Rapport d'enquête maritime M03M0077

Incendie et naufrage
du petit bateau de pêche Silent Provider
au large de Petit-de-Grat (Nouvelle-Écosse)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Vers 17 h, heure avancée de l'Atlantique, le 25 juin 2003, le bateau de pêche Silent Provider quitte Canso (Nouvelle-Écosse) par beau temps et par bonne visibilité, pour se rendre à Petit-de-Grat (Nouvelle-Écosse). Environ une heure plus tard, on constate que de la fumée s'échappe par la porte du compartiment moteur. Le dispositif fixe d'extinction par halon du compartiment moteur est actionné, mais il ne semble pas maîtriser le feu. Un signal de détresse est lancé, puis l'équipage de deux hommes met à l'eau le radeau de sauvetage rigide, un Ovatek 4.

    Après avoir enfilé leurs combinaisons d'immersion, les deux membres de l'équipage vont à l'eau et tentent d'embarquer dans le radeau rigide. Lorsque le premier membre de l'équipage y parvient, une grande quantité d'eau est embarquée et le radeau bascule sur le côté. Craignant pour sa sécurité, le membre de l'équipage quitte le radeau. Après plusieurs tentatives vaines de monter à bord et de stabiliser le radeau, les deux membres de l'équipage décident de rester à l'eau et d'utiliser le radeau rigide comme dispositif de flottaison.

    Environ une heure après avoir abandonné le bateau, les deux membres de l'équipage, souffrant d'une légère hypothermie, sont secourus par le bateau de pêche Cape Ryan. Le bateau de pêche Silent Provider brûle ensuite jusqu'à la ligne de flottaison et coule.

    1.0 Renseignements de base

    1.1 Fiche technique du navire

    « SILENT PROVIDER »
    Numéro officiel 808646
    Port d'immatriculation Lunenburg (Nouvelle-Écosse)
    Pavillon Canada
    Type Bateau de pêche
    Jauge bruteNote de bas de page 1 72,68
    LongueurNote de bas de page 2 15,9 m
    Tirant d'eau Avant : 2,1 m Arrière : 3,3 m
    Équipage 2 personnes (le patron et un membre d'équipage)
    Construction 1987
    Groupe propulseur Un moteur diesel Caterpillar développant 358 kW, entraînant une hélice à pas fixe
    Propriétaires Propriétaire privé

    1.1.1 Renseignements sur le navire

    Photo 1. Le bateau de pêche Silent Provider
    Image
    Le bateau de pêche Silent Provider
    Le Silent Provider était un chalutier à pêche arrière ponté en bois, d'envergure moyenne. Construit en 1987, il servait sur la côte est du Canada à différentes pêches. Il était propulsé par un moteur diesel marin entraînant une hélice à pas fixe.

    1.2 Déroulement du voyage

    Le 25 juin 2003 vers 17 h, heure avancée de l'Atlantique (HAA)Note de bas de page 3, le bateau de pêche Silent Provider appareille de Canso pour se rendre à Petit-de-Grat (Nouvelle-Écosse)Note de bas de page 4 où il doit subir une inspection de la coque par Transports Canada.

    Environ une heure après avoir quitté le port, alors que la commande des gaz est réglée sur la vitesse de croisière (1400 tours par minute), l'équipage entend un bruit inhabituel en provenance du compartiment moteur. On ouvre la porte du compartiment moteur pour examiner la situation et on observe une fumée noire qui s'échappe d'en bas. Le moteur est mis au point mort et le coupe-circuit est actionné, mais le régime du moteur ne baisse pas. On tente alors d'utiliser un extincteur à poudre de 5 lb mais ce n'est pas possible en raison de l'épaisse fumée. On actionne le dispositif d'extinction par halon et on isole les citernes de propane de la cuisine (en fermant les robinets des appareils au propane). Peu après, un des membres de l'équipage ouvre la porte du compartiment moteur pour jauger l'effet du halon; il constate que le feu est bien établi. Les robinets d'arrêt carburant et la ventilation du compartiment moteur n'avaient pas été fermés.

    Dans les quelques minutes suivantes, le patron lance un signal de détresse sur la voie 16 VHF alors que l'autre membre de l'équipage récupère les combinaisons d'immersion pour les préparer. La fumée présente dans la timonerie est maintenant trop épaisse pour qu'il soit possible d'y demeurer et les deux membres de l'équipage se rendent sur le pont arrière découvert. Une fumée jaune sort de l'échappement du moteur et une fumée noire sort des manches à air et de l'accès au compartiment moteur.

    Les deux membres de l'équipage grimpent sur le toit de la timonerie et mette le radeau rigide Ovatek 4 à l'eau, à environ 3 m plus bas. Lorsque le radeau heurte la surface de l'eau, l'écoutille d'embarquement arrière s'ouvre, et l'écope est éjectée et perdue. L'équipage coupe la bosse, guide le radeau rigide vers l'arrière et amarre la bosse au bateau de pêche. Les deux hommes enfilent leurs combinaisons d'immersion, et le patron saute à l'eau près du radeau. Il sort l'échelle d'embarquement et y prend pied, agrippant la poignée au-dessus de l'écoutille pour assurer son équilibre. Dès que son poids est transféré à l'échelle, la partie arrière du radeau s'abaisse et est partiellement submergéeNote de bas de page 5. Le radeau embarque alors une grande quantité d'eau par l'écoutille arrière. Le patron parvient à plonger à l'intérieur du radeau, mais le radeau se met aussitôt sur le côté. Craignant pour sa sécurité, il sort du radeau par l'écoutille avant.

    Entre-temps, l'autre membre de l'équipage a aussi abandonné le bateau de pêche en feu. Il embarque dans le radeau d'une façon semblable à ce qu'a fait le patron, mais le radeau bascule de nouveau sur le côté et il est impossible de le stabiliser. Un moment, le patron tente de redresser le radeau renversé en agrippant les poches de stabilisation à eau (poches à eau)Note de bas de page 6 mais sa prise est affaiblie lorsque les poches se déchirent. Après plusieurs tentatives infructueuses pour embarquer dans le radeau, les membres de l'équipage conviennent de demeurer à l'eau en tenant la filière en guirlande fixée sur le pourtour du radeau. Ils coupent la bosse pour permettre au radeau rigide de s'éloigner du bateau de pêche qui brûle maintenant dangereusement.

    À 19 h 27, environ une heure après avoir abandonné le bateau de pêche, les deux membres de l'équipage sont secourus par le bateau de pêche Cape RyanNote de bas de page 7 qui rebroussera chemin pour les ramener à Canso où ils seront transportés à l'hôpital.

    1.3 Renseignements météorologiques

    Selon l'information recueillie, les vagues atteignaient environ 0,5 m et les vents étaient légers. La température de l'eau, d'après la télémétrie par satellite, était de 10 °C. La visibilité signalée était d'environ 2 milles marins dans le brouillard léger.

    1.4 Victimes

    Les deux membres de l'équipage ont été traités pour légère hypothermie.

    1.5 Avaries et dommages

    1.5.1 Avaries au navire

    Le Silent Provider a fini par brûler jusqu'à la ligne de flottaison et a coulé. Il a été déclaré perte totale.

    1.5.2 Dommages à l'environnement

    Il n'y a eu aucun dommage apparent à l'environnement.

    1.6 Certificats et brevets

    1.6.1 Certificats du navire

    Le Silent Provider devait se soumettre à des inspections quadriennales (tous les quatre ans) de Transports Canada en vertu du Règlement sur l'inspection des petits bateaux de pêche. Un certificat d'inspection à court terme a été délivré au bateau en avril 1999; il expirait en août 1999 sous réserve d'une inspection de la carène. Au terme de cette inspection, le certificat d'inspection du bateau, valable pour des voyages de cabotage, classe II, a été prolongé jusqu'en mars 2003.

    Avant la délivrance du certificat d'inspection en 1999, le dispositif fixe d'extinction d'incendie du compartiment moteur a été examiné par une autorité compétenteNote de bas de page 8. Ce dispositif comportait une charge de 25 lb de halon 1301, une tirette, un détecteur thermovélocimétrique, une cloche de manostat, des tuyaux et des buses d'émission de halon. La pression du dispositif a été jaugée à 500 lb/po² et tout a été déclaré satisfaisantNote de bas de page 9. Par ailleurs, le moteur diesel existant a été remplacé par un nouveau moteur diesel Caterpillar, modèle 3408.

    En 1999, le bateau a été doté à la fois d'un radeau rigide pour quatre personnes (Ovatek 4, numéro de série 52), et d'un radeau pneumatique pour six personnes. Le bateau transportait en outre quatre combinaisons d'immersion. En avril 2003, le radeau pneumatique a été retiré du bateau puisque Transports Canada permettait alors que tous les petits bateaux de pêche transportent un seul radeau de sauvetage à condition de transporter aussi des combinaisons d'immersion pour tous les membres d'équipageNote de bas de page 10.

    En février 2003, le dispositif fixe d'extinction d'incendie a de nouveau été inspecté par la même autorité compétente en préparation de la prochaine inspection quadriennale de Transports Canada. La pression relevée du dispositif était de 450 lb/po². Il sera noté que si la pression continue de baisser, le dispositif devrait être changé puisque les pièces de ce type de dispositif n'étaient plus disponibles. En avril, un certificat d'inspection à court terme est délivré au bateau, de nouveau sous réserve d'une inspection de la carène. En mai, toutes les combinaisons d'immersion sont inspectées par une autorité compétente. Les feux de secours des quatre combinaisons sont changés et une réparation légère est effectuée au joint du poignet droit d'une des combinaisons. À tous autres égards, les combinaisons sont déclarées satisfaisantes. Le propriétaire prévoyait faire effectuer un examen de la carène en juin à Petit-de-Grat (Nouvelle-Écosse) pour compléter l'inspection.

    1.6.2 Brevets du personnel

    Le patron était titulaire d'un brevet de capitaine de pêche, troisième classe, délivré en avril 2000. L'autre membre de l'équipage détenait un brevet de capitaine de pêche, quatrième classe, délivré en juin 1985. Selon la réglementation de Transports Canada, ces brevets étaient valables pour le navire et les voyages qu'il effectuait.

    1.7 Antécédents du personnel

    1.7.1 Formation aux fonctions d'urgence en mer

    Les deux membres de l'équipage avaient reçu une formation aux fonctions d'urgence en mer (FUM) : le patron en 2000 et le membre de l'équipage, en 1984. Ni l'un ni l'autre n'avait toutefois reçu de formation officielle dans l'utilisation d'un radeau rigide, car ce sujet ne figure pas dans le programme de formation aux fonctions d'urgence en mer. Bien que certains établissements de formation aient acquis des radeaux Ovatek pour en traiter dans la formation selon les besoins des clients, cette option n'était pas offerte aux membres de l'équipage du Silent Provider lorsqu'ils ont reçu leur formation FUM.

    1.7.2 Familiarisation avec l'Ovatek

    Chaque radeau de sauvetage Ovatek est doté d'un manuel de l'utilisateur et d'une vidéo d'instruction présentant de l'information sur l'utilisation et l'entretien du radeau, y compris la méthode d'embarquement préconisée et l'utilisation de l'équipement de bord. Cependant, la méthode à suivre pour redresser un Ovatek inondé et retourné n'était abordée ni dans le manuel, ni dans la vidéo.

    Le souvenir qu'avaient les membres de l'équipage du visionnement de la vidéo d'instruction variait de vague à nul. Dans les quatre ans depuis l'achat de l'Ovatek, ils n'avaient pas mis le radeau à l'eau pour s'entraîner à embarquer dans le radeau.

    1.8 Normes pour la construction et les essais des radeaux de sauvetage

    Les normes concernant la construction et les essais des radeaux de sauvetage sont énoncées par l'Organisation maritime internationale (OMI) dans la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer ( Convention SOLAS ) Note de bas de page 11 . Les normes canadiennes, qui suivent de près les lignes directrices de l'OMI, sont définies dans les documents suivants :
    • Normes relatives aux radeaux de sauvetage et aux plates-formes de sauvetage pneumatiques (TP 7321);
    • Radeau de sauvetage côtier (TP 11342);
    • Spécification relative aux textiles revêtus utilisés dans la fabrication des embarcations de survie pneumatiques (TP 1324).

    1.8.1 Tissus utilisés dans la construction des radeaux de sauvetage

    La Convention SOLAS et les normes canadiennes imposent des normes minimales en matière de résistance au déchirement et à la traction pour les éléments en textile suivants d'un radeau :

    • tubes de flottaison (chambres de flottabilité), arceaux pneumatiques et rampes d'embarquement;
    • planchers;
    • tendelets extérieurs;
    • tendelets intérieurs.

    Tous les matériaux et composants utilisés dans la construction des radeaux de sauvetage doivent résister à la détérioration due aux intempéries pendant la mise à poste du radeau sur le navire et l'exposition à l'eau de mer. En outre, la résistance au déchirement et à la traction des textiles doit être testée et les résultats des essais doivent être conservésNote de bas de page 12. Les exigences en matière de résistance se résument comme suit :

    Composant textile Normes canadiennes Normes SOLAS
    Résistence à la traction
    (N/50mm)
    Résistence au déchirement (N) Résistence à la traction
    (N/50mm)
    Résistence au déchirement (N)
    Tubes de flottaison (chambres de flottabilité)
    Arceaux pneumatiques 2400 (chaîne)Note de bas de page 13 1000 (trame) 2255 1030
    Rampes d'embarquement 2000 (chaîne) 900 (trame)
    Planchers
    Tendelets extérieurs 950 400 930 490
    Tendelets intérieurs 500 140 100 S.O.

    Les normes ne prévoient pas d'exigences précises quant à la résistance à la traction ou au déchirement du tissu utilisé pour la fabrication des poches à eau.

    Une consultation de certains des principaux fabricants de radeaux pneumatiques a révélé une variété de pratiques dans la fabrication des poches à eauNote de bas de page 14. Un des fabricants fabrique les poches avec le même tissu que celui utilisé pour d'autres parties du radeau. Ce tissu a une résistance à la traction de 1663 N/50 mm. Deux autres fabricants majeurs utilisent un produit textile distinct pour les poches; l'un a une résistance maximale à la traction de 950 N/50 mm; l'autre a une résistance de 540 N/50 mm. Tous les répondants confirment toutefois qu'ils disposent d'un système de contrôle de la qualité pour veiller à ce que le tissu respecte leurs propres normes de résistance.

    1.8.2 Normes pour les poches de stabilisation à eau

    Les normes canadiennes contiennent des précisions sur les dimensions, la forme, le déploiement et la répartition des poches à eau pour les radeaux pneumatiques. En particulier, les poches doivent avoir une capacité d'au moins 225 litres sur les radeaux pour 10 personnes ou moins. Il n'y a pas d'exigences semblables pour les poches à eau des radeaux rigides, et les poches de l'Ovatek 4 n'avaient pas été évaluées en regard des normes applicables aux radeaux pneumatiques.

    1.8.3 Essais des radeaux de sauvetage

    Les normes canadiennes exigent un certain nombre d'essais en fonctionnement avant la délivrance d'un certificat d'approbation pour un radeau de sauvetage. Dans la publication TP 7321, ces essais sont répartis en trois catégories :

    • essais pour tous les radeaux de sauvetage;
    • essais pour les radeaux de sauvetage pneumatiques;
    • essais pour les radeaux de sauvetage rigides.

    Comme l'Ovatek 4 peut accueillir moins de six personnes, il a été testé en regard des normes canadiennes énoncées dans la publication Radeau de sauvetage côtier (TP 11342)Note de bas de page 15. Cette norme ne prévoit aucune disposition concernant expressément les essais de radeaux rigides, de sorte que certains essais pour radeaux rigides énoncés dans la publication TP 7321 ont été utilisés lorsque cela a été jugé nécessaire.

    Durant le processus d'homologation de l'Ovatek 4 et de l'Ovatek 7, certains essais ont été soit modifiés, soit mis de côté, parce que Transports Canada considérait qu'ils n'étaient pas applicables. Les changements ont touché entre autres :

    • l'essai d'amarrage;
    • l'essai de submersion - des vagues n'ont pas été utilisées pour évaluer la navigabilité des radeaux lorsqu'ils sont inondés;
    • l'essai de saut;
    • l'essai de résistance du plancher.

    Voir les détails de ces impératifs d'essais en annexe C.

    1.9 Radeaux de survie rigides

    1.9.1 Radeaux Ovatek

    Le radeau rigide Ovatek est actuellement le seul radeau de survie rigide en son genre connu au monde. Il est fabriqué au Nouveau-Brunswick. Deux modèles sont actuellement fabriqués : l'Ovatek 4 et l'Ovatek 7 (le numéro suivant le nom indique le nombre de personnes que peut transporter le radeau). Un radeau pour six personnes (appelé l'Esperanto 6) avait initialement été mis au point en tant que prototype, mais il n'est plus produit. En date du mois de juin 2003, environ 230 Ovatek 4 et 275 Ovatek 7 avaient été vendus - surtout à des pêcheurs de la côte est du Canada. Environ 60 radeaux Ovatek ont été vendus à l'étranger, surtout aux États-Unis. De plus, environ 43 Esperanto 6 ont été vendus.

    Les radeaux Ovatek sont équipés d'une coque à double paroi en fibre de verre remplie d'environ 38 mm de mousse de polyuréthane qui procure de l'isolation et une réserve de flottabilité. Les radeaux sont équipés de deux écoutilles : une écoutille arrière avec échelle d'embarquement et une écoutille avant. Le capot est équipé d'ouvertures de ventilation qui peuvent être fermées en les vissant. Une filière en guirlande est fixée sur le pourtour du radeau. L'Ovatek 4 a une longueur de 2,06 m et pèse 115 kg; l'Ovatek 7 fait 2,83 m et 182 kg. Le centre de gravité est tel que même avec ses dispositifs de stabilisation à vide, l'Ovatek se redresse lui-même si les écoutilles sont fermées et qu'il n'y a pas d'eau à l'intérieur.

    L'Ovatek 7, en raison de ses dimensions et de sa capacité supérieures, est considéré comme étant mieux adapté comme engin de sauvetage pour les navires d'environ 15 m ou plus de longueur. L'Ovatek 4 convient mieux aux bateaux faisant aussi peu que 12 m de longueur.

    Les deux Ovatek sont équipés de l'équipement d'urgence voulu conformément au Règlement sur l'inspection des petits bateaux de pêche. En 2000, une pompe d'assèchement manuelle a été ajoutée à l'équipement d'urgence. Les Ovatek 4 portant un numéro de série égal ou inférieur à 79 (l'Ovatek du Silent Provider porte le numéro de série 52) et les Ovatek 7 portant un numéro de série égal ou inférieur à 84 ne sont pas dotés de cette pompe.

    Photo 2. L'Ovatek 4
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    L'Ovatek 4

    Les poches à eau de l'Ovatek 4 s'emplissent d'eau de mer lorsque le radeau est mis à l'eau. Ces poches ont pour fonction d'assurer la stabilité du radeau lors de l'embarquement et de la navigation au large. Lorsque le radeau est à poste, les poches sont sous le radeau, dans une cavité peu profonde du berceau. Bien que les poches soient protégées du soleil, l'eau salée peut s'infiltrer dans leur cavité et saturer le textile. Le berceau a des orifices d'évacuation, mais les cristaux de sel subsistant après l'évaporation de l'eau demeurent imprégnés dans le textile. Par contre, l'Ovatek 7 n'a pas de poches de stabilisation à eau. Il comporte un dispositif de stabilisation interne où l'eau de mer pénètre par des ouvertures dans la quille creuse en fibre de verre.

    Photo 3. L'Ovatek 7
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    L'Ovatek 7
    Pour mettre l'Ovatek 7 à l'eau, on fait pivoter le radeau sur son berceau et on le pousse par-dessus bord, l'avant en premier. Le berceau comporte un cran transversal qui fait place à la quille du radeau et facilite la mise à l'eau. Dans le cas de l'Ovatek 4 au fond plat, il faut deux personnes pour d'abord le soulever de son berceau, puis le lancer par-dessus bord pour éviter d'endommager les poches à eau qui pendent en dessous.

    Les deux modèles d'Ovatek ont été approuvés par Transports Canada en juin 1998 en tant que radeaux de sauvetage pour les navires qui sont soumis au Règlement sur l'inspection des petits bateaux de pêche, au Règlement sur l'inspection des grands bateaux de pêche ainsi qu'au Règlement sur l'équipement de sauvetage.

    1.9.2 Tissu des poches de stabilisation à eau de l'Ovatek 4

    Le fabricant des radeaux Ovatek (Ovatek Inc.) applique des mesures rigoureuses de contrôle de la qualité dans la production à l'interne de la coque en fibre de verre ainsi que dans les opérations d'assemblage et de montage. Le seul textile utilisé dans la fabrication de l'Ovatek 4 est celui pour les poches à eau extérieures. Ces poches sont assemblées en sous-traitance avant d'être posées par Ovatek Inc. Le sous-traitant utilise un nylon noir qui provient d'un grossiste en textiles qui se le procure sur des marchés outre-mer.

    Ovatek Inc. n'a pas communiqué au sous-traitant des normes en matière de résistance du tissu. La résistance au déchirement et à la traction du tissu n'a pas non plus été mise à l'essai régulièrement. À un moment donné, le sous-traitant a changé de grossiste pour s'approvisionner, mais n'en a pas informé Ovatek Inc. Le nylon du deuxième fournisseur a servi aux poches à eau des Ovatek portant un numéro égal ou supérieur à 57. L'Ovatek 4 qui était à bord du Silent Provider porte le numéro 52. Ses poches à eau sont donc faites du nylon provenant du premier fournisseur.

    Des essais et analyses ont été effectués sur le tissu des poches à eau du radeau Ovakek qui était à bord du Silent Provider ainsi que sur trois autres échantillonsNote de bas de page 16. Un des trois échantillons a été fourni par Ovatek Inc.; il s'agit du genre servant actuellement à la production. Les deux autres échantillons proviennent de radeaux Ovatek 4 qui étaient sur des bateaux de pêche en service. Un des échantillons provenait d'un radeau mis en service deux ans plus tôt et l'autre, d'un radeau mis en service quatre ans plus tôt. L'échantillon provenant du radeau du Silent Provider avait aussi été mis en service quatre ans plus tôt. Les quatre échantillons étaient en toile simple de nylon revêtu d'une couche d'enduit.

    Selon les essais, le nylon servant actuellement à la production, lorsqu'il est neuf, a une résistance à la traction (sens chaîne) de 1094 N/50 mm. Du fait de sa plus grande superficie transversale totale de la fibre, ce nylon est sensiblement plus résistant que le nylon utilisé dans les modèles portant un numéro égal ou inférieur à 56. Les essais indiquent en outre que les trois échantillons de tissu usagé avaient subi une dégradation de leur résistance dans la direction chaîne autant que trame. Par exemple, l'échantillon vieux de deux ans avait perdu 11 % de sa résistance au déchirement (direction trame). Quant aux deux échantillons de quatre ans, celui du radeau du Silent Provider avait perdu quelque 25 % de sa résistance au déchirement dans la direction trame par rapport à sa résistance initiale estimée, et l'autre avait perdu 29 %Note de bas de page 17.

    1.9.3 Radeau de sauvetage du Silent Provider

    Les essais d'homologation comprenaient une épreuve à la lance en vue de vérifier l'étanchéité aux intempéries de l'écoutille; cette épreuve avait été satisfaisante. Après l'accident, un examen de l'Ovatek 4 utilisé par l'équipage du Silent Provider a révélé que l'écoutille arrière ne se verrouillait pas fermement en place du fait qu'un des deux verrous n'accrochait pas la languette de l'écoutille alors que l'autre le faisait à peine. En outre, le bord de l'écoutille ne recouvrait pas également la languette de l'écoutille et ne comprimait pas le joint de façon à sceller l'écoutille. En conséquence, l'écoutille n'était pas étanche aux intempéries. Les documents de contrôle de la qualité à l'égard du radeau n'indiquent aucun problème au moment de la fabrication.

    Les poches à eau en nylon étaient gravement endommagées; le tissu avait subi de multiples déchirures. Bien que les membres de l'équipage du Silent Provider aient déclaré les avoir endommagées en tentant de stabiliser et de redresser le radeau pour y embarquer, des dommages supplémentaires peuvent avoir été causés lors du sauvetage et de la récupération du radeau. Il n'a pas été possible de quantifier les dommages causés uniquement durant les tentatives d'embarquement.

    1.10 Essais postérieurs à l'accident

    1.10.1 Essais de rendement du Bureau de la sécurité des transports

    Afin d'évaluer l'influence de divers facteurs sur l'embarquement et les paramètres de stabilité de l'Ovatek 4 et de l'Ovatek 7, le BST a procédé à l'automne 2003 à divers essais en bassin d'eau calme. Une personne de masse semblable aux deux membres de l'équipage (environ 110 kg) et portant une combinaison d'immersion a tenté d'embarquer dans le radeau. Des essais ont été effectués pour comparer le comportement des radeaux, lorsqu'ils sont dotés ou non de poches à eau, et lorsqu'ils sont soit inondés, soit secs à l'intérieur. Les tentatives d'embarquement dans les radeaux ont été faites successivement en passant d'abord la tête, et d'abord les pieds. Des essais de redressement ont également été effectués sur les deux modèles.

    Les essais ont révélé que l'embarquement en passant d'abord les pieds n'était pas praticable. Tous les autres essais ont été réalisés en entrant dans le radeau comme le préconise le fabricant, c'est-à-dire tête première.

    La première personne qui a tenté d'embarquer dans l'Ovatek 4 a connu des problèmes semblables à ceux vécus par les membres de l'équipage du Silent Provider. Le radeau a pris une assiette sur cul et a embarqué une importante quantité d'eau. Une fois l'eau à l'intérieur, l'embarquement était grandement compliqué puisque le radeau gîtait considérablement à chaque tentative. L'embarquement d'une personne de 75 kg causerait un changement d'assiette important, mais pas au point d'entraîner une entrée d'eau. Une fois que la première personne a réussi à embarquer dans l'Ovatek 4, une seconde a pu le faire sans difficulté.

    L'Ovatek 7 a pris une assiette sur cul moins importante que l'Ovatek 4 et n'embarquait pas d'eau durant l'embarquement. Lorsque le radeau a été inondé (intentionnellement, aux fins des essais), le mouvement de roulis a augmenté, mais la tentative d'embarquement a réussi.

    Il n'y avait pas de différence discernable dans l'angle d'assiette durant l'embarquement dans un Ovatek sans poches à eau, ou avec poches à eau. En revanche, le mouvement de roulis d'un Ovatek 4 à pleine charge et doté de poches à eau semblait sensiblement atténué par rapport à un radeau sans poches à eau.

    Un Ovatek 4 sec avec les écoutilles fermées est une embarcation à redressement automatique, et redresser un Ovatek 4 renversé avec les écoutilles ouvertes (inondé) a été facile. Cependant, comme le radeau n'est pas doté d'une sangle de redressement, l'utilisateur avait tendance à agripper les poches à eau extérieures pour se donner un point d'appui pour redresser le radeau. Un Ovatek 7 sec avec les écoutilles fermées se redresse aussi automatiquement. Cependant, lorsqu'il était inondé, que les écoutilles soient ouvertes ou fermées, il ne pouvait pas être redressé par des personnes à l'eau. Un résumé de tous les résultats des essais se trouve à l'annexe B.

    1.10.2 Essais de rendement de Transports Canada

    En mars 2004, Transports Canada a effectué des essais en bassin avec les modèles Ovatek 4 et Ovatek 7. Des essais semblables aux essais d'homologation initiaux ont été effectués, et les radeaux se sont comportés conformément aux normes. Lors d'essais supplémentaires, des représentants d'Ovatek Inc. ont démontré qu'un radeau inondé et donnant de la bande pouvait être asséché et redressé en embarquant dans le radeau, en fermant les écoutilles et en utilisant la pompe manuelle pour évacuer l'eau par l'ouverture de ventilation située dans le panneau supérieur du capot du radeau. Les représentants d'Ovatek Inc. ont également démontré qu'un Ovatek 4 inondé équipé d'une sangle de redressement pouvait être redressé sans utiliser les poches à eau comme point d'appui. Le radeau du Silent Provider n'avait ni pompe manuelle ni sangle de redressement.

    D'autres essais d'embarquement ont comparé le comportement d'un Ovatek 4 à celui d'un radeau pneumatique conçu pour 6 personnes en présence de vagues de 0,5 mNote de bas de page 18. La personne la plus lourde à embarquer pesait environ 92 kg. Lorsque les radeaux étaient secs à l'intérieur, les deux modèles se comportaient bien, sans embarquer d'eau lors de l'embarquement. Par ailleurs, en présence d'un effet de carène liquideNote de bas de page 19, le radeau pneumatique s'est avéré stable durant l'embarquement en eau calme, mais pas l'Ovatek 4.

    2.0 Analyse

    Au Canada, l'industrie de la pêche connaît une plus grande incidence d'accidents entraînant des pertes de vie et la perte ou l'abandon d'un navire que tout autre secteur de l'industrie maritime. Un certain nombre d'enquêtes se sont penchées sur la question des incendies de navire et des tactiques inadéquates de lutte contre l'incendie utilisées sur les bateaux de pêcheNote de bas de page 20.

    Comme les marins risquent de devoir abandonner leur navire, il est essentiel que l'équipement de sauvetage du bord puisse remplir efficacement sa fonction. La sécurité des bateaux de pêche, y compris les exigences en matière d'équipement de sauvetage et l'efficacité de l'équipement de sauvetage, ainsi que la préparation aux situations d'urgence, est au coeur des préoccupations du Bureau. L'analyse du présent accident porte sur les questions entourant la lutte contre l'incendie et la survie des occupants.

    2.1 Lutte contre l'incendie

    Bien que ce ne soit pas exigé par le Règlement sur l'inspection des petits bateaux de pêche, de nombreux bateaux de pêche comme le Silent Provider sont dotés d'un dispositif fixe d'extinction d'incendie (comme un dispositif d'extinction par halon). Lorsqu'il est utilisé correctement, ce dispositif est extrêmement efficace pour éteindre un feu.

    Les feux dans les compartiments moteurs et dans les salles des machines sont extrêmement volatiles puisqu'il s'y trouve des chaleurs élevées et une abondance de combustibles comme du liquide hydraulique et du carburant. La marche à suivre pour combattre un tel feu exige de fermer toutes les ouvertures du local, avant de décharger l'agent extincteur, puis de condamner le local. Tout écart de cette méthode permet à l'agent extincteur de s'échapper et à de l'oxygène de pénétrer, ce qui prolonge le temps requis pour l'extinction. En outre, la machine principale doit être stoppée et l'alimentation en combustible coupée. L'expérience démontre que si ces mesures ne sont pas prises, une partie de l'agent extincteur est « consommée » par le moteur à combustion interne et expulsée par le tuyau d'échappementNote de bas de page 21. Ce qui semble être le cas dans le présent accident.

    Du fait que le Silent Provider a coulé, il n'a pas pu faire l'objet d'un examen en vue de déterminer la cause de l'incendie. Cependant, on sait que même si le coupe-circuit du moteur a été actionné, la machine principale ne s'est pas arrêtée. Par ailleurs, comme les accès au compartiment moteur n'ont pas été tous fermés et que l'alimentation en combustible n'a pas été coupée, l'efficacité du dispositif au halon a été compromise et une partie du monoxyde de carbone produit par le feu s'est échappée. Avec les ouvertures de ventilation ouvertes et la machine principale qui continuait de fonctionner, l'incendie s'est propagé rapidement.

    Les incendies à bord des bateaux de pêche sont depuis longtemps reconnus comme des événements à haut risque. À la suite des incendies survenus à bord du Judith Suzanne en 1993 et du Rali II en 1994, le Bureau s'est inquiété de la mesure dans laquelle les feux dans les salles des machines continuent d'entraîner d'importantes pertes dans la flotte de pêche canadienneNote de bas de page 22. Transports Canada a publié le Bulletin de la sécurité des navires 13/96 qui insistait sur la nécessité d'améliorer les connaissances et les aptitudes des pêcheurs à combattre les incendies sur les bateaux de pêche. Auparavant, le Bulletin de la sécurité des navires 6/95 avait attiré l'attention sur l'importance de la formation FUM. Malgré l'importance que la formation FUM attache aux principes de la lutte contre l'incendie, des enquêtes sur d'autres événements ont révélé que les mesures prises par les pêcheurs en cas d'urgence peuvent ne pas réussir à maîtriser un incendie dans la salle des machines.

    Les pêcheurs ne possèdent pas les connaissances nécessaires pour comprendre et utiliser correctement les dispositifs fixes d'extinction d'incendie. Par conséquent, les avantages offerts par ces dispositifs pour lutter contre un incendie dans la salle des machines peuvent ne pas être entièrement réalisés. Jusqu'à ce que ces lacunes soient pleinement comblées, que ce soit par la formation ou par l'information, les tactiques inadéquates de lutte contre l'incendie utilisées par les pêcheurs peuvent continuer de compromettre la sécurité des membres d'équipage et des navires.

    2.2 Radeaux rigides

    2.2.1 Utilisation et formation

    Même si les deux membres de l'équipage du Silent Provider avaient suivi la formation FUM, leur programme de formation ne comprenait pas les modalités d'utilisation des radeaux rigides. Ils n'avaient de fait reçu aucune formation à ce sujet. Le fabricant fournit des indications écrites avec chaque radeau vendu, mais celles-ci n'insistent pas sur le fait que la première personne à s'embarquer doit entrer tête première et se tenir bas, près de l'arrière du radeau; cette information n'est pas non plus indiquée à l'entrée de l'écoutille du radeau. Cependant, une vidéo d'instruction très informative est fournie avec chaque radeau, montrant la technique appropriée d'entrée tête première.

    Le Silent Provider avait été doté de l'Ovatek 4 quelque quatre ans avant l'accident, mais les membres de l'équipage ne l'avaient jamais mis à l'eau, ni n'avaient tenté d'y embarquer sur l'eau. La mise à l'eau du radeau durant des exercices aurait permis de mieux comprendre les considérations spéciales à prendre en compte lors de l'embarquement.

    Photo 4. L'Ovatek 7 inondé, gisant sur le côté durant les essais en bassin du BST
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    L'Ovatek 7 inondé, gisant sur le côté durant les essais en bassin du BST

    Les essais en bassin révèle qu'une fois inondé, l'Ovatek 7 prend une gîte de presque 90°. Même si les écoutilles sont fermées, le radeau ne peut pas être redressé par deux personnes à l'eau. Le fabricant a expliqué que dans ces conditions, il s'agit malgré tout d'embarquer dans le radeau, de fermer les écoutilles puis d'assécher le radeau au moyen de la pompe manuelle qui évacuera l'eau par l'ouverture de ventilation. Une fois asséché, le radeau se redresse. L'information et les indications quant aux mesures à prendre lorsque le radeau est inondé ne figurent toutefois ni dans la vidéo d'instruction ni dans le manuel de l'utilisateur d'un ou l'autre modèle Ovatek.

    Les deux membres de l'équipage ne connaissaient pas la méthode à suivre pour assécher et redresser le radeau. Le manque de familiarisation avec l'équipement essentiel de survie peut réduire l'efficacité de cet équipement, comme l'a démontré le présent accident.

    2.2.2 Radeaux pneumatiques et rigides - Forces et faiblesses

    Après l'abandon d'un navire, des radeaux pneumatiques ont été retrouvés vides et retournés. [Traduction] « Pour améliorer la stabilité et limiter la dérive, le radeau de sauvetage SOLAS est doté de poches de stabilisation à eau (poches à eau) qui se déploient sous les tubes de flottaison (chambres de flottabilité), et d'une ancre flottante. L'ancre flottante est le principal moyen de stabilisation après la mise à l'eau du radeau, mais des recherches indiquent que la stabilité des radeaux de sauvetage est problématique en présence de vagues déferlantes »Note de bas de page 23.

    Le rapport final sur la perte du traversier roulier à passagers Estonia, qui a fait plus de 850 morts, juge que les radeaux pneumatiques sont utiles, mais il note de graves lacunes par grosse mer comme c'était le cas le soir de l'accident du EstoniaNote de bas de page 24. Parmi elles figurent les suivantesNote de bas de page 25 :

    • De nombreux radeaux ne se sont pas gonflés complètement.
    • De nombreux radeaux se sont renversés sous l'action du vent et ont dérivé à l'envers.
    • Certains des radeaux à la dérive à l'envers ont par la suite été redressés par les vagues. Lorsque c'est arrivé cependant, les personnes dans le radeau ont de nouveau été jetées à la mer et ont eu de grandes difficultés à rembarquer dans le radeau.
    • Les tendelets des radeaux ne se sont pas automatiquement mis en place, et les ouvertures n'ont pas pu être fermées correctement.
    • Une grande quantité d'eau s'est accumulée dans le fond des radeaux. Dans le pire cas rapporté, il se trouvait 20 cm d'eau au fond du radeau. Les écopes étaient si petites qu'elles étaient inefficaces et de nombreux survivants ont écopé avec leurs chaussures.
    • L'échelle de corde passait sous le radeau, emportant les pieds de ceux qui tentaient d'embarquer dans le radeau, de sorte qu'elle était pratiquement inutile.
    • Dans de nombreux radeaux trouvés après l'accident, l'actionneur de la bouteille de CO² sous pression était mal fixé, ce qui expliquerait pourquoi de nombreux radeaux ne se sont pas gonflés complètement.

    Malgré les avantages d'un radeau pneumatique au plan de la sécurité, d'autres faiblesses de ce type d'équipement de sauvetage sont évidentes, dont les suivantes :

    • La vulnérabilité à la chaleur et aux flammes - Lors d'un incendie à bord du bateau de pêche Jakejewe, l'équipage a tenté d'abandonner le navire dans un radeau de sauvetage pneumatique, mais celui-ci a pris feu à son tour lorsqu'il a été mis à l'eau. Un membre de l'équipage a été sauvé alors qu'il s'accrochait à une bouée; les deux autres l'ont été après s'être accrochés aux restes dégonflés du radeau - l'un d'entre eux est plus tard décédé par suite d'hypothermieNote de bas de page 26.
    • L'incertitude associée à ce type de radeau de sauvetage - Même s'ils sont inspectés et reconditionnés chaque année (ou dans certains cas tous les deux ans) par des ateliers agréés, les membres d'équipage ne peuvent pas vérifier eux-mêmes le bon état de fonctionnement d'un radeau jusqu'à ce qu'il soit temps de l'utiliser - ce qui est trop tard si le radeau ne fonctionne pas comme prévu.
    • La difficulté pour les membres d'équipage de s'entraîner à mettre à l'eau un radeau pneumatique - Il y a des obstacles à l'apprentissage par l'expérience de l'utilisation de ce type d'équipement. Si le radeau est mis à l'eau dans le cadre d'un exercice, il pourrait ne pas être disponible pendant un certain temps : le temps qu'il soit vérifié et reconditionné par un atelier agréé, d'où une formation coûteuse et une source de complications.
    • Le risque de dommages pendant le transport - [Traduction] « Le fait d'enlever le radeau de sauvetage de son conteneur sur un navire, et de le transporter jusqu'à un point de service, puis de nouveau au navire, est la première cause de dommages au conteneur et au radeau de sauvetage lui-même. La mauvaise manipulation du conteneur peut le faire fissurer à l'intérieur, et les éclats qui en résultent peuvent endommager le radeau de sauvetage »Note de bas de page 27.

    En comparaison, un radeau rigide affiche des points forts dans la plupart de ces domaines. Les Ovatek résistent à la chaleur et aux flammes grâce à leur matériau stratifié ignifuge. Les propriétaires peuvent aisément inspecter eux-mêmes le radeau en entier, à l'intérieur et à l'extérieur. Aucun gonflage n'est requis, ce qui élimine les problèmes associés à ce processus. L'échelle d'embarquement est rigide et aisément accessible, offrant une plus grande stabilité aux personnes qui veulent embarquer dans le radeau.

    Enfin, le radeau rigide peut servir d'abri pendant une urgenceNote de bas de page 28. C'est là une possibilité particulièrement intéressante qui peut réduire l'aspect le plus risqué de l'abandon d'un petit navire : le fait d'entrer à l'eau puis d'embarquer à bord du radeau de sauvetage. Dans ces circonstances, non seulement les membres d'équipage doivent-ils entrer à l'eau, mais encore doivent-ils tenter de diriger et de maîtriser le radeau de sauvetage, souvent dans des conditions loin d'être idéales. De plus, les membres d'équipage à l'eau sont exposés aux risques supplémentaires d'un environnement hostile, y compris l'hypothermie. Cependant, ils ne sont pas exposés à ces risques quand ils utilisent le radeau comme abri.

    2.2.3 Facteurs pertinents à la conception des radeaux de sauvetage rigides

    2.2.3.1 Changement d'assiette de l'Ovatek 4 lors de l'embarquement et effet de carène liquide

    Photo 5. Changement d'assiette de l'Ovatek 4 lors de l'embarquement durant les essais en bassin du BST
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    Changement d'assiette de l'Ovatek 4 lors de l'embarquement durant les essais en bassin du BST

    Les essais d'embarquement effectués par le BST n'ont révélé aucune différence discernable dans l'angle d'assiette lors de l'embarquement dans l'Ovatek 4, qu'il soit ou non équipé de poches à eau. Les poches à eau n'entraînent un mouvement de redressement important que si elles sont soulevées hors de l'eau. Le fait que les poches à eau de l'Ovatek 4 sont situées près du milieu et de l'axe de pivotement longitudinal diminue leur aptitude à rétablir l'assiette sur cul du radeau pendant l'embarquement (voir photo 5). Lorsque la première personne à embarquer est lourde, le changement d'assiette est suffisant pour permettre une entrée d'eau dans le radeau. L'effet de carène liquide qui en résulte diminue la stabilité du radeau. Alors que l'on peut embarquer dans l'Ovatek 7 même en présence d'un effet de carène liquide, l'Ovatek 4 est instable en présence d'un effet de carène liquide.

    Lors de l'embarquement, il est essentiel que la première personne entre tête première dans l'Ovatek et se tienne bas. Si possible, les autres personnes à l'eau devraient aider à stabiliser le radeau pendant l'embarquement de la première personne. Même si la vidéo d'instruction que le fabricant fournit avec chaque nouvel Ovatek insiste sur ce point, une deuxième personne peut ne pas être en mesure d'aider à stabiliser le radeau durant l'embarquement. En outre, il n'y a pas de garantie que le radeau demeurera sec avant que la première personne y entre. Les vagues s'abattant sur l'écoutille ouverte ou le poids d'une personne de forte taille sur l'échelle d'embarquement peuvent permettre une entrée d'eau suffisante pour diminuer sensiblement la stabilité durant l'embarquement.

    Du fait que l'Ovatek dispose d'une réserve de flottabilité suffisante pour demeurer à flot lorsqu'il est complètement inondé, l'entrée d'eau durant l'embarquement ne peut pas le faire couler. Cependant, les événements entourant l'accident et les résultats des essais en bassin du BST révèlent que l'instabilité du radeau dans cette situation a fait en sorte que les membres de l'équipage ont renoncé à tenter d'embarquer dans le radeau et sont plutôt restés à l'eau. Comme il n'était pas possible d'embarquer dans l'Ovatek 4 en toute sécurité, les membres de l'équipage ont été exposés à des risques inacceptables.

    2.2.3.2 Tissu des poches de stabilisation à eau

    Les normes applicables aux radeaux de sauvetage ne fixent pas de critère minimum pour la résistance du tissu utilisé pour la fabrication des poches à eau. Ovatek Inc. n'effectue pas d'essais sur ces tissus à l'interne ni n'exige du fournisseur de nylon des résultats d'essais ou des données sur la résistance. Les expériences réalisées par le BST indiquent que le nylon utilisé actuellement pour la fabrication est en fait plus résistant que celui utilisé précédemment. Cependant, la résistance à la traction du nylon actuel, lorsqu'il est neuf, est de 1094 N/50 mm, soit moins de la moitié de la résistance exigée par les normes pour le tissu du plancher et des tubes de flottaison (chambres de flottabilité) des radeaux pneumatiques. Il faut noter que la résistance du tissu utilisé par certains fabricants de radeaux pneumatiques pour la fabrication des poches à eau est inférieure à la résistance du tissu de l'Ovatek 4. Cependant, les poches à eau ne sont pas exposées à l'environnement comme le sont celles de l'Ovatek, puisqu'une coquille les protège lorsque le radeau n'est pas gonflé. La dégradation de la résistance à la traction et au déchirement au fil du temps est vraisemblablement beaucoup moindre dans le cas des radeaux pneumatiques que dans le cas du modèle Ovatek exposé.

    L'examen des échantillons de tissu des Ovatek qui avaient été en service n'a révélé aucun signe de dommage ou d'usure mécanique préalable ou de dégradation par suite d'exposition au soleil ou d'attaque chimiqueNote de bas de page 29. Cependant, tous les spécimens affichaient une dégradation de la résistance au fil du temps (voir la figure 1). Du fait de leur position extérieure quand le radeau est à poste, les poches à eau sont vulnérables aux effets des intempéries environnementales et au risque de dommages mécaniques lors du déploiement ou de l'utilisation du radeau. En l'absence de normes minimales sur la résistance pour la fabrication et comme il n'y a pas de politique de remplacement ou de lignes directrices sur l'inspection permettant de garantir l'intégrité des poches dans le temps, la probabilité de dommages augmente sensiblement avec le temps.

    Figure 1. Dégradation de la résistance du nylon (direction trame) au fil du temps
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    Dégradation de la résistance du nylon (direction trame) au fil du temps

    2.3 Normes pour les essais des radeaux de sauvetage

    Chaque membre de l'équipage du Silent Provider pesait environ 110 kg. Lorsqu'ils ont tenté d'embarquer dans l'Ovatek 4, l'arrière du radeau a été submergé, permettant l'entrée d'une grande quantité d'eau par l'écoutille arrière. Le radeau a alors perdu sa stabilité transversale, ce qui a empêché un embarquement normal. Par ailleurs, des essais ultérieurs à l'accident ont révélé que l'Ovatek 7 présentait également des lacunes : il n'a pas pu être redressé de l'extérieur lorsqu'il était renversé et inondé. Malgré ces lacunes, l'Ovatek 4 et l'Ovatek 7 ont réussi les essais d'homologation de type en regard des normes de rendement des nouveaux radeaux de sauvetage.

    Les normes existent par nécessité pragmatique, commerciale et socialeNote de bas de page 30. La raison derrière un changement radical à une norme est souvent un accident majeur ou un désastre. La Convention SOLAS par exemple a été élaborée à la suite du naufrage du Titanic. Toutefois, les normes peuvent également évoluer graduellement par suite d'analyses des tendances, de changements sociaux et en particulier de changements dans le niveau de risque jugé acceptable ou le niveau de risque perçu, entre autres. En 1997, l'OMI a reconnu le fait qu'une approche rationnelle était souhaitable en matière d'élaboration de normes et de règlements lorsqu'elle a adopté la méthode de l'évaluation formelle de la sécurité (Formal Safety Assessment ou FSA). La FSA est décrite comme étant un processus rationnel et systématique d'évaluation des risques associés à tout domaine d'activité et d'évaluation des coûts et avantages des différentes options permettant d'atténuer ces risques. Elle permet ainsi d'évaluer objectivement la nécessité de règlements de sécurité et leur contenuNote de bas de page 31. Sans un tel processus d'évaluation du risque, les normes sont plus susceptibles d'être changées radicalement après un désastre que graduellement par suite d'analyses. Il est par ailleurs concevable que de nouveaux dispositifs puissent réussir les essais exigés tout en n'étant pas entièrement adéquats, en raison de nouveaux risques non évalués.

    La stabilité, l'embarquement, le redressement et l'état inondé sont tous des éléments qui sont pris en compte dans les normes des radeaux de sauvetage, qu'elles soient canadiennes (TP 7321 et TP 11342) ou internationales. Bien que les Ovatek aient réussi les essais exigés par Transports Canada , ceux-ci n'étaient pas une mesure adéquate du rendement des radeaux dans des conditions réelles. Certaines des lacunes des présentes normes, telles que révélées par les événements entourant le présent accident, sont examinées dans les paragraphes suivants.

    2.3.1 Stabilité et embarquement

    Un radeau de survie, qu'il soit pneumatique ou rigide, est le plus vulnérable et le moins stable lors de l'embarquement d'une personne seule ou de la première personne. Une fois qu'une personne a réussi a embarqué dans le radeau, la masse de la personne peut aider à équilibrer le moment d'inclinaison longitudinale (l'assiette) ou le moment d'inclinaison transversale induits par les autres personnes qui embarquent dans le radeau. Avant ou durant l'embarquement, il y a une grande probabilité que le radeau embarque de l'eau. Par conséquent, il est raisonnable de s'attendre à ce que les normes prévoient une évaluation du rendement en présence d'un effet de carène liquide. La probabilité que des vagues soient présentes durant l'embarquement est aussi élevée, mais les normes n'exigent aucun essai de stabilité dans les vagues.

    2.3.2 Masse des occupants

    Selon les statistiques, les hommes canadiens de 20 ans et plus ont une masse moyenne de 81,5 kgNote de bas de page 32. Les statistiques sont semblables aux États-Unis. Toutefois, les essais de rendement et de capacité requis par les normes des radeaux de sauvetage se fondent sur une masse de 75 kg par personne. Vu la probabilité que la majorité des pêcheurs canadiens aient un poids au moins équivalent au poids moyen des hommes adultes au Canada, il y a aussi une forte probabilité que la marge de sécurité assurée par les normes des radeaux de sauvetage ne soit pas adéquate.

    2.3.3 Essai de redressement

    L'essai de redressement des radeaux pneumatiques exige que le tendelet soit rempli d'eau avant la tentative de redressement (ce qui correspond essentiellement à la condition inondée), mais l'essai de redressement des radeaux rigides se fait avec les écoutilles fermées et sans eau à l'intérieur. Vu la possibilité qu'un radeau rigide soit inondé dès que l'écoutille est ouverte pour l'embarquement, il serait raisonnable de prévoir que les normes des radeaux évalueraient le rendement en présence d'un effet de carène liquide.

    2.3.4 Spécifications du matériau des poches de stabilisation à eau

    Des normes ont été établies pour tous les éléments entrant dans la construction d'un radeau de survie sauf pour les poches à eau. Il n'y a pas d'exigences en matière d'essais visant la résistance minimale d'échantillons du tissu des poches à eau. Par conséquent, le rendement des poches à eau ne peut pas raisonnablement être garanti. De plus, du fait de leur exposition aux intempéries quand le radeau est à poste, les poches à eau des Ovatek sont vulnérables à la dégradation de leur résistance. Les essais du BST ont indiqué que les conditions des essais face aux intempéries ne suffisent pas pour évaluer la dégradation de la résistance et la résistance aux intempéries sur plusieurs annéesNote de bas de page 33.

    Pour qu'un radeau de survie puisse répondre à l'objectif qui lui est confié, il doit être capable d'un rendement acceptable en fonction d'attentes raisonnables quant à son utilisation, ses dimensions, la masse des utilisateurs, les vagues et les conditions météorologiques. Les normes actuelles des radeaux de sauvetage ne tiennent pas compte de ces attentes.

    2.4 Survie en eau froide

    Ne réussissant pas à stabiliser le radeau ou à embarquer aisément dans le radeau, les deux membres de l'équipage ont décidé de s'accrocher à l'extérieur et sont restés à l'eau environ une heure avant leur sauvetage. Leur seul moyen de protection contre l'eau de 10°C était leur combinaison d'immersion.

    Depuis leur adoption par l'industrie maritime, les combinaisons d'immersion se sont avérées un moyen efficace et fiable de prolonger la survie à l'eau. Le BST a constaté des cas où les combinaisons d'immersion ont sauvé des vies.

    • En décembre 1990, un membre de l'équipage d'un bateau de pêche a été rescapé après sept heures dans l'eau froide.
    • En janvier 1993, un membre de l'équipage d'un bateau de pêche a été rescapé après environ cinq heures dans la mer glaciale.
    • En février 1995, un membre de l'équipage d'un bateau de pêche a été rescapé après plus de deux heures dans l'eau froide.
    • En décembre 2001, sur un équipage de quatre personnes, les deux personnes portant une combinaison d'immersion ont survécu mais une seule des personnes qui ne portaient pas de combinaison a eu la vie sauve.

    L'absence de combinaison d'immersion ou l'utilisation fautive de la combinaison augmente le risque de mort par hypothermie. Dans le cas présent, les deux membres de l'équipage avaient une combinaison d'immersion et l'ont utilisée, ce qui a assuré une certaine protection contre l'hypothermie.

    3.0 Faits établis

    3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

    1. Du fait que le Silent Provider a coulé, il n'a pas pu faire l'objet d'un examen en vue de déterminer la cause de l'incendie.
    2. Le moteur n'a pas pu être coupé par le coupe-circuit et la ventilation du compartiment moteur n'a pas été fermée avant l'activation du dispositif d'extinction par halon. Le moteur a consommé et expulsé du halon, et de l'oxygène a pu pénétrer librement dans le compartiment moteur, ce qui a permis au feu de s'intensifier.

    3.2 Faits établis quant aux risques

    1. Malgré l'attention accordée aux principes de la lutte contre l'incendie dans la formation aux fonctions d'urgence en mer, le fait que des pêcheurs utilisent des tactiques inadéquates de lutte contre l'incendie en cas d'urgence expose les membres d'équipage et les navires à des risques.
    2. Les poches de stabilisation à eau en nylon de l'Ovatek 4 sont vulnérables aux dommages mécaniques durant la mise à l'eau du radeau, aux intempéries environnementales et à une dégradation de leur résistance au fil du temps; pourtant, il n'y a pas de politique de remplacement ou de lignes directrices sur l'inspection permettant de garantir leur intégrité.
    3. L'information et les indications quant aux mesures à prendre pour redresser un Ovatek inondé ne figurent pas dans la vidéo d'instruction ni dans le manuel de l'utilisateur de l'Ovatek.
    4. Les lacunes des normes canadiennes et internationales visant les essais des radeaux de sauvetage compromettent la capacité de survie des marins qui doivent abandonner leur navire. Les points suivants sont particulièrement préoccupants :
      • les exigences concernant la stabilité et l'embarquement;
      • la masse corporelle moyenne supposée de 75 kg des occupants;
      • l'essai de redressement;
      • l'absence de normes sur la résistance à la traction et au déchirement du tissu des poches de stabilisation à eau.
    5. L'eau embarquée par l'écoutille arrière et retenue sur le plancher du radeau a diminué la stabilité de l'Ovatek, gênant les tentatives des membres de l'équipage de stabiliser le radeau et de l'utiliser comme prévu.
    6. Une formation sur les radeaux de sauvetage rigides n'est pas prévue dans le programme de formation aux fonctions d'urgence en mer, et les membres de l'équipage n'ont pas pris les moyens de se familiariser avec les caractéristiques du radeau rigide. Le manque de familiarisation avec un engin de sauvetage essentiel peut rendre cet engin de sauvetage moins efficace.
    7. De nombreux Ovatek 4 et Ovatek 7 datant du début de la production ne sont pas dotés d'une pompe d'assèchement manuelle. De ce fait, les utilisateurs ne peuvent procéder à l'assèchement préconisé par le fabricant lorsque le radeau est inondé, ce qui les expose à des risques inacceptables.

    3.3 Autres faits établis

    1. Le mécanisme de fermeture de l'écoutille arrière était défectueux, ce qui compromettait l'étanchéité aux intempéries du radeau.
    2. L'utilisation des combinaisons d'immersion a assuré une certaine protection contre l'hypothermie.

    4.0 Mesures de sécurité

    4.1 Mesures de sécurité prises

    4.1.1 Mesures prises par le Bureau de la sécurité des transports

    Le 22 septembre 2003, le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a envoyé à Transports Canada l'avis de sécurité maritime 04/03 signalant des lacunes de sécurité liées au rendement du radeau de sauvetage Ovatek 4, notamment :

    • les dispositifs de blocage à ressort de l'écoutille arrière ne s'enclenchaient pas entièrement;
    • l'écoutille arrière ne pouvait pas être rendue étanche aux intempéries parce que la forme de l'écoutille n'épousait pas celle de la coque;
    • les poches de stabilisation à eau (poches à eau) extérieures sont vulnérables :
      • - aux dommages durant leur utilisation,
      • - à l'usure du matériau, ce qui mine leur résistance à la traction et au déchirement;
    • la stabilité semble diminuée une fois que de l'eau a été embarquée et est retenue sur le plancher du radeau.

    Également le 22 septembre 2003, le BST a envoyé à Transports Canada l'avis de sécurité maritime 06/03 signalant des lacunes dans la formation à l'utilisation des radeaux rigides, soulignant que même s'il existe des ressemblances entre les modalités de mise à l'eau des radeaux pneumatiques et des radeaux rigides (Ovatek), il y a aussi certaines différences notables. Transports Canada a accepté le radeau rigide Ovatek comme option aux radeaux pneumatiques, mais la formation visant ce type de radeau de survie n'est pas prévue dans le programme de formation aux fonctions d'urgence en mer (FUM).

    Ce même 22 septembre 2003, le BST a également envoyé à Transports Canada la lettre d'information sur la sécurité 09/03. Celle-ci informait Transports Canada de la préoccupation persistante du Bureau au sujet des tactiques inadéquates de lutte contre l'incendie utilisées sur les bateaux de pêche. Les pêcheurs, en général, ne semblent pas avoir intégré d'exercice d'utilisation des dispositifs fixes d'extinction d'incendie dans leurs routines professionnelles, de sorte qu'on continue de déplorer des pertes de vie et de navire en raison d'incendies dans la salle des machines, même à bord de navires équipés d'un dispositif fixe d'extinction d'incendie.

    Le 13 novembre 2003, des représentants du BST ont rencontré des employés de Normes, construction et équipement de Transports Canada. Le BST a alors présenté une séance d'information sur les observations faites durant les essais en bassin les 23 septembre et 15 octobre et il a exprimé les préoccupations que suscitent les lacunes perçues des normes canadiennes et internationales concernant les essais des radeaux de sauvetage ainsi que les lacunes du programme d'essais d'Ovatek Inc. Au même moment, le BST a remis l'avis de sécurité maritime 07/03, officialisant la communication de sécurité donnée dans la séance d'information. Des photocopies de toutes les communications de sécurité touchant les radeaux Ovatek ont été remises à Ovatek Inc.

    4.1.2 Mesures prises par Transports Canada

    Le 29 juillet 2003, Transports Canada a informé la Garde côtière américaine (USCG) des problèmes possibles de l'Ovatek 4 et de son intention d'ajouter une condition au certificat d'approbation. Selon cette condition, le radeau doit être inspecté à la même fréquence que le navire sur lequel il est installé.

    Le 29 octobre 2003, Transports Canada a répondu à l'avis de sécurité maritime 04/03 en précisant que des inspecteurs de Transports Canada avaient visité les installations de production d'Ovatek Inc. et constaté que les mesures correctrices avaient été prises face au problème du vieillissement aux intempéries apparent et du risque de dommages aux poches à eau extérieures de l'Ovatek 4. En outre, Transports Canada a précisé que le fabricant a mis au point un nouveau dispositif de stabilisation pour l'Ovatek 4 qui est semblable au dispositif de l'Ovatek 7 (sans sacs de stabilisation). Le nouveau dispositif subira des essais d'homologation avant d'être approuvé.

    Également le 29 octobre 2003, en réponse à l'avis de sécurité maritime 06/03, Transports Canada a informé le BST que la publication Programme de formation aux fonctions d'urgence en mer (TP 4957) et les cours FUM A3 et FUM A4 seraient modifiés pour y ajouter une formation spéciale sur l'embarquement à bord d'un radeau de sauvetage rigide. Dans une communication ultérieure, Transports Canada a indiqué qu'il allait modifier les programmes FUM pertinents touchant la formation des pêcheurs en tenant compte des risques soulignés dans le présent rapport.

    Le 24 novembre 2003, Transports Canada a rencontré des représentants d'Ovatek Inc. pour discuter des questions soulevées par le BST dans ses communications de sécurité et pour organiser des essais en bassin supplémentaires.

    Les 29 et 30 mars 2004, Transports Canada a effectué des essais sur l'Ovatek 4 et l'Ovatek 7, pour vérifier l'état de l'homologation et évaluer les changements mineurs apportés aux deux modèles de radeau face aux problèmes décrits dans les communications de sécurité du BST (voir le paragraphe 4.1.3). Les essais ont confirmé que le radeau respecte les normes actuelles. Des essais ont aussi été effectués avec des vagues pour évaluer le comportement du radeau pendant l'embarquement. Ces essais dépassent les exigences des normes actuelles. Des représentants du BST ont assisté aux essais en tant qu'observateurs.

    Transports Canada participe actuellement à deux études distinctes dont les résultats préliminaires indiquent :

    • que la masse standardisée de 75 kg est insuffisante pour les essais d'homologation;
    • que des données anthropométriques plus détaillées sont nécessaires pour définir les sujets des essais d'homologation.

    Les résultats des deux études ont été présentés pour examen à la 48e session du sous-comité sur la conception et l'équipement (Organisation maritime internationale) en février 2005. Transports Canada cherchera à obtenir des modifications au protocole d'essai SOLAS de façon à mieux définir les sujets des essais.

    4.1.3 Mesures prises par Ovatek Inc.

    Ovatek Inc. a entrepris de renseigner les propriétaires de radeaux Ovatek sur les problèmes possibles d'étanchéité aux intempéries de l'écoutille arrière. De plus, des représentants d'Ovatek Inc. ont visité une cinquantaine d'installations existantes pour vérifier l'état général des radeaux de sauvetage.

    Ovatek Inc. a également entrepris à l'hiver 2003-2004 d'importantes activités de recherche-développement. Un certain nombre de changements ont été apportés ou sont envisagés.

    • L'écope est maintenant fixée en place lorsqu'un radeau Ovatek est expédié.
    • Les problèmes d'étanchéité aux intempéries de l'écoutille arrière ont fait l'objet de diverses mesures, y compris l'augmentation de la pénétration du verrou et le resserrement du contrôle de la qualité durant la fabrication.
    • Un avertissement est maintenant apposé sur le seuil de l'écoutille d'embarquement, rappelant qu'il faut entrer tête première.
    • Sous réserve de l'approbation de Transports Canada, l'embarquement sera encore facilité par l'ajout d'une sangle fixée à l'intérieur, au fond de l'Ovatek 4 et de l'Ovatek 7.
    • Sous réserve de l'approbation de Transports Canada, le redressement de l'Ovatek 4 sera encore facilité par l'ajout d'une sangle de redressement.
    • Une nouvelle vidéo et de nouvelles directives écrites seront produites et expédiées avec chaque nouveau radeau vendu. Elles comprendront de l'information sur l'assèchement d'un Ovatek inondé, sur son redressement et sur l'entrée tête première.
    • l'évaluation d'un prototype se poursuit en vue de remplacer les poches de stabilisation à eau en tissu de l'Ovatek 4 par un dispositif intégré en fibre de verre semblable à celui de l'Ovatek 7.

    4.2 Mesures à prendre

    4.2.1 Radeaux rigides Ovatek

    Comme le mentionne ce rapport, le radeau rigide Ovatek a des atouts dans la plupart des domaines où les radeaux pneumatiques ont des faiblesses. Les radeaux Ovatek :

    • résistent à la chaleur et aux flammes grâce à leur stratifié ignifuge;
    • sont essentiellement insubmersibles et servent de dispositif flottant;
    • peuvent aisément être inspectés par les propriétaires;
    • peuvent aisément être utilisés lors d'exercices d'entraînement, sans coûts et sans guère de difficultés;
    • n'exigent aucun gonflement, évitant les problèmes associés à ce processus;
    • peuvent servir d'abri en cas d'urgence (autre qu'un incendie).

    Un radeau rigide en fibre de verre, comme l'Ovatek, est foncièrement plus robuste qu'un radeau pneumatique en textile enduit de caoutchouc. Cependant, la présente enquête a révélé que les radeaux de sauvetage de cette marque comportent des lacunes qui demeurent non résolues.

    • Les poches à eau en nylon de l'Ovatek 4 sont vulnérables aux dommages mécaniques lors de la mise à l'eau, ainsi qu'aux intempéries environnementales, ce qui diminue la résistance du tissu.
    • Les poches à eau en nylon subissent une dégradation avec le temps, et il n'y a pas de politique de remplacement ou de lignes directrices sur l'inspection permettant de garantir l'intégrité des poches.
    • L'eau embarquée par l'écoutille arrière du radeau et retenue sur le plancher diminue la stabilité de l'Ovatek 4, entravant les tentatives d'utiliser le radeau comme prévu. Bien que le radeau soit essentiellement insubmersible, l'information limitée fournie avec le produit et l'absence de formation à l'égard des mesures à prendre en présence d'un effet de carène liquide peuvent exposer les équipages à des risques.
    • Les premiers radeaux Ovatek 4 et Ovatek 7 ne sont pas dotés d'une pompe d'assèchement manuelle. Les utilisateurs ne peuvent procéder à l'assèchement maintenant préconisé par le fabricant lorsque le radeau est inondé. Par ailleurs, les propriétaires des premiers radeaux ne sont pas renseignés sur la technique d'assèchement puisque les premiers manuels de l'utilisateur et les premières vidéos ne contiennent pas cette information.

    À la suite de l'enquête et en réponse à certaines des lacunes de sécurité soulignées, Ovatek Inc. a pris des mesures positives à l'égard de l'écope et des problèmes d'étanchéité aux intempéries de l'écoutille arrière. Ovatek Inc. attend l'approbation de Transports Canada pour ajouter une poignée d'embarquement intérieure qui facilitera grandement l'entrée dans le radeau. Ovatek Inc. étudie également la possibilité de remplacer les poches à eau en nylon par un dispositif de stabilisation permanent en fibre de verre semblable à celui de l'Ovatek 7.

    Malgré les améliorations apportées par Ovatek Inc. et celles envisagées, certaines questions de sécurité demeurent en instance. Le Bureau se préoccupe du fait que sans information de sécurité sur l'assèchement et le redressement d'un Ovatek inondé, sans un équipement adéquat comme une pompe d'assèchement manuelle (pour les personnes qui ont acheté des radeaux Ovatek avant que cet équipement ne soit fourni en série) et sans l'expérience nécessaire pour utiliser ces radeaux correctement lorsqu'ils sont inondés, les propriétaires de radeaux Ovatek seront exposés à des risques plus grands, s'ils doivent les utiliser. Par conséquent, le Bureau recommande que :

    Le ministère des Transports, de concert avec le fabricant, veille à ce que tous les propriétaires actuels et futurs de radeaux de sauvetage Ovatek reçoivent l'information qui permettra aux utilisateurs d'assécher et de redresser efficacement un radeau inondé, et encourage tous les utilisateurs à s'y entraîner.
    Recommandation M05-02 du BST

    4.2.2 Normes pour les essais des radeaux rigides et pneumatiques

    Les radeaux pneumatiques sont souvent utilisés dans des conditions qui sont sensiblement plus difficiles que celles des essais en bassin d'eau calme. L'enquête révèle que même si le radeau rigide réussit les essais de stabilité ainsi que les essais à l'état inondé, à l'embarquement et au redressement, il ne fonctionne pas comme prévu dans des conditions réelles. Lorsque le radeau est inondé, l'embarquement devient très difficile (à moins d'appliquer la nouvelle technique), ce qui rend le radeau inefficace par rapport à son utilisation prévue.

    Diverses enquêtes sur des accidents survenus au Canada et à l'étranger ont révélé que des radeaux n'avaient pas eu un rendement entièrement satisfaisant. Les cas suivants en sont des exemples :

    • Le 10 avril 1995, le bateau de pêche Hili-Kum embarque de l'eau et chavire dans le détroit d'Hécate (Colombie-Britannique). L'équipage met un radeau pneumatique à l'eau et abandonne le navire, mais le radeau chavire plusieurs fois. Sur les trois membres de l'équipage, un seul a survécu.
    • Le 28 septembre 1994, le traversier roulier à passagers Estonia chavire et coule dans la mer Baltique; 852 passagers et membres de l'équipage perdent la vie. Les passagers et les membres de l'équipage ont eu du mal à embarquer dans les radeaux, les radeaux ont chaviré plusieurs fois et les tendelets n'ont pas voulu se gonfler.
    • Le 26 novembre 1999, le traversier rapide Sleipner s'échoue et coule lors d'un voyage entre Stavanger et Bergen, en Norvège; 16 passagers perdent la vie. Deux radeaux avaient été mis à l'eau, mais un ne s'est pas gonflé et l'autre a chaviré sous l'action des vagues et du vent.

    La survie en mer dépend dans une grande mesure du fait que l'équipement de survie fonctionne comme prévu. En outre, lorsqu'un radeau est mis à l'eau en cas d'urgence, les survivants doivent composer avec des conditions qui peuvent être défavorables à l'utilisation efficace du radeau. Par exemple, la mer peut être agitée, le radeau peut prendre l'eau avant ou pendant l'embarquement, il peut se renverser ou il peut y avoir des blessés. En conséquence, il est essentiel que les normes pour les essais des radeaux de sauvetage, qu'ils soient rigides ou pneumatiques, produisent une mesure du rendement en fonction de l'utilisation prévue, idéalement dans les conditions réelles d'utilisation. À l'heure actuelle, ce n'est pas le cas. Les normes canadiennes, qui sont dérivées des normes de l'OMI, prévoient que des essais essentiels visant par exemple l'inondation, le redressement, la stabilité et l'embarquement se fassent indépendamment les uns des autres, et en eau calme. La stabilité des radeaux équipés de poches à eau dépend aussi de l'intégrité des poches à eau. Pourtant, les normes ne prévoient pas d'essais pour les matériaux des poches à eau, et il n'y a pas d'exigences minimales adéquates quant à leur résistance compte tenu de leur utilisation. En 2004, la Garde côtière canadienne a entrepris une étude intitulée « Rendement des radeaux de sauvetage durant l'évacuation, le sauvetage et la récupération ». L'étude se concentrera toutefois sur les exigences en matière d'aptitudes physiques, de connaissances et de compétences du personnel dans les radeaux de sauvetage; elle ne vise pas à faire enquête sur les lacunes cernées à la suite du présent accident.

    En réponse aux lacunes observées des radeaux de sauvetage lors du chavirement du Estonia en 1994, la commission d'enquête conjointe qui s'est penchée sur l'accident a recommandé entre autres [Traduction] « des mesures urgentes en vue de mettre au point des concepts et de l'équipement de sauvetage nouveaux, surtout pour les navires à passagers transportant de grands nombres de personnes non formées qui pourraient avoir à être secourues ».

    Cependant, la mise au point de tels nouveaux concepts de sauvetage est entravée par le manque de normes maritimes fondées sur le rendement de l'équipement de sauvetage. De telles normes devraient tenir compte des paramètres opérationnels et environnementaux qui peuvent raisonnablement être prévus durant l'utilisation, et fixer des critères de rendement en conséquence. Ces normes permettraient à l'industrie d'innover dans la recherche-développement visant de nouveaux dispositifs de sécurité. Des améliorations constantes à la conception de l'équipement et des progrès techniques pourraient augmenter le degré de sécurité et de protection pour les marins et les passagers.

    Le Bureau sait que le Règlement de l'aviation canadienNote de bas de page 34 exige que les radeaux de sauvetage conçus pour être transportés à bord des aéronefs soient soumis à des essais en mer. Le règlement exige que

    des essais, une analyse ou à la fois des essais et une analyse démontrent que le radeau de sauvetage est capable de tenir la mer dans des conditions de haute mer avec des vents de 17 à 27 nœuds et des vagues de 6 à 10 pieds,

    et que

    le radeau de sauvetage soit déployé de façon à simuler un déploiement à partir d'un aéronef en présence de vents soufflant dans la direction la plus défavorable et de vagues les plus défavorables.

    Même si Transports Canada reconnaît l'importance d'essais fondés sur le rendement pour les radeaux de sauvetage dans l'industrie de l'aviation, une telle démonstration pratique des capacités des radeaux de sauvetage dans des conditions réelles d'utilisation n'est pas requise pour les radeaux à bord des navires canadiens. Le Bureau se préoccupe du fait que les radeaux sont homologués sans une prise en compte complète des conditions réelles d'utilisation, comme l'embarquement ou le maintien de la stabilité avec de l'eau à bord du radeau, ou l'embarquement en présence de vagues. En outre, les normes canadiennes et internationales pour l'essai et la certification des radeaux rigides et des radeaux pneumatiques ne tiennent pas suffisamment compte du rendement, ce qui expose les passagers et les membres d'équipage à des risques inacceptables. Par conséquent, le Bureau recommande que :

    Le ministère des Transports formule et adopte des normes fondées sur le rendement pour s'assurer que tous les radeaux de sauvetage à bord des navires canadiens sont aptes à être utilisés dans des conditions maritimes particulièrement mauvaises, et qu'il encourage l'Organisation maritime internationale à adopter une démarche semblable à l'échelle internationale.
    Recommandation M05-03 du BST

    4.3 Préoccupations liées à la sécurité

    4.3.1 Tactiques de lutte contre l'incendie à bord des bateaux de pêche

    L'efficacité du dispositif d'extinction par halon du Silent Provider a été compromise en raison d'un certain nombre d'événements imputables pour la plupart aux actions de l'équipage :

    • le moteur n'a pas été coupé;
    • les accès au compartiment moteur n'ont pas été tous fermés;
    • l'alimentation en combustible n'a pas été coupée;
    • la porte du compartiment moteur a été ouverte à un moment délicat, pour vérifier si le halon avait été déchargé.

    Le Bureau a exprimé des préoccupations au sujet des pertes importantes subies par la flotte de pêche canadienne par suite d'incendies dans la salle des machinesNote de bas de page 35. Bien que les pêcheurs reçoivent maintenant une formation en lutte contre l'incendie dans les nouveaux cours obligatoires FUM A3 et FUM A4, cette formation tente d'aborder la gamme complète des fonctions d'urgence y compris le sauvetage, l'abandon, la survie, la lutte contre l'incendie, les mesures d'urgence, les questions relatives à la réglementation et à l'environnement, le matelotage, la conduite des navires, la météorologie et les opérations de sauvetage - le tout en huit heures. Il n'est actuellement pas sûr que les techniques essentielles de lutte contre l'incendie reçoivent toute l'attention voulue dans cette formation.

    Des tactiques inefficaces de lutte contre l'incendie dans la salle des machines de bateaux de pêche ont été notées lors d'événements passés. On continue de déplorer des pertes de vie et de bateaux de pêche en raison d'incendies dans la salle des machines de navires dotés d'un dispositif fixe d'extinction d'incendie. Bien qu'il revienne au capitaine de veiller, au moyen d'exercices et d'un entraînement, à ce que les membres d'équipage connaissent bien le dispositif d'extinction d'incendie du bord, de nombreux pêcheurs, y compris des capitaines, ne savent pas comment utiliser correctement une installation fixe d'extinction d'incendie pour combattre un incendie dans la salle des machines.

    Le Bureau se préoccupe du fait que le niveau d'aptitude en lutte contre l'incendie est inadéquat parmi les pêcheurs et que le risque qui en découle compromet la sécurité.

    4.3.2 Détermination de la masse normale

    Les statistiques révèlent que plus de la moitié de tous les hommes de plus de 20 ans au Canada et aux États-Unis ont une masse d'au moins 80 kg. Un critère clé servant à évaluer le rendement d'un engin de sauvetage est fondé, comme en témoigne le cas à l'étude, sur une valeur inférieure à la moyenne.

    Bien que Transports Canada, de concert avec les États-Unis et la Suède, ait abordé cette question auprès de l'OMI, on ignore encore si une nouvelle masse normale sera convenue et si elle sera adéquate. Il serait logique qu'un engin de sauvetage fasse l'objet d'essais à une masse supérieure à la masse moyenne pour créer une marge de sécurité pour la majorité des utilisateurs. Des décisions sur de telles questions devraient se fonder sur les statistiques et le recours à des méthodes anthropométriques rigoureuses. La tendance à l'augmentation de la masse des personnes fait également de la masse normale un sujet de préoccupation dans l'industrie du transport aérien. À la suite de l'écrasement fatal du vol 126 de Georgian Express en janvier 2004, le BST a recommandé que Transports Canada reconsidère les poids standard publiés pour les passagers et les bagages de cabine, et les rajustent pour tous les aéronefs de façon à tenir compte des réalités actuelles.

    Malgré les progrès réalisés sur cette question, le Bureau continue de s'inquiéter du fait que la masse normale utilisée actuellement pour les essais des radeaux de survie est inadéquate et qu'une nouvelle masse normale pourrait ne pas être adéquate pour assurer un rendement acceptable des engins de sauvetage construits pour des groupes particuliers comme les pêcheurs. Le Bureau continuera de suivre l'évolution de ce dossier.

    Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .

    5.0 Annexes

    Annexe A - Croquis des lieux de l'accident

    Annexe A. Croquis des lieux de l'accident
    Image
    Croquis des lieux de l'accident

    Annexe B - Résumé des essais en bassin du Bureau de la sécurité des transports

    Essais d'embarquement (personne de 110 kg entrant tête première)
    Ovatek 4 équipé de poches à eau radeau à sec Le radeau prend une assiette sur cul et embarque une importante quantité d'eau par l'écoutille d'embarquement.
    eau dans le radeau Le radeau prend une assiette sur cul, embarque encore de l'eau par l'écoutille d'embarquement et bascule sur le côté lorsqu'une première personne tente d'embarquer dans le radeau, sans succès.
    non équipé de poches à eau radeau à sec Le radeau non équipé de poches à eau prend une assiette sur cul et embarque une importante quantité d'eau par l'écoutille d'embarquement. Le radeau se comporte à peu près de la même manière que le radeau équipé de poches à eau.
    eau dans le radeau Essai non réalisé.
    Ovatek 7 avec du lest radeau à sec Le radeau prend une assiette légèrement sur cul lorsqu'une personne embarque dans le radeau. Aucune eau n'est embarquée par l'écoutille d'embarquement.
    eau dans le radeau Le radeau prend une forte assiette sur cul et une légère gîte lorsqu'une personne embarque dans le radeau. Aucune eau n'est embarquée par l'écoutille d'embarquement.
    Essais de redressement
    Ovatek 4 écoutilles fermées (radeau à sec) Le radeau renversé se remet à l'endroit sans aide.
    écoutilles ouvertes (présence d'eau) Le radeau reste renversé, mais peut être redressé par une personne seule. En l'absence d'une sangle de redressement, les personnes à l'eau ont tendance à s'agripper aux poches à eau extérieures et à tirer sur elles pour redresser le radeau.
    Ovatek 7 écoutilles fermées (radeau à sec) Le radeau renversé se remet à l'endroit sans aide.
    écoutilles ouvertes (présence d'eau) Le radeau renversé prend une gîte de presque 90°. Deux personnes à l'eau tentent de le redresser, sans succès.

    Annexe C - Essais d'un intérêt particulier pour l'enquête

    Les essais d'homologation de type qui sont d'un intérêt particulier pour la présente enquête sont décrits ci-dessousNote de bas de page 36.

    Essai d'amarrage - Un radeau de sauvetage est chargé d'une masse équivalente à la masse du nombre total de personnes qu'il doit accueillir, à raison de 75 kg par personne, et à la masse de son équipement. Il doit être amarré en mer ou dans un port de mer. Le radeau doit rester à flot pendant au moins 15 jours (30 jours d'après les Normes relatives aux radeaux de sauvetage et aux plates-formes de sauvetage pneumatiques [TP 7321] et la norme SOLAS). Dans le cas d'un radeau pneumatique, la pression peut être rétablie une fois par jour au moyen d'une pompe à main ou d'un soufflet. Toutefois, le radeau doit conserver sa forme pendant au moins 24 heures consécutives. À l'issue de la période d'amarrage, le radeau ne doit avoir subi aucun dommage susceptible de nuire à son fonctionnement.

    Essai de chargement et vérification du nombre de places assises - Le franc-bord du radeau à l'état lège, avec l'équipement complet mais sans le personnel, doit être enregistré avant cet essai. Le franc-bord est à nouveau enregistré après que les personnes qu'il doit accueillir, à raison de 75 kg par personne, portant chacune une combinaison d'immersion, sont montées à bord et se sont assises. Dans cette condition, on doit établir que toutes les personnes assises ont suffisamment de place et disposent d'une hauteur libre suffisante au-dessus de leur tête. Le franc-bord ne doit pas être inférieur à 300 mm.

    Essai d'embarquement - L'essai d'embarquement doit être effectué dans une piscine par une équipe de quatre personnes au maximum qui doivent être d'âge mûr et de morphologies différentes. Les personnes choisies devront de préférence ne pas être de bons nageurs et l'une d'entre elles doit peser moins de 75 kg. Pour cet essai, les personnes doivent être vêtues d'une chemise et d'un pantalon ou d'un bleu de travail et elles doivent porter une combinaison d'immersion approuvée. Chaque personne doit nager sur 100 m environ avant d'atteindre le radeau, puis tenter de se hisser à bord immédiatement. Chaque personne doit tenter de se hisser à bord sans l'aide des autres nageurs ou des personnes qui se trouvent déjà à bord. La profondeur de l'eau doit être suffisante pour que les nageurs ne puissent pas se hisser à bord en s'aidant d'un appui extérieur. Les dispositions d'embarquement sont jugées satisfaisantes si trois des quatre personnes se hissent à bord du radeau sans assistance et que la quatrième y prend place avec l'aide des trois autres.

    Essai de stabilité - La stabilité du radeau doit être déterminée de la façon suivante. Deux personnes portant l'une et l'autre une combinaison d'immersion doivent d'abord monter dans le radeau vide. On doit démontrer que ces deux personnes peuvent facilement hisser à bord une troisième personne, portant également une combinaison d'immersion, qui simule un évanouissement. La troisième personne doit tourner le dos au radeau de manière à ne pas pouvoir aider les sauveteurs. Au cours de cet essai, on doit démontrer que les poches d'eau neutralisent le moment de chavirement du radeau et qu'il n'y a aucun risque de le voir chavirer.

    Essai de submersion - On doit démontrer que, lorsque le radeau est complètement rempli d'eau, il peut porter le nombre de personnes qu'il doit accueillir en étant toujours capable de tenir la mer sans se déformer gravement. On doit soumettre le radeau à un essai dans au moins 10 vagues d'au moins 0,3 m de hauteur (0,9 m de hauteur d'après la norme SOLAS). On peut créer les vagues grâce au sillage d'un bateau ou à tout autre moyen satisfaisant.

    Essai de redressement (radeaux pneumatiques) - Pour cet essai, un radeau gonflé et chargé de son ensemble d'équipement le plus lourd doit être retourné et à flot. On doit ouvrir les entrées, les orifices et autres ouvertures pratiquées dans le tendelet afin de laisser l'eau y pénétrer lorsque le radeau est retourné. Le tendelet doit être rempli d'eau. Au besoin, on abaissera partiellement son support. Les dispositions de redressement seront jugées satisfaisantes si chacune des personnes redresse le bateau sans aide.

    Essai de redressement (radeaux rigides) - Le radeau est placé dans l'eau et retourné, s'il ne s'agit pas d'un modèle qui peut être utilisé d'un côté ou de l'autre. Les dispositions de redressement seront jugées satisfaisantes si chacune des personnes redresse le radeau sans aide. Pour cet essai, on ne doit pas laisser l'eau pénétrer dans le radeau avant le redressement.

    Annexe D - Sigles et abréviations

    BST
    Bureau de la sécurité des transports du Canada
    cm
    centimètre
    CO2
    dioxyde de carbone
    FSA
    Formal Safety Assessment, terme anglais pour évaluation formelle de la sécurité
    FUM
    fonctions d'urgence en mer
    HAA
    heure avancée de l'Atlantique
    kg
    kilogramme
    kW
    kiloWatt
    lb
    livre
    lb/po²
    livre par pouce carré
    m
    mètre
    mm
    millimètre
    MSC
    Comité de la sécurité maritime
    N
    newton
    N
    nord
    N/mm
    newton par millimètre
    OMI
    Organisation maritime internationale
    S.O.
    sans objet
    SOLAS
    Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer
    TP
    publication de Transports Canada
    TP 1324
    Spécification relative aux textiles revêtus utilisés dans la fabrication des embarcations de survie pneumatiques
    TP 7321
    Normes relatives aux radeaux de sauvetage et aux plates-formes de sauvetage pneumatiques
    TP 11342
    Radeau de sauvetage côtier
    TSO
    Aviation Technical Standard Orders, terme anglais pour normes techniques
    VHF
    très haute fréquence
    W
    ouest
    minute
    °
    degré
    ° C
    degré Celsius

    Appendices

    Appendix A - Occurrence area (enlarged)

    Appendix B – Summary of Transportation Safety Board of Canada Pool Tests

    Boarding Tests (110 kg person boarding head first)
    Ovatek 4 with water pockets dry Liferaft trimmed and took on a substantial amount of water through the boarding hatch.
    water inside Liferaft trimmed, took on additional water through the boarding hatch, and subsequently heeled on its side when first boarder attempted entry. Entry not accomplished.
    without water pockets dry Liferaft trimmed and took on a substantial amount of water through the boarding hatch. The liferaft behaved in a similar fashion to the liferaft with water pockets.
    water inside — test not performed —
    Ovatek 7 ballasted dry Liferaft trimmed slightly as boarder entered. No water was taken on through the boarding hatch.
    water inside Liferaft trimmed noticeably and heeled slightly as boarder entered. No water was taken on through the boarding hatch.
    Righting Tests
    Ovatek 4 hatches closed (dry) Overturned liferaft returned to upright position without assistance.
    hatches open (wet) Overturned liferaft remained overturned, but could be righted with assistance from one person. Without the benefit of a line or strap to aid in righting, people in the water tended to grab and pull on the external water pockets to turn liferaft over.
    Ovatek 7 hatches closed (dry) Overturned liferaft returned to upright position without assistance.
    hatches open (wet) Overturned liferaft assumed a near 90-degree orientation on its side. Attempts to right it by two people in the water were not successful.

    Appendix C – Description of Type Approval Tests Relevant to this Investigation

    The liferaft type approval tests that are of specific interest to this investigation are described in the following paragraphs.Footnote 36

    Mooring Out Test – A liferaft is loaded with a mass equal to the total number of persons that it is to accommodate (each having an average mass of 75 kg) and its equipment, and is moored in a location at sea or in a seawater harbour. The loaded liferaft must then remain afloat for a period of not less than 15 days (30 days for TP 7321 and the SOLAS standard). In the case of an inflatable liferaft, the pressure may be topped up once a day using the manual pump or bellows; however, during any 24-hour period, the liferaft must retain its shape. Upon completion of the mooring out period, the liferaft must not have sustained any damage that would impair its performance.

    Loading and Seating Test – The freeboard of the liferaft in the light condition, including full equipment but not personnel, must be recorded prior to this test. The freeboard of the liferaft is again recorded once the full complement, having an average mass of 75 kg and each wearing an immersion suit, have boarded and are seated. In this condition, occupants must have sufficient space and headroom and the freeboard must be at least 300 mm.

    Boarding Test – The boarding test is to be carried out in a swimming pool by a team of not more than four people who should be of mature age, of differing physiques, and preferably not strong swimmers. At least one subject shall weigh less than 75 kg. For this test, individuals are to be clothed in shirt and trousers, or a coverall, and be wearing an approved immersion suit. Prior to boarding the liferaft, each individual is to swim about 100 m and, on reaching the liferaft, are to attempt to board it immediately. Each individual must attempt to board the liferaft individually with no assistance from the other swimmers or anyone already on board, and the water must be of sufficient depth to prevent any external assistance when boarding. Liferaft boarding arrangements are considered satisfactory if three of the four individuals board the liferaft unaided, and the fourth boards with the assistance of the others.

    Stability Test – To test the stability of a liferaft, two people, each wearing an immersion suit, must first board the empty liferaft and then demonstrate that they can readily assist from the water a third person, also wearing an immersion suit, who is required to feign unconsciousness. The third person must have his or her back towards the liferaft so that he or she cannot assist the rescuers. In this test, it must be ascertained that the water pockets of the liferaft adequately counteract the upsetting movement on the liferaft, and that there is no danger of the liferaft capsizing.

    Swamp Test – It must be demonstrated that the liferaft, when in a fully swamped condition, is capable of supporting the number of people it is designed to accommodate, remains seaworthy, and will not seriously deform. It must be tested in at least 10 waves of at least 0.3 m height (SOLAS requires waves of 0.9 m height). The waves may be produced by the wake of a boat or by other suitable means.

    Righting Test (Inflatable Liferafts) – Before attempting this test, an inflated liferaft is loaded with its heaviest equipment pack and inverted in the water. All entrances, ports, and other openings in the liferaft canopy must be opened to allow the infiltration of water into the canopy when capsized. The canopy is to be allowed to fill completely with water, if necessary by partially collapsing the canopy support. Righting arrangements are considered satisfactory if each person rights the liferaft unaided.

    Righting Test (Rigid Liferafts) – The liferaft is placed in the water and is inverted if it is not of a design that can be used either side uppermost. Righting arrangements are considered satisfactory if each person rights the liferaft unaided. In this test, it is not required to have water enter the liferaft prior to righting.

    Appendix D – Glossary

    cm
    centimetre(s)
    CO2
    carbon dioxide
    FSA
    Formal Safety Assessment
    IEEE
    Institute of Electrical and Electronics Engineers
    kg
    kilogram(s)
    kW
    kilowatt(s)
    IMO
    International Maritime Organization
    m
    metre(s)
    MED
    Marine Emergency Duties
    mm
    millimetre(s)
    MSA
    Marine Safety Advisory
    MSI
    Marine Safety Information letter
    N
    newton(s)
    psi
    pound(s) per square inch
    rpm
    revolution(s) per minute
    SIIT
    Standardization and Innovation in Information Technology
    SOLAS
    International Convention for the Safety of Life at Sea, 1974
    SSB
    Ship Safety Bulletin
    TC
    Transport Canada
    TP
    Transport Publication
    TP 1324
    Material Specification for Coated Fabrics Used in the Manufacture of Inflatable Liferafts
    TP 7321
    Standards for Life Rafts and Inflatable Rescue Platforms
    TP 11342
    Coastal Life Raft
    TSB
    Transportation Safety Board of Canada
    VHF
    very high frequency
    minute(s)
    °
    degree(s)
    °C
    degree(s) Celsius