Collision avec un quai
Vraquier CSL Tadoussac
Port de Québec
Québec (Québec)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
Le 10 juin 2020, le vraquier CSL Tadoussac accostait sous la conduite d’un pilote au port de Québec (Québec) lorsqu’il a heurté le quai. Le navire a été endommagé. Il n’y a eu aucun blessé ni aucune pollution.
1.0 Renseignements de base
1.1 Fiche technique du navire
Nom du navire | CSL Tadoussac |
---|---|
Numéro de l’Organisation maritime internationale (OMI) | 6918716 |
Numéro officiel | 325750 |
Pavillon | Canada |
Port d’immatriculation | Collingwood (Ontario) |
Société de classification | Lloyd’s Register |
Type | Vraquier |
Jauge brute | 20 101 |
Longueur hors tout | 222,6 m |
Largeur | 23,78 m |
Profondeur | 12,78 m |
Tirant d’eau maximal | 8,05 m |
Port en lourd | 30 133 t |
Année de construction | 1969 |
Propulsion | 1 moteur diesel de 6 637 kW entraînant 1 hélice à pas variable à gauche |
Propulseur d’étrave | 746 kW |
Cargaison | 27 013 t de minerai de fer |
Membres d’équipage | 24 |
Propriétaire | Canada Steamship Lines |
1.2 Description du navire
Le vraquier auto-déchargeur CSL Tadoussac a été construit en 1969 en Ontario par Collingwood Shipyards Ltd. En 2001, le navire a été élargi et son système d’autodéchargement a été mis à niveau par Canadian Shipbuilding & Engineering Ltd. à Port Weller (Ontario).
Le navire (figure 1) est équipé d’un système de manutention de cargaison à bord, qui permet de décharger la cargaison sans l’aide d’équipement de déchargement à terre. Il est doté d’une coque en acier avec une étrave droite et une poupe à tableau plat. Le CSL Tadoussac a des superstructures avant et arrière séparées par 5 cales à cargaison. La passerelle de navigation et des emménagements sont situés à l’avant. La salle des machines, les compartiments machine et d’autres emménagements sont situés à l’arrière.
La passerelle est dotée d’équipement de navigation et de communication, notamment 2 systèmes de visualisation de cartes électroniques et d’information (ECDIS) avec 1 écran supplémentaire, et 2 radars à aide de pointage radar automatique. Le pupitre de commande principal est situé près des fenêtres avant de la passerelle et comprend les commandes de la machine principale (notamment celles de l’hélice à pas variable) et du propulseur d’étrave. Le poste de conduite est situé derrière le pupitre de commande principal. Un autre pupitre se trouve à bâbord du pupitre de commande principal. Ce pupitre est équipé d’un système d’identification automatique (SIA) doté d’une prise destinée au pilote pour brancher 1 unité portative de pilotage (UPP)Note de bas de page 1. Deux petits ailerons se trouvent de chaque côté de la passerelle.
Le navire est propulsé par un moteur diesel à 2 temps, 6 cylindres, entraînant 1 hélice à pas variable à gaucheNote de bas de page 2. Ce type d’hélice tourne en sens antihoraire. Lorsque le pas de l’hélice est réglé en marche arrière, la poussée résultante a tendance à faire pivoter l’arrière du navire à bâbord et l’étrave à tribord. La direction est assurée par un gouvernail compensé avec un angle maximal de 35°, et le navire dispose d’un propulseur d’étrave en tunnel d’une puissance de 746 kW. Le navire n’est pas équipé d’un enregistreur des données du voyage.
Le navire est pourvu de trois ancres, une de chaque côté de l’étrave et une à l’arrière. Les ancres sont équipées d’un frein manuel et peuvent seulement être mouillées à partir du poste de mouillage. Lors de l’événement, les trois ancres étaient prêtes à être mouillées comme on l’exige pour tous les navires naviguant dans les zones de pilotage obligatoires du fleuve Saint-Laurent.
1.3 Déroulement du voyage
Le 7 juin 2020, le CSL Tadoussac a quitté Conneaut (Ohio, États-Unis) à destination de Québec (Québec). Après avoir quitté l’écluse de Saint-Lambert à Montréal (Québec), le navire a fait route vers l’est sous la conduite d’un pilote.
Le 10 juin 2020, à 1 h 50Note de bas de page 3, le navire est arrivé à la station de pilotage de Trois-Rivières (Québec), où un pilote de relève est monté à bord. Le pilote de relève et le pilote qu’il remplaçait étaient tous deux affectés à ce navire par l’Administration de pilotage des Laurentides (APL). Après être monté à bord, le pilote de relève a échangé des renseignements sur la navigation avec le pilote qu’il remplaçait et a discuté avec le capitaine de la vitesse du navire, de sa destination au poste d’amarrage no 53 et de l’accostage du navire sur son côté tribord. Le pilote a configuré son UPP pour suivre la progression du navire et a communiqué l’heure d’arrivée prévue du navire au prochain point d’appel aux Services de communications et de trafic maritimes (SCTM) de Québec. L’officier de quart a remis au pilote la fiche de pilotageNote de bas de page 4. Peu après, le capitaine a quitté la passerelle; l’équipe à la passerelle se composait alors du pilote, d’un officier de quart et d’un timonier.
À 6 h 29, le premier officier, qui était l’officier de quart à ce moment, a appelé le capitaine alors que le navire entrait dans les limites du port de Québec (figure 2).
À 6 h 54, le pilote a communiqué la position du navire aux SCTM de Québec et a réduit la vitesse du navire. Peu de temps après, le capitaine est arrivé sur la passerelle.
À 7 h, après une brève discussion entre le capitaine et le premier officier au sujet de l’accostage à venir, le capitaine a remplacé le premier officier, qui a ensuite quitté la passerelle.
Peu après, le pilote a expliqué son plan d’accostage au capitaine. Le capitaine a ensuite informé le pilote des particularités de manœuvre du navire étant donné que celui-ci est équipé d’une hélice à pas variable à gauche.
Avant d’entamer l’approche du poste d’amarrage no 53, le pilote était installé au poste du SIA, face aux fenêtres de la passerelle, et surveillait son UPP. Il a donné des ordres à la barre à l’intention du timonier et des ordres de propulsion au capitaine. Le timonier était à la barre, et le capitaine manipulait les commandes de propulsion et du propulseur d’étrave (figure 3). De sa position, le capitaine était en mesure de voir l’écran de l’ECDIS.
Vers 7 h 26, le navire se trouvait par le travers du poste d’amarrage no 25. La vitesse du navire était de 3 nœudsNote de bas de page 5 et son cap était de 17° gyroscopiquesNote de bas de page 6. Pour faire virer le navire à bâbord vers le poste d’amarrage no 53, le pilote a ordonné de mettre la barre à bâbord toute ainsi que le propulseur d’étrave à pleine puissance, également à bâbord. Il a ensuite ordonné au capitaine de réduire la vitesse du navire (figure 4)Note de bas de page 7.
À 7 h 35, le navire avait terminé la moitié de son cercle de giration vers le poste d’amarrage no 53. Sa vitesse à ce moment était de 2,2 nœuds.
Peu après, le pilote a remarqué, de visu et sur son UPP, que la trajectoire d’approche du navire avait changé; le navire ne suivait plus la trajectoire prévue, parallèle au quai, mais se trouvait plutôt sur une trajectoire de collision avec celui-ci. Le taux de virage du navire avait sensiblement diminué, et la vitesse du navire avait augmenté à 2,7 nœuds.
À 7 h 41, l’avant tribord du navire est passé par le travers du coin du poste d’amarrage no 53. Le navire a continué à virer lentement vers bâbord en s’approchant du quai à une vitesse de 3,2 nœuds. Il était positionné de telle sorte que la partie avant du navire était alignée avec le quai, tandis que la partie arrière dépassait le quai.
Vers 7 h 42, alors qu’il continuait à avancer vers le quai à une vitesse d’environ 3 nœuds, le navire a cessé de virer vers bâbord. La collision avec le quai étant inévitable, le pilote a ordonné au capitaine de régler le pas de l’hélice en marche arrière toute; toutefois, le capitaine l’avait déjà fait peu avant d’entendre cet ordre. L’heure exacte de l’action du capitaine n’a pu être déterminée.
Vers 7 h 43, l’avant tribord du navire a heurté le poste d’amarrage no 53 entre 2 défenses pneumatiques flottantes en caoutchouc à une vitesse de 2,1 nœuds et à un angle d’environ 30°. L’une des défenses en caoutchouc en forme de D du quai a perforé l’avant tribord du navire.
Après le heurt, le pilote a demandé au capitaine de terminer l’accostage. Le navire a été amarré au poste d’amarrage no 53 à 8 h 40.
Le pilote a signalé aux SCTM de Québec que le navire était amarré au quai. Les SCTM de Québec n’ont pas été informés à ce moment du heurt avec le quai, même si la réglementation l’exigeait Note de bas de page 8.
Après avoir évalué les avaries au navire avec le capitaine, le pilote a débarqué du navire.
À 12 h 23, le gestionnaire du navire a informé le bureau de Québec de Transports Canada (TC) de l’événement.
1.4 Avaries
Le navire a subi les dommages suivants (figures 5 et 6) :
- perforation du compartiment du propulseur d’étrave du navire à tribord, entre les couples 236 et 243;
- déformation de la citerne de ballast no 2, 850 cm au-dessus du fond de la citerne, entre les couples 166 et 175;
- marques de frottement, éraflures et décoloration de la peinture où le navire est entré en contact avec la défense en caoutchouc en forme de D.
1.5 Conditions environnementales
Le jour de l’événement, le temps était clair et les vents soufflaient de l’est-nord-est à 7 nœuds.
La marée basse était à 5 h 09, et on prévoyait que le niveau de l’eau serait de 0,6 m au-dessus du zéro des cartes. La marée haute était à 10 h 03 et le niveau de l’eau était de 5,2 m au-dessus du zéro des cartes. Au moment de l’événement, le niveau de l’eau était d’environ 4,0 m au-dessus du zéro des cartes et la marée était montante.
Lorsque la marée monte, il y a généralement deux directions de courant principales différentes dans le secteur de l’événementNote de bas de page 9. Au moment de l’événement, le premier courant se déplaçait en direction du sud-ouest, à une vitesse d’environ 2 nœuds, et le second courant se déplaçait en direction du sud-sud-ouest le long du rivage de la baie de Beauport, à une vitesse de moins de 1 nœud.
1.6 Le port de Québec
Le port de Québec est le 2e port en importance de la province de Québec et est géré par l’Administration portuaire de Québec. Le territoire portuaire est divisé en 6 secteurs, dont l’un est le secteur Beauport, situé dans la baie de Beauport, dans l’estuaire de la rivière Saint-Charles. Le secteur Beauport est un secteur en eau profonde; ses 4 postes d’amarrage (nos 50, 51, 52 et 53) ont une profondeur de 15 m à marée basse, ce qui permet d’accueillir de grands navires de chargeNote de bas de page 10.
1.6.1 Description du poste d’amarrage no 53
Le poste d’amarrage no 53 mesure 325 m de longueur; le tablier s’élève à 7,2 m au-dessus du zéro des cartes et la profondeur de l’eau le long du quai est d’environ 15 m. L’amplitude de marée peut atteindre 6 m.
Le quai est muni de 3 types de défenses en caoutchouc différents. Les défenses sont conçues pour absorber l’énergie transférée d’un navire à un quai, protégeant ainsi la coque du navire et la structure du quai. Le système de défense du poste d’amarrage (figure 7) comprend ce qui suit :
- défenses en pneu, suspendues par des fils en acier à intervalles de 36,56 m;
- défenses pneumatiques mesurant environ 2 m de diamètre et 3,5 m de longueur, ancrées au quai à intervalles de 35,02 m. Ces défenses ont une grande capacité d’absorption d’énergie pour éviter la déformation par compression. Les défenses flottent pour s’adapter aux changements de marée;
- défenses creuses en forme de D, boulonnées horizontalement le long du quai.
1.6.2 Utilisation de remorqueurs
Les navires qui accostent au port de Québec doivent se conformer aux exigences de l’Administration portuaire de Québec énoncées dans le document Pratiques et procédures reliées à la navigation. Ce document prescrit l’utilisation obligatoire d’un remorqueur pour tous les navires lors de l’accostage dans ces 2 conditions :
- lorsque le capitaine de port détermine que des vents de plus de 20 nœuds entravent les manœuvres;
- le navire a une jauge brute de 5000 ou plus et un port en lourd de plus de 5000 tonnesNote de bas de page 11.
Si le pilote ou le capitaine détermine que les circonstances l’exigent, on peut demander à ce qu’un remorqueur soit utilisé.
1.7 Certificats du navire
Le CSL Tadoussac possédait tous les certificats requis au titre de la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada pour un navire de sa catégorie et pour le voyage prévu. Bien que cela ne soit pas exigé par la réglementation, le CSL Tadoussac avait un système de gestion de la sécurité (SGS) qui était certifié et vérifié par Lloyd’s Register.
1.8 Certification et expérience du personnel
Le capitaine du CSL Tadoussac était titulaire d’un brevet valide de capitaine à proximité du littoral, délivré en 2009 et renouvelé la dernière fois en 2019. Il avait navigué à divers titres, sur différents navires, depuis 1975, et travaillait pour Canada Steamship Lines en tant que capitaine depuis 2003. Le capitaine naviguait sur le CSL Tadoussac depuis 2018. Il avait suivi un cours en gestion des ressources à la passerelle (GRP) en janvier 1995. En outre, le capitaine était titulaire d’un certificat médical valide.
Le pilote était titulaire d’un brevet valide de capitaine au long cours, délivré en 2005. Il avait navigué à divers titres, sur différents navires, depuis 1990, et avait suivi un cours en GRP en novembre 2005. En 2007, après 2 ans comme apprenti, il avait été affecté comme pilote à la circonscription no 1 de l’APL, pour le secteur Trois-Rivières à Québec. Au moment de l’événement, il était titulaire d’un brevet de pilote de classe A, ce qui lui permettait de piloter des navires de toutes tailles dans son secteur. De plus, le pilote détenait un certificat médical valide.
Le pilote connaissait bien le secteur Beauport du port de QuébecNote de bas de page 12. Il avait manœuvré différents navires dans ce secteur à 43 reprises avant juin 2020 et avait effectué 14 affectations d’accostage de navires au poste d’amarrage no 53 au cours des 5 dernières années, la plus récente datant d’avril 2020. Le pilote n’avait pas eu d’affectation sur le CSL Tadoussac au cours des 5 années précédant l’événement. Le pilote avait suivi plusieurs cours de formation sur la manœuvre des navires dans le cadre de sa formation au pilotage. En 2012, le pilote avait effectué des manœuvres d’accostage simulées au poste d’amarrage no 53.
Le timonier naviguait depuis 1975 et s’était joint pour la première fois au CSL Tadoussac en tant que timonier en octobre 1980.
L’enquête a permis de déterminer qu’il n’y avait pas de facteurs liés à la fatigue ou à l’état de santé qui affectaient la capacité du capitaine, du pilote ou du timonier à naviguer le jour de l’événement.
1.9 Gestion des ressources à la passerelle
La GRP est la gestion et l’utilisation de toutes les ressources, humaines et techniques, dont dispose l’équipe à la passerelle pour assurer la sécurité du voyage. Une communication efficace à la passerelle est un concept central de la GRP, car elle permet aux membres de l’équipe de créer une compréhension commune (ou un modèle mental commun) de la façon dont les tâches individuelles seront exécutées et du déroulement général du voyage. Pour que la GRP soit efficace, les renseignements et les intentions doivent être communiqués et mis à jour entre les membres de l’équipe à la passerelle pendant le voyage.
Une communication efficace est également essentielle à l’échange de renseignements entre le capitaine et le pilote, par lequel le capitaine et le pilote tiennent des discussions et s’entendent sur les procédures, les plans, les manœuvres et les imprévus avant le départ, puis continuent d’échanger des renseignements sur la navigation pendant toute la durée du voyage. Un manque de communication peut générer une compréhension différente de la situation, au fur et à mesure qu’elle se déroule, parmi les membres d’une équipe.
Dans le cadre de l’étude du BSTNote de bas de page 13 sur les rapports de travail entre les capitaines de navire et officiers de quart, et les pilotes de navire, 273 événements ont été analysés. Un manque de communication entre le pilote et l’officier de quart était un facteur fréquemment présent. Un sondage mené auprès des gens de mer canadiens durant l’étude a révélé qu’une proportion importante de capitaines et d’officiers de pont faisaient état d’une certaine réticence à remettre en question les décisions d’un pilote. L’étude a noté qu’en ce qui concerne l’échange global de renseignements entre les pilotes, les capitaines et les officiers de quart, chaque partie peut présumer que l’autre connaît les renseignements nécessaires et que, dans le cas contraire, elle les demandera.
Un sondage en ligne mené par le BST en 2014 auprès de 54 pilotes de navireNote de bas de page 14 a révélé que, même s’ils reconnaissaient l’importance d’une communication et d’un travail d’équipe efficaces parmi les membres de l’équipe à la passerelle, 37 % d’entre eux avaient déclaré que le capitaine ne s’assurait presque jamais que le plan de traversée et les conditions locales convenaient au navire, et 26 % avaient déclaré que les officiers de pont étaient presque toujours réticents à remettre en question les décisions du pilote.
1.9.1 Exigences relatives à la formation sur la gestion des ressources à la passerelle
Depuis le 1er janvier 2005, le Règlement général sur le pilotageNote de bas de page 15 exige que tous les pilotes maritimes brevetés au Canada détiennent un certificat de participation à un programme de formation en GRP. En 2012, cette exigence a été retirée de la réglementation et n’a pas été remplacée.
Cependant, l’APL considère toujours cette formation comme obligatoire pour ses pilotes.
Depuis 2017, en vertu de la Convention internationale de 1978 sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille (Convention STCW) et des modifications de Manille de 2010Note de bas de page 16, les gens de mer canadiens qui souhaitent obtenir un brevet de compétence en tant qu’officier de pont doivent suivre un cours de navigation électronique simulée opérationnelle (NES-O). Ceux qui souhaitent obtenir un brevet de compétence en tant que capitaine doivent suivre un cours de navigation électronique simulée – Gestion (NES-G)Note de bas de page 17. Ces cours ont remplacé la formation en navigation électronique simulée, niveau 1 (NES-1) et la formation en navigation électronique simulée, niveau 2 (NES-2). Le Règlement sur le personnel maritimeNote de bas de page 18 précise que les gens de mer doivent suivre les cours NES-1 et NES-2 pour obtenir leur brevet. Le Règlement ne mentionne pas les cours NES-O ou NES-G.
Les cours NES-O et NES-G comprennent tous deux une formation en GRP. Les sujets abordés durant la formation en GRP sont, généralement, la conscience situationnelleNote de bas de page 19, les compétences en matière de communication, la planification des traversées, l’organisation sur la passerelle, le leadership et le travail d’équipe, le stress et la fatigue, ainsi que les rapports entre les membres de l’équipe à la passerelle, les pilotes et les autres membres de l’équipage.
Les cours NES-O et NES-G sont décrits dans la plus récente version de la publication TP 4958 de TC. Cette version préliminaire a été mise à la disposition des prestataires de cours autorisés en 2017. Les premiers cours NES qui abordent la GRP ont été offerts en 2018.
Au moment de la rédaction du rapport, ni le Règlement sur le personnel maritime, ni la version du TP 4958 publiée sur le site Web de TC n’avaient été mis à jour avec les modifications apportées en 2017 à la Convention STCW concernant les cours NES qui abordent la GRP.
La version du TP 4958 publiée sur le site Web de TC fait toujours référence à la navigation électronique simulée, niveaux 1 et 2, et ne comprend pas de contenu de cours sur la GRP.
Les capitaines et les officiers de pont qui ont obtenu leur brevet avant 2017 n’étaient pas tenus de suivre un cours de GRP dans le cadre de leur formation. En outre, aucune exigence réglementaire n’oblige les capitaines et les officiers de pont à suivre respectivement les cours NES-O et NES-G pour renouveler leur brevet tous les 5 ans.
1.10 Gestion de la sécurité
Les objectifs du Code international de gestion pour la sécuritéNote de bas de page 20 (Code ISM) sont d’assurer la sécurité en mer, de prévenir les blessures ou les pertes de vies humaines et d’éviter les dommages à l’environnement. Selon le Code ISM, les objectifs de gestion de la sécurité d’une compagnie doivent prévoir des pratiques sécuritaires relativement à l’exploitation des navires de même qu’un environnement de travail sûr en évaluant tous les risques identifiés pour les navires, le personnel et l’environnement, établir des mesures de protection appropriées à l’égard de ces risques et améliorer continuellement les compétences en matière de gestion de la sécurité du personnel à terre et à bord des navires. Le Code ISM, qui s’applique à tous les navires assujettis à la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer (Convention SOLAS), exige que les compagnies et les navires élaborent et mettent en œuvre un SGS.
Au Canada, les navires de charge non assujettis à la Convention qui effectuent des voyages intérieurs ne sont pas tenus d’avoir un SGS. Toutefois, les compagnies qui mettent volontairement en œuvre un SGS peuvent le faire vérifier par une société de classification. Après avoir vérifié que le SGS mis en œuvre volontairement répond aux exigences du Code ISM et que la compagnie et le navire sont exploités conformément au SGS, la société de classification délivrera un document de conformité à la compagnie et un certificat de gestion de la sécurité au navire. TC n’assure pas la vérification ou la surveillance de ces systèmes mis en œuvre volontairement.
Les compagnies devraient s’assurer que les SGS utilisés à bord d’un navire particulier comprennent des procédures et des instructions pour éviter les pratiques non sécuritaires. Par conséquent, les compagnies devraient veiller à ce que leurs procédures soient claires et simples et comprennent des activités routinières comme la planification des traversées et l’échange de renseignements entre le capitaine et le pilote.Note de bas de page 21
Bien que la réglementation ne l’exigeait pas, Canada Steamship Lines avait volontairement élaboré un SGS pour le CSL Tadoussac et avait retenu les services d’une société de classification, Lloyd’s Register, pour vérifier et certifier sa conformité au Code ISM.
1.10.1 Plan de traversée
L’objectif du plan de traversée d’un navire est d’améliorer la sécurité, en mettant en évidence les secteurs à haut risque et en fournissant des renseignements importants dans un format facilement accessible par les personnes chargées de la navigation. Un plan de traversée permet aux membres de l’équipe à la passerelle de partager une même connaissance de la situation à mesure que progresse le voyage. Il contient également les éléments clés de la navigation tels que le cap du navire, les points de changement de cap avec les positions de changement de route, les points d’abandonNote de bas de page 22, les dangers locaux, les marées, les références et repères visuels et les points où il faut signaler sa présence au contrôle de la circulation maritime.
Le paragraphe 14(1) du Règlement sur les cartes marines et les publications nautiques (1995)Note de bas de page 23 établit que tous les navires canadiens, et tous les navires se trouvant dans des eaux de compétence canadienne, sont tenus de préparer un plan de traversée d’un poste d’amarrage à l’autre, conformément à la norme STCW A-VIII/2.3, à la résolution A.893(21) de l’OMI et à la règle 34 du chapitre V de la Convention SOLAS.
La procédure de planification de la traversée du CSL Tadoussac est décrite dans le manuel d’exploitation de la flotte, dans la section sur la planification de traversée pour les navires équipés d’un ECDIS [traduction] :
Le plan de traversée d’un poste d’amarrage à l’autre doit être découpé en autant de tronçons indépendants que nécessaire. Par exemple, un fichier pour la traversée du poste d’amarrage à la fin de la navigation côtière, un fichier pour la traversée en mer et un fichier pour la traversée dans les eaux côtières jusqu’au poste d’amarrageNote de bas de page 24.
La même sous-section contient un avis indiquant ce qui suit [caractères gras dans l’original] [traduction] :
Les capitaines et les officiers de navigation doivent examiner visuellement chaque tronçon de la traversée avant d’appliquer le mode de suivi. Il est également essentiel d’utiliser les fonctions de vérification automatique intégrées fournies lors de la validation et de l’approbation du plan de voyageNote de bas de page 25.
Un plan général de traversée de Conneaut au port de Québec a été préparé bien avant le voyage de l’événement à l’étude par un second officier et approuvé par le capitaine. Ce plan général a été entré dans l’ECDIS et a été utilisé pour chaque voyage effectué par le navire entre Conneaut et le port de Québec. Une version papier de ce plan a été imprimée et, conformément à la pratique courante, certains détails comme la date du voyage et les corrections de la carte ont été modifiés pour le voyage de l’événement à l’étude. La partie accostage du plan de traversée comprenait 2 étapes et 3 points de cheminement, le dernier point de cheminement étant le poste d’amarrage no 53. Le plan ne détaillait pas les manœuvres nécessaires pour que le navire effectue un cercle de giration et vienne accoster au poste d’amarrage no 53 (figure 8).
Pour s’assurer que tous les éléments essentiels sont inclus dans un plan de traversée, la Canada Steamship Lines exige que sa liste de vérification soit utilisée dans la procédure de planification de la traversée. Selon cette liste de vérification, les points d’abandon doivent être identifiés et marqués. La liste de vérification du plan de traversée pour le voyage de l’événement à l’étude avait été remplie et indiquait que l’obligation d’identifier les points d’abandon avait été respectée (annexe A). Cependant, les points d’abandon n’avaient pas été identifiés et marqués sur le plan de traversée.
1.10.2 Procédure d’échange de renseignements entre le capitaine et le pilote
La procédure de navigation sous la conduite d’un pilote à bord du CSL Tadoussac est décrite dans la partie A du manuel d’exploitation de la flotte. Dans cette partie, le manuel exige que les capitaines et les pilotes remplissent la liste de vérification portant sur l’échange de renseignements essentiels entre le capitaine et le pilote. L’annexe B montre la liste de vérification laminée utilisée à bord; la liste de vérification peut être effacée et réutilisée pour d’autres voyages.
La liste de vérification indique que le capitaine doit donner au pilote un exposé de sécurité et fournir la fiche de pilotage, qui comprend des renseignements essentiels sur le navire. Le capitaine doit également informer le pilote des caractéristiques de manœuvre du navire, de l’état de l’équipement à la passerelle, du tirant d’air et du dégagement sous quille.
Le pilote doit informer le capitaine du plan de traversée, y compris la vitesse aux étapes critiques. Il doit également fournir des renseignements sur des sujets tels que les exigences en matière communication avec les services de trafic maritime, les conditions de trafic, les données sur les marées et les courants, et les conditions météorologiques prévues.
En outre, la liste de vérification indique les points sur lesquels le capitaine et le pilote doivent se mettre d’accord : renseignements sur le poste d’amarrage, profondeur d’eau le long du quai, plan d’amarrage, utilisation de remorqueurs et leur position de rendez-vous, position d’amarrage, puissance de traction, toute restriction applicable au navire, amarres à utiliser pour l’amarrage et configurations des cordages.
Le manuel d’exploitation de la flotte indique en outre que [caractères gras et soulignement dans l’original] [traduction] :
À la fin de l’exposé, le capitaine doit remplir la liste de vérification NAV 05 portant sur l’échange de renseignements entre le capitaine et le pilote. Ce document doit être signé par le capitaine et le pilote avant de poursuivre. Les données pertinentes doivent être entrées dans le système. Si le pilote refuse de signer, il faut l’indiquer dans le système.
Le pilotage ne doit pas commencer tant que le pilote et l’équipe à la passerelle du navire n’ont pas été informés et ne sont pas pleinement conscients de la situation. Les pressions commerciales ne doivent pas compromettre une bonne planification de la traversée. Si le capitaine n’est pas satisfait de l’échange de renseignements ou des compétences du pilote, le navire ne doit pas poursuivre sa route.Note de bas de page 26
La liste de vérification n’a pas été remplie ou signée le jour de l’événement comme il se doit. Le fait de ne pas remplir ou signer la liste de vérification le jour du voyage était une pratique courante en ce qui concerne les échanges entre le capitaine et le pilote à bord de ce navire. Le journal de bord du navire ne contenait aucune entrée confirmant que la procédure d’échange de renseignements entre le capitaine et le pilote avait été exécutée.
S’appuyant sur la résolution A960 de l’OMI, l’Association internationale des pilotes maritimes recommande que le capitaine et le pilote discutent de leurs intentions et attentes respectives concernant la traversée prévue et parviennent à une [traduction] « entente générale sur les plans et les procédures, y compris les plans d’urgence ». Le document insiste en outre sur le fait que [traduction] « il doit être clairement entendu que tout plan de traversée est une indication de base de l’intention préférée et que le pilote et le capitaine doivent être prêts à s’en écarter lorsque les circonstances l’exigentNote de bas de page 27 ».
1.11 Accostage d’un navire sur son côté tribord
Ce qui suit décrit une pratique courante pour l’accostage d’un navire sur son côté tribord, sans vent ni courant, lorsqu’il est équipé d’une hélice à pas fixe à droiteNote de bas de page 28. Ces procédures s’appliquent aux navires qui accostent de cette façon au poste d’amarrage no 53.
- Approcher le quai à un angle prononcé.
- Mettre le gouvernail à bâbord pour faire pivoter la poupe vers le quai.
- Mettre la machine en marche arrière. Lorsqu’on met la machine en marche arrière pour freiner la progression du navire, l’effet de la poussée transversale éloigne la poupe du quai. Il faut exercer son jugement pour s’assurer que l’effet de la poussée transversale est suffisant pour arrêter le virage vers bâbord, mais pas suffisant pour faire dévier la poupe.
- Positionner le navire parallèlement au quaiNote de bas de page 29.
En plus des procédures ci-dessus, l’ancre bâbord d’un navire peut être mouillée pour draguer le fond marin pendant que le navire accoste sur son côté tribord.
Les différents guides de manœuvre des navires fournissent des renseignements légèrement différents sur la vitesse optimale du navire à l’approche d’un quai. Un manuel destiné aux capitaines de navires fait référence à une vitesse de 30 à 40 cm/s (de 0,6 à 0,8 nœud) pour les navires ayant un port en lourd similaire à celui du CSL TadoussacNote de bas de page 30. Le fait d’approcher le quai à basse vitesse peut permettre d’arrêter le navire à l’aide de sa machine ou des ancres, si nécessaire.
La manœuvre d’un grand navire peut être affectée par le vent, le courant ou une combinaison des deux, comme c’était le cas le jour de l’événement. Dans ces conditions, l’assistance d’un remorqueur peut être utile pour faciliter l’accostage.
L’accostage d’un navire descendant dans le secteur Beauport lors d’une marée montante est plus difficile que l’accostage d’un navire remontant. Avant d’entrer dans l’estuaire de la rivière Saint-Charles, un navire descendant doit effectuer un cercle de giration pour se placer parallèlement à la ligne d’accostageNote de bas de page 31. Les manœuvres des navires peuvent être affectées par les courants du sud-ouest et du sud-sud-ouest lorsque la marée monte. L’effet du courant sud-sud-ouest est plus prononcé à l’est du coin du poste d’amarrage no 53, à l’extrémité du terminal. Les capitaines et les pilotes qui manœuvrent des navires dans cette zone sont conscients des effets de ces courants.
1.11.1 Plan d’accostage du pilote pour le poste d’amarrage no 53
Dans l’événement à l’étude, le plan d’accostage du pilote était le suivant :
- en approchant du secteur Beauport dans l’estuaire de la rivière Saint-Charles, garder le navire plus près de la rive sud du fleuve Saint-Laurent pour éviter le poste d’amarrage no 25, car le navire pourrait être poussé vers le poste no 25 par le courant sud-ouest;
- réduire la vitesse du navire à 2 ou 2,5 nœuds pour faire virer le navire à bâbord vers le poste d’amarrage no 53 et amener le navire parallèlement au quai à une distance d’environ 60 m;
- déplacer le navire plus loin le long de la ligne d’accostage du terminal jusqu’au poste d’amarrage no 52 inoccupé; en amenant le navire à l’intérieur du poste d’amarrage no 52, toute la longueur du navire pourrait être protégée du courant sud-sud-ouest par le rivage;
- arrêter le navire, puis manœuvrer en marche arrière et avant pour l’amener le long du poste d’amarrage no 53.
L’assistance d’un remorqueur n’était pas requise par la réglementation portuaire, car le vent soufflait à moins de 20 nœuds le jour de l’événement. Même si le pilote avait le pouvoir discrétionnaire de demander l’assistance d’un remorqueur pour l’accostage, le capitaine et le pilote n’ont pas abordé ni planifié la possibilité de demander l’assistance d’un remorqueur, même si cette option figurait sur la liste de vérification.
Se fondant sur son expérience des manœuvres et de l’accostage de navires en général et dans le secteur Beauport en particulier, le capitaine préférait approcher le poste d’amarrage no 53 parallèlement à celui-ci, en complétant le virage à bâbord à la bouée latérale K168 pour tenir compte de l’effet du courant sud-sud-ouest. Même si l’approche prévue par le pilote était différente de celle du capitaine, ce dernier n’a pas exprimé d’inquiétude quant au plan d’accostage du pilote.
1.12 Pilotage dans le secteur du fleuve Saint-Laurent
Au Canada, il existe 4 administrations de pilotage, chacune d’entre elles étant régie par la Loi sur le pilotageNote de bas de page 32. Les administrations de pilotage exercent leurs activités dans les régions suivantes : Pacifique, Grands Lacs, Atlantique et Laurentides. Chaque région possède son propre ensemble de règlements.
L’APL est la société d’État fédérale chargée de fournir des services de pilotage dans la région du fleuve Saint-Laurent. Les principales responsabilités de l’APL consistent à établir les zones de pilotage obligatoire et à délivrer des brevets de pilote et des certificats de pilotage. L’APL a conclu des contrats avec 2 corporations de pilotes pour l’embauche de pilotes brevetés et d’apprentis-pilotes qui doivent fournir des services dans les 3 circonscriptions suivantes :
- la circonscription no 1, qui couvre la région entre Montréal et Québec ;
- la circonscription no 1.1, qui couvre le port de Montréal;
- la circonscription no 2, qui couvre la zone entre Québec et Les Escoumins, y compris la rivière Saguenay.
Les services de pilotage dans les circonscriptions no 1 et 1.1 sont fournis par la Corporation des pilotes du Saint-Laurent Central (CPSLC), et les services de pilotage dans la circonscription no 2 sont fournis par la Corporation des pilotes du Bas Saint-Laurent.
L’APL confie la formation des apprentis pilotes à la Corporation des pilotes du Saint-Laurent Central (CPSLC), mais conserve la responsabilité de s’assurer que les pilotes sont dûment formés et brevetés.
Les pilotes d’accostage effectuent les manœuvres d’accostage des navires qui arrivent à Québec en provenance de Les Escoumins. Le pilote d’accostage embarque à la station de pilotage au large de Sainte-Pétronille (Québec) et assure la relève pour le ou les pilotes déjà à bord. Cette pratique a été adoptée en raison de la taille de la circonscription no 2, qui est de 120 NM et se traverse en 10 heures environ. À titre de comparaison, le secteur Trois-Rivières/Québec de la circonscription no 1 est d’environ 68 NM et se traverse en 6 heures environ, de sorte que les pilotes affectés à cette circonscription accostent eux-mêmes les navires.
1.12.1 Responsabilités du pilote et du capitaine relativement à la conduite du navire
Pour assurer la sécurité de la navigation, il est essentiel qu’une seule personne assure la conduite d’un navire en tout temps. Sinon, il peut y avoir des ordres contradictoires et des retards dans la prise de décisions.
Dans les zones de pilotage obligatoire, seul un pilote breveté ou le titulaire d’un certificat de pilote peut assurer la conduite d’un navire, et cette personne est responsable envers le capitaine de la sécurité de la navigation du navireNote de bas de page 33. Si le capitaine a des motifs raisonnables de croire que les actions du pilote mettent le navire en danger, il peut relever le pilote de ses fonctions et assumer la conduite du navire. Pour ce faire, le capitaine doit informer le pilote de son intention de prendre la conduite du navire; les transferts de conduite doivent être clairs pour que l’équipe à la passerelle sache qui a le contrôle du navire. Conformément à la Loi sur le pilotage, lorsqu’un capitaine remplace un pilote, il doit envoyer un rapport écrit détaillé à TC dans un délai de 3 joursNote de bas de page 34.
En août 2014, l’APL a publié un avis à l’industrie pour rappeler aux gens de mer le rôle et les responsabilités du pilote pendant les manœuvres d’accostage, ainsi que les responsabilités du capitaine si celui-ci relève le pilote de ses fonctions. L’avis indiquait également que le capitaine doit informer le pilote et l’équipe à la passerelle lorsque le capitaine prend la conduite du navire.
Dans l’événement à l’étude, le capitaine a réglé le pas de l’hélice en marche arrière toute avant que le pilote ne le lui ordonne et sans l’en informer.
1.12.2 Exigences en matière d’échange de renseignements entre le capitaine et le pilote
L’APL a préparé une politique détaillée sur l’échange de renseignements entre les capitaines et les pilotes. La Politique sur l’échange d’informations entre le capitaine et le/la pilote (MPX)Note de bas de page 35 de l’APL est entrée en vigueur le 23 juin 2020, après l’événement à l’étude.
1.12.3 Unité portative de pilotage
Une unité portative de pilotage (UPP) est un appareil électronique portatif informatisé qui permet aux pilotes d’utiliser leurs propres cartes électroniques et routes pour faciliter la navigation. L’UPP utilise sa propre antenne de système de positionnement global. Elle peut être connectée au SIA du navire à l’aide de la prise destinée au pilote. L’UPP possède une fonction de prévision qui détermine les futures positions du navire en effectuant des calculs géométriques basés sur le taux de virage, la position, le cap, la route sur le fond et la vitesse sur le fond actuels du navire. L’UPP comprend également une fonction permettant d’enregistrer le voyage, mais cette fonction doit être activée par l’utilisateur. Dans l’événement à l’étude, le pilote n’a pas enregistré le voyage; toutefois, l’APL n’exige pas que ses pilotes enregistrent leurs voyages.
L’APL fournit à chacun de ses pilotes une UPP contenant des cartes marines pour leurs zones de pilotage respectives. Aucune route recommandée n’est fournie dans les UPP; les pilotes sont responsables de saisir des points de cheminement dans l’UPP pour préparer le plan de traversée.
1.13 Enregistreur des données du voyage
L’objectif d’un enregistreur des données du voyage (VDR) est d’enregistrer et de sauvegarder les renseignements et paramètres critiques relatifs aux dernières heures précédant un incident, afin d’aider les autorités compétentes dans leurs enquêtes sur les causes et les facteurs contributifs d’un événement.
En plus des conversations à la passerelle, le VDR enregistre en continu les données telles que l’heure, le cap et la vitesse du navire, les indications du gyrocompas, du radar et de l’échosondeur, les alarmes, les communications radiotéléphoniques VHF, la vitesse et la direction du vent, ainsi que les commandes à la barre et à la machine et la réponse à ces commandes. Le bouton de sauvegarde du VDR doit être activé après un événement pour que les données soient récupérables.
Selon le Règlement sur les enregistreurs des données du voyageNote de bas de page 36, le CSL Tadoussac n’était pas tenu d’être équipé d’un VDR et n’avait pas de VDR installé.
1.14 Recommandations actives du BST
Le 1er janvier 1995, le BST a publié son rapport Étude de sécurité portant sur les rapports de travail entre les capitaines et officiers de quart, et les pilotes de navireNote de bas de page 37. Cette étude avait pour but de déterminer les lacunes en matière de sécurité liées au travail d’équipe à la passerelle, y compris les échanges entre les pilotes et les capitaines ou les officiers de quart, sur les navires canadiens et étrangers d’une jauge brute de plus de 5000 sous la conduite d’un pilote dans les zones où le pilotage est obligatoire au Canada.
Le Bureau a constaté que les divergences de perception entre les capitaines et officiers de quart et les pilotes, et les différences dans les attentes de ces deux groupes, contribuent à un manque de compréhension mutuelle. En raison de la gravité potentielle des conséquences de ces malentendus, le Bureau estimait que des mesures rigoureuses devaient être prises pour améliorer l’efficacité de l’équipe à la passerelle grâce à un meilleur échange d’information. Le Bureau a formulé 2 recommandations en ce sens : l’une concernant la tenue d’un échange de renseignements en bonne et due forme entre le capitaine et le pilote lorsqu’un pilote prend son service, et l’autre visant à s’assurer que la formation des officiers et pilotes de navires canadiens comprend des exercices pratiques sur les méthodes de relève à la conduite du navire.
Par conséquent, le Bureau a recommandé que
le ministère des Transports exige que le programme de formation initiale de tous les officiers de navire soit modifié de façon à inclure un volet sur les compétences en gestion des ressources à la passerelle.
Recommandation M95-09 du BST
De plus, le Bureau a recommandé que
le ministère des Transports exige que tous les officiers de navire fassent la preuve de leurs compétences en gestion des ressources à la passerelle avant de se voir délivrer des certificats de maintien des compétences.
Recommandation M95-10 du BST
Depuis que ces recommandations ont été émises, le BST fait un suivi annuel auprès de TC sur les mesures prises pour y donner suite. TC fournit des réponses indiquant les mesures qui ont été ou seront prises, et le BST évalue ces réponses. Au moment de la rédaction du présent rapport, les réponses les plus récentes de TC avaient été reçues en février 2021. Le Bureau a estimé que la réponse à la recommandation M95-09 dénotait une intention satisfaisanteNote de bas de page 38 et que la réponse à la recommandation M95-10 dénotait une attention en partie satisfaisante.Note de bas de page 39
1.15 Liste de surveillance du BST
La Liste de surveillance du BST énumère les principaux enjeux de sécurité qu’il faut s’employer à régler pour rendre le système de transport canadien encore plus sûr.
La gestion de la sécurité figure sur la Liste de surveillance 2020. Bien que la réglementation n’exige pas la mise en place d’un SGS sur des navires comme le CSL Tadoussac, Canada Steamship Lines avait volontairement élaboré et mis en œuvre un SGS pour le CSL Tadoussac et avait retenu les services de Lloyd’s Register pour en assurer la surveillance et la certification.
TC ne vérifie pas les SGS mis en œuvre de façon volontaire pour les navires canadiens, et l’inspection du CSL Tadoussac effectuée par TC après l’événement n’a pas révélé de lacunes dans le SGS. Toutefois, l’enquête du BST sur cet événement a révélé des lacunes dans le respect du plan de traversée et concernant l’échange de renseignements entre le capitaine et le pilote, qui font partie du SGS du navire. Ces faits soulignent l’importance d’une surveillance réglementaire adéquate et de la démonstration par les exploitants de l’efficacité de leur SGS.
MESURES À PRENDRE La gestion de la sécurité restera sur la Liste de surveillance dans le secteur du transport maritime jusqu’à ce que :
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2.0 Analyse
L’analyse portera sur les facteurs ayant mené à la collision avec le poste d’amarrage no 53 dans le port de Québec, y compris les effets des courants et des vents, de la vitesse du navire et de l’inefficacité des manœuvres d’évitement. Elle traitera également du rôle de la gestion des ressources à la passerelle (GRP), du transfert de la conduite, des procédures de planification de la traversée et de l’échange de renseignements entre le capitaine et le pilote, ainsi que de l’utilisation des enregistreurs des données du voyage (VDR).
2.1 Facteurs ayant mené au heurt
Après l’entrée du CSL Tadoussac dans le secteur Beauport du port de Québec, le pilote a effectué une manœuvre de virage à une vitesse sur le fond de 3,2 nœuds pour effectuer un cercle de giration vers bâbord. L’objectif du pilote était d’amener le navire parallèlement à la ligne d’accostage à une distance d’environ 60 m, puis de manœuvrer le navire pour l’amener le long du poste d’amarrage no 53. Le pilote s’est fié à la fonction de prévision de son unité portative de pilotage (UPP) pour surveiller la progression du navire et l’aider à naviguer pendant l’accostage. Lorsque la partie avant du CSL Tadoussac a dépassé le coin du poste d’amarrage no 53, le navire était positionné de telle sorte qu’il était partiellement à l’intérieur du quai. Alors que la partie avant de la coque du navire était protégée du courant de la marée montante sud-sud-ouest, la partie arrière dépassait le quai et était exposée au courant. La force du courant a poussé la poupe à bâbord, ce qui a poussé la proue à tribord, vers le quai.
Le moment de pivotement créé par le courant a agi contre le moment de rotation créé par le gouvernail et le propulseur d’étrave du navire, ce qui a réduit le taux de virage du navire. Par conséquent, le navire n’a pas pu terminer son virage vers bâbord et n’était pas parallèle lorsqu’il s’est approché du poste d’amarrage.
Le navire s’est approché du poste d’amarrage à vitesse réduite, mais sa progression a été affectée par l’effet combiné du courant sud-ouest et du vent est-nord-est, qui a poussé le navire vers l’avant.
En raison du virage incomplet vers bâbord et de l’effet combiné du courant et du vent, le navire s’est approché du poste d’amarrage à une vitesse d’environ 3 nœuds, ce qui a réduit le temps dont disposait l’équipage pour prendre des mesures correctives efficaces afin d’empêcher le navire de heurter le quai.
Afin d’éviter de heurter le quai, le capitaine a mis l’hélice à pas variable à gauche en position de marche arrière toute. Cette action a fait virer l’arrière du navire vers bâbord, ce qui a réduit le taux de virage du navire vers bâbord. Par conséquent, la route sur le fond du navire a progressivement changé vers tribord et sa vitesse a été réduite à 2,1 nœuds. Le navire s’est ensuite approché du poste d’amarrage à un angle de 30°, ce qui a contribué au fait qu’il a manqué une défense pneumatique et a heurté le quai.
Juste avant que le CSL Tadoussac ne heurte le quai, sa vitesse était d’environ 2 nœuds; il n’était donc pas possible d’arrêter le navire à l’aide de la machine uniquement. Dans de telles situations, lorsqu’un navire se trouve à proximité d’un poste d’amarrage et qu’il se déplace à une vitesse qui ne permet pas de l’arrêter à l’aide de la machine uniquement, le fait de mouiller et de draguer l’ancre peut aider à réduire la vitesse et à éloigner la proue du quai. Cela peut aider à éviter le heurt ou à minimiser les avaries au navire.
Avant l’événement, le pilote et le capitaine n’ont pas abordé ni planifié l’utilisation des ancres pour l’accostage ou en cas d’urgence. Par conséquent, même si les ancres étaient prêtes à être mouillées, aucun membre d’équipage n’avait été désigné pour se tenir prêt à les mouiller.
Le CSL Tadoussac n’était pas tenu par la réglementation des administrations portuaires d’utiliser l’assistance d’un remorqueur. Même si l’assistance d’un remorqueur pouvait être demandée pour l’accostage, le capitaine et le pilote n’avaient pas l’intention d’utiliser un remorqueur.
Si les capitaines et les pilotes ne discutent pas de l’utilisation de tous les moyens disponibles pour manœuvrer lors de l’accostage, comme les ancres ou l’assistance d’un remorqueur, ils risquent de limiter les outils à leur disposition, surtout dans les moments critiques.
2.2 Gestion des ressources à la passerelle
La GRP n’est efficace que lorsqu’une équipe a une compréhension commune de la situation. Un manque de communication peut avoir des effets néfastes sur la conscience situationnelle de l’équipe et, par conséquent, sur la sécurité et l’efficacité des voyages d’un navire. La formation en GRP souligne la nécessité d’assurer la compréhension commune d’une situation ainsi que la communication entre les membres de l’équipe à la passerelle, notamment la communication entre les capitaines et les pilotes. Ce type de formation peut atténuer le risque d’une communication inadéquate. Avant l’événement à l’étude, le pilote avait suivi une formation en GRP en 2005 et le capitaine avait suivi une formation en GRP en 1995.
Dans l’événement à l’étude, des manques de communication entre le capitaine et le pilote ont nui à leur capacité d’acquérir et de partager une conscience situationnelle exacte quant à la trajectoire du navire pendant la manœuvre d’accostage. Le pilote a expliqué au capitaine les manœuvres d’approche et d’accostage qu’il avait prévues; le capitaine a accusé réception du plan et a informé le pilote des caractéristiques de manœuvre du navire. Toutefois, en raison de son expérience antérieure de l’accostage dans le secteur Beauport, le capitaine préférait une approche différente de celle du pilote pour manœuvrer le navire jusqu’au poste d’amarrage, mais il ne l’a pas communiquée au pilote.
Les membres de l’équipe à la passerelle peuvent être réticents à remettre en question les décisions d’un pilote et avoir tendance à se fier aux connaissances et à l’expérience locales du pilote lors de l’exécution de manœuvres d’accostage. Cependant, le capitaine et l’équipage connaissent mieux les caractéristiques de manœuvre de leur navire, et il est important de communiquer des renseignements cruciaux avec les pilotes lors de la planification et de l’exécution d’une manœuvre. L’enquête n’a pas permis de déterminer dans quelle mesure le pilote aurait pu modifier son approche si le capitaine lui avait fait part de son expérience de la manœuvre du navire et de son approche privilégiée pour le poste d’amarrage no 53.
Dans l’événement à l’étude, le pilote assurait la conduite du navire. Toutefois, lorsqu’il est devenu évident pour le capitaine qu’une collision avec le quai était inévitable et qu’une action urgente était justifiée, il a tenté une manœuvre d’évitement en réglant le pas de l’hélice en marche arrière toute. Le capitaine n’a pas communiqué son action au pilote, ce qui a nui à l’exactitude de la conscience situationnelle du pilote et à sa compréhension de l’évolution de la trajectoire du navire.
En agissant ainsi, le capitaine a en fait relevé le pilote de ses fonctions et pris la conduite du navire. Même si le capitaine croyait que les actes du pilote compromettaient la sécurité du navire, il devait, selon la Loi sur le pilotage et l’Administration de pilotage des Laurentides, aviser clairement le pilote de son intention de prendre la conduite du navire.
Si les membres de l’équipe à la passerelle ne communiquent pas de façon constante pour établir une compréhension commune de l’état du navire, il y a un risque que les manœuvres cruciales pour assurer la sécurité de la navigation ne soient pas adéquatement planifiées, coordonnées et exécutées.
2.3 Gestion de la sécurité à bord du CSL Tadoussac
Canada Steamship Lines avait volontairement mis au point un système de gestion de la sécurité (SGS) pour le CSL Tadoussac qui comprenait des procédures et des instructions pour les opérations courantes comme la planification des traversées et l’échange de renseignements entre le capitaine et le pilote. Cependant, le jour de l’événement, certaines de ces procédures n’ont pas été suivies à la lettre.
Un plan de traversée est une procédure formelle visant à fournir à l’équipe à la passerelle une projection des manœuvres à effectuer pour assurer une traversée sécuritaire. Pour être applicable dans la pratique, le plan de traversée doit être réaliste et correspondre étroitement aux voies navigables empruntées et aux caractéristiques de manœuvre réelles du navire.
Afin de respecter les exigences relatives à la planification de la traversée contenues dans le SGS du navire, un plan de traversée général pour le voyage de routine du navire entre Conneaut et le port de Québec avait été préparé et approuvé par le capitaine. La partie du plan de traversée général concernant l’approche du poste d’amarrage comprenait 2 étapes et 3 points de cheminement, le dernier point de cheminement étant le poste d’amarrage.
Même si le plan de traversée général couvrait l’ensemble du voyage, d’un poste d’amarrage à l’autre, et ainsi répondait techniquement aux exigences du SGS, la portion du plan visant l’approche du poste d’amarrage prévoyait que le navire arriverait de face, ce qui ne correspondait pas exactement à la route privilégiée par le capitaine ni à la route prévue par le pilote. Cette partie du plan de traversée n’était pas divisée en plusieurs étapes indépendantes qui suivent les approches et les manœuvres courantes et pratiques nécessaires à l’accostage au poste d’amarrage no 53, comme le cercle de giration requis pour amener le navire parallèlement au poste.
Par conséquent, l’équipe à la passerelle n’a pas pu suivre le plan de traversée du navire et a dû se fier entièrement au pilote pour accoster le navire en toute sécurité. La présence d’un pilote à bord ne dispense pas l’équipe à la passerelle de l’obligation de préparer un plan de traversée réaliste qui comprend une approche pratique du poste d’amarrage. De plus, sans une bonne compréhension du plan de traversée du pilote, l’équipe à la passerelle n’avait pas une compréhension prévisionnelle des manœuvres à effectuer et n’était donc pas en mesure de surveiller les actions du pilote pendant que le navire approchait du poste d’amarrage.
Si le plan de traversée du navire ne prévoit pas une approche réaliste du poste d’amarrage qui intègre les conditions réelles et les caractéristiques du navire, il y a un risque que les membres de l’équipe à la passerelle n’établissent pas un modèle mental commun et soient donc incapables de surveiller et de prévoir efficacement la progression du navire pendant la manœuvre d’accostage.
L’échange de renseignements entre le capitaine et le pilote vise à communiquer des renseignements essentiels concernant la navigation et les caractéristiques du navire. L’échange de renseignements permet également à tous les membres de l’équipe à la passerelle d’avoir le même modèle mental du plan de traversée du navire.
Dans l’événement à l’étude, le pilote a échangé des renseignements sur la navigation avec le pilote qu’il remplaçait et a eu une discussion avec le capitaine concernant la vitesse et la destination du navire. Le capitaine et le pilote n’ont pas exécuté ni signé la liste de vérification portant sur l’échange de renseignements essentiels entre le capitaine et le pilote, comme l’exigeaient les procédures du navire. La liste de vérification est un outil important à utiliser lors de l’échange de renseignements officiel entre le capitaine et le pilote, car elle vise à aider les deux parties à communiquer tous les renseignements nécessaires et essentiels. Comme l’échange n’a pas été effectué conformément aux procédures normalisées, des renseignements essentiels n’ont pas été communiqués entre le capitaine et le pilote; alors que le navire approchait du poste d’amarrage no 53, le capitaine et le pilote n’ont pas discuté d’un plan d’urgence.
Si les capitaines et les pilotes ne suivent pas la procédure établie sur l’échange de renseignements entre le capitaine et le pilote, ils risquent de ne pas communiquer des renseignements essentiels, tels que les caractéristiques du navire, nécessaires à une navigation sécuritaire.
2.4 Enregistreur des données du voyage
Les données objectives du VDR s’avèrent inestimables pour les enquêteurs lorsqu’ils tentent de comprendre une séquence d’événements et de cerner les problèmes opérationnels et les facteurs humains.
Dans l’événement à l’étude, le CSL Tadoussac n’avait pas de VDR à bord et la réglementation ne l’exigeait pas non plus. Par conséquent, les enquêteurs n’ont pas pu confirmer les ordres transmis aux machines et les temps de réponse à ces ordres. Sans enregistrements audio du VDR à la passerelle, on n’a pas pu confirmer objectivement, au cours de l’enquête, certains événements ayant mené au heurt.
Fait établi quant aux risques
Sans données du VDR au cours d’une enquête, les lacunes de sécurité risquent de ne pas pouvoir être cernées ni communiquées en vue de promouvoir la sécurité des transports.
3.0 Faits établis
3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs
Il s’agit des conditions, actes ou lacunes de sécurité qui ont causé l’événement ou y ont contribué.
- Le moment de pivotement créé par le courant a agi contre le moment de rotation créé par le gouvernail et le propulseur d’étrave du navire, ce qui a réduit le taux de virage du navire. Par conséquent, le navire n’a pas pu terminer son virage vers bâbord et n’était pas parallèle lorsqu’il s’est approché du poste d’amarrage.
- En raison du virage incomplet vers bâbord et de l’effet combiné du courant et du vent, le navire s’est approché du poste d’amarrage à une vitesse d’environ 3 nœuds, ce qui a réduit le temps dont disposait l’équipage pour prendre des mesures correctives efficaces afin d’empêcher le navire de heurter le quai.
- Afin d’éviter de heurter le quai, le capitaine a mis l’hélice à pas variable à gauche en position de marche arrière toute. Cette action a fait virer l’arrière du navire vers bâbord, ce qui a réduit le taux de virage du navire vers bâbord. Par conséquent, la route sur le fond du navire a progressivement changé vers tribord et sa vitesse a été réduite à 2,1 nœuds. Le navire s’est ensuite approché du poste d’amarrage à un angle de 30°, ce qui a contribué au fait qu’il a manqué une défense pneumatique et a heurté le quai.
3.2 Faits établis quant aux risques
Il s’agit des conditions, des actes dangereux, ou des lacunes de sécurité qui n’ont pas été un facteur dans cet événement, mais qui pourraient avoir des conséquences néfastes lors de futurs événements.
- Si les capitaines et les pilotes ne discutent pas de l’utilisation de tous les moyens disponibles pour manœuvrer lors de l’accostage, comme les ancres ou l’assistance d’un remorqueur, ils risquent de limiter les outils à leur disposition, surtout dans les moments critiques.
- Si les membres de l’équipe à la passerelle ne communiquent pas de façon constante pour établir une compréhension commune de l’état du navire, il y a un risque que les manœuvres cruciales pour assurer la sécurité de la navigation ne soient pas adéquatement planifiées, coordonnées et exécutées.
- Si le plan de traversée du navire ne comprend pas une approche réaliste du poste d’amarrage qui intègre les conditions réelles et les caractéristiques du navire, il y a un risque que les membres de l’équipe à la passerelle n’établissent pas un modèle mental commun et ne soient donc pas en mesure de surveiller et de prévoir efficacement la progression du navire pendant la manœuvre d’accostage.
- Si les capitaines et les pilotes ne suivent pas la procédure établie sur l’échange de renseignements entre le capitaine et le pilote, ils risquent de ne pas communiquer des renseignements essentiels, tels que les caractéristiques du navire, nécessaires à une navigation sécuritaire.
- Sans données de l’enregistreur des données du voyage au cours d’une enquête, les lacunes de sécurité risquent de ne pas pouvoir être cernées ni communiquées en vue de promouvoir la sécurité des transports.
3.3 Autres faits établis
Ces éléments pourraient permettre d’améliorer la sécurité, de régler une controverse ou de fournir un point de données pour de futures études sur la sécurité.
- Le pilote a signalé aux Services de communications et de trafic maritimes (SCTM) de Québec que le navire était amarré au quai. Les SCTM de Québec n’ont pas été informés à ce moment du heurt avec le quai, même si la réglementation l’exigeait.
- Depuis le 1er janvier 2005, le Règlement général sur le pilotage exige que tous les pilotes maritimes brevetés au Canada détiennent un certificat de participation à un programme de formation en gestion des ressources à la passerelle. En 2012, cette exigence a été retirée de la réglementation et n’a pas été remplacée.
- Au moment de la rédaction du rapport, ni le Règlement sur le personnel maritime ni la version du TP 4958 publiée sur le site Web de Transports Canada n’avaient été mis à jour avec les modifications apportées en 2017 à la Convention internationale de 1978 sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille concernant les cours de navigation électronique simulée qui abordent la gestion des ressources à la passerelle.
- Les capitaines et les officiers de pont qui ont obtenu leur brevet avant 2017 n’étaient pas tenus de suivre un cours de gestion des ressources à la passerelle dans le cadre de leur formation. En outre, aucune exigence réglementaire n’oblige les capitaines et les officiers de pont à suivre respectivement le cours de navigation électronique simulée opérationnelle, et le cours de navigation électronique simulée – Gestion, pour renouveler leur brevet tous les 5 ans.
4.0 Mesures de sécurité
4.1 Mesures de sécurité prises
4.1.1 Administration de pilotage des Laurentides
L’Administration de pilotage des Laurentides (APL) a effectué une étude de cas sur cet événement et a envoyé des lettres au pilote et au capitaine pour les informer des conclusions de l’étude.
Avant cet événement, l’APL avait préparé une politique détaillée sur l’échange de renseignements entre les capitaines et les pilotes, intitulée Politique sur l’échange d’informations entre le capitaine et le/la pilote (MPX), qui est entrée en vigueur le 23 juin 2020. Après l’événement, cette politique a été envoyée au pilote et au capitaine en même temps que les conclusions de l’étude.
Le présent rapport conclut l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été officiellement publié le .
Annexes
Annexe A – Liste de vérification du plan de traversée (en anglais seulement)
Source: TSB
Annexe B – Exemple de liste de vérification pour l’échange de renseignements essentiels entre le capitaine et le pilote de la Canada Steamship Lines (en anglais seulement)
Source: TSB