Rapport d'enquête maritime M16A0140

Chavirement et perte de vie
Petit bateau de pêche C19496NB
Salmon Beach (Nouveau-Brunswick)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Le 16 juin 2016, vers 4 h 45, heure avancée de l'Atlantique, un des filins de casiers du petit bateau de pêche C19496NB, avec 3 personnes à bord, s'est emmêlé au cours des activités de pêche au homard, à environ 0,5 mille marin du quai de Miller Brook à Salmon Beach (Nouveau-Brunswick). Les importantes contraintes exercées par le filin ont réduit le franc bord arrière du bateau à tribord et lorsque la mer de la hanche a frappé cette même partie du bateau, celui-ci a rapidement pris l'eau puis chaviré. Les 3 membres d'équipage ont été récupérés par le bateau de pêche Marie Eliser 1. Un des membres a reçu des soins médicaux pour hypothermie et le décès des 2 autres membres a été constaté par des ambulanciers paramédicaux.

    1.0 Renseignements de base

    1.1 Fiche technique du navire

    Tableau 1. Fiche technique du navire
    Nom du navire Sans nom
    Immatriculation du bateau 150985
    Numéro officiel C19496NB
    Type Petit bateau de pêche
    Jauge brute estimée 2,7
    Longueur hors tout 7,1 m
    Largeur 2,44 m
    Construction Royal Sea Boats
    Propulsion Moteur hors-bord 4 temps de 90 hp Mercury 2012
    Cargaison Casiers, bacs, homards, essence, appâts, engins de pêche
    Équipage 3
    Propriétaire enregistré Propriétaire privé, Salmon Beach (Nouveau-Brunswick)*
    *Le propriétaire est également le capitaine du bateau.

    1.2 Description du navire

    Le C19496NB (figures 1 et 2) était un canot à moteur à pont découvert en fibre de verre de 7,1 m doté d'une petite timonerie ouverte près de la proue. Il était propulsé par 1 moteur hors‑bord 4 temps de 90 hp et doté de 1 compas magnétique, de 1 poste bande publique et de 1 sondeur électronique monté à bord. Il était aussi équipé de 1 réflecteur radar, de 1 projecteur de pont arrière de 7 pouces à DEL, de feux de navigation montés sur la timonerie et de 1 projecteur portatif installé sur la console. Le bateau transportait dans son rouf avant 3 gilets de sauvetage, des fusées éclairantes, 1 sceau d'incendie en acier, 1 klaxon à air comprimé portatif et 1 extincteur à poudre sèche (annexe A). Il y avait également 1 bouée de sauvetage et 1 petite ancre de palangre en acier à l'arrière du rouf.

    Figure 1. Bateau C19496NB (vue de profil)
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    Bateau C19496NB (vue de profil)

    Au moment de l'événement, le bateau avait 2 réservoirs de carburant portatifs de 23 litres près de la poupe côté bâbord, et 1 réservoir de carburant portatif de 20 litres et 2 bidons d'essence de 20 litres à l'avant. Le bateau avait aussi1 pompe d'assèchement dans la cale avant. Le bateau transportait 8 casiers à homards en plastique (superposés), 1 casier simple, 4 bacs de manutention en plastique (superposés), 1 bac simple placé sur les casiers superposés et 125 kg d'appâts dans des bacs empilés. Des gaffes et 2 batteries marines étaient aussi à bord.

    Le pont du bateau était en fibre de verre, étanche et surélevé. Une petite console regroupant les commandes de direction et de propulsion était installée dans la timonerie et un treuil hydraulique à essence était monté sur la poupe. Une potence à casiers en acier pourvue d'un haleur de casier à homard avec plaque de 10 pouces et de 2 rouleaux (annexe B) était montée à tribord, à environ 0,5 m de la poupe.

    Pendant la remontée des filins de casiers à homards, la ligne de fond à laquelle sont attachés les casiers à homards passait sur la poulie suspendue à la potence, à environ 6 pieds au-dessus du pont du bateau, puis autour des plaques de tête verticales du haleur de casier à homard sur le plat‑bord tribord arrière.

    Deux bouchons de dalot de poupe étaient insérés dans la coque. Les éclaboussures des vagues et l'eau s'écoulant des engins de pêche s'accumulaient fréquemment sur le pont, sur une hauteur de plusieurs pouces. Lorsque l'accumulation d'eau était trop importante, le capitaine retirait un bouchon de dalot et faisait virer le bateau de façon continue du côté du dalot découvert. Il remettait le bouchon après l'évacuation de l'eau dans l'océan.

    Figure 2. Aménagement du bateau de pêche C19496NB
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    Aménagement du bateau de pêche C19496NB

    1.3 Pêche au homard à partir du quai Miller Brook

    Dans la région de Salmon Beach, les activités de pêche au homard se déroulent en général à 4 milles marins ou moins de la côte. Les pêcheurs titulaires d'un brevet de pêche au homard de catégorie A peuvent utiliser 300 casiers. Deux des casiers utilisés dans l'événement à l'étude sont montrés à l'annexe C.

    Dans la région de Salmon Beach, les pêcheurs utilisent 3 casiers à homards reliés ensemble sur un chalut à corde marqué par une bouée. L'équipage remontait normalement les 300 casiers à homards en 5 à 8 heures. Auparavant, les pêcheurs locaux travaillaient durant les heures de clarté. En 2016, ils ont toutefois commencé à pêcher à la noirceur, parfois dès 3 h en raison des vents qui sont généralement plus légers au début et à la fin des heures de clarté.

    1.4 Déroulement du voyage

    Le 12 juin 2016, le capitaine a remonté et mouillé 300 casiers à homards. Il a décidé de ne pas pêcher du 13 au 15 juin en raison des vents forts (jusqu'à 35 nœuds) et de la mer agitée.

    Vers 4 h 15, le 16 juin, le bateau a quitté le port Miller Brook avec à son bord le capitaine, un matelot de pont et un matelot de pont expérimenté. Le bateau s'est rendu à un point à environ 0,5 mille marin à l'ouest du quai et à 0,13 mille marin de la côte où l'équipage avait installé le premier filin de 3 casiers à homards (annexe D). Comme il faisait noir, le capitaine a utilisé un projecteur portatif pour trouver la bouée attachée au chalut. Vers 4 h 25, le bateau a rejoint la bouée et l'équipage a remonté, nettoyé, réappâté et remouillé le premier filin de 3 casiers sans incident.

    Le bateau s'est alors dirigé vers la deuxième bouée. Vers 4 h 43, la deuxième bouée était accrochée et le filin passait dans la poulie de la potence, puis sur le haleur de casier à homard. Le matelot de pont expérimenté, qui commandait la poignée du haleur de casier à homard hydraulique, a remonté le premier casier à homards jusqu'au plat-bord tribord arrière et le matelot de pont l'a tiré sur la lisse.

    Le matelot de pont, qui se trouvait à proximité, à l'avant de la potence du haleur de casier à homard, a dit au capitaine qu'un des avançonsNote de bas de page 1 du casier était brisé et a commencé à retirer les débris, les vieux appâts et les homards du casier. Le capitaine s'est déplacé à l'arrière vers le casier pour réparer l'avançon. Le matelot de pont a remis des appâts dans le premier casier et l'a refermé en vue du prochain mouillage.

    À ce moment-là, le deuxième casier avait été remonté jusqu'au plat-bord. Le matelot de pont l'avait tiré sur la lisse et avait commencé à en retirer les débris, les vieux appâts et les homards. Le capitaine réparait toujours l'avançon brisé.

    Le matelot de pont expérimenté a commencé à remonter le troisième casier à homards, mais a constaté qu'il était emmêlé dans le chalut d'un autre pêcheur. Le haleur de casier à homard tentait de remonter le casier, mais les contraintes sur le filin ont augmenté, le plat-bord tribord arrière du bateau a été tiré vers le fond, ce qui a fait baisser le franc-bord du bateau dans cette zone.

    Une vague s'est brisée sur le bateau et a ajouté plusieurs pouces d'eau de mer sur le pont. Les contraintes sur le haleur de casier à homard ont diminué, le bateau a roulé sur bâbord et le plat‑bord tribord arrière est remonté plus près de sa position précédente. L'équipage a de nouveau tenté de remonter le troisième casier et le plat-bord tribord arrière a été encore une fois tiré vers le fond. Une autre vague s'est brisée sur le bateau dans la zone où le franc-bord était le plus bas.

    Le matelot de pont expérimenté a arrêté la remontée du filin, l'a laissé tendu dans le haleur de casier à homard, et s'est rendu à la lisse pour essayer de libérer le casier. Il y avait alors plus de 1 pied d'eau dans la poupe du bateau. Alors que tous les membres d'équipage étaient rassemblés près de l'extrémité tribord arrière du bateau pour tenter de libérer le casier, le matelot de pont expérimenté s'est penché en avant par-dessus le plat-bord. Ce transfert de poids a encore réduit le franc-bord dans cette zone et le pont a été inondé davantage. Le capitaine a donné l'ordre de libérer le filin.

    Une troisième vague s'est brisée sur le bateau avant que le filin soit libéré. Le bateau a roulé sur tribord et a chaviré, projetant les 3 membres d'équipage à la mer.

    Le matelot de pont est remonté à la surface vers le milieu du bateau, s'est débarrassé de ses bottes de caoutchouc à embout en acier et s'est accroché à la paroi latérale du bateau. Il a réussi à s'approcher de la poupe, où le franc-bord était moindre, et a rampé sur le bateau renversé. Le matelot de pont expérimenté est remonté à la surface à environ 2 m du bateau et a appelé à l'aide avant de perdre conscience. Même s'il a fait surface près du bateau, le capitaine était inanimé et a dérivé plus loin.

    Le matelot de pont a chevauché la quille du bateau renversé et s'est lentement glissé vers l'avant jusqu'à environ 2 m à l'arrière de la proue. Il a appelé à l'aide durant environ 30 minutes. Le Marie Eliser 1, un autre homardier, se dirigeait vers sa deuxième bouée lorsque son projecteur a éclairé le bateau renversé à 0,4 mille nautique à l'ouest du Marie Eliser 1. Le Marie Eliser 1 a mis le cap vers le bateau renversé et le capitaine a utilisé son radiotéléphone à très haute fréquence (VHF) pour lancer un appel sur tous les canaux afin d'informer tous les navires de la région de la situation et pour leur demander de participer aux opérations de sauvetage.

    Le capitaine et un membre de l'équipage du Marie Eliser 1 ont aidé le matelot de pont à monter à bord de leur embarcation. Le matelot de pont a ensuite aidé le capitaine et le membre d'équipage du Marie Eliser 1 à remonter le matelot de pont expérimenté et le capitaine du bateau renversé.

    Le capitaine du Marie Eliser 1 a composé le 9-1-1 sur un téléphone cellulaire afin de signaler l'accident. Vers 5 h 25, le Marie Eliser 1 est rentré au quai Miller Brook. Les intervenants d'urgence du service des incendies sont arrivés peu de temps après et ont traité le matelot de pont survivant qui souffrait d'hypothermie. Les ambulanciers paramédicaux sont arrivés environ 10 minutes plus tard et ont transporté le matelot de pont à l'hôpital. À 5 h 50, les ambulanciers paramédicaux ont confirmé le décès des 2 autres membres d'équipage.

    1.5 Victimes

    On a confirmé la mort par noyade du capitaine et du matelot de pont expérimenté. Le matelot de pont qui a survécu a été traité pour hypothermie à l'hôpital local et a obtenu son congé plus tard dans la même matinée.

    1.6 Conditions environnementales

    Au moment de l'événement, le vent soufflait du nord-ouest à 15 km/h. La hauteur des vagues atteignait 0,5 m, la température de l'eau était de 12,3 °C et la mer semblait sale en raison du limon transporté par la mer du large agitée des jours précédents. La marée se dirigeait vers le sud. Le crépuscule nautique avait commencé à 3 h 47 et le lever du soleil était établi à 5 h 24.

    1.7 Certification et expérience du personnel

    Le capitaine était titulaire d'un brevet de service de capitaine de bâtiment de pêche d'une jauge brute inférieure à 60 tonneaux délivré le 29 décembre 2010Note de bas de page 2. Il était aussi titulaire d'un certificat de formation sur les fonctions d'urgence en mer A1 depuis avril 2003 et d'un permis de pêche du homard de catégorie A. Le capitaine travaillait dans le secteur de la pêche commerciale depuis plus de 40 ans et était propriétaire et capitaine du bateau C19496NB depuis son achat, à l'état neuf, 20 ans avant l'événement.

    Le matelot de pont expérimenté avait plus de 4 ans d'expérience à titre de pêcheur sur le bateau en cause dans l'événement.

    Le matelot de pont pêchait sur le bateau en cause depuis le début de la saison de la pêche au homard, le 1er mai, mais avait déjà travaillé à bord du même bateau avec le même capitaine (durant plusieurs années environ 13 ans avant l'événement).

    1.8 Certification du navire

    Étant un petit bateau de pêche d'une jauge brute d'au plus 15 tonneaux, le bateau C19496NB était assujetti à la partie II du Règlement sur l'inspection des petits bateaux de pêche et il n'était pas obligatoire de le soumettre aux inspections périodiques de Transports Canada (TC). Le capitaine et propriétaire du bateau l'avait immatriculé auprès de TC ainsi que comme bateau de pêche commerciale auprès de Pêches et Océans Canada au moment de son achat, 20 ans avant l'événement.

    1.9 Avaries au navire

    La petite timonerie ouverte, le plat-bord arrière ainsi que le haleur de casier à homard et sa potence ont été arrachés du bateau renversé au cours de son remorquage au quai Miller Brook (figure 3). Le moteur hors-bord, le moteur du haleur de casier à homard hydraulique et le matériel électronique ont été contaminés par l'eau salée.

    Figure 3. Détails des dommages subis par le C19496NB
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    Détails des dommages subis par le C19496NB

    1.10 Équipement de sauvetage

    L'équipement de sauvetage suivant doit se trouver à bord des bateaux de moins de 12,2 m de longueur assujettis à la partie II du Règlement sur l'inspection des petits bateaux de pêche (cas du bateau en cause dans l'événement) :

    • un gilet de sauvetage approuvé pour chaque personne à bord;
    • une bouée de sauvetage approuvée munie d'une ligne de 27 m;
    • une boîte métallique étanche contenant 6 feux approuvés à allumage automatiqueNote de bas de page 3.

    Le bateau de l'événement transportait 3 gilets de sauvetage, 1 bouée de sauvetage et des fusées éclairantes à allumage automatique, conformément aux règlements, mais aucun vêtement de flottaison individuel (VFI).

    1.11 Exigences relatives aux vêtements de flottaison individuels

    Au Canada, 84 % des pertes de vie liées à la pêche qui ont été signalées entre 1999 et 2010 sont le résultat de chavirements, de naufrages et de chutes par-dessus bordNote de bas de page 4. Selon l'Enquête sur les questions de sécurité relatives à l'industrie de la pêche au Canada (l'Enquête) du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST), les chutes par-dessus bord constituent la deuxième cause de décès dans l'industrie de la pêcheNote de bas de page 5. Entre 1999 et 2010, elles ont causé 41 décès (3,4 par an), soit 27 % du total des décès de cette période. De 2011 à 2015, elles ont causé 26 décès (5,2 par an), soit 53 % du total des décès de cette période. Cela représente une augmentation considérable du nombre annuel de pêcheurs décédés à la suite d'une chute par-dessus bord.

    Une chute en eau froide provoque d'abord un choc hypothermique, qui présente le plus grand danger, voire un risque de décès lorsqu'une personne est brusquement immergée dans de l'eau dont la température est inférieure à 15 °CNote de bas de page 6. La victime peut ensuite rapidement subir une grande fatigue pendant qu'elle tente de demeurer à flot. Cette fatigue s'accroît rapidement si la personne ne porte pas de VFI. L'hypothermie peut se produire en moins de 35 minutes dans l'eau froide; les fonctions corporelles ralentissent et cela peut provoquer finalement le décès de la personne. Pour accroître les chances de survie, il est essentiel de sortir rapidement la personne de l'eau. L'Enquête a démontré que plusieurs pêcheurs sont encore réticents à utiliser un VFI, invoquant des raisons comme le manque de confort et le risque d'emmêlement.

    Plusieurs programmes et initiatives d'éducation et de sensibilisation ont été lancés au sein du milieu de la pêche pour tenter de modifier les comportements et de promouvoir le port des VFI. En Colombie-Britannique, la campagne « Real Fishermen » de Fish Safe mise sur du matériel promotionnel qui montre des pêcheurs vêtus d'un VFI. En Nouvelle-Écosse, un groupe de travail sur la sécurité des activités de pêche, en collaboration avec des pêcheurs et des fournisseurs, a visité des quais, fait signé des engagements familiaux, organisé un concours d'affiche dans les écoles primaires, fait de la publicité et fait essayer différents modèles de dispositifs de sauvetage pour souligner l'importance de porter un VFI. En Nouvelle-Écosse également, l'Alliance pour la sécurité en mer a élaboré un plan pour l'industrie de la pêche de la province en collaboration avec des représentants du secteur et du gouvernement. Ce plan comprend plusieurs recommandations pour améliorer la sécurité par l'éducation, la sensibilisation et la mise en application des règlements. Par exemple, l'une de ces recommandations préconise l'élaboration d'un programme amélioré comprenant des exercices de sécurité et des démonstrations de VFI en mer.

    1.11.1 Réglementation fédérale

    Dans le cas des grands et petits bateaux de pêche, TC exige, au minimum, la présence à bord de gilets de sauvetage standards comme moyen de flottaison individuel.

    En 2012, TC a publié un bulletin de la sécurité des navires autorisant l'usage de VFI au lieu des gilets de sauvetage approuvés à bord de petits bâtiments autres que les embarcations de plaisance et petits bateaux de pêche commercialeNote de bas de page 7. Il y est précisé que si l'on opte pour des VFI, il faut les porter « en tout temps »Note de bas de page 8 lorsque l'on se trouve à bord d'un bâtiment qui effectue des voyages à proximité du littoral, classe 2.

    En juillet 2017, le Règlement sur la sécurité des bâtiments de pêche entrera en vigueur et s'appliquera aux petits bateaux de pêche d'une longueur d'au plus 24,4 m et d'une jauge brute d'au plus 150. Ce règlement stipule ce qui suit :

    Il est interdit d'utiliser un bâtiment de pêche, ou d'en permettre l'utilisation, dans des conditions environnementales ou des circonstances qui pourraient compromettre la sécurité des personnes à bord, sauf si les gilets de sauvetage exigés par la présente partie ou les vêtements de flottaison individuels qui répondent aux exigences de l'article 3.2 sont portés, selon le cas :

    1. par les personnes à bord, s'agissant d'un bâtiment de pêche sans pont ou sans structure de pont;
    2. par les personnes qui se trouvent sur le pont ou dans le cockpit, s'agissant d'un bâtiment de pêche avec pont ou structure de pontNote de bas de page 9.

    Aucun règlement n'oblige les pêcheurs à avoir des VFI à bord de leur bateau ou à les porter en tout temps lorsqu'ils sont en mer. Même si un capitaine peut exiger que tous les membres de son équipage portent un VFI en présence d'un risque donné, l'évaluation du risque demeure subjective. Ainsi, il est possible qu'un grand nombre de capitaines ne reconnaissent pas la nécessité d'acheter des VFI. De plus, même s'il y a des VFI à bord, si les membres d'équipage ne les portent pas en tout temps il est possible qu'ils n'aient pas le temps de les revêtir dans une situation d'urgence.

    1.11.2 Règlements provinciaux

    1.11.2.1 Québec

    Au Québec, depuis 2001, la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) applique la disposition de la Loi sur la santé et la sécurité du travail stipulant que « L'employeur doit prendre les mesures nécessaires pour protéger la santé et assurer la sécurité et l'intégrité physique du travailleurNote de bas de page 10. » Selon le Règlement sur la santé et la sécurité du travail en vigueur au Québec, «le port d'un vêtement de flottaison individuel est obligatoire pour tout travailleur qui travaille au-dessus de l'eau si les conditions suivantes sont satisfaites

    1. aucune autre mesure de sécurité ne peut le protéger efficacement;
    2. la profondeur de l'eau est suffisante pour en permettre une utilisation efficaceNote de bas de page 11.

    Même si le règlement fait référence à « tout travailleur qui travaille au-dessus de l'eau », il s'agit des travailleurs de la construction et l'exigence ne s'applique pas aux bateaux de pêche.

    Des règles sur le port de VFI par les pêcheurs de homards ont toutefois été adoptées en 2012 après la publication des statistiques suivantes :

    Au Québec, de 2008 à 2012, on dénombre six décès en mer dont deux accidents mortels impliquant des pêcheurs de homard. Dans les deux cas, il s'agit de chutes par-dessus bord et ils sont survenus sur deux années d'affiliée soit en 2010 et en 2011Note de bas de page 12.

    À la suite de ces 2 accidents, la CNESST a imposé certaines règles de sécurité aux pêcheurs de homards dont « le port du gilet de sauvetage par l'aide-pêcheur en tout temps sur le pont... »Note de bas de page 13. Pour faire en sorte que les pêcheurs de homards connaissent et comprennent les nouvelles règles, la CNESST leur a envoyé des bulletins d'information et a réalisé 150 visites d'évaluation de la conformité à bord de bateaux. Depuis la mise en œuvre de ces règles de sécurité, aucun décès de pêcheur de homards n'a été signalé.

    1.11.2.2 Nouveau-Brunswick

    Au Nouveau-Brunswick, Travail sécuritaire NB est une société d'État chargée de veiller à la mise en œuvre et à l'application de la Loi sur l'hygiène et la sécurité au travail; de la Loi sur les accidents du travail; de la Loi sur la Commission de la santé, de la sécurité et de l'indemnisation des accidents au travail et le Tribunal d'appel des accidents au travail; et de la Loi sur l'indemnisation des pompiersNote de bas de page 14. Sa mission est d'être un partenaire dans la promotion d'un milieu de travail sain et sécuritaire pour les travailleurs et les employeurs du Nouveau-Brunswick, et offre de façon efficace des services de qualité et l'application impartiale des lois.

    La Loi sur l'hygiène et la sécurité au travail du Nouveau-Brunswick prévoit les mesures de sécurité suivantes dans les endroits qui présentent des risques de noyade :

    51(2)   Lorsqu'un salarié est exposé à un risque de noyade, le propriétaire d'un lieu de travail, l'employeur et l'entrepreneur s'assurent chacun que le salarié utilise :

    1. ou bien un système de protection contre les chutes;
    2. ou bien un gilet de sauvetage qui satisfait à la norme ONGC CAN-65.7-M88, « Gilets de sauvetage à matériau insubmersible »;
    3. ou bien un vêtement de flottaison individuel qui satisfait à la norme ONGC CAN-65.11-M88, « Vêtements de flottaison individuels »;
    4. ou bien un vêtement de flottaison individuel autogonflable qui satisfait à la norme UL1180-95, « Fully Inflatable Recreational Personal Flotation Devices »;
    5. ou bien un filet de sécurité individuel qui répond aux exigences de l'article 49.8.

    51(4)   Malgré le paragraphe (2), le salarié porte un gilet de sauvetage :

    1. ou bien quand il travaille seul;
    2. ou bien quand les ressources ne sont pas suffisantes pour effectuer une opération de sauvetage rapide et efficace.

    51(5)   L'employeur et l'entrepreneur s'assurent chacun que le salarié porte le gilet de sauvetage ou le vêtement de flottaison visé aux alinéas (2)b) à d) lorsqu'il est transporté en bateauNote de bas de page 15.

    Le secteur de la pêche commerciale du Nouveau-Brunswick n'est pas visé par la Loi sur l'hygiène et la sécurité au travail de cette province ni par le programme de Travail sécuritaire NB. La Loi sur l'hygiène et la sécurité au travail du Nouveau-Brunswick n'exige pas que les pêcheurs commerciaux portent un VFI pendant les activités de pêche.

    Au cours des 15 dernières années, les autorités de cette province ont tenté à plusieurs reprises de combler la lacune dans la réglementation sur la santé et la sécurité au travail dans le secteur de la pêche commerciale. Toutefois, en général, les intervenants du secteur ne souhaitent pas l'adoption de mesures de santé et de sécurité supplémentaires à bord des bateaux de pêche commerciale.

    En avril 2013, le Nouveau-Brunswick a annoncé une révision exhaustive de ses lois sur l'indemnisation des travailleurs, soit une initiative collaborative entre le gouvernement du Nouveau-Brunswick et Travail sécuritaire NB. Cette révision devait comprendre un examen des secteurs d'emploi que la réglementation soustrait actuellement aux indemnisations des travailleurs, comme les propriétaires de bateaux de pêche et de petites entreprises. En 2017, la sécurité à bord des bateaux de pêche n'avait toujours pas été examinée.

    1.11.3 Recommandations du BST sur les vêtements de flottaison individuels

    Des enquêtes précédentes du BST ont établi que le port d'un VFI augmente les chances de survie des pêcheurs qui tombent dans l'eau.Note de bas de page 16 À part la CSST, ni TC ni aucun autre organisme de réglementation provincial chargé de la sécurité au travail n'ont pris de dispositions pour veiller à ce que les pêcheurs portent des VFI en tout temps. Malgré la réglementation fondée sur le risque et les initiatives sectorielles visant à modifier les comportements et à sensibiliser les pêcheurs à l'importance de revêtir un VFI, ainsi que les améliorations apportées à la conception des VFI par les fabricants en réponse aux préoccupations des pêcheurs à propos du confort et du port en tout temps, les pêcheurs n'ont pas changé fondamentalement de comportement et nombreux sont ceux qui continuent de travailler sur le pont sans porter de VFI.

    Le 5 septembre 2015, le chalutier Caledonian a chaviré à 20 milles marins à l'ouest du détroit Nootka (Colombie-Britannique)Note de bas de page 17 pendant une sortie de pêche au merlu avec 4 membres d'équipage à bord. Le navire a coulé et 3 membres de l'équipage sont décédés. Le seul membre de l'équipage qui a survécu portait un VFI. Le BST a considéré que la mise en œuvre d'exigences explicites relatives au port de VFI par les pêcheurs, jumelée à des mesures d'éducation et d'application appropriées, réduira considérablement le nombre de pertes de vie attribuables aux chutes par-dessus bord. Par conséquent, en 2016, à la suite de l'événement Caledonian, le BST a fait les 2 recommandations suivantes :

    WorkSafeBC exige que les personnes portent les vêtements de flottaison individuels appropriés en tout temps lorsqu'elles se trouvent sur le pont d'un bâtiment de pêche commerciale ou à bord d'un bâtiment de pêche commerciale non ponté ou sans structure de pont et que WorkSafeBC veille à l'élaboration de programmes visant à confirmer la conformité.
    Recommandation M16-04 du BST

    Le ministère des Transports exige que les personnes portent les vêtements de flottaison individuels appropriés en tout temps lorsqu'elles se trouvent sur le pont d'un bâtiment de pêche commerciale ou à bord d'un bâtiment de pêche commerciale non ponté ou sans structure de pont et que le ministère des Transports veille à l'élaboration de programmes visant à confirmer la conformité.
    Recommandation M16-05 du BST

    1.12 Appareils de communication d'urgence

    Des radiobalises de localisation des sinistres (RLS) sont requises à bord des bateaux d'une longueur égale ou supérieure à 8 m qui va au-delà des limites de voyage à proximité du littoral, classe 2Note de bas de page 18. Qu'elle soit automatique ou manuellement activée, une RLS émet un signal d'urgence pour alerter immédiatement les ressources de recherche et sauvetage et déclencher leur intervention.

    Ni la RLSNote de bas de page 19 ni le radiotéléphone VHFNote de bas de page 20 ne sont obligatoires à bord des bateaux de pêche non pontés de toute longueur ou des bateaux de pêche pontés de 8 m ou moins, comme le bateau de pêche de l'événement en cause.

    Le bateau de l'événement à l'étude n'avait à bord ni RLS ni radiotéléphone VHF. Les seuls appareils de communication à bord étaient 2 téléphones cellulaires, que le capitaine et le matelot de pont gardaient dans leur poche, et un poste bande publique.

    1.13 Enquête sur les questions de sécurité relatives à l'industrie de la pêche au Canada

    En août 2009, le BST a entrepris une vaste enquête sur les questions de sécurité relatives aux bateaux de pêche au Canada. Le rapport Enquête sur les questions de sécurité relatives à l'industrie de la pêche au Canada a été publié en juin 2012. Cette enquête a soulevé plusieurs questions de sécurité importantes qui méritent une attention particulière, à savoir : la stabilité, les engins de sauvetage, la gestion des ressources halieutiques, le coût de la sécurité, l'information sur la sécurité, les pratiques de travail sécuritaires, l'approche réglementaire de la sécurité, la fatigue, la formation et les données statistiques de l'industrie de la pêche. Elle cite 2 rapports du BST indiquant que la gestion des pêches a des répercussions directes et indirectes sur la sécurité de la pêche, et conclut que les pêcheurs sont mis en danger lorsque les mesures de gestion des ressources halieutiques ne tiennent pas compte de la sécurité à tous les niveaux : de la politique à la pratique. Il est également relevé que les engins de sauvetageNote de bas de page 21 qui sont conçus, transportés, installés, utilisés ou entretenus de manière inadéquate pour les activités de pêche mettent des vies en danger.

    1.14 Recommandations en suspens

    1.14.1 Radiobalises de localisation des sinistres

    Il n'y avait aucun dispositif de communication de détresse à bord du bateau de l'événement. Entre février 2010 et août 2016, il y a eu 9 accidentsNote de bas de page 22, y compris l'événement visé par le présent rapport, mettant en cause des bateaux de pêche de moins de 12 m de longueur non dotés d'une RLS ou d'un autre moyen de transmettre un message de détresse. Ces événements ont touché 24 membres d'équipage dont 15 sont décédés.

    En 1998, lors de la traversée entre Les Escoumins et Rimouski (Québec), le dragueur à pétoncles Brier Mist a été inondé et a sombré à environ 10 milles de la côteNote de bas de page 23. On n'a trouvé aucune trace de l'épave; 2 personnes ont été repêchées décédées et les 3 autres membres de l'équipage ont été portés disparus. Le BST était d'avis que tous les pêcheurs devraient avoir une capacité d'alerte de détresse qui ne nécessite aucune intervention humaine. En outre, les pêcheurs qui sont à l'eau ou à bord d'une embarcation de sauvetage devraient pouvoir transmettre en continu leur position aux coordonnateurs des opérations de recherche et sauvetage afin d'accélérer les recherches.

    Le ministère des Transports exige que les petits bateaux de pêche qui effectuent des voyages côtiers aient à leur bord une radiobalise de localisation des sinistres ou tout autre équipement approprié à dégagement hydrostatique qui se déclenche automatiquement, avertit le système de recherche et sauvetage, transmet périodiquement la position et est muni d'un dispositif de localisation directionnelle.
    Recommandation M00-09 du BST

    Dans sa réponse à cette recommandation, TC a indiqué que le nouveau Règlement sur la sécurité des bateaux de pêche qui était projeté, et qui est entré en vigueur le 13 juillet 2017, imposerait l'exigence de transporter une RLS aux bateaux de pêche de plus de 12 m de longueur et naviguant à moins de 25 milles marins du rivage.

    Les bateaux de pêche de moins de 12 m auraient le choix de transporter une RLS de 406 MHz au lieu d'un radeau ou d'une autre embarcation de sauvetage. Toutefois, si les propriétaires ou exploitants optent pour une RLS, ils devront néanmoins avoir à bord du bateau des combinaisons d'immersion ou de protection contre les éléments si la température de l'eau est inférieure à 15 °C. Les bateaux de moins de 12 m naviguant à moins de 25 milles marins du rivage pourront remplacer la RLS par un moyen efficace de communication bidirectionnelle, comme un cellulaire. Tous les bateaux de pêche, peu importe leur longueur, qui voyagent dans des eaux abritées ou à moins de 2 milles de la côte auront la même optionNote de bas de page 24.

    Le nouveau Règlement sur la sécurité des bateaux de pêche proposé n'élimine donc pas le risque soulevé dans la recommandation M00-09 du BST. En mars 2016, le BST estimait que la réponse à la recommandation dénotait une attention non satisfaisante puisque le Règlement n'exige pas que tous les bateaux de pêche aient à leur bord une RLS, ou un autre dispositif approprié à dégagement hydrostatique qui se déclenche automatiquement, qui avertit le système de recherche et sauvetage, qui transmet périodiquement la position du navire et qui est muni d'un dispositif de localisation directionnelle. En juin 2017, le Bureau a indiqué que la réponse était toujours insatisfaisante. Le BST continue d'enregistrer des décès et des événements à bord de bateaux de pêche de moins de 12 m non équipés de RLS et dont l'équipage n'a pas utilisé un autre dispositif d'alerte de détresse, ou n'a pas été en mesure de le faireNote de bas de page 25.

    1.14.2 Clarté des lois sur la santé et la sécurité au travail

    Les gouvernements provinciaux ont la responsabilité d'assurer la sécurité des « activités de pêche ». Toutefois, les cadres réglementaires des provinces qui portent sur la sécurité des bateaux de pêche ne sont pas uniformes à l'échelle du pays et certaines provinces n'ont pas encore adopté de mesures de sécurité adéquates et propres au secteur de la pêche. Une des recommandations du BST portant sur cette lacune de sécurité est toujours active. Elle a été présentée après l'enquête sur l'accident qui s'est produit sur le S.S. BrothersNote de bas de page 26.

    Le 8 octobre 1996, l'équipage du S.S. Brothers rentrait la drague à pétoncles par beau temps. Un des matelots essayait d'enjamber le treuil pour atteindre les commandes, sa jambe droite a été happée par le treuil et est restée coincée entre le câble et le tambour. Le Bureau a déterminé que les facteurs suivants ont contribué à l'accident : le treuil de pont n'avait jamais été inspecté et n'était pas muni d'un dispositif de protection; le matelot manœuvrait le treuil seul; et les surfaces du treuil et le pont étaient glissants. Il est également probable que le matelot a eu du mal à décider comment utiliser le treuil en toute sécurité à cause de la fatigue engendrée par son horaire de travail et de repos.

    Par suite de cet événement, le Bureau estimait qu'une démarche coordonnée et harmonisée des administrations fédérale et provinciales permettrait d'améliorer la sécurité au travail et des opérations à bord des bateaux de pêche. La législation générale du travail des provinces est complexe et peut être difficile à comprendre pour les intéressés. Étant donné que les provinces comptent énormément sur le concours de chacun pour assurer le respect des règlements, le Bureau s'inquiétait de la complexité de la réglementation qui empêche le marin-pêcheur de se conformer aux exigences et d'atteindre les objectifs de sécurité de la réglementation. Par conséquent, en 1999, le BST a recommandé que :

    Les provinces révisent leur réglementation sur la sécurité au travail pour que les personnes concernées aient plus de facilité à la comprendre, dans l'espoir de s'assurer que les mécanismes de mise en application ainsi que les règlements soient complémentaires.
    Recommandation M99-02 du BST

    Lors de sa plus récente évaluation des réponses des provinces à sa recommandation M99-02, en octobre 2016, le BST a déterminé que 8 des 10 provinces ont des règlements sur la sécurité au travail qui s'appliquent aux bateaux de pêche. Les provinces qui n'en ont pas sont le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard, où la réglementation sur la sécurité au travail continue de définir les milieux de travail de façon telle que la province n'exerce aucun pouvoir sur les bateaux de pêche. Le Nouveau-Brunswick envisage d'entreprendre une révision en 2017 pour clarifier sa sphère de compétence relativement à la sécurité de la pêche.

    Seules deux provinces, la Colombie-Britannique et Terre-Neuve-et-Labrador, ont des règlements sur la sécurité au travail propres aux bateaux de pêche. La réglementation des autres provinces sur la sécurité au travail est, en majeure partie, plus générale et ne vise pas les bateaux de pêche. Elle pourrait donc ne pas aborder adéquatement les dangers liés au travail à bord de telles embarcations.

    Jusqu'à ce que les 8 autres provinces se soient assurées que leur réglementation sur la sécurité au travail et son imposition aux pêcheurs soit facile à comprendre et à mettre en application, le Bureau estime que la réévaluation de leurs réponses demeure en partie satisfaisanteNote de bas de page 27.

    1.15 Liste de surveillance du BST

    La sécurité de la pêche commerciale restera sur la Liste de surveillance du BST jusqu'à ce que :

    • de nouveaux règlements encadrant les navires de pêche commerciale de toutes tailles soient mis en œuvre;
    • des lignes directrices conviviales sur la stabilité des navires soient établies et appliquées afin de réduire les pratiques non sécuritaires;
    • il soit prouvé qu'un changement de comportement s'opère parmi les pêcheurs en ce qui a trait à l'utilisation des VFI, des RLS et des vêtements de survie, et que des évaluations des risques et des exercices de sécurité aient eu lieu à bord;
    • les autorités fédérales et provinciales, ainsi que les leaders du milieu de la pêche et les pêcheurs eux-mêmes, posent des gestes concertés et coordonnés en vue de mettre en place des initiatives solides dans les régions et de développer une saine culture de sécurité dans le milieu de la pêche.

    La Liste de surveillance du BST énumère les principaux enjeux de sécurité qu'il faut s'employer à régler pour rendre le système de transport canadien encore plus sûr.

    La sécurité de la pêche commerciale figure sur la Liste de surveillance 2016. Comme l'événement à l'étude l'a démontré, malgré de nombreuses initiatives de sécurité, des pratiques dangereuses persistent dans l'industrie de la pêche.

    Comme le montre le présent événement, des lacunes demeurent en ce qui a trait à la présence de RLS à bord des bateaux et au port de VFI durant les activités s'il y a un risque de passer par-dessus bord.

    2.0 Analyse

    2.1 Facteurs ayant mené au chavirement et aux décès

    Alors que les membres d'équipage remontaient le deuxième filin de casiers à homards, le troisième filin s'est emmêlé avec le chalut d'un autre pêcheur. Il arrive que des casiers à homards s'emmêlent au cours des activités de pêche, en particulier après une période de conditions météorologiques défavorables. La technique de virage du filin utilisée par l'équipage est une pratique courante pour libérer des engins de pêche.

    Toutefois, dans le cas étudié, le casier ne remontait pas et agissait plutôt comme une ancre fixée à un lienNote de bas de page 28 de faible longueur. Les contraintes exercées par le filin emmêlé qui se trouvait sur le haleur de casier à homard a tiré le plat-bord tribord arrière vers le fond, abaissant le franc-bord sur cette partie du bateau. Le bateau a commencé à prendre l'eau.

    Le capitaine avait l'habitude d'évacuer l'eau du bateau en enlevant le bouchon de dalot. Dans la situation décrite, l'eau s'est toutefois accumulée trop rapidement pour que le capitaine puisse retirer le bouchon.

    Pour remonter le casier et démêler le filin, tous les membres d'équipage se sont rassemblés près de l'extrémité tribord arrière du bateau. Le matelot de pont expérimenté s'est penché en avant par-dessus le plat-bord. Ce mouvement a encore réduit le franc-bord et une plus grande quantité d'eau a envahi le pont.

    Le capitaine a donné l'ordre de libérer le filin, mais il était trop tard. Le bateau a roulé sur tribord et a chaviré, et les 3 membres d'équipage ont été projetés à la mer.

    Les membres d'équipage ne portaient pas de vêtement de flottaison individuel lorsqu'ils sont tombés dans l'eau, ce qui a réduit leurs chances de survie. Aucun message de détresse n'a été émis. Dans l'obscurité, il a fallu un certain temps avant qu'on aperçoive le bateau renversé et que le Marie Eliser 1 vienne en aide aux 3 membres d'équipage. Le capitaine et le matelot de pont expérimentés étaient inanimés lorsqu'ils ont été montés à bord et leur décès a été confirmé plus tard par les ambulanciers paramédicaux. Le matelot de pont s'est rétabli après avoir reçu des soins pour hypothermie.

    2.2 Surveillance de la sécurité de la pêche commerciale au Nouveau-Brunswick

    Malgré leur responsabilité d'assurer la sécurité des « activités de pêche », certains gouvernements provinciaux n'ont pas encore adopté de mesures de sécurité adéquates pour protéger les pêcheurs.

    Travail sécuritaire NB est une société d'État chargée de veiller à la mise en œuvre de certaines lois et notamment de la Loi sur l'hygiène et la sécurité au travail. Il agit aussi à titre de partenaire pour sensibiliser les travailleurs et les employeurs du Nouveau-Brunswick à l'importance de créer et de maintenir un milieu de travail sain et sécuritaire.

    Toutefois, le secteur de la pêche commerciale n'est pas visé par la Loi sur l'hygiène et la sécurité au travail de cette province et n'est donc pas inclus dans le programme de sécurité de Travail sécuritaire NB.

    Si le secteur de la pêche commerciale n'est pas visé par la Loi sur l'hygiène et la sécurité au travail de la province et ne fait pas partie du programme de sécurité de Travail sécuritaire NB, il y a un risque accru que les pêcheurs ne suivent pas des méthodes de travail sécuritaires.

    2.3 Vêtements de flottaison individuels

    Le fait que les pêcheurs ne portent pas de vêtement de flottaison individuel (VFI) est une pratique dangereuse que signale le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) depuis des années. Les gilets de sauvetage sont des engins de flottaison efficaces, mais les pêcheurs les trouvent encombrants et ne les portent pas toujours à bord des bateaux. Les VFI sont conçus pour être portés en tout temps, mais de nombreux pêcheurs refusent d'en acheter pour leur bateau, et de les porter selon les recommandations, invoquant notamment le manque de confort, le risque d'emmêlement et la perception que le port d'un VFI ne soit pas naturel ou pratique. De plus, il a été démontré que les pêcheurs sous-estiment souvent les risques de passage par-dessus bord.

    Dans l'événement à l'étude, les membres d'équipage ne portaient pas de VFI ni de gilet de sauvetage au moment où le bateau a chaviré et il n'y avait aucun VFI à bord. Comme le chavirement a été rapide, les membres d'équipage n'ont pas eu le temps de prendre et de revêtir les gilets de sauvetage rangés à bord du bateau. La température de la mer (12,3 °C) aurait causé un choc thermique et de l'hypothermie en relativement peu de temps, mais les VFI auraient assuré la flottaison et augmenté les chances de survie des membres d'équipage.

    Malgré les campagnes de sensibilisation de l'industrie, tant que les pêcheurs ne revêtent pas de VFI ou de gilet de sauvetage lorsqu'ils travaillent sur le pont, le risque de décès après une chute à la mer demeurera élevé.

    Le Règlement sur l'inspection des petits bateaux de pêche qui est actuellement en vigueur indique qu'il doit y avoir des gilets de sauvetage à bord, mais il n'est pas obligatoire de les porter. Comme le démontre l'événement à l'étude, un chavirement est parfois si soudain qu'il est impossible de prendre et de revêtir un gilet de sauvetage. Le Bulletin de la sécurité des navires 06/2012 de Transports Canada (TC) stipule qu'il est possible de remplacer les gilets de sauvetage approuvés par des VFI à condition de porter ces derniers en tout temps lorsque le bateau est en route. TC n'oblige pas les pêcheurs à porter un VFI lorsqu'il y a des gilets de sauvetage à bord du bateau.

    Depuis le 13 juillet 2017, le nouveau Règlement sur la sécurité des bateaux de pêche exige que les personnes se trouvant à bord d'un bateau de pêche portent un gilet de sauvetage ou un VFI, mais seulement si des conditions environnementales ou des circonstances pouvaient compromettre leur sécurité. Même si un capitaine peut déceler la présence d'un risque et exiger que les membres de son équipage portent un VFI en présence d'un risque donné, l'évaluation du risque demeure subjective. Ainsi, il est possible qu'un grand nombre de capitaines ne reconnaissent pas la nécessité d'acheter des VFI. De plus, même si des VFI se trouvent à bord, si les membres d'équipage ne les portent pas en tout temps, il est possible qu'ils n'aient pas le temps de les revêtir dans une situation d'urgence. Si TC n'exige pas que les pêcheurs portent un VFI en tout temps quand ils sont sur le pont d'un bateau de pêche, le risque de noyade en cas de passage par-dessus bord s'accroît.

    Malgré la réglementation fondée sur le risque et les initiatives sectorielles visant à modifier les comportements et à sensibiliser les pêcheurs à l'importance de revêtir un VFI, ainsi que les améliorations apportées à la conception des VFI par les fabricants en réponse aux préoccupations des pêcheurs à propos du confort et du port en tout temps, les pêcheurs n'ont pas changé fondamentalement de comportement et nombreux sont ceux qui continuent de travailler sur le pont sans porter de VFI, même s'il y a des VFI à bord du bateau. Dans l'événement à l'étude, il n'y avait aucun VFI à bord et les membres d'équipage n'ont pas pu revêtir de gilet de sauvage avant de tomber dans l'eau, ce qui a réduit leurs chances de survie.

    Dans les provinces, seule la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail du Québec exige, depuis 2012, que certains pêcheurs, portent un VFI en tout temps, en particulier les pêcheurs de homards. Par comparaison, la Loi sur l'hygiène et la sécurité au travail du Nouveau-Brunswick ne comprend aucune exigence similaire.

    Si la Loi sur l'hygiène et la sécurité au travail du Nouveau-Brunswick n'exige pas que les pêcheurs portent un VFI en tout temps quand ils sont sur le pont d'un bateau de pêche commerciale, il y a un risque accru de noyade en cas de passage par-dessus bord.

    Comme il l'a indiqué dans ses recommandations M16-04 et M16-05, le BST croit que la mise en œuvre d'exigences explicites relatives au port de VFI par les pêcheurs, jumelée à des mesures d'éducation et d'application appropriées, réduira considérablement le nombre de pertes de vie attribuables aux chutes par-dessus bord.

    2.4 Communication en cas d'urgence

    Dans les incidents mettant en cause des bateaux de pêche d'une longueur inférieure ou égale à 8,5 m, les appels de détresse sont rares, voire inexistants. Les situations d'urgence peuvent évoluer si rapidement que les personnes à bord n'ont que peu ou pas le temps de transmettre verbalement ou manuellement un appel de détresse, ce qui retarde d'autant les opérations de recherche et sauvetage et réduit les chances de survie. La présence d'une radiobalise de localisation des sinistres (RLS) –déclenchée manuellement par l'équipage ou automatiquement au contact de l'eau et qui transmet en continu la position du bateau – à bord d'un bateau peut réduire considérablement le temps que les personnes passent dans l'eau avant l'arrivée des secours.

    Dans l'événement étudié, 2 membres de l'équipage avaient un téléphone cellulaire, mais ils n'ont pas eu le temps d'émettre un appel de détresse avant de tomber à l'eau. L'intervention des équipes de recherche et sauvetage a donc été retardée; elle n'a été lancée que lorsque le capitaine du Marie Eliser 1 a vu le matelot de pont qui se trouvait sur le bateau chaviré et qui criait à l'aide. Le bateau C19496NB n'avait ni radiotéléphone à très haute fréquence avec appel sélectif numérique ni RLS, et n'était pas tenu d'avoir cet équipement à bord en vertu de la réglementation.

    Des enquêtes précédentes du BST ont démontré qu'une RLS peut contribuer à sauver des vies, car elle transmet automatiquement un signal de détresse et la position du bateau en détresse. Entre février 2010 et août 2016, 9 accidents (y compris l'événement visé par le présent rapport) mettant en cause des bateaux de pêche de moins de 12 m de longueur ont été signalés au BST. Ces accidents ont causé au total 15 décès. Aucun des bateaux en cause n'était équipé d'une RLS et aucun signal de détresse n'avait été transmis.

    Si les bateaux de pêche ne sont pas dotés d'appareils de communications pouvant transmettre un signal de détresse automatique, comme une RLS, les opérations de recherche et sauvetage peuvent être retardées, voire non lancées ce qui augmente le risque de pertes de vie.

    2.5 Questions de sécurité dans l'industrie de la pêche

    Dans le cadre de l'Enquête sur les questions de sécurité relatives à l'industrie de la pêche au Canada (l'Enquête) du BST, on a regroupé les activités ayant une incidence sur la sécurité en 10 questions de sécurité importantes, et l'on a constaté qu'il existe des relations et des interdépendances complexes entre elles. L'Enquête analyse de façon plus poussée ces importantes questions de sécuritéNote de bas de page 29. Les questions se rapportant aux engins de sauvetage et à l'approche de réglementation de la sécurité, définies dans le rapport de l'Enquête, sont évidentes dans l'événement à l'étude.

    Engins de sauvetage
    Fait établi dans le cadre de l'Enquête sur les questions relatives à la sécurité Lien avec l'événement à l'étude
    Les pêcheurs sont réticents à porter des VFI parce que bon nombre d'entre eux ont accepté le risque. Personne ne portait de VFI.
    Les bateaux de pêche ne sont pas tous équipés d'une RLS, malgré la recommandation M00-09 du BST. Le bateau C19496NB n'était pas équipé d'une RLS.
    Les pêcheurs équipent parfois leurs bateaux d'engins de sauvetage dans le seul but de se conformer à la réglementation. Il transportait seulement les engins de sauvetage prescrits par le règlement.
    Approche de réglementation de la sécurité
    Fait établi dans le cadre de l'Enquête sur les questions relatives à la sécurité Lien avec l'événement à l'étude
    TC ne prescrit pas le transport ou le port obligatoire de VFI à bord des bateaux de pêche s'il y a des gilets de sauvetage à bord. Les membres d'équipage du bateau de l'événement à l'étude n'avaient pas accès à des VFI.
    Dans certaines provinces, la commission d'indemnisation des accidents du travail a une politique qui s'applique expressément aux pêcheurs. La Loi sur l'hygiène et la sécurité au travail que Travail sécuritaire NB est chargé d'appliquer exclut les bateaux de pêche en tant que lieux de travail et l'organisme ne participe pas au traitement des questions liées à la sécurité de la pêche.

    Interdépendance des questions de sécurité

    La sécurité des pêcheurs est compromise par de nombreuses questions de sécurité qui sont interreliées. Les questions de sécurité ci-après présentent des relations complexes et ont contribué à l'événement à l'étude :

    • Engins de sauvetage – Il n'y avait aucun VFI ni aucune RLS à bord, et ils ne sont pas obligatoires selon la réglementation.
    • Approche de réglementation de la sécurité – Le port d'un VFI n'est pas obligatoire.

    Les tentatives entreprises par le passé pour résoudre ces problèmes de sécurité au cas par cas n'ont pas donné les résultats escomptés : c'est-à-dire un environnement plus sûr pour les pêcheurs. Le rapport d'Enquête sur les questions de sécurité relatives à l'industrie de la pêche au Canada souligne que, pour qu'une amélioration réelle et durable de la sécurité soit observée au sein de l'industrie de la pêche, les changements ne doivent pas seulement porter sur un des problèmes de sécurité liés à un accident, mais plutôt sur l'ensemble de ces problèmes, ce qui met en lumière leurs relations complexes et leur interdépendance. L'élimination d'une seule situation dangereuse peut empêcher qu'un accident se produise, mais ne réduit que légèrement les risques que posent les autres. La sécurité des pêcheurs continuera de présenter des lacunes tant que le milieu de la pêche ne reconnaîtra pas et ne traitera pas des relations complexes et de l'interdépendance des questions de sécurité.

    3.0 Faits établis

    3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

    1. Alors que les membres d'équipage remontaient le deuxième filin de casiers à homards, le troisième filin s'est emmêlé avec le chalut d'un autre pêcheur.
    2. Les contraintes exercées par le filin emmêlé qui se trouvait sur le haleur de casier à homard ont tiré le plat-bord tribord arrière vers le bas; le franc-bord sur cette partie du bateau a diminué, et de l'eau s'est infiltrée dans le bateau.
    3. Alors que tous les membres d'équipage étaient rassemblés près du côté tribord arrière du bateau pour tenter de remonter le casier et de libérer le filin, le matelot de pont expérimenté s'est penché en avant par-dessus le plat-bord. Ce mouvement a entraîné la réduction du franc-bord dans cette partie du bateau et a accru la quantité d'eau sur le pont.
    4. Le capitaine a donné l'ordre de libérer le filin de casiers, mais il était trop tard. Le bateau a roulé sur tribord et a chaviré, et les 3 membres d'équipage ont été projetés à l'eau.
    5. Les membres d'équipage ne portaient pas de vêtement de flottaison individuel lorsqu'ils sont tombés dans l'eau, ce qui a réduit leurs chances de survie.
    6. Aucun message de détresse n'a été émis. Dans l'obscurité, il a fallu un certain temps avant qu'on aperçoive le bateau renversé et que le Marie Eliser 1 vienne en aide aux 3 membres d'équipage.
    7. Le capitaine et le matelot de pont expérimenté étaient inanimés lorsqu'ils ont été remontés à bord du Marie Eliser 1 et leur décès a été confirmé plus tard par les ambulanciers paramédicaux. Le matelot de pont s'est rétabli après avoir reçu des soins pour hypothermie.

    3.2 Faits établis quant aux risques

    1. Si le secteur de la pêche commerciale n'est pas visé par la Loi sur l'hygiène et la sécurité au travail du Nouveau-Brunswick et ne fait pas partie du programme de sécurité de Travail sécuritaire NB, il y a un risque accru que les pêcheurs ne suivent pas des méthodes de travail sécuritaires.
    2. Malgré les campagnes de sensibilisation de l'industrie, si les pêcheurs ne revêtent pas de vêtement de flottaison individuel ou de gilet de sauvetage lorsqu'ils travaillent sur le pont, le risque de noyade après une chute à l'eau demeurera élevé.
    3. Si Transports Canada n'exige pas que les pêcheurs portent un vêtement de flottaison individuel en tout temps quand ils sont sur le pont, il y a un risque accru de noyade en cas de passage par-dessus bord.
    4. Si la Loi sur l'hygiène et la sécurité au travail du Nouveau-Brunswick n'exige pas que les pêcheurs portent un vêtement de flottaison individuel en tout temps dans un but de protection personnelle quand ils sont sur le pont d'un bateau de pêche commerciale, le risque de décès en cas de passage par-dessus bord est plus élevé.
    5. Si les bateaux de pêche ne sont pas dotés d'appareils de communication pouvant transmettre un signal de détresse automatique, comme une radiobalise de localisation des sinistres, l'intervention de recherche et sauvetage peut être retardée, voire non lancée ce qui augmente le risque de décès.
    6. La sécurité des pêcheurs sera compromise tant que la relation complexe et l'interdépendance entre les questions de sécurité ne seront pas reconnues par le milieu de la pêche et que celui-ci n'adoptera pas les mesures nécessaires.

    3.3 Autres faits établis

    1. Un poste bande publique et 2 téléphones cellulaires étaient les seuls appareils de communication à bord, et les membres d'équipage n'ont pas pu les utiliser parce que le bateau a chaviré très rapidement.

    4.0 Mesures de sécurité

    4.1 Mesures de sécurité prises

    Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) n'est pas conscient de toute mesure de sécurité prise après l'événement.

    4.2 Mesures de sécurité requises

    4.3 Exigences relatives aux vêtements de flottaison individuels

    Les pêcheurs exercent souvent leurs activités dans de rudes conditions environnementales et physiques. L'état de la mer varie pendant qu'ils pêchent, chargent, transfèrent et arriment leurs prises, et le risque de passer par-dessus bord est élevé. Un pêcheur qui tombe à l'eau peut mourir rapidement en raison du choc thermique, de l'hypothermie et de l'épuisementNote de bas de page 30, surtout s'il ne porte pas de vêtement de flottaison individuel (VFI).

    Le BST a déterminé qu'au Canada, entre 2006 et 2016, 9 personnes sont décédées en moyenne chaque année dans le secteur de la pêche commerciale. Durant cette même période, environ 46 000 pêcheurs commerciaux travaillaient dans ce secteur. L'Enquête sur les questions de sécurité relatives à l'industrie de la pêche au Canada du BST indique que la noyade après une chute dans l'eau causée par un chavirement, un envahissement ou un naufrage est la principale cause de décès dans le secteur de la pêche au paysNote de bas de page 31.

    Dans l'événement à l'étude, les membres d'équipage ne portaient pas de VFI ni de gilet de sauvetage au moment où le bateau a chaviré, et il n'y avait pas de VFI à bord. Comme le chavirement a été rapide, les membres d'équipage n'ont pas eu le temps de prendre et de revêtir les gilets de sauvetage rangés à bord du bateau. Une chute dans l'eau à une température de 12,3 °C cause généralement un choc thermique et de l'hypothermie en relativement peu de temps, mais s'ils avaient porté un VFI ou un gilet de sauvetage, les membres d'équipage auraient flotté et eu de meilleures chances de survie.

    Plusieurs programmes et initiatives d'éducation et de sensibilisation ont été lancés au sein du milieu de la pêche pour tenter de modifier les comportements et de promouvoir le port des VFI. En Colombie-Britannique, la campagne « Real Fishermen » de Fish Safe mise sur du matériel promotionnel qui montre des pêcheurs vêtus d'un VFI. En Nouvelle-Écosse, la Fisheries Safety Association of Nova Scotia a consulté des pêcheurs et des fournisseurs pour élaborer et mettre en œuvre des initiatives telles que des visites de quais, la signature d'engagements familiaux, un concours d'affiche dans les écoles primaires, de la publicité et des essais de différents modèles de dispositifs de sauvetage pour souligner l'importance de porter un VFI. En Nouvelle-Écosse également, l'Alliance pour la sécurité en mer a élaboré un plan pour l'industrie de la pêche de la province en collaboration avec des représentants du secteur et du gouvernement. Ce plan comprend plusieurs recommandations pour améliorer la sécurité par l'éducation, la sensibilisation et la mise en œuvre des exigences et règlements. Par exemple, l'une de ces recommandations préconise l'élaboration d'un programme amélioré comprenant des exercices de sécurité et des démonstrations de VFI en mer. Malgré ces initiatives, le comportement des pêcheurs n'a pas beaucoup changé, et bon nombre d'entre eux refusent toujours de porter un VFI.

    À part la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail de Québec, ni Transports Canada ni aucun autre organisme de réglementation provincial chargé de la sécurité au travail n'ont pris de dispositions pour veiller à ce que les pêcheurs portent des VFI en tout temps. Malgré la réglementation fondée sur le risque et les initiatives sectorielles visant à modifier les comportements et à sensibiliser les pêcheurs à l'importance de revêtir un VFI, ainsi que les améliorations apportées à la conception des VFI par les fabricants en réponse aux préoccupations des pêcheurs à propos du confort et du port en tout temps, les pêcheurs n'ont pas changé fondamentalement de comportement et nombreux sont ceux qui continuent de travailler sur le pont sans porter de VFI.

    Parce que les VFI sont légers et peu encombrants, les pêcheurs peuvent les porter en tout temps lorsqu'ils sont à bord d'un bateau; de cette façon, ils seront protégés s'ils venaient à tomber à l'eau, ce qui peut arriver soudainement. Si les pêcheurs ne revêtent pas de VFI ou de gilets de sauvetage lorsqu'ils travaillent sur le pont, le risque de décès après une chute à l'eau est accru.

    Dans l'événement à l'étude, le homardier C19496NB a chaviré près de Salmon Beach, au Nouveau-Brunswick. Aucun membre de l'équipage à bord du bateau ne portait de VFI et 2 des 3 personnes à bord ont péri en mer. Le secteur de la pêche commerciale au Nouveau-Brunswick n'est pas visé par la Loi sur l'hygiène et la sécurité au travail de la province et n'est pas compris dans le programme de sécurité de Travail sécuritaire NB. La Loi sur l'hygiène et la sécurité au travail du Nouveau-Brunswick n'exige pas que les pêcheurs commerciaux portent un VFI au cours des activités de pêche.

    Le BST est d'avis que la mise en œuvre d'exigences explicites relatives au port de VFI par les pêcheurs réduira considérablement le nombre de pertes de vie attribuables aux chutes par‑dessus bord, et il a déjà fait des recommandations similaires à Transports Canada et à WorkSafeBCNote de bas de page 32. Par conséquent, le Bureau recommande que :

    Le gouvernement du Nouveau-Brunswick et Travail sécuritaire NB exigent que les personnes portent les vêtements de flottaison individuels appropriés en tout temps lorsqu'elles se trouvent sur le pont d'un bâtiment de pêche commerciale ou à bord d'un bâtiment de pêche commerciale non ponté ou sans structure de pont, et que Travail sécuritaire NB veille à l'élaboration de programmes visant à confirmer la conformité.
    Recommandation M17-04 du BST

    Le présent rapport conclut l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le Le rapport a été officiellement publié le

    Annexes

    Annexe A – Matériel de sécurité rangé dans le rouf avant

    Annexe B – Haleur de casier à homard et potence

    Annexe C – Deux des casiers à homards utilisés sur le bateau C19496NB

    Annexe D – Lieu de l'événement

    Source : Google Earth, avec annotations du BST
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