Rapport d’enquête sur la sécurité du transport aérien A21P0069

Perte de maîtrise à l’envol et renversement
Atleo River Air Service Ltd.
Cessna A185F, C-GYJX
Hydroaérodrome du port de Tofino (Colombie-Britannique)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Le 26 juillet 2021, l’hydravion Cessna A185F d’Atleo River Air Service Ltd. (immatriculation C-GYJX, numéro de série 18503187) effectuait un vol entre l’hydroaérodrome du port de Tofino (Colombie-Britannique) et la communauté de la Première Nation Hesquiaht située à Hot Springs Cove (Colombie-Britannique), avec 1 pilote et 4 passagers à bord. Au cours du décollage, vers 11 h 38, heure avancée du Pacifique, l’aéronef a momentanément pris son envol avant qu’il y ait perte de maîtrise et que l’aéronef ne fasse la roue avant de s’immobiliser à l’envers dans des eaux peu profondes. Le pilote et les passagers ont été en mesure d’évacuer l’aéronef sur une barre de sable. Une passagère a subi des blessures graves; les 3 autres passagers et le pilote ont été légèrement blessés. L’aéronef a été lourdement endommagé. Aucun signal de la radiobalise de repérage d’urgence émettant sur 406 MHz n’a été reçu.

    1.0 Renseignements de base

    1.1 Déroulement du vol

    Le 26 juillet 2021, l’hydravion Cessna A185F d’Atleo River Air Service Ltd. (immatriculation C-GYJX, numéro de série 18503187) devait effectuer plusieurs vols à partir de l’hydroaérodrome du port de Tofino (CAB4), en Colombie-Britannique (C.-B.) Le premier vol de la journée a été retardé en raison du brouillard qui était présent ce matin-là.

    Le pilote est arrivé à la base de la compagnie à 8 h 45Note de bas de page 1, a examiné le carnet de route de l’aéronef pour voir si des anomalies étaient listées et a vérifié les conditions météorologiques à partir du quai, notant que les vents étaient calmes et que le brouillard se levait. Le pilote a effectué une inspection prévol de l’aéronef et a confirmé que les flotteurs ne contenaient pas d’eau. Il a ensuite avitaillé l’aéronef et confirmé la quantité de carburant qui se trouvait dans le réservoir à l’aide d’un bâton gradué.

    Le préposé au suivi des vols a rempli le plan de vol exploitation (OFP) pour le premier vol en utilisant les poids fournis librement par les passagers et a équipé chaque passager d’un vêtement de flottaison individuel (VFI). Le pilote a approuvé le contenu de l’OFP par signature et a emmené les passagers au quai.

    À 9 h 46, une fois les vérifications avant le décollage effectuées avec succès, peu après la marée basseNote de bas de page 2 et avec environ 16 minutes de retard sur l’horaire prévu en raison du brouillard, l’aéronef s’est aligné pour un décollage en direction nord à partir de CAB4 vers une barre de sable connue. Le vol touristique local comprenait une brève escale au lac Megin (C.‑B.), situé à 21 milles marins (NM) au nord-nord-ouest de CAB4; ensuite, l’aéronef est retourné à CAB4 et a atterri en direction est-sud-est à 11 h 16.

    Le vol dans l’événement à l’étude, qui était le deuxième vol de passagers de la journée, était prévu à 11 h pour transporter 4 passagers de CAB4 à la communauté de la Première Nation de Hesquiaht, située à Hot Springs Cove (C.-B.). Ce départ a également été repoussé. Le préposé au suivi des vols a rempli l’OFP pour le deuxième vol en utilisant le poids estimé des passagers et le carburant restant, communiqué par le pilote. Le pilote a examiné et approuvé le contenu de l’OFP par signature avant d’emmener les passagers au quai. Les passagers ont enfilé les VFI pendant que le pilote leur donnait un exposé de sécurité sur la manière de bien les utiliser ainsi qu’une présentation des issues de l’aéronef. Le pilote a chargé les bagages, puis a permis aux passagers de monter à bord, en faisant très attention à l’attribution des sièges pour chaque personne.

    À 11 h 36, l’aéronef s’est aligné sur une trajectoire de décollage vers le nord-ouest, semblable à celle du premier vol, en circulant à partir du quai de la compagnie. L’aéronef était configuré pour un décollage normal avec les volets réglés à 20°Note de bas de page 3. Le décollage a été temporairement retardé en raison de la circulation des navires le long de la trajectoire de décollage choisie; une fois la trajectoire dégagée, le pilote a commencé la course au décollage.

    Pendant la course au décollage, l’aéronef a croisé le sillage d’un navire sur l’eau, ce qui a freiné l’accélération de l’aéronef. Le pilote a déterminé qu’une course au décollage plus longue pourrait être nécessaire et a amorcé un virage à droite sur le redan pour tenter d’atteindre le chenal d’eau profonde marqué par 2 bouées marines. À 11 h 38 min 1 s, le flotteur gauche s’est soulevé de l’eau en premier, suivi du flotteur droit, et l’aéronef a pris son envol et a maintenu le virage à droite. Il n’a pas été possible de déterminer, dans le cadre de cette enquête, si le décollage a été amorcé par un deuxième sillage de navire ou par une commande de vol.

    Le pilote a poussé le manche vers l’avant et a modifié le réglage des volets de 20° à 30°. Environ 5 secondes plus tard, l’aéronef a fait un mouvement brusque de lacet ainsi qu’un roulis à gauche tout en perdant de l’altitude. Les flotteurs ont touché l’eau, suivis immédiatement de l’extrémité de l’aile gauche. L’aéronef a rebondi vers la droite, et l’extrémité de l’aile droite a percuté la surface de l’eau; l’aéronef a alors fait un mouvement de lacet sur la droite et a dérapé à la surface de l’eau. Le flotteur gauche s’est enfoncé dans l’eau, et l’aéronef a fait la roue avant de s’immobiliser à l’envers sur la barre de sable dans environ 1 pied d’eau à 11 h 38 min 10 s (figure 1).

    Figure 1. Aéronef à l’étude reposant à l’envers sur la barre de sable à environ 3100 pieds au nord-ouest du quai de la compagnie (Source : Gendarmerie royale du Canada)
    Image
    Aéronef à l’étude reposant à l’envers sur la barre de sable à environ 3100 pieds au nord-ouest du quai de la compagnie (Source : Gendarmerie royale du Canada)

    Le pilote et les 4 passagers ont pu évacuer l’aéronef par les portes de gauche et de droite de la cabine. Le pilote est retourné dans l’aéronef pour éteindre l’interrupteur général alimentation.

    Immédiatement après l’événement, un plaisancier se trouvant à proximité est arrivé sur les lieux pour fournir une aide d’urgence, suivi de la Garde côtière canadienne. Le pilote et les passagers ont été examinés et transportés jusqu’au rivage de Tofino, où ils ont été emmenés à l’hôpital local pour recevoir des soins supplémentaires. La passagère assise dans le siège avant droit a subi des blessures graves, alors que les 3 autres passagers et le pilote ont subi des blessures mineures.

    L’aéronef a été lourdement endommagé et le carburant restant s’est déversé dans l’eau. Aucun signal provenant de la radiobalise de repérage d’urgence (ELT) émettant sur 406 MHz n’a été reçu.

    1.2 Personnes blessées

    Le pilote et 4 passagers étaient à bord de l’aéronef à l’étude. Le tableau 1 présente un résumé des blessures.

    Tableau 1. Personnes blessées
    Gravité des blessures Membres d’équipage Passagers Personnes ne se trouvant pas à bord de l’aéronef Total selon la gravité des blessures

    Mortelles

    0

    0

    0

    Graves

    0

    1

    1

    Légères

    1

    3

    4

    Total des personnes blessées

    1

    4

    5

    1.3 Dommages à l’aéronef

    L’aéronef a été lourdement endommagé en raison des forces d’impact.

    1.4 Autres dommages

    Environ 250 livres (42 gallons américains) de carburant se sont déversés dans l’eau.

    1.5 Renseignements sur le personnel

    Le pilote dans l’événement à l’étude avait la licence appropriée et répondait aux exigences de mise à jour des connaissances pour le vol, conformément à la réglementation en vigueur.

    Le pilote détenait une licence de pilote de ligne - avion avec la qualification sur hydravion, et un certificat médical valide de catégorie 1. La formation offerte par la compagnie et la formation réglementaire du pilote étaient à jour, et une vérification de compétence du pilote avait été effectuée chez un autre exploitant le 15 janvier 2021 sur un aéronef Cessna 180.

    Le pilote avait précédemment travaillé pendant 2 saisons estivales chez Atleo River Air Service Ltd., jusqu’en octobre 2019. Il est retourné chez l’exploitant le 23 juillet 2021 et a piloté l’aéronef à l’étude pendant un total de 10,7 heures au cours des 3 jours précédant le vol en cause. Cela comprenait le vol effectué plus tôt ce jour-là.

    Le pilote avait suivi une formation sur l’évacuation subaquatique avant l’événement à l’étude.

    Tableau 2. Renseignements sur le personnel
    Licence de pilote

    Licence de pilote de ligne (ATPL)

    Date d’expiration du certificat médical

    1er août 2021

    Heures de vol totales

    17 010,8

    Heures de vol sur type

    8000 (environ)

    Heures de vol au cours des 7 jours précédant l’événement

    10,7

    Heures de vol au cours des 30 jours précédant l’événement

    14,7

    Heures de vol au cours des 90 jours précédant l’événement

    35,9

    Heures de vol sur type au cours des 90 jours précédant l’événement

    10,7

    Heures de service avant l’événement

    3

    Heures hors service avant la période de travail

    13

    1.6 Renseignements sur l’aéronef

    L’aéronef Cessna A185F est un monoplan monomoteur, à aile haute, entièrement métallique, doté d’un moteur à niveau et d’un profil d’aile amélioré par rapport au modèle original du Cessna 185. L’aéronef est certifié pour transporter 1 pilote et 5 passagers.

    L’aéronef à l’étude était équipé d’un moteur Teledyne Continental IO-550-DNote de bas de page 4, d’une hélice tripale McCauley à vitesse constante de 86 pouces de diamètre et de flotteurs Aerocet 3500L.   

    L’aéronef était entretenu conformément au calendrier de maintenance de la compagnie approuvé par Transports Canada (TC) et était équipé pour le vol prévu conformément à la réglementation en vigueur. La dernière inspection aux 100 heures avait été effectuée le 14 juillet 2021; au moment de l’événement, l’aéronef avait accumulé 47,8 heures depuis cette inspection. Il n’y avait aucune défectuosité enregistrée non corrigée.  

    Dans le cadre de l’enquête, on n’a trouvé aucune indication d’un problème mécanique qui aurait limité la performance de l’aéronef au moment de l’événement à l’étude.  

    La masse au décollage de l’aéronef enregistrée sur l’OFP était de 3374 livres et se trouvait dans les limites de centrage.

    Tableau 3. Renseignements sur l’aéronef
    Constructeur

    Cessna Aircraft CompanyNote de bas de page 5

    Type, modèle et immatriculation

    Cessna A185F Skywagon, C-GYJX

    Année de construction

    1976

    Numéro de série

    18503187

    Date d’émission du certificat de navigabilité / permis de vol

    23 septembre 1985

    Total d’heures de vol cellule

    16 907,7 heures

    Type de moteur (nombre)

    Teledyne Continental IO-550-D (1)

    Type d’hélice (nombre)

    McCauley D3A34C401/90DFA-4 (1)

    Masse maximale autorisée au décollage

    3525 livres (1599 kg)

    Type(s) de carburant recommandé(s)

    100 LL, 100

    Type de carburant utilisé

    100 LL

    1.6.1 Modifications de l’aéronef

    L’aéronef a été modifié à plusieurs reprises au moyen de modifications de conception certifiées et approuvées par des certificats de type supplémentaires (CTS). Les modifications ont permis d’augmenter la masse brute maximale au décollage de 3350 livres à 3525 livres, d’améliorer la performance de décollage et d’atterrissage courts (ADAC) et de permettre l’exploitation sur l’eau.

    1.6.1.1 Modifications de l’aile
    1.6.1.1.1 CTS SA93-136 : Rallonges d’ailes d’Air Research Technology Inc.

    La modification de renforcement et de rallonge d’ailes permet de renforcer le longeron de l’aile et d’augmenter l’envergure d’aile de 37,75 pouces, ce qui augmente la surface de l’aile et la portance qui en résulte. Combinée à un moteur de 300 hp et à une flottabilité suffisante, la modification permet d’augmenter la masse maximale certifiée au décollage de 175 livres pour un total de 3525 livres. Le supplément au manuel de vol de l’aéronef (AFMS) pour la modification fournit les renseignements pertinents suivants :

    • vitesse à ne pas dépasser (Vne) réduite à 165 nœuds;
    • limites prescrites de masse et centrage pour une masse maximale au décollage accrue de 3525 livresNote de bas de page 6.

    L’AFMS se réfère au manuel d’utilisation du piloteNote de bas de page 7 du Cessna 185 pour les autres données de performance de l’aéronef.

    1.6.1.1.2 CTS SA2256WE : Profil rapporté de bord d’attaque de Stene Aviation, Inc.

    Le profil rapporté de bord d’attaque, communément appelé l’ensemble ADAC Sportsman, modifie le profil aérodynamique de l’aile afin d’accroître l’efficacité aérodynamique et la résistance aux décrochages aérodynamiques. Cette modification n’était pas assortie d’un AFMS.

    1.6.1.1.3 CTS SA1441WE : Système hypersustentateur de décollage et d’atterrissage courts Robertson de Sierra Industries, Ltd.

    Le système hypersustentateur ADAC Robertson modifie les gouvernes de l’aile en reliant les circuits des volets et des ailerons de manière à augmenter la cambrure de l’aile de l’emplanture à l’extrémité lorsque les volets sont sortis. Le CTS vise aussi à recourber le bord d’attaque pour améliorer le profil aérodynamique; toutefois, étant donné que le Cessna A185F est fabriqué avec un bord d’attaque amélioré, ce modèle d’aéronef est exempté de la modification du bord d’attaque. Le résultat est une performance ADAC améliorée avec une meilleure tenue à basse vitesse et des vitesses de décrochage aérodynamiques plus faibles.

    En 2003, la Safety Investigation Authority de la Finlande a effectué des vols d’essaiNote de bas de page 8 sur un hydravion Cessna A185E équipé du système hypersustentateur ADAC Robertson afin de vérifier la performance aérodynamique de l’aile modifiée. Les vols d’essai simulaient la phase de décollage alors que le moteur était réglé à la puissance maximale et que les volets étaient réglés à 20°, ce qui correspond à un braquage des ailerons à 13° à cause du système de liaison entre les volets et les ailerons. Les essais ont révélé que le réglage des ailerons à 13° avait provoqué un décollement des filets d’air au point d’articulation des ailerons, ce qui avait entraîné périodiquement un décrochage soudain de l’extrémité de l’aile lorsque l’aéronef était cabré de 10 degrés à une vitesse de 50 à 55 nœuds. Le décrochage de l’extrémité de l’aile ne correspondait pas à une séquence normale de décrochage du Cessna 185, durant laquelle le décollement des filets d’air commence à l’emplanture de l’aileNote de bas de page 9 et le contrôle de l’aileron est brièvement maintenu pour assurer la stabilité latérale.  

    L’AFMS indique des vitesses de décrochageNote de bas de page 10 améliorées pour l’aile modifiée, mais les vols d’essai effectués par la Safety Investigation Authority de la Finlande ont mené aux conclusions suivantes [traduction] :  

    Les calculs et les vols d’essai effectués pendant l’enquête ont prouvé que les vitesses de décollage ADAC sont légèrement trop faibles et qu’il existe un risque de décrochage. [...] Il semble très important d’augmenter la vitesse près du sol ou de l’eau à plus de 65 nœuds avant de commencer à monter. On ne devrait pas faire de virage pendant la montée initialeNote de bas de page 11.

    L’AFMS présente également les 2 procédures de décollage suivantes :

    • la procédure de décollage normal avec les volets réglés à 20°;
    • la procédure de décollage à performance maximale avec les volets réglés à 30°Note de bas de page 12.

    Le manuel d’utilisation du pilote du Cessna 185 recommande un réglage des volets au décollage de seulement 20°; les réglages des volets de 30° et 40° ne sont pas approuvésNote de bas de page 13.

    Tous les renseignements et toutes les procédures figurant dans l’AFMS pour le système hypersustentateur ADAC Robertson sont basés sur le fait que l’aéronef est sur roues, sans modifications supplémentaires, et que sa masse maximale au décollage est de 3350 livres. L’AFMS ne fournit ni mise en garde ni avertissement au pilote concernant le changement potentiel des caractéristiques de décrochage de l’aéronef.

    1.6.1.2 Modifications du groupe motopropulseur
    1.6.1.2.1 CTS SA2933SO : Mise à niveau du moteur de Davis Aviation Services

    La mise à niveau du moteur Teledyne Continental Motors IO-550-D permet d’augmenter de 15 hp la puissance maximale continue, qui passe à 300 hp. L’AFMSNote de bas de page 14 concernant la mise à niveau du moteur présente des renseignements pertinents propres au fonctionnement et à la performance du moteur.

    1.6.1.2.2 CTS SA00412WI : Hélice tripale d’Air Plains Services Corporation

    L’installation de l’hélice tripale McCauley de 86 pouces permet d’améliorer la performance et d’atténuer davantage le bruit. L’approbation du CTS de l’hélice exige d’apposer une inscription qui indique au pilote les restrictions applicables au fonctionnement continu; toutefois, la modification n’était pas accompagnée d’un AFMS.

    1.6.1.3 Modifications du train d’atterrissage
    1.6.1.3.1 CTS SA5908NM : Flotteurs d’Aerocet Inc.

    Les flotteurs Aerocet 3500L sont fabriqués en matériaux composites et permettent d’utiliser un aéronef sur l’eau. Les flotteurs sont conçus pour produire une certaine portance en vol, mais le résultat aérodynamique net sur l’aéronef est une augmentation de la traînée. Sur la base d’une masse maximale au décollage de 3350 livres sans modifications supplémentaires, l’AFMS pour les flotteurs prévoit des limites d’aéronef légèrement différentes pour les éléments suivants :

    1.6.2 Modifications multiples

    Les données de performance figurant dans tous les AFMS de l’aéronef en cause ne tenaient pas compte de l’interaction combinée de toutes les modifications apportées, ce qui, par ailleurs, n’était pas exigé par la réglementation.

    Chacune de ces modifications de CTS a été évaluée et approuvée par les organismes de réglementation au terme des essais réalisés sur un aéronef sans autre modification. Par conséquent, la plupart des CTS émis par TC et par la Federal Aviation Administration comprennent une déclaration de compatibilité qui indique, en partie, ce qui suit :

    Conditions : avant de procéder à cette modification, l’installateur doit s’assurer que les relations entre le travail devant être effectué et les modifications déjà incorporées ne remettront nullement en cause l’état de navigabilité du produit ainsi modifiéNote de bas de page 16.

    Outre cette attestation, TC a publié l’Avis de navigabilité B045 – Compatibilité entre plusieurs modifications. L’organisme de réglementation exige que l’installateur s’assure que la ou les modifications n’auront aucune incidence sur la navigabilité du produit modifié et, si nécessaire, un nouveau supplément au manuel de vol pourrait être requis avec l’installation pour prescrire les limites d’exploitation.

    L’examen des dossiers techniques de l’aéronef n’a pas permis de démontrer que les modifications installées avaient fait l’objet d’une évaluation de compatibilité par l’installateur. Malgré les conditions susmentionnées, TC n’exige pas que l’on démontre que cette évaluation a été faite.

    1.6.2.1 Préoccupation liée à la sécurité du BST

    À la suite de son enquête sur le décrochage aérodynamique et la collision avec le relief d’un Cessna A185E en octobre 2013Note de bas de page 17, le BST a constaté que TC exige que l’installateur évalue toutes les combinaisons de CTS et détermine si la combinaison de CTS maintient l’état de navigabilité de l’aéronefNote de bas de page 18. Toutefois, il n’existe aucune ligne directrice réglementaire pour déterminer l’ampleur ou la portée de cette évaluation, ou encore la façon dont elle doit être faite et consignée.

    Au Canada, on confie la maintenance de la plupart des aéronefs légers, y compris ceux qui sont exploités à des fins commerciales, à de petits organismes de maintenance agréés qui n’ont qu’une capacité limitée de réalisation d’essais aérodynamiques ou d’évaluations techniques. Il arrive donc souvent que la compatibilité et l’interaction entre les CTS soient acceptées au terme d’une évaluation sommaire.

    En conclusion, le BST a émis la préoccupation liée à la sécurité suivante :

    Le Bureau est préoccupé par le fait que si plusieurs CTS sont installés sans ligne directrice appropriée sur la façon d’évaluer et de documenter leurs effets sur la manœuvrabilité des aéronefs, les pilotes pourraient perdre la maîtrise de ces aéronefs parce qu’ils ignorent leurs caractéristiques de performanceNote de bas de page 19.

    Depuis 2013, le BST a enquêté sur au moins 2 autres événementsNote de bas de page 20 pour lesquels il a exprimé la même préoccupation dans ses rapports.

    1.7 Renseignements météorologiques

    La station d’observation météorologique pour l’aviation la plus près est l’aéroport de Tofino/Long Beach (CYAZ) (C.-B.) (à 7 NM au sud-est de CAB4). Elle se trouve à environ 900 pieds au nord de la côte et à 80 pieds au-dessus du niveau moyen de la mer. À 11 h, les conditions météorologiques étaient les suivantes :

    • vents du 160° vrai, de directions variables du 140° au 210° vrais, à 7 nœuds;
    • visibilité de 15 milles terrestres;
    • couches de nuages épars à 2000 pieds et 10 000 pieds au-dessus du sol;
    • température de 17 °C, point de rosée de 14 °C;
    • calage altimétrique de 30,05 pouces de mercure.

    En raison de l’emplacement différent des deux aérodromes, le vent du sud enregistré à CYAZ n’était pas représentatif des conditions qui étaient présentes à CAB4. Par conséquent, les conditions de vent au port sont déterminées en observant les drapeaux à proximité du port ainsi que la surface de l’eau.

    Au moment de l’événement à l’étude, les observations locales indiquaient que le vent était calme et ne causait pas d’agitation à la surface de l’eau. Des données supplémentaires recueillies à partir d’une station météorologique sans fil, située sur le quai de la Garde côtière canadienne dans le port, signalaient un vent de 2 nœuds en direction ouest-nord-ouest.

    Les conditions météorologiques ne sont pas considérées comme un facteur dans l’événement à l’étude.

    1.8 Aides à la navigation

    Sans objet.

    1.9 Communications

    Sans objet.

    1.10 Renseignements sur l’aérodrome

    CAB4 est situé à environ 7 NM au nord-ouest de CYAZ et est un hydroaérodrome enregistré exploité par Tofino Airlines. Atleo River Air Services Ltd. exerce ses activités à partir d’un quai privé distinct situé à environ 820 pieds à l’est du quai désigné pour l’hydroaérodrome.

    L’hydroaérodrome est un aérodrome non contrôlé. En plus de l’exploitation d’hydravions, le port accueille [traduction] « des kayaks, des embarcations de plaisance, des navires d’observation des baleines, des bateaux d’excursion [et] des bateaux-taxisNote de bas de page 21 ». Le port n’offre aucune zone de décollage ou d’atterrissage désignée pour les hydravions.

    Le port est entouré d’îles ainsi que de rochers et de barres de sable. La profondeur des rochers et des barres de sable change avec le niveau des marées océaniques. Au nord, le port dispose d’un chenal désigné qui permet aux navires d’entrer et de sortir du port de façon sécuritaire pendant la marée basse. Ce chenal d’eau profonde – appelé le passage Deadman – a une largeur d’environ 90 mNote de bas de page 22 et s’étend en direction du nord-nord-est du port. Aux points d’entrée nord et sud, le chenal est marqué par 2 bouées décalées, 1 bouée rouge et 1 bouée verte, qui indiquent le chemin permettant aux navires d’entrer dans le chenal de manière sécuritaire, de même que les bords est et ouest. Au point d’entrée sud, la bouée verte est située à 178 m au nord-nord-ouest de la bouée rouge et est la plus proche de la barre de sable. L’enquête a révélé que la bouée verte peut être difficile à voir du point de vue du pilote, compte tenu de l’arrière-plan de l’eau sombre de l’océan et des montagnes boisées. 

    Le vol dans l’événement à l’étude était le deuxième décollage de la journée que le pilote effectuait de CAB4 à bord de l’aéronef à l’étude. Le premier décollage du pilote avait été effectué environ 2 heures auparavant dans une direction similaire, nord-nord-ouest, dans des conditions de vent similaires (figure 2).

    Figure 2. Trajectoires approximatives de décollage de l’aéronef superposées à la carte hydrographique de CAB4, montrant les profondeurs en mètres à la marée normale la plus basse ainsi que les bouées et les dangers identifiés (Source : Google Earth et carte 3685 du Service hydrographique du Canada, avec annotations du BST)
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    Trajectoires approximatives de décollage de l’aéronef superposées à la carte hydrographique de CAB4, montrant les profondeurs en mètres à la marée normale la plus basse ainsi que les bouées et les dangers identifiés (Source : Google Earth et carte 3685 du Service hydrographique du Canada, avec annotations du BST)

    1.11 Enregistreurs de bord

    L’aéronef n’était muni ni d’un enregistreur de données de vol ni d’un enregistreur de conversations de poste de pilotage, et la réglementation en vigueur n’exigeait ni l’un ni l’autre.

    Le vol dans l’événement à l’étude a été enregistré par 2 caméras vidéo : une caméra de télévision en circuit fermé et une caméra de téléphone cellulaire.

    1.12 Renseignements sur l’épave et sur l’impact

    1.12.1 Généralités

    Après l’accident, l’aéronef était renversé sur une barre de sable à environ 4000 pieds au nord-nord-ouest du quai de la compagnie. Le fuselage est demeuré en grande partie intact, les 2 ailes étant submergées dans environ 1 pied d’eau.

    Environ 2 heures après l’événement, alors que l’eau montait avec la marée montante, l’aéronef a été récupéré sur la barre de sable, démonté et transporté à CYAZ pour y être entreposé.

    L’enquête n’a pas permis de confirmer la continuité des commandes de vol ni la position des gouvernes pendant l’impact, compte tenu des dommages subis pendant la récupération et le démontage de l’aéronef. Les commandes du moteur ont été retrouvées intactes et opérationnelles. 

    1.12.2 Flotteurs de l’aéronef

    La section avant du flotteur gauche a été sectionnée de la barre d’écartement avant et déviée vers l’intérieur d’environ 45°; par conséquent, la moitié du revêtement extérieur du flotteur s’est détachée. L’orientation du flotteur et les dommages qu’il a subis concordent avec l’arrêt brusque du mouvement de lacet vers la droite et du dérapage de l’avion sur la surface de l’eau lorsque le flotteur gauche s’est enfoncé dans l’eau. 

    Le flotteur droit était fixé aux 2 barres d’écartement et n’a pas subi de dommages importants.  

    1.12.3 Ailes de l’aéronef

    Le bord d’attaque de l’extrémité de l’aile gauche a été considérablement endommagé, et l’emplanture de l’aile s’est séparée du fuselage de sorte que seul le mât d’aile était relié aux 2 extrémités. Les dommages étaient caractéristiques d’un impact entre l’extrémité de l’aile gauche et la barre de sable ainsi que d’une surcharge de l’aile lorsque l’aéronef a basculé sur la gauche.

    L’aile droite était fixée au fuselage et le bord d’attaque ne présentait pas de dommages importants dus à l’impact. 

    1.12.4 Fuselage

    Le fuselage a subi des dommages par compression mineurs, 6 des 7 fenêtres ayant été retrouvées en grande partie intactes. Ces dommages laissent croire que la majeure partie de l’énergie s’est dissipée pendant l’accident, avant de se retrouver sur le toit; ainsi, le fuselage offrait un espace de survie adéquat pour les occupants. 

    Les 2 portes du poste de pilotage étaient ouvertes sur le lieu de l’accident et étaient fixées aux charnières sans déformation importante.

    1.12.5 Hélice

    Les 3 pales de l’hélice présentaient des dommages par flexion et abrasion, ce qui concorde avec le fait que l’hélice tournait et que le moteur produisait de la puissance au moment de l’impact.

    1.13 Renseignements médicaux et pathologiques

    Selon l’enquête, rien n’indique que des facteurs médicaux ou physiologiques, y compris la fatigue, aient nui au rendement du pilote.

    1.14 Incendie

    Il n’y a pas eu d’incendie.

    1.15 Questions relatives à la survie des occupants

    Au cours de l’événement à l’étude, l’aéronef s’est renversé sur la barre de sable, ce qui a empêché le fuselage d’être submergé et a donné le temps aux occupants d’évacuer l’aéronef. Le pilote et 1 passager avaient suivi une formation sur l’évacuation subaquatique, et tous les occupants portaient un VFI. La température de l’eau de mer était d’environ 15,3 °CNote de bas de page 23.

    Le fuselage n’a subi que des déformations mineures et offrait un espace de survie adéquat pour les occupants. Tous les sièges et toutes les ceintures de sécurité sont restés ancrés au sol, et les bagages ont été retenus dans la soute à bagages arrière. Les occupants ont pu sortir de l’aéronef sans aide extérieure.

    Fait établi : Autre

    L’aéronef s’est renversé en eau peu profonde sur la barre de sable, ce qui a probablement contribué à la survie des occupants en réduisant le risque de noyade et en donnant aux occupants le temps d’évacuer l’aéronef.

    L’aéronef était équipé d’une ELT automatique fixe (Kannad 406 AF-compact) pouvant transmettre sur les fréquences 406 MHz et 121,5 MHz. La certification annuelle de l’ELT avait été effectuée le 12 mai 2021, et les butées de verrouillage de l’interrupteur de l’ELT ont été retrouvées intactes après l’événement à l’étudeNote de bas de page 24. L’ELT était montée près de l’avant de la soute à bagages, du côté gauche du fuselage. Aucun signal d’ELT n’a été reçu par le Centre conjoint de coordination de sauvetage de Victoria; toutefois, l’enquête n’a pas permis de déterminer si cela était attribuable à des forces d’impact insuffisantes pour déclencher l’interrupteur à force g, ou au fait que l’antenne était submergée.

    Peu après l’accident, un plaisancier se trouvant à proximité est arrivé sur le lieu de l’accident pour offrir son aide avant l’arrivée du détachement local de la Garde côtière canadienne. Tous les occupants ont été examinés sur place et transportés jusqu’au rivage de Tofino pour être soignés à l’hôpital local. 

    1.15.1 Ceintures de sécurité

    Dans l’événement à l’étude, tous les occupants de l’aéronef étaient retenus au moyen des ceintures de sécurité.

    Les 2 sièges avant étaient équipés d’une ceinture sous-abdominale et d’une ceinture-baudrier; le siège gauche était doté d’un enrouleur à inertie pour la ceinture-baudrier, tandis que le siège droit avait des réglages fixes. Les sièges du milieu et de l’arrière étaient équipés uniquement de ceintures sous-abdominales. Les ancrages des ceintures sous-abdominales et le matériel de fixation pour toutes les places assises ont été retrouvés considérablement corrodés.

    Le pilote et les 3 passagers assis sur les sièges arrière ont pu détacher leur ceinture de sécurité et évacuer l’aéronef sans assistance. La passagère assise dans le siège avant droit était partiellement immergée dans l’eau et, comme elle était désorientée, elle n’a pas été en mesure de trouver le dispositif d’attache de sa ceinture de sécurité. Les 3 autres passagers l’ont aidé et, après avoir eu des difficultés à trouver le dispositif d’attache de la ceinture de sécurité et à détacher la ceinture, ils ont pu sortir la passagère du siège avant droit. Cette dernière est ensuite sortie de l’aéronef par la porte de droite de la cabine.

    1.15.2 Issues de secours

    Les 2 issues de secours désignées de l’aéronef sont les portes de cabine droite et gauche, tel qu’il est indiqué sur la carte des consignes aux passagers. L’aéronef possède également une petite porte de soute à bagages (environ 22 pouces de haut sur 15 pouces de large) située à gauche du siège arrière. La porte de la soute à bagages n’est pas conçue ou désignée comme une issue de secours; il est prévu que le passager arrière passe par-dessus les sièges du milieu (figure 3) et devant les occupants de ces sièges pour sortir de l’aéronef.

    Figure 3. Disposition des sièges de l’aéronef en cause et direction de l’évacuation des occupants de l’aéronef (Source : Rapport d’enquête aéronautique A11Q0136 du BST)
    Image
    Disposition des sièges de l’aéronef en cause et direction de l’évacuation des occupants de l’aéronef (Source : Rapport d’enquête aéronautique A11Q0136 du BST)

    Le BST a constaté que le risque de noyade des occupants est élevé à la suite d’accidents d’hydravions et que, dans certains cas, la noyade peut être attribuée au fait que des personnes physiquement aptes sont coincées dans un aéronef qui couleNote de bas de page 25. À la suite d’un événementNote de bas de page 26 survenu le 29 novembre 2009, dans lequel un aéronef de Havilland DHC-2 Mk. I exploité à des fins commerciales est entré en collision avec un plan d’eau et 6 personnes se sont noyées, le Bureau a recommandé que

    le ministère des Transports exige que les sorties normales et les issues de secours des hydravions commerciaux, neufs et actuellement en service, permettent une évacuation rapide après un impact avec l’eau offrant des chances de survie.
    Recommandation A11-05 du BST

    Dans sa réponse finale à cette recommandation reçue en janvier 2017, TC déclare [traduction] « qu’aucune solution de conception facilement identifiable n’aurait d’incidence marquée sur le niveau existant de sécurité des hydravionsNote de bas de page 27 ». Lors de son évaluation de mars 2017 de la réponse de TC, le BST a déclaré que malgré les améliorations apportées au chapitre des issues de secours pour certains types d’aéronefs,

    si l’organisme de réglementation ne rend pas obligatoire la modification des issues standards et ne fait pas non plus la promotion d’une modification volontaire, des hydravions continueront d’être exploités avec des issues qui pourraient devenir inutilisables après un impact, diminuant ainsi la probabilité que les occupants parviennent à sortir de l’aéronef après un accident offrant des chances de survieNote de bas de page 28.

    Le BST a évalué la réponse à la recommandation A11-05 en jugeant qu’elle dénote une « attention en partie satisfaisante »; comme aucune autre mesure n’est prévue par TC, le dossier de la recommandation est « en veilleuseNote de bas de page 29 ».

    1.16 Essais et recherche

    Sans objet.

    1.16.1 Rapports de laboratoire du BST

    Le BST a produit le rapport de laboratoire suivant dans le cadre de la présente enquête :

    • LP094/2021 – NVM Data Recovery [Récupération des données de la mémoire non volatile]

    1.17 Renseignements sur les organismes et sur la gestion

    1.17.1 Aviation civile de Transports Canada – Contrôle de la masse des aéronefs

    Le poids des passagers d’un petit aéronefNote de bas de page 30 constitue une grande partie de la masse totale de l’aéronef. Par exemple, lors du vol à l’étude, les 4 passagers constituaient 26 % de la masse totale de l’aéronef avant le décollageNote de bas de page 31. Cela souligne l’importance de données précises pour déterminer la masse et le centrage de l’aéronef.

    En juin 2012, les Normes de service aérien commercialNote de bas de page 32 ont été révisées afin d’assurer la plus grande exactitude possible des calculs de la masse et du centrage en exigeant que les exploitants aériens régis par la sous-partie 703 du Règlement de l’aviation canadien (RAC) utilisent les poids réels ou les poids pondérés pour déterminer le poids des passagers et des bagages de cabine. En guise de complément à la norme 723, la Circulaire d’information (CI) 703-004 de TC fournit des lignes directrices sur le calcul du poids des passagers pour les avions exploités en vertu de la sous-partie 703 du RAC. Elle définit par ailleurs le poids pondéré comme une modification du poids moyen des hommes et des femmes qui sert à mieux représenter la population sondée actuelle (tableau 4).

    Tableau 4. Méthodes de contrôle de la masse et du centrage pour les exploitants régis par la sous-partie 703 du Règlement de l’aviation canadien (Source : BST, dérivé de la Circulaire d’information 703-004 de Transports Canada, édition 04)
    Méthodes de contrôle de la masse approuvées Types Collecte des poids Ajout aux poids recueillis

    Poids réel*

    Pesée

    Balance

    + vêtements personnels**

    + bagages de cabine**

    Fourni librement

    Fournis par les passagers

    + 10 lb

    + vêtements personnels

    + bagages de cabine

    Estimé

    Estimation de l’exploitant

    + vêtements personnels

    + bagages de cabine

    Poids pondérés

    S. O.

    Données publiées dans le Manuel d’information aéronautique de Transports Canada, tableau 3.2

    S. O.

    1. * Tel qu’il est décrit dans le Manuel d’information aéronautique de Transports Canada (AIM de TC), « [l]es vols à bord desquels aucun bagage de cabine n’est autorisé sont les seuls cas où le poids des bagages de cabine ne doit pas être ajouté au poids de chaque passager ». (Source : Transports Canada, TP14371F, Manuel d’information aéronautique de Transports Canada [AIM de TC], RAC - Règles de l’air et services de la circulation aérienne [7 octobre 2021), section 3.4.7 : Calcul du poids des passagers et des bagages, note 2, p. 236, à l’adresse https://tc.canada.ca/sites/default/files/2022-03/AIM-2022-1_ACCESS_F.pdf [dernière consultation le 21 septembre 2022]).
    2. ** Ajoutés seulement si le passager est pesé sans les articles qu’il apporte à bord de l’aéronef (Source : Transports Canada, TP14371F, Manuel d’information aéronautique de Transports Canada [AIM de TC], RAC – Règles de l’air et services de la circulation aérienne [7 octobre 2021], section 3.4.7[a] : Calcul du poids des passagers et des bagages, p. 236, à l’adresse https://tc.canada.ca/sites/default/files/2022-03/AIM-2022-1_ACCESS_F.pdf [dernière consultation le 21 septembre 2022]).

    La CI 703-004 approuve le poids estimé comme un poids réel, mais précise que le poids estimé correspond à :

    une estimation raisonnable du poids des passagers que fait l’exploitant aérien lorsque le poids réel n’est pas disponible ou lorsque le poids fourni librement n’est pas communiqué ou est jugé comme étant en deçà de la réalité. À ce poids on ajoute le poids permis pour les vêtements et les bagages de cabineNote de bas de page 33.

    Après l’événement à l’étude, les enquêteurs du BST ont calculé le poids total des passagers en utilisant leurs poids fournis librement. Ce total dépassait de 27 % le poids estimé par le préposé au suivi des vols. 

    La CI énonce en outre que le poids réel offrira la plus grande précision pour le calcul de la masse et du centrage, et que s’il n’est pas possible de l’obtenir, l’utilisation alternative des poids pondérés pourra

    garantir un degré de confiance de 95 % et une marge d’erreur tolérée de 1 % comme quoi le véritable poids total des passagers ne dépassera pas le poids total des passagers calculé à l’aide des poids pondérésNote de bas de page 34.

    Les enquêteurs du BST ont également calculé le poids total des passagers à l’aide des poids pondérés. Ce total dépassait de 28 % le poids estimé par le préposé au suivi des vols. 

    1.17.2 Exploitant

    Atleo River Air Service Ltd. est titulaire d’un certificat d’exploitation aérienne et est basée à Tofino (C.-B.). La compagnie fournit des services commerciaux de taxi aérien en vol VFR et de travail aérien pour la région locale, conformément aux sous-parties 702 et 703 du RAC.   

    Au moment de l’événement à l’étude, la flotte de la compagnie comprenait 3 aéronefs Cessna A185F, un aéronef de Havilland DHC-2 Mk. I, 1 hélicoptère Bell 206B et 1 hélicoptère Bell 206 L-1. 

    La compagnie utilise un système de contrôle d’exploitation de type DNote de bas de page 35. Le vol à l’étude était assorti d’un OFP qui avait été déposé auprès d’un préposé au suivi des vols de la compagnie.

    La compagnie est également un organisme de maintenance agréé par TC pour tous les travaux non spécialisés sur les types d’aéronefs exploités.    

    1.17.2.1 Procédures au port

    De manière informelle, la compagnie encourage les aéronefs à décoller de CAB4 en direction du nord-ouest dans le but de réduire le bruit, une recommandation soumise à la discrétion du pilote en fonction de la performance de l’aéronef, des conditions environnementales et du trafic dans le port.

    Le manuel d’exploitation d’Atleo River Air Service Ltd. ne renferme aucune procédure écrite et ne prévoit aucune formation concernant le décollage ou l’atterrissage à CAB4. Le personnel de la compagnie communique verbalement les dangers du port et les préoccupations en matière de sécurité pendant les exercices de formation des pilotes et les réunions périodiques du personnel. 

    En octobre et en novembre 2021, 3 réunions ont eu lieu sur la sécurité dans le port de Tofino. Plusieurs exploitants aériens et maritimes y ont participé, y compris Atleo River Air Service Ltd. La communication entre le personnel d’exploitation, les meilleures pratiques de sécurité et les moyens possibles d’améliorer la sécurité dans le port étaient au nombre des sujets abordés. Toutefois, il n’y avait pas de procédure ni d’accord en vigueur au moment de la publication de ce rapport.

    En novembre 2021, les communautés locales des Premières Nations ont tenu une cérémonie sur l’eau sur le quai de la rue First à Tofino et dans le port de Tofino afin de purifier l’eau, les pilotes, l’exploitant du navire, les passagers, l’aéronef et les navires concernés par les 2 accidents d’aéronefs survenus dans le port de Tofino en 2021Note de bas de page 36 et de rassembler la communauté pour guérir et tourner la page.

    1.17.2.2 Contrôle de la masse et du centrage

    L’article 703.37 du RAC oblige un exploitant aérien à

    préciser, dans son manuel d’exploitation, le système de calculs de masse et centrage ainsi que les instructions à l’intention des employés concernant la préparation et la précision du devis de masse et centrageNote de bas de page 37.

    Le manuel d’exploitation de la compagnie d’Atleo River Air Service Ltd.Note de bas de page 38 autorise 2 méthodes pour déterminer le poids d’un passager dans le système de contrôle de masse et centrage : le poids réel obtenu au moyen d’une balance, ou lorsqu’une balance n’est pas disponible, l’ajout de 10 livres au poids fourni librement par le passager. Le manuel d’exploitation de la compagnie n’inclut pas les poids admissibles des vêtements personnels et des bagages de cabine dans le calcul du poids fourni librement, comme l’indiquent les lignes directrices présentées dans la CI 703-004Note de bas de page 39.

    Il est pratique courante dans la compagnie que le préposé au suivi des vols aide le pilote à effectuer le calcul de la masse au décollage de l’aéronef, laquelle comprend les poids des passagers et du chargement. Le préposé au suivi des vols inscrit les poids dans l’OFP et ajoute à la colonne du centrage la lettre de profil pertinente – qui représente une configuration particulière de masse et de centrage, calculée au préalable et trouvée dans le manuel d’exploitation de la compagnie. Ensuite, le pilote examine les renseignements fournis et approuve le contenu de l’OFP en y apposant sa signature.

    En règle générale, au cours du processus de réservation d’un vol, les passagers fournissent librement leur poids, qui est consigné sur la feuille de calcul électronique des réservations. Lors de l’événement à l’étude, les réservations du vol avaient été effectuées par un tiers, et les poids des passagers n’avaient pas été fournis au moment des réservations. Vu l’absence de renseignements sur le poids des passagers sur la feuille de calcul, le préposé au suivi des vols a estimé le poids total des passagers et a inscrit celui-ci comme étant de 730 livres sur l’OFP. Selon ces calculs, le poids total de l’aéronef était de 3374 livres au décollage. Même si la réglementation autorise l’utilisation des poids estimés des passagers, cette procédure ne fait pas partie du système de contrôle de masse et de centrage figurant dans le manuel d’exploitation de la compagnie.  

    À l’aide des poids fournis librement par les passagers et de l’orientation présentée dans la CI 703-004, on a pu déterminer dans le cadre de l’enquête que le poids total des passagers était de 194 livres supérieur à celui estimé par le préposé au suivi des vols. Ainsi, selon ces calculs, le poids total de l’aéronef était de 3568 livres au décollage.

    La compagnie dispose d’une balance sur place.

    1.18 Renseignements supplémentaires

    1.18.1 Décrochage aérodynamique

    Un décrochage aérodynamique survient lorsque l’angle d’attaque de l’aile excède l’angle d’attaque critique auquel l’écoulement de l’air commence à se décoller de l’aile. Il y a décrochage de l’aile lorsque l’écoulement de l’air décolle de l’extrados et que la portance diminue au point de ne plus supporter l’aile.

    On utilise souvent la vitesse indiquée pour anticiper les conditions de décrochage. Plus un avion vole vite, moins l’angle d’attaque doit être prononcé pour assurer une portance égale à la masse. Au fur et à mesure que l’avion ralentit, il faut accroître l’angle d’attaque pour engendrer une portance égale à la masse. La vitesse de décrochage est la vitesse à laquelle l’avion ne peut pas générer une portance suffisante pour se maintenir en vol.

    Dans un virage en montée, l’aile extérieure de l’aéronef rencontre l’écoulement d’air relatif à un angle d’attaque plus prononcé que l’aile intérieure; dans le cas d’un décrochage aérodynamique, l’aile extérieure atteindra en premier l’angle de décrochage critique, entraînant une inclinaison de l’aile extérieure et un mouvement de roulis de l’aéronef dans la direction opposée au virage contrôlé.

    Une augmentation du poids de l’aéronef entraîne une augmentation de la vitesse de décrochage, puisque l’aile doit produire plus de portance pour maintenir le vol en palier, ce qui rapproche son angle d’attaque à l’angle critique. En outre, l’emplacement du centre de gravité, même s’il demeure dans les limites de l’aéronef indiquées dans le manuel de vol, aura un effet sur la vitesse de décrochage et la manœuvrabilité d’un aéronef.

    Les modifications de la forme en section transversale (profil aérodynamique) par l’ajout d’éléments d’un ensemble ADAC ou d’une combinaison d’ensembles entraînent des changements aux vitesses de décrochage et aux caractéristiques de manœuvrabilité originelles d’un aéronef. Habituellement, l’ajout d’un ensemble ADAC réduit les vitesses de décrochage et améliore la manœuvrabilité de l’aéronef à plus basses vitesses, ce qui permettra aux aéronefs de décoller et d’atterrir dans des zones plus restreintes.

    1.18.2 Prise de décision du pilote

    La prise de décision du pilote est un processus cognitif consistant à recueillir de l’information, à l’évaluer, puis à choisir une option parmi plusieurs. Une fois que le plan d’action est mis en marche, le processus décisionnel recommence afin de valider si la décision prise est la meilleure option possible. La prise de décision est donc un processus dynamique. Selon une trousse didactique publiée par TC, la prise de décision du pilote est fonction du temps; ainsi, avant le vol, il y a « prise de décision sans souci du temps » et pendant le vol, dans un environnement dynamique, il peut y avoir prise de décisions quand le temps presseNote de bas de page 40.

    Plusieurs facteurs, circonstances contextuelles et biais peuvent nuire à la prise de décision du pilote, notamment l’objectif ou les buts du vol, ainsi que les connaissances, l’expérience et la formation du piloteNote de bas de page 41. Les modèles mentaux constituent une composante intrinsèque de la prise de décision. Ils constituent des représentations internes qui permettent à une personne de décrire, d’expliquer et de prévoir des événements ou des situations dans son environnementNote de bas de page 42. Lorsqu’un modèle mental est adopté, il génère des attentes et résiste au changement. De nouveaux renseignements convaincants doivent être absorbés pour modifier un modèle mental.

    2.0 Analyse

    2.1 Généralités

    Rien n’indique que les conditions météorologiques aient été un facteur dans cet événement. Le pilote possédait la licence appropriée pour effectuer le vol conformément à la réglementation en vigueur, et rien n’indique que la performance du pilote ait été affectée par des facteurs physiologiques tels que la fatigue.

    Il n’y a eu aucun signe de défaillance mécanique de la cellule ou du moteur pendant le vol dans l’événement à l’étude. Cependant, l’examen des dossiers de l’aéronef a soulevé des préoccupations liées aux modifications multiples apportées à l’aéronef suite à sa fabrication.

    Les renseignements obtenus au cours de l’enquête, comme les enregistrements vidéo, indiquent qu’un décrochage aérodynamique s’est produit sur l’aile gauche alors que l’aéronef virait vers la droite, peu après le décollage.

    Cette analyse se concentrera sur les procédures de contrôle de la masse et du centrage et les directives fournies à ce sujet, sur les modifications apportées à l’aéronef ainsi que sur la performance du pilote et de l’aéronef pendant le décollage. 

    2.2 Contrôle de la masse et du centrage

    Un calcul exact du poids des passagers est essentiel dans les aéronefs exploités en vertu de la sous-partie 703 du Règlement de l’aviation canadien où les passagers représentent une part importante de la masse au décollage.

    Le manuel d’exploitation de la compagnieNote de bas de page 43 d’Atleo River Air Service Ltd. énonce 2 méthodes pour déterminer le poids d’un passager : peser le passager à l’aide d’une balance, ou ajouter 10 livres au poids qui a été fourni par le passager. Dans le manuel d’exploitation de la compagnieNote de bas de page 44, le calcul du poids fourni librement ne comprend pas les valeurs ajoutées pour les vêtements et les bagages de cabine, qui sont exigées par la réglementation pour obtenir un poids plus réaliste des passagers. Par conséquent, le personnel d’exploitation de la compagnie se contentait d’ajouter 10 livres aux poids fournis par les passagers lorsqu’il remplissait les plans de vol exploitation.

    En vertu de la réglementation et des documents d’orientation, Transports Canada (TC) considère que les poids estimés des passagers représentent les poids réels des passagers; si les poids estimés sont disponibles, TC recommande de les utiliser au lieu d’utiliser les poids pondérés des passagers qui ont fait l’objet d’une recherche et d’un calcul statistiques. TC s’attend à ce que les exploitants produisent une « estimation raisonnableNote de bas de page 45 » du poids des passagers, mais il n’y a aucune directive sur ce qui constitue une estimation raisonnable ou sur la façon d’en produire une. Ainsi, les poids estimés des passagers peuvent être très variables et, par conséquent, ne pas représenter les poids réels des passagers ou fournir des attentes précises quant à la performance de l’aéronef. 

    Fait établi quant aux risques

    Si l’utilisation des poids estimés des passagers est autorisée sans directives appropriées sur la manière d’effectuer une estimation de poids raisonnable, il se peut que les poids des passagers soient sous-estimés et qu’il s’en suive un risque de surcharge compromettant la sécurité du vol.

    2.3 Modifications de l’aéronef

    2.3.1 Système hypersustentateur de décollage et d’atterrissage courts Robertson de Sierra Industries Ltd.

    Les essais en vol effectués par la Safety Investigation Authority de la Finlande indiquent que la modification de décollage et atterrissage courts (ADAC) Robertson peut induire le décrochage aérodynamique initial à l’extrémité de l’aile, alors que la conception originale de l’aéronef prévoit le décrochage initial à l’emplanture de l’aile pour assurer une stabilité latérale accrue. 

    Le supplément au manuel de vol de l’aéronef (AFMS) pour le système hypersustentateur ADAC Robertson indique les données de performance aérodynamique améliorée associées à la modification sur le Cessna 185, mais ne comprend pas de mise en garde ou d’avertissement destinés au pilote à propos du changement potentiel des caractéristiques de décrochage de l’aéronef. L’AFMS est la principale source de renseignements pour le pilote et devrait l’avertir du risque de décrochage de l’extrémité de l’aile et l’informer de la façon d’en sortir.

    Fait établi quant aux risques

    Si les caractéristiques de décrochage de l’extrémité de l’aile du système hypersustentateur d’ADAC Robertson ne sont pas énoncées dans le supplément au manuel de vol de l’aéronef, il y a un risque que les pilotes des aéronefs sur lesquels ce système est installé ne soient pas conscients des caractéristiques de manœuvre inhabituelles qui peuvent entraîner une perte de maîtrise. 

    2.3.2 Compatibilité et performance des modifications multiples

    Lorsqu’un seul aéronef fait l’objet de modifications multiples selon plusieurs certificats de type supplémentaires (CTS), des essais ne sont généralement pas effectués pour vérifier les interactions aérodynamiques entre les modifications. De plus, TC fournit peu de directives aux propriétaires, aux exploitants et aux installateurs sur la façon d’évaluer la compatibilité de plusieurs CTS et de résoudre les conflits potentiels.

    Le Bureau a déjà publié une préoccupation liée à la sécurité au sujet de l’absence de directives sur la façon d’évaluer et de consigner les effets de ces modifications multiples.

    Dans le cas de l’aéronef à l’étude, les 6 modifications ont fait en sorte de modifier les caractéristiques aérodynamiques ainsi que la performance du moteur, en plus d’augmenter la masse au décollage par rapport à l’aéronef original ayant le certificat de type. L’AFMS du système ADAC Robertson énumère les vitesses de décrochage uniquement pour la masse au décollage d’origine, sans tenir compte des autres modifications apportées à l’aéronef en cause, notamment les rallonges d’ailes, les profils rapportés de bord d’attaque de l’ensemble ADAC Sportsman et les flotteurs, qui peuvent toutes avoir une incidence sur la vitesse de décrochage de l’aéronef.

    Les dossiers techniques de l’aéronef n’indiquaient pas que l’installateur avait procédé à une évaluation de la compatibilité des modifications apportées à l’aéronef, et il n’existait aucun AFMS intégrant l’interaction des modifications en vol. Par conséquent, il n’était pas possible pour le pilote de connaître la performance de l’aéronef avec ces modifications.

    Faits établis quant aux risques

    Si plusieurs certificats de type supplémentaires sont installés sans directives appropriées sur la façon d’évaluer et de consigner leurs effets cumulatifs sur les manœuvres et la performance de l’aéronef, il y a un risque que l’aéronef ait des caractéristiques de vol inattendues, ce qui augmente la possibilité de perte de maîtrise.

    2.4 Facteurs nuisant au rendement du pilote

    2.4.1 Prise de décision du pilote

    Lors du vol à l’étude, la marée basse a exposé la barre de sable située à l’extrémité nord-nord-ouest du port, qui était infranchissable tant par les aéronefs que par les navires. Malgré la présence de la barre de sable et la restriction qu’elle impose à la distance requise pour décoller, les décollages du nord-nord-ouest étaient courants pour réduire le bruit, si les conditions opérationnelles et environnementales le permettaient. Si une plus grande distance était nécessaire pour décoller, les eaux restreintes du chenal d’eau profonde adjacent à la barre de sable étaient considérées comme une option viable. Par conséquent, le choix de décoller sur la trajectoire de décollage nord-nord-ouest pour ce vol n’était pas un événement extraordinaire, et le modèle mental du pilote reposait sur les hypothèses suivantes :

    • la puissance accrue de l’aéronef et les connaissances du pilote des caractéristiques ADAC;
    • les paramètres de masse dans les limites de masse et de centrage de l’aéronef;
    • les vents étaient calmes, les conditions de l’eau étaient favorables et la visibilité était bonne;
    • la présence d’appareils en conflit dans le port était minime;
    • un décollage réussi dans la même direction relative avait été effectué plus tôt dans la journée.

    Pour la deuxième course au décollage, le pilote a opté pour une trajectoire qui était moins alignée avec le chenal d’eau profonde que la première. Le pilote s’attendait à être dans les airs avant d’atteindre la bouée rouge située du côté du chenal d’eau profonde le plus près de l’aéronef. Cependant, l’aéronef a rencontré un sillage de navire inattendu pendant la course au décollage, qui, combiné au fait que l’aéronef était lourd, a entravé le taux d’accélération de l’aéronef. Par conséquent, le pilote a dû effectuer un virage sur le redan vers la droite pour accéder au chenal d’eau profonde et prendre de la distance supplémentaire pour le décollage.

    Pour emprunter avec succès le chenal, il faut naviguer entre les bouées rouge et verte décalées qui marquent les obstacles de chaque côté de l’ouverture du chenal. D’après la direction du décollage, l’aéronef a d’abord dépassé la bouée rouge du côté droit (côté passager), puis, environ 178 m plus tard, la bouée verte du même côté, qui était la dernière bouée avant la barre de sable. Le pilote n’a pas pu manœuvrer dans le chenal d’eau profonde entre les bouées rouge et verte.

    2.5 Décollage

    La procédure de décollage normale prévue dans l’AFMS pour l’ADAC Robertson prévoit cette configuration d’aéronef : un réglage des volets à 20° et un braquage des ailerons de 13° correspondant. À la suite de calculs et de vols d’essai, la Safety Investigation Authority de la Finlande a déterminé 3 caractéristiques de performance pendant le décollage pour un aéronef Cessna 185 avec la modification ADAC Robertson :

    • Les vitesses de décrochage indiquées dans l’AFMS sont légèrement trop faibles.
    • La vitesse de l’aéronef devrait être augmentée près de l’eau à plus de 65 nœuds avant la montée.
    • L’aéronef ne devrait pas faire de virage pendant la montée initialeNote de bas de page 46.

    Lors du décollage dans l’événement à l’étude, l’aéronef a pris son envol dans un virage à droite et une assiette en cabré et à une vitesse indiquée faible. Il n’a pas été possible de déterminer, dans le cadre de l’enquête, si l’aéronef a décollé en raison d’un deuxième sillage de navire ou d’une commande du pilote visant à lever l’aéronef de l’eau en prévision de la barre de sable droit devant. Le pilote a réalisé sa faible vitesse et a tenté de maintenir la course de l’aéronef en poussant le manche vers l’avant et en ajoutant 10° aux volets. Malgré cela, l’aile gauche a subi un décrochage aérodynamique qui a déclenché la séquence de l’écrasement.

    Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

    Le taux d’accélération de l’aéronef a été ralenti par le sillage d’un navire pendant la course au décollage, et le pilote a tenté de prendre plus de distance en effectuant un virage à droite à la surface de l’eau. L’aéronef a ensuite décollé de la surface de l’eau à une faible vitesse indiquée en raison d’un deuxième sillage de navire ou d’une commande.

    L’aéronef a pris son envol à une faible vitesse indiquée et dans un virage à droite qui a fait augmenter l’angle d’attaque de l’aile gauche. Par conséquent, l’aile gauche a subi un décrochage aérodynamique à une altitude trop basse pour que la maîtrise puisse être reprise avant que l’aile ne percute l’eau.

    3.0 Faits établis

    3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

    Il s’agit des conditions, actes ou lacunes de sécurité qui ont causé l’événement ou y ont contribué.

    1. Le taux d’accélération de l’aéronef a été ralenti par le sillage d’un navire pendant la course au décollage, et le pilote a tenté de prendre plus de distance en effectuant un virage à droite à la surface de l’eau. L’aéronef a ensuite décollé de la surface de l’eau à une faible vitesse indiquée en raison d’un deuxième sillage de navire ou d’une commande.
    2. L’aéronef a pris son envol à une faible vitesse indiquée et dans un virage à droite qui a fait augmenter l’angle d’attaque de l’aile gauche. Par conséquent, l’aile gauche a subi un décrochage aérodynamique à une altitude trop basse pour que la maîtrise puisse être reprise avant que l’aile ne percute l’eau.

    3.2 Faits établis quant aux risques

    Il s’agit des conditions, des actes dangereux, ou des lacunes de sécurité qui n’ont pas été un facteur dans cet événement, mais qui pourraient avoir des conséquences néfastes lors de futurs événements.

    1. Si l’utilisation des poids estimés des passagers est autorisée sans directives appropriées sur la manière d’effectuer une estimation de poids raisonnable, il se peut que les poids des passagers soient sous-estimés et qu’il s’en suive un risque de surcharge compromettant la sécurité du vol.
    2. Si les caractéristiques de décrochage de l’extrémité de l’aile du système hypersustentateur de décollage et d’atterrissage courts Robertson ne sont pas énoncées dans le supplément au manuel de vol de l’aéronef, il y a un risque que les pilotes des aéronefs sur lesquels ce système est installé ne soient pas conscients des caractéristiques de manœuvre inhabituelles qui peuvent entraîner une perte de maîtrise. 
    3. Si plusieurs certificats de type supplémentaires sont installés sans directives appropriées sur la façon d’évaluer et de consigner leurs effets cumulatifs sur les manœuvres et la performance de l’aéronef, il y a un risque que l’aéronef ait des caractéristiques de vol inattendues, ce qui augmente la possibilité de perte de maîtrise.

    3.3 Autres faits établis

    Ces éléments pourraient permettre d’améliorer la sécurité, de régler une controverse ou de fournir un point de données pour de futures études sur la sécurité.

    1. L’aéronef s’est renversé en eau peu profonde sur la barre de sable, ce qui a probablement contribué à la survie des occupants en réduisant le risque de noyade et en donnant aux occupants le temps d’évacuer l’aéronef.

    4.0 Mesures de sécurité

    4.1 Mesures de sécurité prises

    4.1.1 Atleo River Air Service Ltd.

    La compagnie a modifié la façon dont elle établissait son horaire en augmentant la durée entre ses vols de 15 minutes dans le but d’accorder plus de temps aux pilotes pour effectuer leurs tâches avant un vol.

    Le présent rapport conclut l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été officiellement publié le .