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Rapport d'enquête aéronautique A99W0061

Incendie en vol
Aerospatiale AS 355 F1 Twinstar (hélicoptère) C-GTUI
10 nm à l'est de Fairview (Alberta)
Le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

L'hélicoptère Aerospatiale AS 355 F1 Twinstar, à bord duquel se trouvaient le pilote et un passager, venait de terminer une mission de surveillance de gazoducs et retournait à Fairview (Alberta). Pendant la croisière en descente lente vers Fairview, à quelque 800 pieds au-dessus du sol, le voyant rouge de température batterie s'est allumé sur le tableau annonciateur des alarmes et des avertissements. Le pilote a observé que les indications du voltmètre et de l'ampèremètre étaient normales et il a coupé la batterie. Environ trois minutes plus tard, à quelque 500 pieds au-dessus du sol, alors que le pilote songeait à faire un atterrissage de précaution, l'hélicoptère a subi une panne complète d'alimentation électrique, et la cabine s'est remplie de fumée et d'émanations. Le pilote et le passager ont ouvert les fenêtres latérales pour aérer la cabine, et le pilote a immédiatement effectué un atterrissage d'urgence dans un champ qui se prêtait à la manoeuvre. Une fois au sol, le pilote a coupé les moteurs, et les deux occupants sont sortis de l'appareil sans autre incident. Personne n'a été blessé. Des flammes ont été aperçues à proximité du compartiment à bagages de droite. L'hélicoptère a ensuite été détruit par un violent incendie au sol.

Renseignements de base

Renseignements sur l'organisme et sur la gestion

L'hélicoptère appartenait à une entreprise de transport de gaz naturel de l'Alberta qui possédait trois autres hélicoptères biturbines Aerospatiale AS 355 Twinstar. L'entreprise utilisait ces hélicoptères comme des aéronefs privés. En juillet 1998, l'entreprise avait fusionné avec une autre importante entreprise de transport de gaz naturel par gazoduc. La division des hélicoptères de l'entreprise avec qui il y avait eu fusion exploitait plusieurs hélicoptères Bell 206 Jet Ranger en vertu d'un certificat d'exploitation aérienne. En novembre 1998, un responsable des services assurés par les hélicoptères avait été nommé pour superviser l'exploitation des hélicoptères de l'entreprise absorbée. Il avait alors immédiatement engagé sous contrat un consultant en aéronautique qu'il avait chargé d'effectuer un examen de sécurité indépendant de la division des hélicoptères d'Edmonton (Alberta). Le compte rendu de cet examen fait l'éloge de la division des hélicoptères à plusieurs égards; il mentionne entre autres que les membres du personnel de maintenance et des opérations aériennes sont hautement qualifiés, que l'entreprise a d'excellentes normes de maintenance et que la régulation des vols est très fiable. Le compte rendu mentionne également de nombreuses lacunes en matière de sécurité, y compris des lacunes au niveau des communications liées à la maintenance, l'incorporation de modifications non approuvées sur les hélicoptères, et le fait que certains manuels de la compagnie sont périmés. Le responsable des services assurés par les hélicoptères a traité quelques questions-clés liées à la sécurité et à la réglementation dans une consigne opérationnelle qu'il a envoyée le 25 janvier 1999 aux membres du service de maintenance et aux personnel des opérations aériennes. Les mesures à prendre touchant plusieurs autres questions liées à la sécurité ont été repoussées jusqu'à ce que la restructuration organisationnelle inhérente à la fusion soit terminée. Le 23 avril 1999, les employés de la division des hélicoptères d'Edmonton ont été conviés à une réunion pour y discuter de l'impact de l'examen de sécurité et de divers autres points liés à la fusion. Plusieurs des 14 employés de la division des hélicoptères d'Edmonton se sont montrés critiques envers les conclusions de l'examen de sécurité, et il semble que la réunion ait été chargée d'émotion.

Renseignements sur la réglementation

En vertu de l'article 604.02 du Règlement de l'aviation canadien (RAC), un exploitant qui transporte des passagers à bord d'un avion pressurisé à turbomoteur ou d'un gros avion est tenu de respecter les conditions et les spécifications énoncées dans un certificat d'exploitation privée délivré en vertu de l'article 604.05 du RAC ou dans un certificat d'exploitation aérienne délivré en vertu de la partie VII du RAC. Le certificat d'exploitation stipule, entre autres, que l'exploitant doit entretenir l'avion conformément à un système de contrôle de la maintenance approuvé. Les exploitants qui transportent des passagers à l'aide d'un hélicoptère ne sont pas tenus d'exploiter l'appareil en vertu d'un certificat d'exploitation, pas plus qu'ils ne sont obligés de l'entretenir conformément à un système de contrôle de la maintenance approuvé. Il n'existe aucune disposition dans le RAC permettant à un exploitant de demander volontairement un certificat d'exploitation ou d'en obtenir un.

La division des hélicoptères d'Edmonton ne possédait pas de certificat d'exploitation, et le service de maintenance n'était pas un organisme de maintenance agréé (OMA).

Renseignements sur le personnel

Le pilote possédait la licence et les qualifications nécessaires au vol et en vertu de la réglementation en vigueur. Il totalisait 15 000 heures de vol, dont 8 500 heures sur des appareils à voilure tournante et 3 500 heures sur des hélicoptères AS 355 Twinstar. Le pilote s'est posé sans perte de puissance moteur et sans perte d'efficacité des gouvernes. Il estime qu'il s'est posé environ six minutes après l'allumage du voyant de température batterie. Après l'atterrissage, le pilote et le passager se sont éloignés rapidement de l'hélicoptère et n'ont pas essayé de combattre l'incendie, car les flammes étaient beaucoup trop intenses. Il était déjà arrivé au pilote que le voyant de température batterie s'allume en vol, et il avait pu se poser sans incident. Le manuel de vol de l'appareil (Aircraft Flight Manual) précise que le pilote est censé couper l'interrupteur principal de la batterie et atterrir le plus vite possible si le voyant d'alarme de température batterie s'allume. D'après le manuel de vol, l'expression « atterrir le plus vite possible » signifie « atterrir à l'endroit le plus proche permettant de se poser en toute sécurité ».

Le service de maintenance comptait quatre techniciens d'entretien d'aéronefs (TEA) ayant une très grande expérience des hélicoptères. Les TEA possédaient tous au moins 20 ans d'expérience en maintenance aéronautique et avaient entre 8 et 17 ans d'ancienneté. Les quatre TEA avaient reçu de la formation sur l'hélicoptère AS 355 et leur licence avait été annotée en conséquence. Auparavant, le service de maintenance comprenait cinq personnes, y compris un directeur de la maintenance. Le directeur avait quitté l'entreprise avant la fusion de 1998, et l'entreprise avait alors adopté une structure organisationnelle basée sur trois rôles distincts pour le service de maintenance. Cette structure était basée sur la philosophie de l'entreprise, à savoir un partage de l'encadrement et des responsabilités. En vertu de cette politique, chaque TEA devait occuper les divers postes du service de maintenance et être responsable, pendant des périodes indéterminées, de la surveillance, de l'achat des pièces et des matériaux et de la maintenance en ligne. Cette structure organisationnelle du service de maintenance n'aurait pas répondu aux normes établies par Transports Canada pour un système de contrôle de la maintenance.

Normes de procédure

En 1988, un manuel de maintenance des aéronefs de la compagnie avait été élaboré pour que le personnel de maintenance d'Edmonton puisse s'en servir comme guide de travail. Ce manuel n'ayant pas été mis à jour depuis 1991, il ne reflétait donc plus la composition actuelle de la flotte ni la nouvelle structure organisationnelle du service de maintenance. Ce manuel avait été préparé conformément aux exigences des Ordonnances sur la navigation aérienne de la série VII aujourd'hui abrogées et il ne faisait aucune mention du RAC.

Au moment de l'accident, le service de maintenance en était à la première étape de l'établissement de normes organisationnelles et procédurales communes avec l'entreprise qui avait absorbé la leur. Les mesures devant être prises pour corriger plusieurs des anomalies organisationnelles et procédurales relevées au sein du service de maintenance, dans le cadre de l'examen de sécurité de la division des hélicoptères de novembre 1998, avaient été retardées, car il y avait tout lieu de croire que la fusion entraînerait d'autres modifications. Le 23 avril 1999, le directeur de la maintenance de la division des hélicoptères de Winnipeg (Manitoba) avait été nommé directeur de la maintenance de la division des hélicoptères d'Edmonton. Il avait été nommé à ce poste trois jours ouvrables avant l'accident, il n'avait donc pas eu le temps de prendre des mesures d'encadrement ou d'autres mesures touchant le service de maintenance avant l'accident.

Renseignements sur l'aéronef

L'hélicoptère portait le numéro de série 5084. Il avait été acheté flambant neuf et était exploité par l'entreprise depuis 1981. L'hélicoptère biturbine était entretenu comme un appareil privé conformément au calendrier de maintenance selon les heures de vol de l'AS 355 F1 préparé par l'hélicoptériste.

L'entreprise exploitait deux hélicoptères AS 355 F1 et deux AS 355 F2 Twinstar qui étaient tous équipés d'un nécessaire de démarrage par temps froid à batterie double. L'hélicoptère accidenté était équipé d'un nécessaire facultatif de démarrage par temps froid à batterie double MOD 350AOP0699 qui était décrit dans le bulletin de service 24.01, conformément à la pré-modification 07-1123. L'ensemble comprend deux batteries au nickel-cadmium Saft 1606-1 de 16 ampères-heures et de 24 volts qui sont placées l'une au-dessus de l'autre dans le logement des batteries situé du côté droit du fuselage, à l'arrière de la cabine. Un panneau latéral amovible permet d'avoir accès à ce logement. Les batteries sont reliées au circuit électrique par des câbles de courant continu qui sont fixés individuellement aux bornes positives et négatives des batteries. Dans le cas de la batterie double de l'AS 355 F1, un câble relie en parallèle, au moyen d'un relais de mise en parallèle, la borne positive de la batterie du dessus (la batterie auxiliaire) à la borne positive de la batterie du dessous (la batterie principale). Le fil de connexion négatif de chaque batterie est muni d'un fusible de 400 ampères pour protéger les câbles et les fils du circuit ainsi que les boîtiers électriques principaux. Les batteries possèdent des capteurs qui déclenchent le voyant d'alarme de température batterie dès que la température de la batterie dépasse 71 degrés Celsius. Le dispositif a pour objet de prévenir le pilote qu'il y a un emballement thermique de batterie.

Sur les hélicoptères de modèle AS 355 F1, le circuit est commandé à l'aide de deux câbles sur la borne positive de la batterie principale et d'un interrupteur principal desservant les deux batteries, tandis que sur les appareils de modèle AS 355 F2, il n'y a qu'un seul câble sur la borne positive de la batterie principale et un interrupteur principal distinct pour chaque batterie. Le dispositif à batterie double est également disponible en option sur les hélicoptères monoturbines AS 350. Il y a une dizaine d'années, au moins un exploitant d'hélicoptères canadien a retiré tous les ensembles de démarrage par temps froid à batterie double des appareils de sa flotte d'hélicoptères Aerospatiale AS 350 et les a remplacés par une batterie au nickel-cadmium de grande capacité à un seul raccord et à débranchement rapide, dans le but de rendre le dispositif plus simple et plus léger et pour réduire la maintenance nécessaire.

Sur les hélicoptères AS 355, le compartiment à bagages de droite se trouve juste en avant du logement des batteries (voir l'annexe A). Ces deux compartiments sont séparés par une cloison en aluminium épaisse de 0,050 pouce. Sur chacun des quatre hélicoptères de l'entreprise, le compartiment à bagages de droite servait à ranger l'équipement de survie et de secours obligatoire. Cet équipement comprenait un abri pour cinq personnes ainsi qu'une trousse de survie contenant des fusées éclairantes de secours. Les sacs contenant l'abri de survie et la trousse de secours étaient en nylon inflammable; l'abri de survie était dans une boîte en carton ciré. En vertu de la réglementation, les sacs n'étaient pas tenus d'être ignifugés. Les matériaux d'emballage ont fait l'objet d'essais. Lors des essais, ils se sont enflammés rapidement, ont fondu et ont dégoutté avant d'être entièrement détruits par le feu. Les caractéristiques de combustion ne respectaient pas les exigences actuelles prévues dans les spécifications des textiles ignifugés. Les trousses de survie contenaient deux fusées éclairantes à main à parachute de type maritime ainsi que quatre fumigènes jour/nuit. Les fusées éclairantes de secours qui se trouvaient dans deux des trois sacs de survie des appareils jumeaux de l'entreprise avaient été enveloppées dans du papier journal pour éviter le frottement; les fusées éclairantes de secours qui se trouvaient dans le troisième sac de survie étaient enveloppées dans du carton. Les fusées éclairantes sont emballées et transportées comme des marchandises dangereuses lorsque le fabricant les expédie; toutefois, l'actuel Règlement sur le transport des marchandises dangereuses ne s'applique pas aux produits considérés dangereux si ces produits sont nécessaires à la sécurité des personnes à bord d'un moyen de transport.

Renseignements sur la maintenance de l'aéronef

Les dossiers de maintenance et les entretiens ont permis d'établir que les deux batteries au nickel-cadmium avaient été remplacées le 21 mars 1999, conformément au calendrier de maintenance des batteries, à 13 217,0 heures de vol cellule. Les enveloppes chauffantes hivernales avaient été retirées des batteries le 24 avril 1999 à 13 313,3 heures. Le TEA chargé d'enlever les enveloppes chauffantes ayant remarqué que le connecteur à écrou papillon de la borne positive de la batterie principale était desserré et endommagé par la chaleur, il l'a remplacé. Le TEA qui a remplacé les batteries pensait avoir relié les deux câbles à la batterie principale; toutefois, selon le TEA qui a remplacé le connecteur à écrou papillon, un seul câble était fixé à la batterie quand il a fait son travail. Le remplacement du connecteur à écrou papillon de la borne de la batterie ne figurait pas dans les dossiers de l'appareil. L'accident s'est produit à 13 333,1 heures, soit 116,1 heures après le remplacement des batteries et 19,8 heures après l'enlèvement des enveloppes des batteries. Ces deux opérations de maintenance ont été effectuées au milieu de la journée dans une partie tranquille et bien éclairée du hangar, et rien ne permet de penser que le TEA aurait été fatigué à ce moment-là ou qu'il aurait été dérangé pendant qu'il travaillait. L'enquête n'a pas permis d'identifier de situation précise qui pourrait expliquer pourquoi le câble n'était pas correctement fixé, et il n'a pas été possible d'établir si ce câble avait été laissé détaché dès le remplacement des batteries ou plus tard quand le connecteur endommagé a été remplacé.

Le manuel de maintenance et le manuel de vol de l'AS 355 précisent que des vérifications opérationnelles quotidiennes doivent être accomplies chaque jour avant le premier vol et après le dernier vol. Ces vérifications quotidiennes ont pour objet de s'assurer que l'appareil est en bon état de service. Elles peuvent être effectuées par tout employé de maintenance qualifié ou par tout pilote ayant reçu la formation nécessaire. Lors de l'inspection avant le premier vol, il faut vérifier le branchement des batteries, tandis que lors de l'inspection après le dernier vol, il faut procéder à une vérification de sécurité des batteries. Chacune de ces inspections oblige à enlever le panneau latéral d'accès au logement des batteries et à le remettre en place. Le pilote et les TEA ont déclaré qu'ils ne savaient pas que, dans le cadre des vérifications opérationnelles quotidiennes, il fallait inspecter le logement des batteries avant le premier vol et après le dernier vol, c'est pourquoi ces inspections n'étaient pas faites.

Le pilote a déclaré que le fait qu'il fallait inspecter le logement des batteries dans le cadre des vérifications opérationnelles quotidiennes n'a pas été mentionné lors de la formation au pilotage initiale et périodique qu'il a reçue au centre de formation de l'hélicoptériste, à Grande Prairie (Texas). Des représentants du centre de formation ont été consultés à ce sujet, et il a été établi que le personnel de maintenance effectuait chaque jour la vérification des logements des batteries des hélicoptères servant à l'entraînement avant que les appareils soient autorisés à partir pour les vols d'entraînement.

Le pilote a indiqué qu'il avait retiré le panneau latéral d'accès au logement des batteries le 25 avril 1999 pour examiner visuellement les batteries et qu'il n'avait rien remarqué d'anormal à l'intérieur du logement.

Renseignements météorologiques

Au moment de l'accident, les conditions météorologiques étaient favorables au vol à vue, et on a jugé que la météo n'avait joué aucun rôle dans l'accident. L'hélicoptère survolait un champ plat et dégagé au moment de l'accident.

Renseignements sur l'épave

L'examen des batteries au nickel-cadmium, qui ont été lourdement endommagées par l'incendie, a permis d'établir que le câble de mise en parallèle avait été fixé à la borne positive de la batterie auxiliaire, mais qu'il n'avait pas été fixé à la borne positive de la batterie principale. Un de câble de batterie court non fixé a été trouvé près des batteries dans l'épave après l'incendie. L'examen visuel et l'examen en laboratoire ont permis d'établir que l'embout en cuivre avait été endommagé par un arc électrique. Une analyse en surface et un examen de quelques micro-sections de l'embout ont montré des zones où le cuivre s'était allié avec l'aluminium. Ce constat signifie qu'il y a eu un contact à une température suffisamment élevée pendant un laps de temps relativement long pour que l'aluminium ait le temps de se diffuser dans l'embout en cuivre. Les batteries et le circuit électrique ne présentaient aucune autre anomalie antérieure à l'accident. L'examen du fusible de 400 ampères dans le fil de connexion négatif de la batterie auxiliaire a montré que le fusible s'est rompu à cause d'une surcharge mécanique qui s'est produite lorsque le plateau supportant les batteries s'est affaissé pendant l'incendie au sol.

Essais et recherches

On a fait une reproduction du logement des batteries et du compartiment à bagages en vue de déterminer si le câble de batterie non fixé aurait pu contribuer à l'incendie en vol ou l'avoir causé. Des représentants de l'hélicoptériste, du fabricant des batteries, de l'exploitant et du BST ont assisté aux essais. Les logements des batteries de tous les Twinstar de l'entreprise avaient été recouverts de peinture Endura, et des essais ont montré que cette peinture jouait le rôle d'isolant et que tout embout de câble de batterie non fixé n'aurait pu produire un arc électrique en cas de contact avec une partie peinte de la cloison avant du logement des batteries. Si l'embout du câble était entré en contact avec une partie du logement où la peinture manquait, un arc électrique aurait rapidement traversé la cloison avant et aurait enflammé le sac contenant l'abri de survie et la boîte en carton ciré. Le fusible de 400 ampères n'a pas fondu pendant les essais, et ce, même si le courant a parfois atteint, pendant de courtes périodes, une intensité aussi élevée que 1 361 ampères. Ce fusible (réf. 135000A) a fait l'objet d'une simple analyse de transfert de chaleur. Il est apparu que le fusible était un dispositif de 400 ampères à fusion temporisée et que des sautes momentanées de courant, comme celles qui peuvent se produire lors du contact de l'hélicoptère avec le sol, n'auraient pas fait fondre le fusible à moins que l'intensité du courant n'atteigne quelque cinq fois le calibre du fusible, et ce, pendant plus d'une seconde.

Analyse

Généralités

Un incendie s'est déclaré en vol à bord de l'hélicoptère AS 355 F1 parce que le câble de mise en parallèle reliant la batterie auxiliaire à la batterie principale n'avait pas été fixé à la borne positive de la batterie principale. Cette erreur de maintenance n'a pas été décelée avant le vol. L'information recueillie, les essais effectués à l'aide du logement de batteries qui a été construit pour les fins de l'enquête, ainsi que les résultats de l'examen fait par le Laboratoire technique du BST sur la partie du câble de batterie endommagé par un arc électrique qui a pu être récupérée, ont permis de conclure que le câble non fixé était entré en contact avec une partie non peinte de la cloison avant du logement des batteries, ce qui a produit un arc électrique qui a traversé la cloison et a enflammé le matériel de survie se trouvant dans le compartiment à bagages adjacent.

Les dispositifs de sécurité qui auraient pu prévenir cet accident étaient soit manquants, soit inadéquats. Le dispositif de mise en parallèle reliant la batterie auxiliaire à la batterie principale n'indiquait pas dans le poste de pilotage que la liaison avec la batterie auxiliaire n'était pas assurée, les principes directeurs du système de maintenance de l'entreprise étaient périmés, les vérifications opérationnelles quotidiennes n'étaient pas effectuées conformément aux recommandations de l'hélicoptériste et le TEA qui a effectué les derniers travaux dans le logement des batteries n'a pas remarqué que le câble de mise en parallèle de la batterie auxiliaire n'était pas fixé. Pour toutes ces raisons, l'analyse s'intéressera aux lacunes latentes du système qui ont peut-être contribué à l'erreur de maintenance et aux conditions qui ont fait que cette erreur n'a pas été décelée. L'analyse portera également sur les mesures prises par le pilote ainsi que sur la propagation de l'incendie due à l'inflammabilité du matériel de survie dans le compartiment à bagages.

Système, méthodes et procédures de maintenance

Les systèmes et les méthodes de maintenance ont évolué de façon à réduire les risques d'erreur et à minimiser les conséquences des erreurs. L'entreprise n'était pas tenue de posséder un certificat d'exploitation privée ni un certificat d'exploitation aérienne, ce qui veut dire que le service de maintenance n'était pas tenu de se conformer aux normes beaucoup plus strictes imposées par Transports Canada aux OMA. Par voie de conséquence, plusieurs vérifications et contrôles qui existent normalement dans un OMA se sont trouvés éliminés. Le service de maintenance comptait quatre TEA très expérimentés, mais qui ne bénéficiaient pas de lignes directrices adéquates en matière d'exploitation et de procédures et qui ne jouissaient pas de l'encadrement nécessaire pour pouvoir travailler conformément aux normes de maintenance aéronautique établies depuis longtemps. Les lignes directrices qui se présentaient sous la forme d'un manuel de maintenance de l'entreprise étaient insuffisantes et périmées depuis sept ans. La politique qui existait depuis environ un an au sein du service de maintenance voulant que le personnel occupe à tour de rôle les postes de surveillance, d'achats et de maintenance en ligne était inefficace, car elle manquait de continuité, et elle ne convenait pas à un service de maintenance aéronautique. Comme Transports Canada n'était pas tenu d'effectuer des vérifications réglementaires de l'entreprise, et à cause des modifications et des corrections qui devaient se produire dans la division des hélicoptères à la suite de la fusion, des anomalies qui existaient depuis un certain temps au sein du service de maintenance n'ont pas été corrigées.

Les vérifications opérationnelles quotidiennes, qui auraient pu permettre de découvrir l'erreur de maintenance, n'étaient pas effectuées, ce qui veut donc dire que la maintenance n'était pas effectuée conformément aux recommandations de l'hélicoptériste. Comme rien dans le poste de pilotage ne permettait de savoir que le câble de mise en parallèle des batteries n'était pas fixé, l'hélicoptère volait depuis quelque temps déjà avec une grave anomalie de maintenance. En fait, le TEA qui a effectué le travail est devenu l'unique rempart pour protéger le système.

Le fait que, dans deux des hélicoptères de l'entreprise, il fallait normalement fixer un câble de batterie à la borne positive de la batterie principale et qu'il fallait en fixer deux dans les autres hélicoptères, a probablement augmenté les risques qu'un câble de batterie auxiliaire non fixé soit laissé ainsi.

Le voyant d'alarme rouge de température batterie a pour objet de prévenir le pilote qu'il y a un emballement thermique de batterie. Sa fonction principale n'est pas de servir de voyant d'alarme incendie. C'est pourquoi le pilote a d'abord cru qu'il s'agissait d'un problème d'emballement thermique de batterie plutôt que d'un incendie en vol. Il a réagi en coupant l'interrupteur batterie, conformément aux procédures d'urgence recommandées, et il a continué à descendre lentement à la recherche d'un endroit où il pourrait faire un atterrissage de précaution, envisageant par le fait même un atterrissage de précaution. Il s'est posé sans plus tarder en raison de la panne totale d'alimentation électrique et de l'apparition de la fumée dans le poste de pilotage. Ces deux événements ont été les signes les plus évidents d'une situation d'urgence en vol.

Les matériaux d'emballage en nylon et en carton ainsi que l'abri de survie et les fusées éclairantes de secours n'étaient pas ignifugés. Le fait que cet équipement se trouvait à proximité du câblage électrique du logement des batteries a contribué au déclenchement de l'incendie. L'incendie s'est propagé rapidement à cause des matériaux d'emballage et de l'équipement inflammables.

Structure et gestion organisationnelles

La fusion de l'entreprise a créé de grandes inquiétudes chez les employés de la division des hélicoptères d'Edmonton au niveau de leur emploi et de leur sécurité financière. Le stress est une façon dont le corps réagit à un stimulus qui dérange l'équilibre et qui nuit à la façon de s'en sortir. Le stress peut avoir des effets positifs ou négatifs sur les pensées ou le rendement, selon les circonstances et les personnes. La personne anxieuse et stressée peut s'attarder aux difficultés à l'origine du stress plutôt qu'aux aspects pratiques de la situation réelle. Il peut en résulter un problème de concentration et l'impossibilité de reconnaître certaines erreurs. Le stress émotionnel, comme celui résultant de la peur d'autres difficultés, est celui qui nuit le plus à la concentrationNote de bas de page 1.

Les trois modifications à la politique de gestion du service de maintenance qui sont survenues dans l'année précédant l'accident, ainsi que la récente fusion de l'entreprise, ont augmenté de façon notable le niveau de stress des employés. Il n'a pas été possible d'établir jusqu'à quel point les incertitudes attribuables à la fusion peuvent avoir eu une incidence sur les événements liés à l'accident. Toutefois, il semble que le stress et les inquiétudes entourant l'avenir de l'entreprise aient pu affecter le rendement de l'un ou l'autre des TEA, ou des deux TEA, qui ont travaillé en dernier dans le logement des batteries puisqu'il semble que ces personnes aient eu du mal à se concentrer au travail.

Faits établis

Faits établis quant aux causes et facteurs contributifs

  1. Le câble de mise en parallèle de la batterie auxiliaire n'a pas été fixé à la borne positive de la batterie principale lors de travaux de maintenance de routine.
  2. Le câble de batterie non fixé a fait un arc électrique qui a traversé la cloison avant du logement des batteries et a mis le feu aux sacs en nylon du matériel de survie se trouvant dans le compartiment à bagages adjacent, ce qui a causé un incendie en vol.
  3. Le fait que des sacs en nylon extrêmement inflammable servant à ranger le matériel de survie se trouvaient à proximité du câblage électrique du logement des batteries présentait un danger. Cette situation a contribué au déclenchement et à la propagation de l'incendie en vol.
  4. Les vérifications opérationnelles quotidiennes du logement des batteries, vérifications qui auraient pu permettre de déceler l'erreur, n'étaient pas effectuées par les pilotes ni par les TEA.

Autres faits établis

  1. L'hélicoptère était exploité comme un appareil privé; par conséquent, il n'était pas obligatoire que sa maintenance soit faite par un organisme de maintenance agréé.
  2. La nouvelle structure organisationnelle par roulement qui avait été choisie pour le service de maintenance des hélicoptères n'était pas appropriée et n'aurait pas répondu aux normes établies par Transports Canada pour un système de contrôle de la maintenance.
  3. Les risques étaient plus grands que les TEA fassent des erreurs au travail à cause du stress et de l'anxiété qu'ils éprouvaient face à leur emploi et à leur sécurité financière à cause de la fusion.

Mesures de sécurité

Mesures prises

Après l'accident, l'exploitant a pris les mesures suivantes :

Transports Canada a publié un article intitulé Câble de batterie flottant : risque d'incendie dans le numéro 4/99 de Sécurité aérienne - Mainteneur. L'article traite des risques et des dangers inhérents au présent accident.

Mesures à prendre

Normes d'emballage

L'équipement de survie et de secours transporté à bord de l'hélicoptère comprenait un abri de survie pour cinq personnes ainsi qu'une trousse de survie contenant des fusées éclairantes de secours. Les sacs qui contenaient l'équipement de survie et de secours étaient en nylon inflammable, mais rien n'obligeait à ce que les sacs soient ignifugés. Pendant les essais, le matériau constituant les sacs s'est enflammé rapidement, a fondu et a dégoutté avant d'être complètement détruit par le feu. La nature hautement combustible de ce matériau d'emballage a contribué à la gravité des faits en offrant une source de carburant facile en présence d'un arc électrique. De plus, si de l'équipement de survie est transporté dans un emballage inflammable, les chances sont plus minces que cet équipement soit encore utilisable quand on en a besoin.

Chaque trousse de survie des quatre hélicoptères de la compagnie contenaient deux fusées éclairantes à main à parachute de type maritime ainsi que quatre fumigènes jour/nuit. Tous les fumigènes et fusées transportés à bord de l'hélicoptère accidenté ont pris feu et ont été consumés dans l'incendie. Ces articles sont considérés comme des explosifs des classes 1.2G et 1.4G. En vertu du Règlement sur les marchandises dangereuses de l'Association du transport aérien international (IATA), il est interdit de mettre des matériaux considérés comme des explosifs de classe 1.2G à bord des aéronefs servant au transport de fret et de passagers. Les produits considérés comme des explosifs de classe 1.4G peuvent être mis dans des aéronefs servant au transport de fret, à condition qu'ils soient emballés conformément aux instructions d'emballage pertinentes. Les fusées éclairantes de secours de deux des trois trousses de survie des appareils jumeaux de l'entreprise avaient été enveloppées dans du papier journal pour empêcher le frottement. D'après l'instruction d'emballage des marchandises dangereuses no 905 de l'IATA, les dispositifs de signalisation transportés à bord comme des marchandises dangereuses doivent être emballés dans des contenants en plastique ou en carton compact. L'actuel règlement sur le transport des marchandises dangereuses ne s'applique pas aux produits qui sont nécessaires à la sécurité des personnes à bord d'un moyen de transport. Toute condition qui augmente inutilement les risques de déclenchement ou de propagation d'un incendie à bord d'un aéronef est dangereuse et compromet la sécurité des passagers et de l'équipage, c'est pourquoi le Bureau recommande que :

Le ministère des Transports s'assure que les exploitants aériens rangent le matériel de survie, transporté à bord des aéronefs, dans des contenants ignifugés et qu'ils emballent les dispositifs pyrotechniques de secours ainsi que les autres articles de survie hautement inflammables de manière à respecter au moins les normes établies en vertu du Règlement sur les marchandises dangereuses de l'Association du transport aérien international (IATA).
Recommandation A00-13 du BST

La réglementation aérienne canadienne exige qu'un exploitant privé transportant des passagers à bord d'un avion pressurisé à turbomoteur ou d'un gros avion respecte les conditions et les spécifications énoncées dans un certificat d'exploitation privée ou dans un certificat d'exploitation aérienne. En vertu de ces dispositions, l'exploitant est tenu en vertu de son certificat d'exploitation d'entretenir l'avion conformément à un système de contrôle de la maintenance approuvé. Toutefois, rien dans le règlement n'oblige les exploitants d'hélicoptères privés qui transportent des passagers, comme c'est le cas ci-devant, à procéder en vertu d'un certificat d'exploitation ni à entretenir leurs hélicoptères conformément à un système de contrôle de la maintenance approuvé. De plus, aucune disposition n'est prévue dans la réglementation pour permettre à un exploitant de présenter volontairement une demande de certificat d'exploitation.

L'entreprise exploitait quatre hélicoptères biturbines complexes à hautes performances pour transporter ses employés dans tout l'Alberta. La structure, les politiques et les principes directeurs de l'organisme de maintenance de l'entreprise n'auraient pas répondu aux normes établies par Transports Canada pour un système de contrôle de la maintenance. Un tel système a pour objet de minimiser les risques d'erreurs de maintenance. Le Bureau constate avec inquiétude que des passagers sont transportés régulièrement dans des hélicoptères qui ne sont pas assujettis aux normes de maintenance plus strictes qui sont exigées pour les aéronefs à voilure fixe transportant des passagers, c'est pourquoi il recommande que :

Le ministère des Transports s'assure que les hélicoptères utilisés par des exploitants privés pour transporter des passagers soient assujettis à une norme de maintenance équivalente à celle qui s'applique aux aéronefs à voilure fixe effectuant le même type de vol.
Recommandation A00-14 du BST

Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .

Annexes

Annexe A - Logement des batteries et compartiment à bagages

Annexe B - Liste des rapports de laboratoire pertinents

L'enquête a donné lieu au rapport de laboratoire suivant :

Le service d'analyse des textiles de l'Université de l'Alberta (University of Alberta Textile Analysis Service) a rédigé le rapport suivant :

Flame Resistance Testing of Nylon Survival Bags (Essais de résistance au feu des sacs de survie en nylon).

Le service d'analyse technique de l'Université de l'Alberta (University of Alberta Engineering Analysis Service) a rédigé le rapport suivant :

Heat Transfer Analysis of a 400-A Fuse Used on the Aerospatiale AS 355 F1 Twinstar Helicopter (Analyse de transfert de la chaleur d'un fusible de 400 ampères utilisé à bord de l'hélicoptère Aerospatiale AS 355 F1 Twinstar).

On peut obtenir ces rapports en s'adressant au Bureau de la sécurité des transports du Canada.

Annexe C - Sigles et abréviations

BST
Bureau de la sécurité des transports du Canada
IATA
Association du transport aérien international
nm
mille marin
OMA
organisme de maintenance agréé
RAC
Règlement de l'aviation canadien
TEA
technicien d'entretien d'aéronefs