ce qui aurait été trop rapide pour les conditions de visibilité.
L'hélicoptère aurait pu se retrouver dans une zone où le relief aurait été uniformément recouvert de neige et de givre. Combinées à une mauvaise visibilité, ces conditions auraient pu se traduire par un voile blanc.
Les conditions à l'intérieur de l'hélicoptère auraient aussi pu se réunir pour réduire encore plus la visibilité. Compte tenu de la température et du point de rosée existants, et du fait que les occupants chaudement habillés auraient probablement augmenté le niveau d'humidité relative dans la cabine, il est possible que l'humidité se soit condensée à l'intérieur sur le pare- brise de l'hélicoptère. Cette situation aurait gêné la vue du pilote et l'aurait empêché de bien voir les repères extérieurs.
Comme nous en avons discuté plus haut, étant donné que des particules métalliques ont été trouvées dans la servocommande du pas collectif, un problème avec la commande de pas collectif est une hypothèse très peu plausible qui ne peut être écartée de façon concluante. Un problème technique de cet ordre aurait demandé au pilote de concentrer son attention à l'intérieur du poste de pilotage à un moment critique du vol, ce qui lui aurait fait perdre ses références visuellles avec le sol.
Toutes les situations susmentionnées auraient pu faire perdre au pilote ses références visuelles ou y contribuer.
Il n'a pas été possible de déterminer pourquoi le pilote avait probablement perdu ses repères visuels. Quelle que soit la raison, toutefois, le pilote se serait trouvé dans une des situations les plus dangereuses qui puissent se produire aux commandes d'un hélicoptère, c'est- à-dire la transition immédiate du vol à vue au vol aux instruments. Cette transition se serait produite pendant une phase critique du vol, soit près du sol, à régime élevé et dans un relief montagneux.
2.4 Désorientation spatiale
Deux choses ne jouaient pas en faveur du pilote. Le pilote n'avait pas beaucoup d'expérience du vol aux instruments et ses compétences dans ce domaine n'étaient pas à jour; de plus, l'hélicoptère qu'il pilotait n'avait que peu d'instruments de bord pour le vol aux instruments. Il est connu qu'un pilote qui se retrouve soudainement dans des conditions IMC risque de subir les effets de la désorientation spatiale.
La vitesse élevée et les assiettes inhabituelles en tangage et en lacet donnent à penser que le pilote était désorienté.
2.5 Gestion des risques
Il n'a pas été possible de déterminer pourquoi le pilote avait décollé dans des conditions météorologiques à la limite de l'acceptable et dans des visibilités qu'il avait décrites plus tôt comme se limitant à quatre ou cinq cimes d'arbre.
Rien n'indique que les clients aient exercé des pressions sur le pilote pour qu'il effectue ce vol payant. Il avait l'intention de reprendre la procédure de percée des nuages immédiatement après le vol en question pour un voyage de pêche avec ses amis.
Plus tôt cette journée-là, le pilote avait réussi un vol dans des conditions météorologiques à la limite de l'acceptable. Il avait effectué un vol semblable la veille et, selon les inscriptions de son carnet de bord, il avait déjà volé dans ces conditions à quelques reprises. En outre, au cours de sa carrière de pilote dans les montagnes de la Colombie-Britannique, il avait sans aucun doute observé d'autres pilotes qui faisaient la même chose. Il est possible, compte tenu du fait qu'il réussissait à exécuter la procédure de percée des nuages et du fait qu'il savait que d'autres pilotes se servaient de la même technique, que sa perception des dangers inhérents à cette procédure se soit estompée. Son commentaire au spécialiste de la FSS plus tôt cette journée-là indiquant que la météo était «VFR pour hélicoptère» permet de penser qu'il avait cette perception.
3.0 Faits établis
- Le pilote possédait la licence, la formation et les qualifications nécessaires au vol VFR et en vertu de la réglementation en vigueur.
- Le pilote avait une vaste expérience du vol en montagne et du vol par mauvais temps.
- Le pilote ne possédait ni la formation, ni l'expérience, ni les qualifications pour voler dans des conditions IMC.
- L'hélicoptère était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées.
- L'hélicoptère n'était pas équipé pour le vol aux instruments, ni certifié pour voler dans des conditions IMC.
- Des particules métalliques provenant du processus de fabrication du composant ont été trouvées dans la servocommande du pas collectif. Rien n'indique que ces particules aient contribué à l'accident.
- Trois des particules présentaient des signes qui montraient qu'elles avaient entravé le bon fonctionnement de la soupape du tiroir de vérin à un moment donné au cours de la durée de vie du composant.
- Rien n'indique qu'il y ait eu une défaillance de la cellule, que ce soit avant ou pendant le vol.
- Le pilote avait l'intention de monter au-dessus de la couche de brouillard en se servant du relief comme référence visuelle.
- La visibilité le long la trajectoire de vol de l'hélicoptère était réduite à un quart de mille ou moins dans le brouillard.
- Alors qu'il se trouvait dans la région du mont Harry Davis, le pilote volait dans des visibilités inférieures aux normes VFR en vigueur.
- Avant l'impact, le pilote avait probablement perdu ses repères visuels extérieurs, et l'hélicoptère se trouvait sans doute en conditions IMC.
- En deux autres occasions connues, le pilote avait réussi à exécuter la technique qui consiste à se servir du relief comme référence visuelle pour monter au-dessus d'une couche de brouillard.
- Cette technique est très connue dans le milieu des hélicoptères; toutefois, il n'a pas été possible de déterminer sa fréquence d'utilisation.
3.1 Causes
Alors qu'il tentait de traverser une couche de brouillard en se servant du relief comme référence visuelle pour monter, le pilote a fort probablement perdu les repères visuels nécessaires au vol dans des conditions météorologiques de vol à vue (VMC). L'hélicoptère a heurté une crête montagneuse, probablement alors que le pilote tentait de retrouver ses repères visuels au sol.
La décision du pilote de se servir du relief comme référence visuelle dans les conditions de visibilité qui prévalaient a contribué à l'accident.
4.0 Mesures de sécurité
4.1 Mesures prises
4.1.1 Contamination des servocommandes hydrauliques
Le 15 décembre 1994, Transports Canada a avisé la Federal Aviation Administration (FAA) que des métaux contaminaient la servocommande du pas collectif de l'hélicoptère. Transports Canada a suggéré à la FAA de s'assurer que le fabricant de servocommandes exerce un bon contrôle de la qualité.
4.1.2 Recommandations provisoires émises par le BST
Les renseignements que cette enquête a révélés et les fréquents éléments de preuve découverts dans le cadre d'autres enquêtes révèlent qu'il arrive souvent que les exploitants et les pilotes d'hélicoptère évaluent mal les risques inhérents aux vols VFR par mauvais temps, surtout en région montagneuse, c'est pourquoi le Bureau a transmis trois recommandations provisoires au ministre des Transports en août 1994.
4.1.2.1Vol dans des conditions météorologiques défavorables - Sensibilisation aux risques
L'étude de sécurité du BST portant sur le vol VFR dans des conditions météorologiques défavorables a révélé que les accidents mettant en cause des aéronefs en vol VFR se retrouvant dans des conditions IMC ne comptaient que pour 6 % du nombre total d'accidents d'aviation au Canada. Malgré tout, ces accidents comptaient pour 23 % des accidents mortels et avaient coûté la vie à 418 personnes entre 1976 et 1985. La moitié de ces accidents s'étaient produits en terrain montagneux ou vallonné, et environ 10 % de ceux-ci mettaient en cause des hélicoptères, et avaient été mortels dans le tiers des cas. Depuis la publication de l'étude de sécurité et des recommandations connexes, en décembre 1990, 10 accidents d'hélicoptères commerciaux se sont produits au Canada au cours de vols VFR par mauvais temps, causant la mort de six personnes. Le Bureau estime que certains pilotes d'hélicoptère qualifiés pour le vol VFR, surtout ceux qui volent en région montagneuse, ont pris l'habitude d'entrer volontairement dans des zones où la visibilité est extrêmement réduite localement pour atteindre des endroits où la météo est plus favorable.
Il se produit encore des accidents par mauvais temps mettant en cause des hélicoptères commerciaux, bien que Transports Canada insiste souvent, dans ses bulletins de sécurité et dans ses exposés, sur l'importance de respecter les limites VFR établies. Le Bureau croit qu'une formation et une sensibilisation convenables sont importantes pour prévenir les accidents qui se produisent par mauvais temps. Puisque à sa connaissance, aucune mesure importante n'avait encore été prise dans ce domaine par Transports Canada ou le milieu des hélicoptères à la suite des recommandations faites dans l'étude de sécurité de 1990, le Bureau a recommandé que :
le ministère des Transports, de concert avec le milieu aéronautique, lance une campagne de sécurité spéciale visant à informer le milieu des hélicoptères des risques intrinsèques liés aux procédures d'entrée dans les nuages ou dans le brouillard pendant des vols VFR, notamment en montagne.
(A94-18, publiée en août 1994)
Dans sa réponse à la recommandation A94-18, Transports Canada a déclaré qu'un article de fond serait publié dans le bulletin Vortex . ce sujet. Ce bulletin est distribué à tous les pilotes d'hélicoptère au Canada. En outre, les conseillers régionaux en sécurité aéronautique (RASO) à travers le pays recevront des dossiers de promotion spéciaux qu'ils pourront remettre aux personnes du milieu des hélicoptères pendant leurs visites régionales.
4.1.2.2 Respect de la réglementation et autoréglementation du milieu
L'ONA V, numéro 3, article 6, interdit le vol en VFR dans les nuages. D'après le Bureau, la généralisation de la pratique dangereuse qui consiste à traverser les nuages révèle sans doute un manque de respect en ce qui concerne la nécessité de se conformer à la réglementation. Les exploitants et les pilotes estiment peut-être qu'ils risquent très peu de se faire prendre en train d'enfreindre l'ONA. Dans le cadre d'un sondage auprès des pilotes professionnels effectué par le BST en 1991, 38 % des répondants ont déclaré que les inspections des installations des compagnies effectuées par Transports Canada n'étaient pas assez fréquentes pour assurer le respect de la réglementation. Le Bureau croit savoir que Transports Canada n'a consigné aucune infraction de l'article 6 de l'ONA V, numéro 3, dans les régions montagneuses de l'Ouest canadien dans les 10 dernières années.
Le Bureau sait très bien que les conditions météorologiques en de nombreux endroits empêchent certains pilotes qui volent uniquement en VFR de poursuivre leurs activités pendant certaines périodes de l'année. Cependant, si ces pilotes ne respectent pas les limites énoncées dans l'ONA, ils renoncent à la protection que leur offre le filet de sécurité établi par la réglementation et mettent en danger leur propre vie et celles de leurs passagers. En outre, le Bureau estime que, dans le milieu des hélicoptères en général, la pratique qui consiste à «braver le mauvais temps» est acceptée tacitement et est considérée comme faisant partie intégrante des opérations. En ce domaine, il ne semble pas y avoir d'autoréglementation dans le milieu puisque les collègues ne se condamnent pas entre eux.
Le Bureau est d'avis que ni l'organisme de réglementation, ni le milieu des hélicoptères commerciaux ne veillent efficacement à faire respecter les limites météorologiques établies. C'est pourquoi, le Bureau a recommandé que :
le ministère des Transports insiste davantage sur le véritable respect des limitations météorologiques VFR applicables aux hélicoptères commerciaux.
Recommandation A94-19 du BST
et que :
le ministère des Transports, de concert avec le milieu concerné, explore diverses avenues permettant de contrer cette habitude voulant que le fait de «braver le mauvais temps» est une procédure acceptable pendant les vols VFR d'hélicoptères commerciaux.
Recommandation A94-20 du BST
Dans sa réponse à la recommandation A94-19, Transports Canada a indiqué que les bureaux des transporteurs régionaux devront mettre davantage l'accent sur les vols d'hélicoptères commerciaux par mauvais temps et qu'une CITA (circulaire et information aux transporteurs aériens) sera émise pour souligner les dangers qui guettent les pilotes qui pénètrent volontairement dans des zones où la visibilité est réduite localement. Quant à la recommandation A94-20, Transports Canada a indiqué qu'une lettre sera envoyée aux associations d'hélicoptère importantes pour leur rappeler que «braver le mauvais temps» n'est pas une pratique acceptable.
Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisée le par le Bureau, qui est composé du Président John W. Stants, et des membres Zita Brunet et Hugh MacNeil.
Annexes
Annexe A - Trajectoire de vol estimée
Annexe B - Liste des rapports de laboratoire pertinents
L'enquête a donné lieu aux rapports de laboratoire suivants :
- LP 28/94 - Crash Analysis.(Analyse de l'écrasement);
- LP 35/94 - Instrument/Light Bulb Analysis.(Analyse des instruments et des ampoules);
- LP 80/94 - Hydraulic System Contaminant.(Contamination du circuit hydraulique);
- LP 85/95 - Control Components Examination.(Examen des composants de commande).
On peut obtenir ces rapports en s'adressant au Bureau de la sécurité des transports du Canada.
Annexe C - Sigles et abréviations
- AIP
- Publication d'information aéronautique
- ATS
- Services de la circulation aérienne
- BST
- Bureau de la sécurité des transports
- CVR
- enregistreur phonique
- ELT
- radiobalise de détresse
- FDR
- enregistreur de données de vol
- FSS
- station d'information de vol
- GRC
- Gendarmerie royale du Canada
- h
- heure(s)
- HNP
- heure normale du Pacifique
- IFR
- règles de vol aux instruments
- IMC
- conditions météorologiques de vol aux instruments
- MHz
- mégahertz
- mi
- mille(s)
- ONA
- Ordonnance sur la navigation aérienne
- PEP
- Programme provincial des mesures d'urgence
- pi/min
- pied(s) par minute
- RCC
- centre de coordination de sauvetage
- SEA
- Service de l'environnement atmosphérique
- UTC
- temps universel coordonné
- VFR
- règles de vol à vue
- VMC
- conditions météorologiques de vol à vue
- ′
- minute(s)
- °
- degré(s)