Language selection

Rapport d’enquête sur la sécurité du transport aérien A19Q0091

Perte de maîtrise au décollage et impact avec le sol
Cargair ltée
Piper PA-23-250 Aztec, C-GDUL
Aéroport de Trois-Rivières (Québec)



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 17 juin 2019, un aéronef Piper PA-23-250 (immatriculation C-GDUL, numéro de série 27-3986) exploité par Cargair ltée effectuait un vol voyage de nuit, selon les règles de vol à vue, à partir de l’aéroport de Montréal/St-Hubert (Québec) avec une approche suivie d’une remontée à l’aéroport international de Québec/Jean Lesage (Québec) et à l’aéroport de Trois-Rivières (Québec). Il y avait à bord1 pilote et 1 passager, qui était aussi un instructeur de vol. Lors de l’approche à l’aéroport de Trois-Rivières (Québec), la décision d’effectuer un posé-décollé a été prise. Pendant la course au décollage, les hélices des 2 moteurs sont entrées en contact avec la surface de la piste. L’aéronef a décollé, a viré vers la gauche et, par la suite, le pilote a perdu la maîtrise de l’aéronef. L’aéronef est entré en collision avec le sol à 222 pieds au sud de la piste 23 le 18 juin à 0 h 09, heure avancée de l’Est. Aucun signal de la radiobalise de repérage d’urgence n’a été reçu. Suite à l’impact, un incendie s’est déclaré et l’aéronef a été détruit. Les 2 occupants ont pu évacuer l’aéronef. Le premier a subi des blessures légères et le deuxième, des blessures graves.

1.0 Renseignements de base

1.1 Déroulement du vol

Le 17 juin 2019, le pilote effectuait un dernier vol voyage de nuit selon les règles de vol à vue (VFR) à titre de commandant de bord sous supervisionNote de bas de page 1 à bord d’un aéronef Piper PA-23-250 Aztec (immatriculation C-GDUL, numéro de série 27-3986). Le but du vol était de compléter les heures prévues au programme de formation intégrée de pilote de ligne de ce pilote. Un passager, qui était aussi un instructeur de volNote de bas de page 2, était à bord, assis du côté droit afin de superviser l’exécution du vol.

Le départ de l’aéroport de Montréal/St-Hubert (CYHU) (Québec) était prévu à 22 h 30Note de bas de page 3. Le trajet comprenait une approche suivie d’une remontée à l’aéroport international de Québec/Jean Lesage (CYQB) (Québec) et à l’aéroport de Trois-Rivières (CYRQ) (Québec), avant que l’aéronef revienne se poser à CYHU (figure 1).

Figure 1. Carte du vol planifié (Source : Google Earth, avec annotations du BST)
Carte du vol planifié (Source : Google Earth, avec annotations du BST)

À 22 h 43, l’aéronef à l’étude a décollé de CYHU. En s’approchant de CYQB, le pilote et le passager-instructeur ont convenu qu’à partir de ce moment, le passager-instructeur allait effectuer les communications radio. À CYQB, une approche simulée au moyen du système d’atterrissage aux instruments (ILS) de la piste 06 en conditions météorologiques de vol à vue a été effectuée.

À 23 h 35, l’aéronef était en courte finale. Il a par la suite fait une approche interrompue et s’est dirigé vers CYRQ en vue d’effectuer une approche simulée de navigation de surface (RNAV) sur la piste 23 au moyen du système mondial de navigation par satellite (GNSS), toujours en conditions météorologiques de vol à vue. En rapprochement de CYRQ, le pilote et le passager-instructeur ont convenu d’effectuer un posé-décollé plutôt qu’une approche interrompue et que les volets resteraient à la position d’approche (¼) pour l’atterrissage. Ils ont également convenu qu’une fois au sol, le passager-instructeur allait remonter les volets avant le décollage. Lorsque l’aéronef a intercepté la trajectoire d’approche finale, le pilote a baissé le train d’atterrissage et a exécuté les listes de vérification avant l’atterrissage, qui exigent de vérifier 3 fois, au total, que le train d’atterrissage est abaissé et verrouillé.

À 0 h 07 min 54 s le 18 juin, l’aéronef a franchi le seuil de la piste 23 et s’est posé. Le passager-instructeur a placé le levier des volets à la position UP. Par la suite, à 0 h 08 min 07 s, il a remarqué que les volets n’étaient pas remontés comme prévu et a entrepris de résoudre l’anomalie. Son attention portée sur la console centrale, à 0 h 08 min 11 s, il a constaté que le levier du train d’atterrissage était toujours à la position DOWN (qui a pour effet de bloquer le mouvement des volets) au lieu de revenir automatiquement à la position centrale. Pendant ce temps, le pilote augmentait la puissance sur les 2 moteurs et l’aéronef accélérait sur la piste. Ayant la sensation d’être en vol à basse vitesse, le passager-instructeur a placé le levier du train d’atterrissage à la position UP. Le pilote qui effectuait le décollage n’était pas conscient de l’anomalie de levier du train, que les volets étaient demeurés à la position d’approche, ni du placement du levier du train à la position UP.

À 0 h 08 min 18 s, à une vitesse d’environ 90 mi/h, les hélices des 2 moteurs sont entrées en contact avec la surface de la piste, causant un bruit fort inhabituel, des dommages aux hélices et des vibrations importantes. L’aéronef s’est cabré, a décollé à basse vitesse avec les hélices endommagées et a amorcé un virage à gauche malgré les tentatives du pilote de maintenir le cap de piste avec la déflexion maximale des commandes de vol (ailerons et palonnier). Quelques secondes plus tard, à 0 h 09, le pilote a perdu la maîtrise de l’aéronef, qui a percuté le sol à quelque 222 pieds au sud de la piste 23 (annexe A).

Un incendie s’est déclaré après l’impact. En raison des flammes dans les environs de l’aile droite, côté sur lequel se trouve la porte principale, le pilote et le passager-instructeur se sont déplacés vers l’arrière de l’aéronef pour ouvrir le hublot issue de secours du côté gauche, mais ils n’ont pas réussi. Ils ont tout de même pu évacuer l’aéronef par ce hublot, car le plexiglas s’était brisé à l’impact.

Les pompiers du service d’incendie de la Ville de Trois-Rivières, qui étaient déjà à CYRQ pour un autre aéronef, sont intervenus immédiatement. Aucun signal de la radiobalise de repérage d’urgence (ELT) n’a été signalé. Les 2 occupants ont été transportés par ambulance à un centre hospitalier à Trois-Rivières. L’aéronef a été détruit.

1.2 Personnes blessées

Tableau 1. Personnes blessées
Gravité des blessures Membres d’équipage Passagers Personnes ne se trouvant pas à bord de l’aéronef Total selon la gravité des blessures
Mortelles 0 0 0 0
Graves 0 1 0 1
Légères 1 0 0 1
Total des personnes blessées 1 1 0 2

1.3 Dommages à l’aéronef

L’aéronef a été détruit par la force de l’impact et par l’incendie qui s’est déclaré après la rupture du réservoir de carburant de l’aile droite.

1.4 Autres dommages

Quelques litres de carburant de type 100LL ont été récupérés dans la tranchée en bordure de la piste.

1.5 Renseignements sur le personnel

Tableau 2. Renseignements sur le personnel
  Commandant de bord sous supervision Passager-instructeur
Licence de pilote Licence de pilote professionnel - avion Licence de pilote professionnel - avion
Date d’expiration du certificat médical 1er avril 2020 1er octobre 2019
Heures de vol total 218,4 791,7
Heures de vol total de nuit 18,8 74,6
Heures de vol total de nuit (6 derniers mois) 6,2 19,8
Heures de vol sur type 34 25
Heures de vol sur type de nuit 4,4 0
Heures de vol sur type au cours des 90 derniers jours 34 1,5
Heures de service avant l’événement 2 16
Heures de repos avant le vol 12 12

1.5.1 Renseignements sur le pilote (commandant de bord sous supervision)

Le pilote avait les licences et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol, conformément à la réglementation en vigueur.

Le pilote avait commencé sa formation de pilote chez Cargair ltée en février 2018 en s’inscrivant au programme de formation intégréeNote de bas de page 4 de pilote de ligne – avion (ATP-A) pour pilotes étrangers. Il avait obtenu les qualifications de vol aux instruments et multimoteur ainsi que sa licence de pilote professionnel en mai 2019.

1.5.2 Renseignements sur le passager-instructeur

Le passager-instructeur avait obtenu les qualifications de vol aux instruments et multimoteur, ainsi que sa licence de pilote professionnel en 2017. En mai 2018, il a obtenu sa qualification d’instructeur de classe 4Note de bas de page 5 et, en juin 2018, il a été embauché à titre d’instructeur chez Cargair ltée. En avril 2019, il a obtenu sa qualification d’instructeur de classe 3. En mai 2019, il a suivi une formation supplémentaire afin de devenir instructeur de vol pour la qualification de vol aux instruments sur les aéronefs Piper PA-23-250, pour des étudiants qui ont déjà la qualification multimoteur.

Le vol à l’étude était le 2e vol de sa première journée à titre de passager-instructeur qui supervise des vols avec un commandant de bord sous supervision sur les aéronefs Piper PA-23-250.

1.5.3 Fatigue

Les facteurs de risque suivants ont été évalués afin de déterminer si la fatigue était présente : une perturbation aigüe ou chronique du sommeil, un état d’éveil continu prolongé, les effets du rythme circadien, des troubles du sommeil, une condition médicale ou un effet en lien avec la prise de médicaments.

Un état d’éveil continu prolongé peut causer de la fatigue. Il survient généralement au-delà d’un éveil continu normal, soit de 17 à 18 heures consécutives, et devient progressivement plus prononcé au seuil des 22 heuresNote de bas de page 6. Une combinaison de facteurs de risque augmente la possibilité de fatigue.

1.5.3.1 Pilote (commandant de bord sous supervision)

Au cours des 2 jours précédant l’événement, le pilote n’a effectué qu’un seul vol dans le cadre de sa formation, dont la durée était inférieure à 1 heure, et qui s’est déroulé l’après-midi. Le jour de l’événement, le décollage a eu lieu à 22 h 43. Toutefois, aucun facteur de risque relié à la fatigue n’était présent.

1.5.3.2 Passager-instructeur

Le passager-instructeur n’avait pas travaillé au cours des 4 jours précédant sa journée de travail qui a commencé le 17 juin 2019 et qui s’est terminée le 18 juin 2019. Le 17 juin 2019, le passager-instructeur s’est levé à 7 h et a commencé sa journée de travail à 8 h. Durant la matinée, il a effectué 2 vols d’une durée de moins de 2 heures chacun avec un temps d’arrêt d’environ 30 minutes entre les 2 vols. En après-midi, il a supervisé un vol avec un commandant de bord sous supervision à destination de l’aéroport d’Ottawa/Rockcliffe (CYRO) (Ontario) avec une période d’attente de 2 heures dans le salon des pilotes. Par la suite, le passager-instructeur a donné une formation au sol entre 19 h et 22 h avant d’effectuer le vol à l’étude. Au moment de l’accident, le passager-instructeur était éveillé depuis environ 17 heures consécutives et sa charge de travail était considérée comme étant modérée durant cette journée. L’horaire du passager-instructeur prévoyait un vol de formation le 18 juin à 8 h du matin. Rien n’indique que les performances du passager-instructeur avaient été réduites à cause d’effets reliés à la fatigue.

1.6 Renseignements sur l’aéronef

Les dossiers techniques indiquent que l’aéronef était équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur, selon un calendrier de maintenance approuvé par Transports Canada (TC), et qu’aucune anomalie n’avait été signalée avant le vol à l’étude.

L’aéronef était équipé d’un GPS (système de positionnement mondial) de marque Garmin, modèle GNS 430W, monté sur le tableau de bord. Le GPS n’a pu être récupéré, car il a été complètement détruit par l’incendie après impact. L’aéronef à l’étude était utilisé chez Cargair ltée pour offrir la formation en vol en vue des qualifications multimoteur et en vol aux instruments sur multimoteur.

Tableau 3. Renseignements sur l’aéronef
Constructeur Piper Aircraft Corporation
Type et modèle PA-23-250 (Aztec)
Année de construction 1969
Numéro de série 27-3986
Date d’émission du certificat de navigabilité 16 novembre 2011
Total d’heures de vol cellule 9448,4 heures
Type de moteur (nombre) Lycoming IO-540-C4B5 (2)
Type d’hélice ou de rotor (nombre) Hartzell HC-E2YR-2RBSF (2)
Masse maximale autorisée au décollage 5200 lb
Type(s) de carburant recommandé(s) Essence d’aviation 91/96 minimum
Type de carburant utilisé Essence d’aviation 100LL

La masse et le centre de gravité de l’aéronef étaient dans les limites prescrites. La masse au décollage de CYHU était de 4359 livres.

La vitesse de décrochage à la masse maximale autorisée, sans puissance, est de 74 mi/h avec le train d’atterrissage et les volets remontés, et de 68 mi/h avec le train d’atterrissage et les volets abaissés.

1.6.1 Circuit hydraulique du train d’atterrissage et des volets

L’aéronef Piper PA-23-250 comporte 2 circuits hydrauliques distincts et physiquement indépendants : 1 pour le système de freinage, et 1 pour le train d’atterrissage et les volets.

Le circuit hydraulique du train d’atterrissage et des volets est alimenté par une pompe mécanique entraînée par le moteur gauche. De la pompe, l’huile hydraulique sous pression est conduite vers le distributeur hydraulique, situé dans la console centrale, sous le tableau de bord (figure 2). Le distributeur hydraulique comprend des leviers et des valves qui contrôlent le mouvement du train d’atterrissage et des volets.

Figure 2. Vue des leviers des volets et du train d’atterrissage (Source : BST)
Vue des leviers des volets et du train d’atterrissage (Source : BST)

Le levier du train d’atterrissage actionne le sélecteur hydraulique de position du train, et a 3 positions : UP, centrale et DOWN. En position UP ou DOWN, l’huile hydraulique sous pression est dirigée vers les vérins de rétraction ou d’extension du train et des portes de train.

Lorsque le train d’atterrissage atteint la position sélectionnée, la pression hydraulique augmente dans le système et provoque le retour du levier à la position centrale. Le levier du train revient à la position centrale et l’huile hydraulique sous pression peut ensuite poursuivre son cours vers le sélecteur hydraulique de position des volets (tableau 4).

Tableau 4. Opération normale du levier du train d’atterrissage (Source : BST)
Condition Position des leviers Configuration de l’aéronef
Vol de croisière : les leviers des volets et du train sont à la position centrale, et le train et les volets sont montés.
Le levier du train d’atterrissage est placé à la position DOWN et le train se déploie.
Une fois le train abaissé et verrouillé, le levier du train revient à la position centrale automatiquement.

La position du train d’atterrissage est indiquée par 4 voyants situés sur la console centrale. Lorsque les 3 voyants verts sont illuminés, les 3 jambes de train sont en position abaissée et sont verrouillées en place. Lorsque le 4e voyant ambre est illuminé, le train est entièrement rentré et les portes de train sont fermées. L’huile hydraulique sous pression retenue dans cette partie du circuit maintient le tout en place. Si aucun voyant n’est illuminé, le train est en transition.

Le levier des volets actionne le sélecteur hydraulique de position des volets, et a 3 positions : UP, centrale et DOWN. Il fonctionne comme celui du train d’atterrissage, à l’exception que le pilote peut remettre le levier en position centrale en tout temps afin de sélectionner les volets dans une position intermédiaire. Par exemple, pour placer les volets à la position ¼, le pilote baisse généralement le levier des volets à la position DOWN pendant 3 secondes et remet ensuite le levier à la position centrale. Cependant, le soir du vol à l’étude, après que le levier eut été baissé pendant 3 secondes et remis à la position centrale, les volets se sont retrouvés à la position ½ et, pour une raison indéterminée, les volets sont demeurés à cette position pour l’atterrissage.

Les leviers du train d’atterrissage et des volets peuvent être actionnés simultanément, mais le train d’atterrissage a toujours priorité sur les volets et ceux-ci ne bougeront pas tant que le levier du train ne reviendra pas à la position centrale (figures 3 et 4).

Figure 3. Circuit hydraulique simplifié avec le levier du train d’atterrissage en position UP ou DOWN, bloquant la pression hydraulique aux volets (Source : BST)
Circuit hydraulique simplifié avec le levier du train d’atterrissage en position UP ou DOWN, bloquant la pression hydraulique aux volets (Source : BST)
Figure 4. Circuit hydraulique simplifié avec le levier du train d’atterrissage en position centrale, permettant la pression hydraulique de se rendre aux volets (Source : BST)
Circuit hydraulique simplifié avec le levier du train d’atterrissage en position centrale, permettant la pression hydraulique de se rendre aux volets (Source : BST)

Lors du vol à l’étude, pour une raison indéterminée, le levier du train d’atterrissage n’est pas revenu à la position centrale, ce qui a eu pour effet de bloquer la rétraction des volets (annexe B). À l’occasion, le levier du train d’atterrissage ne revenait pas automatiquement à la position centrale sur certains Piper PA-23-250 de Cargair ltée. Généralement, cette anomalie était intermittente : l’instructeur replaçait le levier du train à la position centrale et, par la suite, le levier revenait à la position centrale lors des mouvements subséquents du train. L’examen des dossiers techniques de l’aéronef à l’étude a permis de constater qu’une défectuosité similaire du levier du train avait été consignée au mois de décembre 2018. Aucune autre défectuosité similaire n’a été consignée depuis.

Afin de prévenir la rétraction par inadvertance du train d’atterrissage lorsque l’aéronef est au sol, le levier est muni d’une butée mobile. Cette butée doit être dégagée manuellement avant que le levier puisse être monté de la position centrale à la position UP. De plus, une valve anti-rétraction située sur la jambe du train gauche empêche l’accumulation de pression hydraulique dans le circuit de rétraction quand le poids de l’aéronef repose sur les roues.

1.6.2 Hublot issue de secours

Un hublot issue de secours est situé derrière le siège du pilote côté gauche (figure 5). Le panneau est scellé contre les intempéries lorsqu’il est installé, et il ne doit être retiré qu’en cas d’urgence.

Figure 5. Vue latérale de l’aéronef Piper PA-23-250 montrant le hublot issue de secours (Source: BST)
Vue latérale de l’aéronef Piper PA-23-250 montrant le hublot issue de secours (Source: BST)

Pour retirer le hublot issue de secours (figures 6 et 7), on doit suivre les étapes suivantes [traduction] :

  1. Retirer la plaquette de plastique transparent recouvrant la poignée.
  2. Tourner la poignée.
  3. Pousser le hublot vers l’extérieur avec les 2 mains sur le bas du cadrage jusqu’à ce que le hublot se délogeNote de bas de page 7.
Figure 6. Hublot issue de secours retiré (Source: BST)
Hublot issue de secours retiré (Source: BST)
Figure 7. Poignée du hublot issue de secours recouvert de la plaquette de plastique (Source : BST)
Poignée du hublot issue de secours recouvert de la plaquette de plastique (Source : BST)

Les instructeurs et les pilotes reçoivent une formation théorique sur la manière d’ouvrir le hublot issue de secours sur l’aéronef Piper PA-23-250. Toutefois, cette formation ne comprend pas d’exercice pratique sur la manipulation de la poignée pour retirer la fenêtre. La réglementation n’exige pas que les écoles de pilotages offrent un volet pratique pour cette formation.

1.7 Renseignements météorologiques

Les régions de Montréal, Trois-Rivières et Québec étaient sous l’influence d’une crête de haute pression et les conditions météorologiques étaient propices au vol VFR au moment de l’accident.

Le système automatisé d’observations météorologiques (AWOS) de CYRQ a émis un message d’observation météorologique régulière d’aérodrome (METAR) qui indiquait les conditions suivantes à 0 h :

1.8 Aides à la navigation

Sans objet.

1.9 Communications

À l’approche de CYRQ, le passager-instructeur a communiqué sur la fréquence radio obligatoire (122,35 MHz) et a obtenu les informations pertinentes de la station de communications universelles (UNICOM).

1.10 Renseignements sur l’aérodrome

Situé à environ 5 mille marins au nord-ouest de la Ville de Trois-Rivières, CYRQ est certifié Note de bas de page 8 en vertu des exigences énoncées dans la sous-partie 302 du Règlement de l’aviation canadien (RAC). CYRQ est ouvert 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 Note de bas de page 9, pour les opérations de jour et de nuit en vol VFR et selon les règles de vol aux instruments (IFR). Le service UNICOM est normalement offert de 8 h à 21 h pendant la période estivale.

1.10.1 Piste 05/23

CYRQ est constitué d’une seule piste asphaltée (piste 05/23) d’une longueur de 9006 pieds et d’une largeur de 150 pieds. L’altitude de l’aéroport est de 199 pieds au-dessus du niveau de la mer. Au moment de l’accident, la piste 23 était en service.

La piste 05/23 est équipée des feux suivants :

1.10.1.1 Balisage lumineux d’aérodrome télécommandé

La piste 05/23 est pourvue d’un balisage lumineux d’aérodrome télécommandé (ARCAL) de type K, qui permet aux pilotes d’allumer les feux d’aérodrome et d’ajuster leur intensité, à l’exclusion des feux d’obstacles. On peut varier l’intensité lumineuse en appuyant 7, 5 ou 3 fois sur le bouton du microphone sur la fréquence 122,35 MHz dans un délai de 5 secondes pour obtenir respectivement un balisage de haute intensité (100 %), de moyenne intensité (30 %) ou de basse intensité (10 %).

À 0 h 02 min 25 s, le passager-instructeur a allumé l’ARCAL en appuyant 7 fois sur le bouton du microphone quand l’aéronef était en approche finale. Quatre minutes plus tard, le passager-instructeur a fait une 2e série de clics pour réduire l’intensité du balisage lumineux à l’intensité moyenne.

1.10.2 Services de sauvetage et de lutte contre les incendies

CYRQ ne fournit pas de services de sauvetage et de lutte contre les incendies d’aéronefs Note de bas de page 10. Le service d’incendie de la Ville de Trois-Rivières assure la protection incendie en cas d’accident ou d’incident à l’aéroport. Le service est accordé en priorité aux incendies de la Ville de Trois-Rivières et, si le service est disponible, son temps de déplacement à l’aéroport est d’environ 10 minutes.

Au moment de l’événement, 2 camions de pompiers étaient présents à l’aéroport à la demande d’un exploitant étranger qui effectuait un arrêt à CYRQ vers 0 h 30. En plus, le service UNICOM était offert en dehors des heures normales de service.

1.11 Enregistreurs de bord

L’aéronef n’était muni ni d’un enregistreur de données de vol ni d’un enregistreur de conversations de poste de pilotage, et la réglementation en vigueur n’exigeait ni l’un ni l’autre.

1.12 Renseignements sur l’épave et sur l’impact

L’examen du site de l’accident et de l’épave a permis de déterminer que l’aile gauche a percuté le sol en premier, suivi du nez de l’aéronef et de l’aile droite. L’aéronef a terminé sa course à l’endroit sur un cap de 90°, à une distance de 4460 pieds du seuil de la piste 23 et à 222 pieds au sud de la piste (figure 8).

Figure 8. Épave du Piper PA-23-250 à l’étude (Source : BST)
Épave du Piper PA-23-250 à l’étude (Source : BST)

L’examen de l’épave a permis de déterminer que le train d’atterrissage était rétracté et que les volets étaient à la position UP au moment de l’événement. Les 2 pales de l’hélice gauche étaient tordues vers l’arrière et les 2 pales de l’hélice droite étaient sectionnées à environ 29 cm du bout de chacune des pales. Par conséquent, en raison de la nature et la différence entre les dommages à l’hélice gauche et à l’hélice droite, la traction des moteurs est devenue asymétrique.

Le distributeur hydraulique a été récupéré. Toutefois, il n’a pas été possible de déterminer la cause de l’anomalie du levier du train d’atterrissage en raison des dommages causés par l’incendie après impact.

L’examen de la piste 23 a permis de constater qu’il y avait 73 marques d’impact causées par les pales de l’hélice du moteur gauche et 65 marques d’impact causées par les pales de l’hélice du moteur droit. Les premières marques ont été relevées à 2980 pieds du seuil de la piste et les marques subséquentes s’étalaient sur une distance d’environ 200 pieds (figure 9).

Les images de la caméra de surveillance aéroportuaire ont permis au laboratoire du BST d’effectuer les calculs nécessaires pour établir la vitesse de l’aéronef sur la piste ainsi qu’au moment du premier impact des pales avec la surface de la piste. Ces données combinées aux autres renseignements recueillis au cours de l’enquête ont permis d’établir la séquence des événements significatifs lors du posé-décollé (annexe A).

Figure 9. Piste 23 à CYRQ, avec image en médaillon montrant l’emplacement de l’épave (Source : Google Earth, avec annotations du BST)
Piste 23 à CYRQ, avec image en médaillon montrant l’emplacement de l’épave (Source : Google Earth, avec annotations du BST)

1.13 Renseignements médicaux et pathologiques

Rien n’indique que les performances du pilote et du passager-instructeur avaient été affectées par des facteurs physiologiques.

1.14 Incendie

Lors de l’impact, l’aile droite s’est détachée du fuselage et le réservoir de carburant s’est fissuré, laissant s’échapper le carburant, qui s’est enflammé. Les flammes se sont propagées rapidement à la cabine de l’aéronef.

Les pompiers, qui étaient présents sur le site de l’aéroport à la demande d’un autre aéronef qui était en rapprochement, sont arrivés sur les lieux à 0 h 13, soit environ 4 minutes après l’accident. Ils sont intervenus auprès des 2 occupants blessés et ont éteint l’incendie.

1.14.1 Préoccupations relatives aux incendies après impact

À la suite de son enquête sur des problèmes de sécurité aéronautique portant sur les incendies après impact faisant suite à des accidents de petits aéronefsNote de bas de page 11, le BST a déterminé qu’il existe un nombre important de petits aéronefs en service et que leurs moyens de défense contre les incendies après impact, dans les cas d’accidents offrant des chances de survie, sont insuffisants et vont le demeurer jusqu’à la mise en place de mesures de prévention ayant pour objet de réduire les risques. Par conséquent, le Bureau a recommandé que :

afin de réduire le nombre d’incendies qui se déclarent après des accidents offrant des chances de survie mettant en cause de nouveaux avions de production ayant une masse inférieure à 5700 kg, Transports Canada, la Federal Aviation Administration et d’autres organismes de réglementation étrangers effectuent des évaluations des risques des éléments qui suivent afin de déterminer la faisabilité du montage en rattrapage sur les aéronefs existants :

  • certains moyens techniques permettant d’éviter que des articles portés à haute température ne deviennent des sources d’incendie;
  • des procédés techniques conçus pour neutraliser la batterie et le circuit électrique à l’impact pour empêcher les arcs électriques à haute température d’être une source d’incendie;
  • la présence de matériaux isolants protecteurs ou sacrificiels aux endroits exposés à la chaleur ou aux étincelles dues au frottement lors d’un accident pour empêcher les étincelles de frottement d’être une source d’incendie;
  • certains composants du circuit carburant résistant à l’écrasement capables de confiner le carburant.
Recommandation A06-10 du BST

En date de mars 2017, lors de la dernière réévaluation de la réponse à cette recommandation par le Bureau, TC et la Federal Aviation Administration ne prévoyaient mener aucune autre activité pour remédier aux risques relevés dans la recommandation A06-10. Pourtant, le Bureau estime que les risques dont il est question dans la recommandation A06-10 n’ont pas diminué et qu’ils demeurent importants.

De janvier 2015 à mars 2017 au Canada, il y a eu 4 accidents d’aéronef offrant des chances de survie qui ont donné lieu à un incendie après impact; leurs occupants ont subi des blessures de gravité variable (2 blessures mineures, 2 blessures graves et 2 morts)Note de bas de page 12.

Par conséquent, le Bureau a jugé que la réponse à la recommandation A06-10 dénotait une attention non satisfaisanteNote de bas de page 13.

Suite à la dernière réévaluation de cette recommandation en mars 2017, il y a eu 4 autres accidents d’aéronef offrant des chances de survie qui ont donné lieu à un incendie après impact; leurs occupants ont subi des blessures de gravité variable (3 blessures mineures, 2 blessures graves et 1 mort)Note de bas de page 14.

1.15 Questions relatives à la survie des occupants

Les 2 occupants n’ont pas réussi à ouvrir le hublot issue de secours. Puisque le hublot a été complètement détruit par l’incendie après impact, il n’a pas été possible de déterminer si une défectuosité du mécanisme d’ouverture est survenue, ou si la déformation du fuselage causée par la force de l’impact a empêché son ouverture.

1.15.1 Radiobalise de repérage d’urgence

L’aéronef était muni d’une ELT ARTEX de modèle ELT 200 (numéro de pièce 453-0190, numéro de série EO1591) pouvant transmettre uniquement sur la fréquence 121,5 MHz. Depuis le 1er février 2009, les satellites du Cospas-SarsatNote de bas de page 15 ne détectent plus les signaux émettant sur la fréquence 121,5 MHz; ils ne détectent que les signaux émettant sur la fréquence 406 MHzNote de bas de page 16.
Aucun signal de détresse n’a été reçu, et il n’a pas été possible d’en déterminer la cause, car la radiobalise a été complètement détruite par l’incendie.

1.16 Essais et recherche

1.16.1 Rapports de laboratoire du BST

Le BST a produit le rapport de laboratoire suivant dans le cadre de la présente enquête :

1.16.2 Essais d’ouverture du hublot issue de secours

Les enquêteurs du BST ont effectué des essais d’ouverture du hublot issue de secours en utilisant la poignée sur 2 autres aéronefs Piper PA-23-250 appartenant à Cargair ltée.

Suite aux essais et aux données recueillies, l’enquête a permis de relever les faits suivants :

Figure 10. Mouvement de la poignée du hublot issue de secours du point A au point C avec le point de résistance B (Source : BST)
Mouvement de la poignée du hublot issue de secours du point A au point C avec le point de résistance B (Source : BST)
Figure 11. Emplacement de la poignée du hublot issue de secours lors des essais (Source : BST)
Emplacement de la poignée du hublot issue de secours lors des essais (Source : BST)

1.17 Renseignements sur les organismes et sur la gestion

1.17.1 Exploitant

Cargair ltée est une école de pilotage qui détient un certificat d’exploitation d’unité de formation au pilotage valide, assujetti à la sous-partie 406 du RAC, ainsi qu’un certificat d’organisme de maintenance agréé délivré par TC. Elle est également autorisée à offrir le programme de formation intégrée de pilote de ligne – avion (ATP-A). Au moment de l’événement, l’entreprise exploitait une flotte de 55 aéronefs, dont 7 aéronefs Piper PA-23-250.

1.17.1.1 Période de service des instructeurs

Les écoles de pilotage comme Cargair ltée sont assujetties aux règlements de la sous-partie 406 du RAC. Toutefois, il n’existe aucun règlement ou norme visant le temps de vol et temps de service de vol dans cette sous-partie du RAC. Les règles générales d’utilisation et de vol des aéronefs du RAC, quant à elles, interdisent qu’une personne assume la fonction de membre d’équipage de conduite ou qu’on assigne la fonction de membre d’équipage de conduite à une personne s’il y a des raisons de croire qu’elle n’est pas apte au travailNote de bas de page 18.

Cargair ltée assure la planification et la répartition du travail quotidien des instructeurs, et assure la surveillance de leur charge de travail afin de leur éviter des heures ou des charges de travail excessives. Cependant, il n’y a pas de lignes directrices documentées qui permettent d’encadrer l’horaire de travail des instructeurs. Ceux-ci sont responsables de s’assurer qu’ils sont aptes au travail et peuvent échanger ou refuser un vol afin de minimiser le risque de fatigue.

1.17.1.2 Commandant de bord sous supervision

Afin de satisfaire aux exigences pour obtenir une licence de pilote de ligne dans leurs pays, certains étudiants étrangers doivent effectuer un minimum de 10 heures à titre de commandant de bord sur multimoteur, dont un minimum de 5 heures effectuées de nuit. Certains pays acceptent que ces heures soient effectuées à titre de commandant de bord sous supervision avec un instructeur à bord.

Au Canada, la norme 421 du RAC permet, dans des conditions précises, que les copilotes puissent comptabiliser des heures de vol à titre de commandant de bord lorsque celles-ci sont effectuées sous la supervision d’un commandant de bordNote de bas de page 19. Toutefois, il n’existe aucune provision règlementaire similaire qui pourrait s’appliquer aux vols effectués par les unités de formation au pilotage comme Cargair ltée.

Le programme de formation intégrée de pilote de ligne chez Cargair ltée pour ces pilotes étrangers prévoit que, lorsque les étudiants ont obtenu leur licence de pilote professionnel, la qualification de vol aux instruments et la qualification multimoteur, ils effectuent des vols VFR de jour et de nuit en solo à bord de l’aéronef Piper PA-23-250. En raison du peu d’expérience globale des pilotes et par mesure de sécurité, Cargair ltée a décidé qu’un instructeur qualifié serait présent à bord comme passager pour ces vols. Dans ce contexte, l’instructeur n’est pas un membre d’équipage et ne consigne pas ces heures de vol dans son carnet de vol. Son rôle consiste à superviser la planification et l’exécution du vol, ainsi qu’à assister le pilote si nécessaire, mais n’intervient seulement qu’en cas d’urgence, si la situation l’exige. Les pilotes du programme et les instructeurs étaient informés verbalement par la compagnie des rôles et des attentes en lien avec l’exécution et la surveillance de ces vols avec un commandant de bord sous supervision.

1.17.1.3 Procédures d’exploitation normalisées

Cargair ltée a élaboré des procédures d’exploitation normalisées (SOP) pour les opérations multimoteur (sur les aéronefs Piper PA-23-250) et IFR. L’objectif de ces SOP est la standardisation des procédures, afin que les pilotes qui n’ont jamais travaillé ensemble utilisent l’aéronef de façon similaire. Ces SOP mettent l’accent sur la nécessité d’étudier et de mémoriser toutes les procédures qui y sont incluses. De plus, les SOP stipulent entre autres que, dans le cadre de ces vols de formation en double commande, l’instructeur est le pilote commandant de bord et que toutes les décisions finales lui appartiennentNote de bas de page 20. Les SOP dans les écoles de pilotage ne sont pas revues ni approuvées par TC.

1.17.1.3.1 Exposé avant le décollage

Essentiellement, l’exposé avant le décollage confirme le type de décollage, la piste en usage, l’application de la puissance, les vitesses de décollage, les mesures à prendre en cas de problème et la procédure de départ, y compris les procédures en cas de panne de communication.

La procédure en cas d’anomalie avant la vitesse de rotation (décision de décollage) spécifie que le décollage doit être interrompu et la procédure d’urgence au sol doit être exécutéeNote de bas de page 21.

1.17.1.3.2 Décollage interrompu

Selon les SOP de Cargair ltée, on doit annoncer et interrompre un décollage dans les situations suivantes [traduction] :

  • LE MOTEUR SUBIT DES RATÉS PENDANT LA COURSE AU DÉCOLLAGE;
  • IL Y A UNE PERTE DE MAÎTRISE DE L’AÉRONEF PENDANT LA COURSE AU DÉCOLLAGE;
  • LE VOYANT DE PORTE OUVERTE EST ILLUMINÉ;
  • IL Y A UNE INDICATION DE VITESSE OU DE DÉBIT DE CARBURANT ANORMAL;
  • IL Y A UNE INCURSION DE PISTE OU DU TRAFIC SUR LA PISTENote de bas de page 22.

La procédure pour interrompre le décollage dans les SOP de Cargair ltée consiste à [traduction] :

  • MAÎTRISER L’AÉRONEF, METTRE LES MOTEURS AU RALENTI ET APPLIQUER LES FREINS;
  • AVISER LE CONTRÔLE DE LA CIRCULATION AÉRIENNE DÈS QUE POSSIBLE;
  • S’IMMOBILISER SUR LA PISTE OU QUITTER LA PISTE SUR UNE VOIE DE CIRCULATION, SELON LA SITUATION;
  • ÉVACUER L’AÉRONEF SI NÉCESSAIRE […]Note de bas de page 23.
1.17.1.3.3 Décollage normal

La procédure de décollage normal dans les SOP de Cargair ltée consiste à [traduction] :

  1. mettre les gaz à un régime d’environ 1500 tr/min :
    1. vérifier les paramètres moteur en vert
    2. et annoncer ALL IN GREEN [tout en vert]
  2. mettre les gaz à pleine puissance, vérifier la vitesse, et annoncer :
    1. MAX POWER SET [puissance maximale réglée]
    2. FUEL FLOW ALIVE [débit de carburant actif]
    3. AIRSPEED ALIVE [vitesse anémométrique active]
    4. à 80 mi/h, VMC [vitesse minimale de contrôle]
    5. à 85 mi/h, ROTATE [rotation] en tirant légèrement sur le manche
  3. Lorsque l’aéronef est en vol, accélérer à VYSE, puis à VYNote de bas de page 24, vérifier et annoncer :
    POSITIVE RATE OF CLIMB [vitesse ascensionnelle positive] et GEAR UP [train d’atterrissage rentré] […]Note de bas de page 25
1.17.1.3.4 Volets à l’atterrissage

Pendant une approche IFR ou une approche simulée, les volets sont placés à la position ¼ lorsque l’aéronef amorce un virage conventionnel ou lorsqu’il est sur un cap pour intercepter l’axe d’approche finale si le virage conventionnel n’est pas utilisé. Les volets sont par la suite baissés à la position maximale à 500 pieds au-dessus du sol lorsque l’aéronef est en vol VFR, ou lorsque la piste est en vue en conditions météorologiques de vol aux instrumentsNote de bas de page 26.

Dans le cadre d’un posé-décollé, l’atterrissage se fait avec les volets à la position ¼. Les volets doivent être remontés immédiatement après l’atterrissage par l’instructeur, selon une entente préalable avec l’étudiant, avant de redécoller.

1.17.1.3.5 Listes de vérification avant l’atterrissage

Trois voyants verts s’illuminent au tableau de bord lorsque le train d’atterrissage est abaissé et verrouillé. D’après les listes de vérification Before Landing (avant l’atterrissage) et Final Checks (dernières vérifications), on doit vérifier 3 fois que ces voyants sont illuminés (figure 12).

Figure 12. Liste de vérification Normal Checklist Piper Aztec PA-23 (Source : Cargair ltée)
Liste de vérification Normal Checklist Piper Aztec PA-23 (Source : Cargair ltée)
1.17.1.3.6 Atterrissage

La procédure d’atterrissage contient la note suivante [traduction] : « la procédure normale consiste à effectuer des arrêts-décollés au lieu de posés-décollés Note de bas de page 27 ». Toutefois, lors de sa formation sur les aéronefs Piper PA-23-250, le pilote a effectué des posés-décollés à plusieurs reprises avec ses instructeurs.

1.18 Renseignements supplémentaires

1.18.1 Illusion vestibulaire somatogravique

L’illusion somatogravique est un phénomène qui se produit par mauvaise visibilité ou en obscurité, alors qu’il y a absence de repères visuels. Cette illusion se produit lorsqu’une personne fait appel aux organes sensoriels de l’oreille interne pour assurer son équilibre et, en l’absence de repères visuels, les signaux transmis par ces organes peuvent produire une perception erronée. Une accélération au décollage stimule les organes otolithiques du système vestibulaire similaire à une inclinaison de la tête vers l’arrière et génère une perception d’assiette plus élevée qu’elle ne l’est en réalité, et peut ainsi créer une impression que l’aéronef est en montée.

Dans l’événement à l’étude, le BST a estimé que l’augmentation de la puissance pour initier le décollage a produit une accélération qui a généré une assiette en cabré perçue de plus de 10° que l’assiette réelle.

1.18.2 Effet de surprise et réflexe de sursaut dans le poste de pilotage

L’effet de surprise et de sursaut peut affecter la performance humaine allant de la distraction à des actions inappropriées ou des prises de décision trop hâtives. La surprise peut être définie comme étant une réponse cognitive et émotionnelle à une situation inattendue qui découle de la disparité entre ce qui est attendu et ce qui est perçu. L’effet de surprise tend à interrompre une action et à générer une canalisation de l’attention sur certains éléments au détriment de la situation globale, et peut ainsi mener à des actions inappropriées.

Le sursaut peut être défini comme un réflexe physiologique involontaire ou une réponse conditionnée qui découle d’un stimulus intense soudain. Le réflexe de sursaut peut générer des actions hâtives qui peuvent être inappropriées pour la situationNote de bas de page 28.

1.19 Techniques d’enquête utiles ou efficaces

Sans objet.

2.0 Analyse

Le pilote détenait les licences et les qualifications requises pour effectuer ce vol voyage de nuit selon les règles de vol à vue, conformément à la réglementation en vigueur. Ce vol était désigné comme un vol avec un commandant de bord sous supervision du programme de formation intégrée de pilote de ligne de Cargair ltée pour pilotes étrangers. Un passager-instructeur était à bord, mais il n’était pas un membre d’équipage.

Rien n’indique que les performances du pilote avaient été affectées par la fatigue.
L’enquête a révélé qu’une anomalie du levier du train d’atterrissage a empêché la rétraction des volets après l’atterrissage, ce qui a déclenché une série d’événements qui ont conduit à un impact des hélices avec la surface de la piste, suivi d’une perte de maîtrise de l’aéronef.

Par conséquent, l’analyse portera sur les éléments suivants :

2.1 Temps en devoir des instructeurs de vol

Il n’existe aucun règlement ni aucune norme visant spécifiquement le temps de vol et le temps de service de vol pour les instructeurs (y compris les passagers-instructeurs) qui travaillent dans les unités de formation au pilotage. Toutefois, Cargair ltée assure la planification et la répartition du travail quotidien des instructeurs, et assure la surveillance de leur charge de travail afin de leur éviter des heures ou des charges de travail excessives. Les données recueillies lors de cette enquête soulèvent le potentiel d’éveil continu prolongé, notamment si des vols de nuit précèdent des vols prévus pour le lendemain matin. Une courte période de sommeil entre 2 quarts de travail augmente le risque de fatigue. Dans un contexte d’école de formation avec des vols de jour et de nuit, des changements d’horaire et des conditions météorologiques propices aux vols après une période inclémente, les instructeurs pourraient être en éveil continu pour de longues périodes et pour des journées consécutives.

Dans le cadre du vol à l’étude, malgré un éveil continu de 17 heures du passager-instructeur, l’absence d’autres facteurs liés à la fatigue et sa charge de travail modérée ont permis d’établir que ses performances n’ont probablement pas été affectées par un état de fatigue. Toutefois, si des instructeurs sont affectés à des tâches de formation ou de supervision en vol menant à un état d’éveil continu prolongé, notamment pendant des jours consécutifs, le risque d’événements liés à la fatigue est accru.

2.2 Vols avec un commandant de bord sous supervision

En l’absence d’un cadre règlementaire spécifique aux vols avec un commandant de bord sous supervision de leur programme de formation, Cargair ltée avait élaboré un programme d’encadrement pour ces vols et informait verbalement les pilotes et les instructeurs de leurs rôles et des attentes pour l’exécution de ces vols. Dans ce contexte, le pilote du vol à l’étude était le commandant de bord et l’instructeur n’était pas un membre d’équipage. Néanmoins, la compagnie s’attendait à ce que l’instructeur supervise le vol et intervienne seulement en cas d’urgence, si la situation l’exigeait. L’instructeur venait de compléter sa formation d’instructeur sur les aéronefs Piper PA-23-250. Le vol dans l’événement à l’étude était son 2e vol de supervision d’un commandant de bord sous supervision sur ce type d’aéronef.

Bien que le pilote était conscient qu’il volait à titre de commandant de bord, il est probable que la présence à bord de l’instructeur ait eu une influence sur ses actions et ses décisions pendant le vol. Il est également probable que l’instructeur ait eu de la difficulté à assumer le rôle passif de passager, puisqu’il devait tout de même superviser le vol et être prêt à intervenir si la situation l’exigeait.

Le pilote avait effectué des posés-décollés en solo sur des aéronefs monomoteurs; toutefois, il n’en avait jamais fait en solo sur les aéronefs multimoteurs de Cargair parce que Cargair ltée ne permet pas les vols en solo sur leurs PA-23-250.

Alors que l’aéronef s’approchait de l’aéroport international de Québec/Jean Lesage (CYQB) (Québec), le pilote et le passager-instructeur ont convenu que le passager-instructeur se chargerait des communications radio avec les services de la circulation aérienne. Même s’il s’agissait d’un partage efficace des tâches dans un contexte de la gestion de la charge de travail du pilote, ce partage pourrait avoir renforcé l’idée du pilote qu’il n’effectuait pas un vol complètement en solo.

L’interprétation des consignes verbales de la compagnie sur le déroulement des vols avec un commandant de bord sous supervision par le pilote et par le passager-instructeur leur a permis de croire que ce dernier pouvait superviser le vol tout en ayant un rôle actif à bord, ce qui les rapprochait d’un contexte de vol d’entraînement habituel. En rapprochement de l’aéroport de Trois-Rivières (CYRQ) (Québec), le pilote et le passager-instructeur ont convenu d’effectuer un posé-décollé tel que pratiqué lors des vols d’entraînement avec instructeur sur un aéronef Piper PA-23-250. Dans ce contexte, l’atterrissage allait s’effectuer avec les volets à la position ¼ et l’instructeur allait remonter les volets après l’atterrissage. Ainsi, dans le cadre du vol à l’étude, le pilote et le passager-instructeur partageaient une interprétation commune des consignes et avaient convenus d’un plan sans ambigüité. Toutefois, si les procédures, les rôles et les responsabilités des passagers-instructeurs et des pilotes lors des vols avec un commandant de bord sous supervision ne sont pas clairement consignés, les interprétations risquent d’être variées, ce qui pourrait créer de la confusion à bord et ainsi compromettre la sécurité des vols.

2.3 Anomalie du levier du train d’atterrissage

Puisqu’on avait convenu de faire un posé-décollé à CYRQ, l’atterrissage allait être effectué avec les volets à la position ¼. Pour régler les volets à cette position, le pilote a utilisé la technique habituelle, c’est-à-dire de baisser le levier des volets à la position DOWN pendant 3 secondes avant de le remettre à la position centrale. Cependant, l’enquête a permis de déterminer que les volets étaient réglés à la position ½ et que, pour une raison indéterminée, ils sont demeurés à cette position pour l’atterrissage.

Lors de l’approche finale, le levier du train d’atterrissage a été abaissé à la position DOWN, mais il n’est pas revenu automatiquement à la position centrale, une fois le train d’atterrissage abaissé et verrouillé. Puisque le train d’atterrissage a la priorité hydraulique sur les volets, tant que le levier du train n’est pas revenu à la position centrale, le déplacement du levier des volets n’aura aucun effet, car aucune pression hydraulique ne sera acheminée aux volets (annexe B).

2.4 Anomalie des volets

Trois voyants verts s’illuminent au tableau de bord lorsque le train d’atterrissage est abaissé et verrouillé. D’après les listes de vérification Before Landing (avant l’atterrissage) et Final Checks (dernières vérifications), on doit vérifier 3 fois que ces voyants sont illuminés. Toutefois, ces listes n’exigent pas de vérifier que le levier du train est revenu à la position centrale. Puisque l’anomalie du levier du train n’a pas été détectée et que les volets n’avaient pas à être repositionnés avant l’atterrissage, ni le pilote ni le passager-instructeur n’ont remarqué que les volets étaient bloqués.

Suite à l’atterrissage, le passager-instructeur a placé le levier des volets en position UP, comme convenu lors de l’approche et selon la procédure normale exécutée lors d’un posé-décollé. Il a ensuite remarqué que les volets étaient demeurés à la position d’approche et, par la suite, que le levier du train d’atterrissage n’était pas revenu automatiquement à la position centrale. L’enquête a permis de déterminer que l’anomalie du levier du train d’atterrissage, qui n’est pas revenu automatiquement à la position centrale, a empêché la rétraction des volets après l’atterrissage.

2.5 Gestion des anomalies au décollage

Selon les procédures d’exploitation normalisées (SOP), si une anomalie survient avant la vitesse de décision ROTATE (rotation), le décollage sera interrompu. Un rappel de cette instruction est compris dans l’exposé avant le décollage. Pendant la course au décollage, il y a peu de temps pour reconnaître, analyser, puis résoudre les anomalies. Ainsi, les SOP préconisent l’arrêt immédiat du décollage, ce qui permet d’analyser l’anomalie au sol, sans pression temporelle, et d’éviter que les pilotes ne posent des gestes inappropriés, surtout s’ils sont surpris ou sursautent, comme dans l’événement à l’étude.

Afin d’essayer de comprendre les gestes qui ont été posés par le passager-instructeur et le pilote, il faut s’attarder sur la perception et la compréhension qu’ils avaient de la situation au moment où leurs gestes ont été posés, dans un contexte de posé-décollé de nuit. Lors de la course au décollage du vol à l’étude, le passager-instructeur a constaté que les volets étaient bloqués en position d’approche avant que l’appel ROTATE n’ait été fait. L’anomalie a créé une situation qui était à l’encontre des attentes du passager-instructeur, ce qui a pu créer un effet de surprise. Cet effet tend à interrompre une action (soit la surveillance du décollage), à générer une canalisation de l’attention sur certains éléments au détriment de la situation globale et à mener à des actions hâtives. Ainsi, à ce moment précis et potentiellement sous l’influence de l’effet de surprise, le passager-instructeur a entrepris de résoudre l’anomalie des volets (qui étaient bloqués en position abaissée) pendant la course au décollage, avant la vitesse de décision de décollage.

Alors que le passager-instructeur canalisait son attention sur la cause de l’anomalie des volets, le pilote a augmenté la puissance des moteurs pour le décollage pendant que l’aéronef roulait sur la piste à environ 65 mi/h. L’augmentation du souffle des hélices sur les ailes alors que les volets étaient toujours à la position d’approche (½) a eu pour effet d’augmenter la portance et, par conséquent, de réduire le poids de l’aéronef sur le train d’atterrissage. Cette augmentation de la portance a créé un léger soulèvement de l’aéronef. En raison du peu de repères visuels la nuit et du fait que l’attention du passager-instructeur était portée sur l’intérieur de l’aéronef, ce soulèvement a donné l’impression d’un décollage prématuré.

Une accélération peut créer une illusion somatogravique si des repères visuels externes ne sont pas perçus simultanément. L’accélération de l’aéronef sur la piste a généré une perception vestibulaire en cabré de plus de 10° plus élevés que l’assiette réelle de l’aéronef. Puisque l’attention du passager-instructeur était portée sur l’intérieur de l’aéronef, il est fort probable qu’il ait également subi les effets de cette illusion. Par conséquent, l’impression d’être en vol à basse vitesse combinée à l’illusion d’assiette en cabré prononcée ont influencé le passager-instructeur à placer le levier du train à la position UP alors qu’en réalité, l’aéronef roulait encore sur la piste.

L’allègement du poids de l’aéronef sur le train d’atterrissage en raison de l’augmentation de la portance lors de la course au décollage a été suffisant pour désactiver la valve anti-rétraction et lancer le cycle de rétraction. Le train d’atterrissage s’est rétracté lors de la course au décollage, l’aéronef est descendu et les hélices sont entrées en contact avec la surface de la piste, leur causant des dommages asymétriques. À ce moment, l’aéronef était aux environs de la vitesse de décision du décollage et l’appel ROTATE n’avait pas encore été fait. L’impact des pales des hélices a créé un bruit fort inhabituel, des dommages aux hélices et des vibrations importantes.

Lors de stimulus intenses soudains, le réflexe de sursaut peut générer des actions hâtives qui peuvent être inappropriées pour la situation. Le pilote, qui n’était pas conscient de l’anomalie de levier du train, que les volets étaient demeurés à la position d’approche, ni que le passager-instructeur avait placé le levier du train à la position UP, a été surpris par la descente de l’aéronef sur la piste, le bruit très fort et les vibrations importantes. Par conséquent, il est probable qu’un réflexe de sursaut du pilote ait provoqué une action de recul (en cabré) sur le manche qui était suffisant pour effectuer le décollage de l’aéronef avec les volets à la position ½, avant la vitesse de décision de décollage.

L’aéronef s’est retrouvé en vol à faible vitesse (environ 80 mi/h). Les dommages causés aux hélices se sont soldés par une traction réduite et asymétrique : le moteur droit avait une traction supérieure à celle du moteur gauche. Par conséquent, l’aéronef a immédiatement commencé un virage à gauche, malgré la déflexion maximale du palonnier et des ailerons vers la droite.

Environ 6 secondes après le décollage, le train d’atterrissage s’est complètement rétracté et le levier du train est revenu automatiquement à la position centrale. Puisque le levier des volets était toujours en position UP, les volets ont commencé à monter, réduisant la portance de l’aéronef. Ainsi, la réduction de la portance créée par la rétraction des volets alors que l’aéronef était dans un régime de vol à faible vitesse et à faible traction motrice asymétrique s’est soldée par la perte de maîtrise de l’aéronef.

2.6 Évacuation par le hublot issue de secours

En raison des flammes dans les environs de l’aile droite, côté sur lequel se trouve la porte principale, les 2 occupants se sont dirigés vers l’arrière pour évacuer l’aéronef par le hublot issue de secours situé derrière le siège du pilote. Toutefois, ils n’ont pas réussi à ouvrir le hublot en utilisant la poignée. Il n’a pas été possible de vérifier le fonctionnement du mécanisme du hublot issue de secours, car il a été complètement détruit par l’incendie qui s’en est suivi.

Afin de vérifier le fonctionnement du mécanisme d’ouverture du hublot issue de secours, y compris la poignée, des essais sur d’autres aéronefs Piper PA-23-250 similaires ont été effectués par les enquêteurs du BST. Ces essais ont démontré que l’application d’une force importante était nécessaire pour utiliser la poignée, même si la structure entourant le hublot issue de secours était intacte dans les aéronefs soumis aux essais. De plus, en raison des changements de résistance dans le mécanisme de la poignée, il faut s’assurer de tourner la poignée jusqu’au bout, afin de dégager le hublot de la structure du fuselage. Il est possible que, sous la pression de l’urgence, le pilote et le passager-instructeur n’aient pas réalisé que la poignée n’avait pas été tournée jusqu’au bout.

Les exercices pratiques permettent aux pilotes d’être mieux préparés en cas d’urgence et permettent de mieux informer les passagers sur les particularités relatives à l’ouverture des issues de secours avant le vol. Ni le pilote ni le passager-instructeur n’avaient effectué d’exercices pratiques d’ouverture du hublot issue de secours pendant leur formation sur l’aéronef.

Étant donné la force de l’impact avec le sol de l’aéronef à l’étude, il est probable que les dommages ou la déformation de la structure de l’aéronef aient coincé le hublot en place. Toutefois, si les pilotes ne pratiquent pas l’ouverture des issues de secours, ils pourraient éprouver de la difficulté à les ouvrir et risquent de ne pas informer adéquatement les passagers sur la manière de les ouvrir en cas d’urgence, ce qui réduit ainsi les chances d’évacuer l’aéronef rapidement.

3.0 Faits établis

3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

Il s’agit des conditions, actes ou lacunes de sécurité qui ont causé l’événement ou y ont contribué.

  1. Une anomalie du levier du train d’atterrissage, qui n’est pas revenu automatiquement à la position centrale, a empêché la rétraction des volets après l’atterrissage.
  2. Potentiellement sous l’influence de l’effet de surprise, le passager-instructeur a entrepris de résoudre l’anomalie des volets (qui étaient bloqués en position abaissée) pendant la course au décollage, avant la vitesse de décision de décollage.
  3. L’impression d’être en vol à basse vitesse combinée à l’illusion d’assiette en cabré prononcée ont influencé le passager-instructeur à placer le levier du train à la position UP alors qu’en réalité, l’aéronef roulait encore sur la piste.
  4. Le train d’atterrissage s’est rétracté lors de la course au décollage, l’aéronef est descendu et les hélices sont entrées en contact avec la surface de la piste, leur causant des dommages asymétriques.
  5. Il est probable qu’un réflexe de sursaut du pilote ait provoqué une action de recul (en cabré) sur le manche qui était suffisant pour effectuer le décollage de l’aéronef avec les volets à la position ½, avant la vitesse de décision de décollage.
  6. La réduction de la portance créée par la rétraction des volets alors que l’aéronef était dans un régime de vol à faible vitesse et à faible traction motrice asymétrique s’est soldée par la perte de maîtrise de l’aéronef.

3.2 Faits établis quant aux risques

Il s’agit des conditions, des actes dangereux, ou des lacunes de sécurité qui n’ont pas été un facteur dans cet événement, mais qui pourraient avoir des conséquences néfastes lors de futurs événements. 

  1. Si des instructeurs sont affectés à des tâches de formation ou de supervision en vol menant à un état d’éveil continu prolongé, notamment pendant des jours consécutifs, le risque d’événements liés à la fatigue est accru.
  2. Si les procédures, les rôles et les responsabilités des passagers-instructeurs et des pilotes lors des vols avec un commandant de bord sous supervision ne sont pas clairement consignés, les interprétations risquent d’être variées, ce qui pourrait créer de la confusion à bord et ainsi compromettre la sécurité des vols.
  3. Si les pilotes ne pratiquent pas l’ouverture des issues de secours, ils pourraient éprouver de la difficulté à les ouvrir et risquent de ne pas informer adéquatement les passagers sur la manière de les ouvrir en cas d’urgence, ce qui réduit ainsi les chances d’évacuer l’aéronef rapidement.

4.0 Mesures de sécurité

4.1 Mesures de sécurité prises

4.1.1 Cargair ltée

En juillet 2019, Cargair ltée a pris les mesures suivantes :

Le présent rapport conclut l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Il a été officiellement publié le .

Annexes

Annexe A — Événements significatifs

Heure Événement significatif
2237 Début du vol à CYHU
2243 Décollage de la piste 24R à CYHU
2335 Approche finale de la piste 06 à CYQB
0006 Approche finale de la piste 23 à CYRQ
0007:54 Aéronef au seuil de la piste 23 à CYRQ
0008:05 Toucher des roues
0008:07 Sélection du levier des volets à la position UP
0008:11 Le passager-instructeur remarque que les volets sont à la position ½
0008:13 Le passager-instructeur remarque que le levier du train est réglé à la position DOWN
0008:15 Augmentation de la puissance (environ 65 mi/h)
0008:16 Sélection du levier du train d’atterrissage à la position UP
0008:18 Début de l’impact des hélices (environ 90 mi/h)
0008:20 Fin de l’impact des hélices et décollage de l’aéronef (environ 80 mi/h)
0008:26 Le levier du train d’atterrissage revient au centre et les volets se rétractent
0008:28 Fin de la rétraction des volets
0008:28 Perte de la maîtrise de l’aéronef
0008:31 Impact au sol (4460 pieds du seuil et 222 pieds au sud de la piste)
0008:34 Un incendie se déclare dans les environs de l’aile droite de l’aéronef
0008:45 Les occupants sortent de l’épave
0008:49 Les pompiers allument les gyrophares
0009:12 Explosion au site et incendie après impact
0009:12 Les pompiers avisent le personnel à l’aéroport
0011:38 Les pompiers sont escortés au site
0013:00 Les pompiers arrivent au site

Notes :

Annexe B — Mouvement des leviers des volets et du train d’atterrissage lors de l’événement à l’étude

Condition Position des leviers Configuration de l’aéronef
Vol de croisière : les leviers des volets et du train sont à la position centrale, et le train et les volets sont montés.
Approche : le levier des volets est placé à la position DOWN, ce qui initie le déploiement des volets.
Une fois les volets à la position désirée, le pilote remet le levier des volets à la position centrale.
Approche finale : le levier du train d’atterrissage est placé à la position DOWN et le train se déploie.
Une fois le train abaissé et verrouillé, le levier du train n’est pas revenu à la position centrale automatiquement.
Après l’atterrissage : le levier des volets est placé à la position UP, mais les volets ne bougent pas, car le levier du train n’est pas à la position centrale.
Course au décollage : le levier du train est placé à la position UP et le train commence le cycle de rétraction.
Après le décollage : une fois le train monté, le levier du train revient automatiquement à la position centrale et, puisque le levier de volets est toujours à la position UP, les volets commencent à monter.