Rapport d’enquête sur la sécurité du transport aérien A23P0061

Collision avec le relief
Immatriculation privée
Quest Kodiak 100, C-GKTX
Aéroport de Tofino/Long Beach (Colombie-Britannique), 60 NM NW

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Déroulement du vol

    Le 20 juin 2023 à 11 h 21Note de bas de page 1, l’aéronef Quest Kodiak 100 équipé de flotteurs amphibies, sous immatriculation privée (immatriculation C-GKTX, numéro de série 100-0010) a décollé de l’aéroport de Masset (CZMT) (Colombie-Britannique) pour effectuer un vol selon les règles de vol aux instruments (IFR) à destination de l’aéroport de Tofino/Long Beach (CYAZ) (Colombie-Britannique), avec un pilote et 3 passagers à bord.

    À 12 h 46, alors qu’il était en route, le pilote a communiqué avec le contrôle de la circulation aérienne pour annuler le plan de vol IFR et a poursuivi le vol selon les règles de vol à vue (VFR). Le vol s’est poursuivi vers la destination finale prévue, à savoir un chalet situé à environ 60 NM au nord-ouest de CYAZ.

    L’aéronef a suivi le passage Tahsis en direction de sa destination et a continué sa route en vue d’un amerrissage direct, près du chalet (figure 1).

    Figure 1. Carte montrant la trajectoire de l’aéronef, le chalet et le lieu de l’accident (Source : Google Earth, avec annotations du BST)
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    Carte montrant la trajectoire de l’aéronef, le chalet et le lieu de l’accident (Source : Google Earth, avec annotations du BST)

    Au point de poser initial, les 2 flotteurs ont touché la surface de l’eau en même temps. L’aéronef a rebondi, et lorsque l’aéronef s’est approché de la surface de l’aire d’amerrissage la 2e fois dans une assiette horizontale, le flotteur gauche aurait touché soit un sillage de bateau ou un objetNote de bas de page 2. La force du contact a fait en sorte que l’aéronef a bondi d’environ 30 pieds et s’est incliné vers la droite.

    Le pilote a amorcé une remise des gaz. À 13 h 37, au cours de la montée initiale au-dessus du sol, l’aéronef a heurté des arbres, puis a percuté le relief.

    Le pilote et 1 passager ont été mortellement blessés, 1 passagère a été grièvement blessée et 1 passager a été légèrement blessé. Un incendie s’est déclaré après l’impact. L’aéronef a été détruit.

    Le signal de la radiobalise de repérage d’urgence a été reçu par le Centre conjoint de coordination de sauvetage de Victoria (Colombie-Britannique). La Garde côtière canadienne, les services de recherche et sauvetage (SAR) des Forces armées canadiennes, la GRC (Gendarmerie royale du Canada) et le personnel de lutte contre les incendies sont intervenus.

    Renseignements sur le pilote

    Le pilote était titulaire d’une licence de pilote privé — avion, valide pour le pilotage des avions à un pilote suivants : avions terrestres et hydravions monomoteurs et multimoteurs, autres que ceux à hautes performances. Sa licence était annotée des qualifications de vol VFR au-dessus de la couche et de vol de nuit. Le pilote était également titulaire d’une qualification de vol aux instruments de groupe 1 et d’un certificat médical valide de catégorie 3. Il avait accumulé environ 1200 heures de vol au total. Le pilote détenait la licence appropriée pour le vol, conformément à la réglementation en vigueur.

    Le pilote avait accumulé environ 250 heures de vol aux commandes de l’aéronef amphibie de l’événement à l’étude, et avait effectué près de la moitié des atterrissages sur l’eau. L’expérience du pilote en matière de décollage sur l’eau et d’amerrissage avait été acquise en majeure partie sur des lacs plutôt que sur l’océan.

    Le pilote avait déjà amerri une fois à cet endroit, 5 jours avant l’événement à l’étude.

    Selon l’information obtenue au cours de l’enquête, rien n’indique que des facteurs médicaux ou physiologiques ont nui à la performance du pilote.

    Renseignements météorologiques

    L’aéroport le plus proche du lieu de l’accident qui disposait de comptes rendus météorologiques était CYAZ. Le message d’observation météorologique régulière d’aérodrome de 13 h indiquait ce qui suit :

    • vents du 170° vrai à 7 nœuds;
    • visibilité de 15 milles terrestres;
    • plafond de nuages fragmentés à 2600 pieds au-dessus du sol (AGL);
    • température de 15 °C, point de rosée de 11 °C;
    • calage altimétrique de 30,16 pouces de mercure.

    La prévision d’aérodrome publiée à 11 h 40 indiquait qu’au moment de l’événement, les conditions à CYAZ seraient les suivantes :

    • vents du 170° vrai à 8 nœuds;
    • visibilité supérieure à 6 milles terrestres;
    • nuages épars à 700 pieds AGL et plafond de nuages fragmentés à 2000 pieds AGL.

    En se fondant sur l’examen de l’imagerie disponible, il a été déterminé que le vent était de 4 à 6 nœuds et que la mer avait de petites vagues au moment de l’événement à l’étude.

    Cisaillement du vent et courants descendants

    Le Manuel d’information aéronautique de Transports Canada définit un cisaillement du vent comme étant un « [c]hangement, sur une courte distance, de la vitesse ou de la direction du vent, ou des deux à la foisNote de bas de page 3 ». Il est indiqué que le cisaillement du vent « peut se produire sur le plan vertical ou horizontal et quelquefois sur les deuxNote de bas de page 4 ». Lorsque le vent est poussé au-dessus d’une chaîne de montagnes, des vagues peuvent se former du côté sous le vent des montagnes. Ces ondes sous le vent produisent des courants descendants importants près de la montagne.

    Bien que les vents exacts au moment de l’événement à l’étude sont inconnus, les vents qui soufflent dans les chaînes de montagnes peuvent être très imprévisibles, et les courants descendantsNote de bas de page 5 ne sont pas rares. Comme il est expliqué dans Mountain Flying [traduction] :

    [l]orsque le vent souffle sur de grandes crêtes montagneuses, le vent soufflant sur le versant au vent, dans une atmosphère stable, est généralement relativement uniforme. Cependant, il se déverse rapidement du côté sous le vent, créant de forts courants descendants et provoquant des turbulences dans une situation qui peut être comparée à de l’eau qui s’écoule dans le lit accidenté d’un cours d’eau. Ces courants descendants peuvent être dangereux et mettre un aéronef dans une position dont il ne pourrait peut-être pas se rétablirNote de bas de page 6.

    De plus, comme l’explique Météo Aviation, « [e]n général, la force des courants descendants est telle qu’un aéronef volant parallèlement à la chaîne pourrait être entraîné vers le sol ou, s’il volait contre le vent, pourrait ne pas réussir à franchir la chaîneNote de bas de page 7 ».

    Il n’y avait aucun renseignement météorologique pour le lieu de l’événement; toutefois, en raison du terrain montagneux, il est possible que du cisaillement du vent ou des courants descendants étaient présents dans la région au moment de l’accident.

    Renseignements sur l’aéronef

    Figure 2. Aéronef à l’étude (Source : tierce partie, avec autorisation)
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    Aéronef à l’étude (Source : tierce partie, avec autorisation)

    Le Quest Kodiak 100 est un aéronef monomoteur à turbine à voilure haute (figure 2). L’aéronef de l’événement à l’étude a été construit en 2009. Il était muni de flotteurs amphibies Aerocet Twin 6650 et propulsé par un moteur PT6A-34 fabriqué par Pratt & Whitney.

    L’enquête n’a relevé aucun problème lié à l’équipement ou à la maintenance de l’aéronef ayant pu nuire à son fonctionnement normal durant le vol à l’étude.

    Performance de l’aéronef

    Un atterrissage interrompu est une manœuvre qui est normalement amorcée lorsque l’aéronef se trouve à faible hauteur au-dessus du sol et qui donne généralement lieu à une remise des gaz. Celui-ci peut aussi être lié à la configuration ou aux performances de l’aéronefNote de bas de page 8.

    La procédure à suivre en cas d’atterrissage interrompu, qui figure dans le supplément au manuel de vol de l’aéronef du fabricant des flotteurs, est la suivante [traduction] :

    ATTERRISSAGE INTERROMPU

    1. RENTRER LES VOLETS À UN ANGLE DE 20° IMMÉDIATEMENT APRÈS AVOIR APPLIQUÉ LA PUISSANCE DE DÉCOLLAGE POUR LA REMISE DES GAZ. VITESSE ANÉMOMÉTRIQUE À 74 KIASNote de bas de page 9 .

    Renseignements sur l’épave et sur l’impact

    L’aéronef a heurté des arbres et a percuté le relief sans se renverser tout en s’inclinant du côté droit. Un incendie s’est déclaré après l’impact et l’aéronef a été détruit. Les flotteurs et les ailes s’étaient détachés du fuselage. Les volets étaient sortis à 20°.

    En raison des dommages causés par l’incendie, le BST n’a pas été en mesure de déterminer la position des commandes moteur ni l’état des flotteurs. Les dommages aux pales de l’hélice concordaient avec un aéronef dont le moteur produisait de la puissance au moment de l’impact. Les roues étaient rentrées.

    Approche pour amerrir

    Transports Canada a émis les recommandations suivantes à l’intention des pilotes d’hydravions :

    Quand vous serez prêt à atterrir, faites au moins trois fois le tour de votre aire d’amerrissage pour :

    • Évaluer la force et la direction des vents;
    • Vérifier qu’il n’y a aucun obstacle le long de votre aire d’amerrissage : troncs d’arbre ou autres objets flottants et bateaux;
    • Vérifier aussi qu’il n’y a pas d’arbres, de bâtiments ou de fils électriques (généralement tendus entre les îles et le rivage) qui obstruent l’axe d’approche;
    • Vérifier qu’aucun obstacle ne se trouve dans l’aire de décollage;
    • Et n’oubliez pas que la distance d’amerrissage ne garantit pas nécessairement une distance de décollage suffisante;
    • Assurez-vous de bien connaître les procédures d’amerrissage sur un plan d’eau miroitantNote de bas de page 10.

    Les lignes directrices de la Federal Aviation Administration (FAA) des États-Unis recommandent ce qui suit [traduction] :

    C’est généralement une bonne pratique de survoler l’aire d’amerrissage prévue et de l’examiner attentivement afin de détecter la présence d’obstacles tels que des pieux ou des débris flottants, et de noter la direction du mouvement de tout bateau qui pourrait se trouver dans l’aire d’amerrissage prévue ou s’en approcherNote de bas de page 11.

    La FAA recommande également ce qui suit [traduction] :

    L’évaluation de l’aire d’amerrissage doit inclure les trajectoires d’approche et de départ. Un relief qui s’élève plus abruptement que l’hydravion ne peut monter est une considération évidente, tant pour le décollage éventuel qu’en cas de remise des gaz à l’amerrissage. Si le franchissement du relief est à la limite des capacités de l’hydravion, il faut s’assurer qu’il y a suffisamment d’espace pour effectuer un demi-tour à faible inclinaison au-dessus de l’eau en vue de la montée.

    REMISE DES GAZ

    Lorsque les conditions d’amerrissage ne sont pas satisfaisantes, effectuez une remise des gaz. […] Montez à une altitude sécuritaire tout en exécutant la liste de vérification de remise des gaz, puis évaluez la situation et effectuez une nouvelle approche dans des conditions plus favorables. Il convient de se rappeler qu’il est souvent préférable de faire demi-tour en montant doucement au-dessus de l’eau pour gagner de l’altitude, plutôt que de monter au-dessus d’un rivage présentant un relief ascendant ou des zones sensibles au bruitNote de bas de page 12 .

    Rapports de laboratoire du BST

    Le BST a produit le rapport de laboratoire suivant dans le cadre de la présente enquête :

    • LP084-2023 – NVM Recovery – Flight Tracker and Foreflight [Récupération de la mémoire non volatile – Système de repérage du vol et ForeFlight]

    Message de sécurité

    Il est important, avant d’amerrir, que les pilotes d’hydravions évaluent l’aire d’amerrissage prévue pour y repérer les dangers. Il est important notamment qu’ils évaluent les conditions à la surface de l’eau et les possibles cisaillements du vent et courants descendants, qu’ils s’assurent que les trajectoires d’approche et de départ sont exemptes d’obstacles et qu’ils envisagent les options possibles en cas de remise des gaz.

    Le présent rapport conclut l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été officiellement publié le .