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Rapport d'enquête maritime SM9501

ÉTUDE DE SÉCURITÉ PORTANT
SUR LES RAPPORTS DE TRAVAIL
ENTRE LES CAPITAINES ET
OFFICIERS DE QUART, ET LES
PILOTES DE NAVIRE



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

1.0 INTRODUCTION

Le 7 juin 1992, le porte-conteneurs roulier suédois «CONCERT EXPRESS» était sous la conduite d'un pilote dans le port de Halifax où il y avait un épais brouillard. Pendant une manoeuvre pour contourner un navire au mouillage, le «CONCERT EXPRESS» s'est échoué et a subi des avaries considérables à la partie inférieure de la coque. Le BST a déterminé que le fait que l'on n'ait pas discuté d'un plan d'entrée dans le port avait été un des facteurs qui ont contribué à l'accident. En outre, le capitaine n'a pas été en mesure d'intervenir à temps dans la conduite du navire à cause d'un manque de communication avec le pilote dont il n'a compris les intentions qu'alors que le navire arrivait à un point critique (M92M4023). Note de bas de page 1

1.1 Historique

De février 1981 à mai 1992, la Direction des enquêtes sur les accidents maritimes de la Garde côtière canadienne ou, à partir de 1990, le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST, le Bureau) a fait enquête sur 273 événements survenus dans les eaux canadiennes assujetties au pilotage et mettant en cause des navires se trouvant sous la conduite d'un pilote. De ces 273 événements, 87 % mettaient en cause des navires de plus de 5 000 tonneaux de jauge brute (tjb).

Ces 273 événements se répartissent en cinq types :

Abordages 43 cas de navires qui se sont abordés alors qu'ils faisaient route

Échouements 88 navires ont heurté des hauts-fonds, touché le fond ou un récif sous-marin, et sont demeurés échoués jusqu'à ce qu'ils soient renfloués

Heurts violents 95 navires ont heurté un objet fixe, comme un navire immobile, un quai ou une autre installation fixe

Contacts 46 navires ont touché légèrement un autre navire, une bouée ou le fond (talonnage)

Naufrage Un navire a été submergé à la suite d'une voie d'eau sous la flottaison et a coulé par le fond

Le tableau 1 montre la fréquence de ces événements ainsi que le type de navire mis en cause. Tableau 1 - Nombre annuel d'événements par type de navire

Type de navire 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 Total
Cargo 8 9 9 6 8 7 5 4 5 6 5   72
Vraquier 19 17 12 12 8 9 11 7 9 10 13 3 130
Citerne 8 3 6 2 3 2 4 8 5 6 2   49
OBO   1       1 1           3
Port-conteneurs               1 1     2 4
Roulier       1 2     2         5
Navire à passagers       1         1       2
Remorquer et chaland 1 1     1               3
Autres   1 2 1   1             5
Total 36 32 29 23 22 20 21 22 21 22 20 5 273

Le Bureau, préoccupé par la fréquence et les conséquences possibles de tels événements, a procédé à une analyse préliminaire comprenant un examen de ces 273 événements. Pour chaque événement, on a identifié le facteur contributif le plus important. La figure 1 montre la répartition de ces facteurs contributifs.

Figure 1 - Facteurs contributifs
Figure 1 - Facteurs contributifs

Comme on peut le voir à la figure 2, sur les 200 accidents où intervient le facteur humain, 84 (42 %) ont été causés par un malentendu entre le pilote et le capitaine, par l'inattention du pilote ou de l'officier de quart, ou encore par un manque de communication entre le pilote et l'officier de quart. En outre, dans 91 (46 %) des cas, il y a eu erreur de jugement de la part du pilote ou du capitaine. Des lacunes sur le plan de la communication ou du travail d'équipe sur la passerelle semblent caractériser bon nombre de ces événements maritimes.

Figure 2 - Facteurs humains
Figure 2 - Facteurs humains

Il n'est pas surprenant que le nombre de facteurs de la figure 2 qui sont associés aux pilotes soit élevé puisque, dans chacun des 200 accidents en question, le navire était sous la conduite d'un pilote.

Par suite de son analyse préliminaire, le Bureau a décidé de se pencher sur les situations ou les méthodes qui sont à l'origine des anomalies relevées, dans le but de constater les manquements à la sécurité sous-jacents.

1.2 Objectif

L'objectif de la présente étude de sécurité est de constater les manquements à la sécurité touchant le travail d'équipe sur la passerelle, y compris la communication entre les pilotes de navire d'une part, et les capitaines et officiers de quart d'autre part.

1.3 Portée et méthodologie

La présente étude porte sur les rapports de travail entre les pilotes et les capitaines et officiers de quart à bord des navires canadiens et étrangers de plus de 5 000 tjb qui traversent des eaux canadiennes assujetties au pilotage sous la conduite de pilotes.

Le comportement dans un milieu de travail complexe, par exemple sur la passerelle d'un navire, est influencé par plusieurs facteurs, comme des règles, des règlements, la formation et l'expérience. Les attitudes personnelles influent elles aussi sur le comportement, rendant des réactions particulières plus difficiles à prédire et à évaluer dans différentes circonstances. Par conséquent, il fallait recueillir de l'information sur les attitudes, comportements et interactions qui caractérisent les rapports entre les pilotes de navire, les capitaines et les officiers de quart. Comme les dossiers d'événement du BST ne pouvaient fournir qu'une certaine partie de ces données relatives aux attitudes, un questionnaire normalisé a été mis au point afin de faciliter l'analyse statistique et la comparaison entre les groupes de répondants, de mettre en relief les divergences d'opinion, et d'établir, à partir de l'échantillon, des inférences pour l'ensemble de la communauté maritime.

Des entrevues ont été organisées avec des représentants des quatre administrations de pilotage du Canada, des membres de l'industrie du transport maritime intérieur et international et de la Garde côtière afin de cerner les problèmes liés à l'interaction entre les membres du personnel à la passerelle. Des questions ont été élaborées afin de recueillir plus de données à cet égard. Un projet de questionnaire a été produit et les personnes du secteur maritime susceptibles d'être intéressées par le sujet à l'étude ont été invitées à faire part de leurs observations. Après réception de celles-ci, la version définitive du questionnaire a été distribuée aux capitaines, aux officiers de quart et aux pilotes.

Le questionnaire comprenait 20 questions à choix multiples. Comme il était important que les réponses soient basées sur l'expérience et le comportement des répondants eux-mêmes (et ne soient pas un simple recensement des exigences réglementaires), chaque question commençait par les mots «Selon mon expérience [....]» Pour donner aux répondants la possibilité de développer ou d'expliquer leurs réponses et d'attirer l'attention sur d'autres points, le questionnaire prévoyait de l'espace pour les commentaires écrits. En outre, tous les répondants étaient invités à commenter librement les rapports de travail entre les pilotes et les capitaines et officiers de quart, ou à faire part de suggestions visant à améliorer la sécurité du transport maritime. Les données tirées des réponses à ces questions sont présentées sous forme de tableaux à l'annexe A.

Sept questions étaient conçues pour recueillir des données démographiques afin d'aider à définir l'échantillon de répondants et de faciliter l'analyse statistique des résultats. Un résumé des données démographiques est inclus à l'annexe B.

Le questionnaire a été distribué à 1 300 personnes, dont des pilotes, capitaines et officiers de navire. Quelque 324 questionnaires ont été retournés, ce qui représente 25 % du nombre total envoyé. De ces 324 questionnaires, 130 (40,1 %) provenaient de pilotes, 142 (43,8 %), de capitaines et 52 (16,1 %), d'officiers de pont. Ces échantillons sont statistiquement adéquats pour tirer des conclusions valables concernant ces trois groupes de navigateurs. Le profil démographique des répondants correspond bien au profil de la population, même si la côte ouest est peu représentée. Cependant, comme les caractéristiques statistiques d'échantillons de cette taille sont stables, une augmentation du nombre de répondants ne changerait sensiblement les résultats que si les réponses étaient extrêmes.

Après réception des réponses au questionnaire, 34 entrevues supplémentaires ont été faites dans les régions de l'Atlantique, du Saint-Laurent et des Grands Lacs, avec des capitaines et des pilotes, des représentants du gouvernement, des administrations de pilotage, des syndicats, des propriétaires et des exploitants de navires, afin de mieux comprendre les observations reçues et de faciliter l'interprétation des résultats.

À la lumière des expériences dont il est fait état dans les réponses au questionnaire, des événements maritimes récents ont été examinés. On a aussi dépouillé les comptes rendus de certains symposiums et conférences, des périodiques et des revues maritimes spécialisées, ainsi que des études de sécurité et des rapports réalisés à l'étranger, et on a examiné des recommandations et des pratiques touchant le pilotage d'autres pays afin de comparer l'expérience canadienne à la situation sur la scène internationale.

Une ébauche de l'étude, sans la section des recommandations, a été envoyée à des organisations de l'industrie maritime qui ont été invitées à nous faire part de leurs observations. Ces organisations comprenaient des administrations de pilotage, des corporations de pilotes, des associations représentant des pilotes, des capitaines, des officiers de pont et des propriétaires de navires, ainsi que Transports Canada. Les observations ont été examinées, le rapport a été modifié le cas échéant et des recommandations sur la sécurité y ont été ajoutées.

2.0 RAPPORTS ENTRE LES CAPITAINES ET LES PILOTES

[...] Les attitudes doivent peut-être changer. La situation a bien évolué dans l'industrie, mais la coopération entre les officiers de pont, les capitaines et les pilotes pourrait être meilleure. -- Un capitaine Note de bas de page 2

Certains capitaines se cramponnent à leurs prérogatives, ignorent les conseils et vous traitent comme un intrus. -- Un pilote

La Loi sur le pilotage de 1972 (la Loi) constituait quatre administrations de pilotage (Atlantique, Laurentides, Grands Lacs et Pacifique) en sociétés d'État ayant la responsabilité exclusive du pilotage dans les eaux relevant de leur compétence. Les administrations de pilotage établissent des zones de pilotage obligatoire, délivrent les brevets de pilote et les certificats de pilotage et fournissent les services de pilotes.

Dans les eaux où le pilotage est obligatoire, les pilotes agissent en tant qu'experts concernant les conditions de navigation locales. Le pilote est responsable envers le capitaine uniquement de la sécurité de la navigation du navire. Le capitaine conserve la responsabilité globale de la sécurité du navire, mais il confie la conduite de celui-ci au pilote, dont les connaissances des conditions locales lui permettent de manoeuvrer le navire de façon sûre et efficace. La coopération entre le pilote et le capitaine est indispensable.

L'Organisation maritime internationale (OMI), dans une recommandation que le Canada a ratifiée et que la Garde côtière canadienne (GCC) a intégrée dans son Code recommandé des méthodes et pratiques nautiques, décrit comme il suit un quart de navigation avec pilote à bord :

Nonobstant les tâches et obligations qui incombent au pilote, sa présence à bord ne décharge pas le capitaine ou l'officier chargé du quart des tâches et obligations qui leur incombent sur le plan de la sécurité du navire. Le capitaine et le pilote doivent échanger des renseignements sur la conduite du navire, les conditions locales et les caractéristiques du navire. Le capitaine et l'officier de quart doivent coopérer étroitement avec le pilote et vérifier soigneusement en permanence la position et les mouvements du navire. Note de bas de page 3

La conduite sûre d'un navire exige un travail d'équipe et de bonnes communications interpersonnelles, surtout dans des eaux assujetties au pilotage lorsqu'un pilote a la conduite du navire. Le BST a examiné l'expérience canadienne à cet égard en posant des questions concernant trois aspects particuliers des rapports de travail entre les pilotes et les officiers de pont, à savoir :

  1. l'échange de renseignements sur des points comme le plan de route, l'état du navire et les facteurs influant sur la communication,
  2. la surveillance des mouvements du navire par le capitaine ou l'officier de quart lorsque le pilote a la conduite du navire,
  3. les attitudes et le comportement du personnel à la passerelle concernant le travail d'équipe.

Chacun de ces trois aspects des rapports de travail est examiné dans les pages qui suivent.

2.1 Communication

Sur la plupart des navires étrangers où j'ai été affecté, on se fiait entièrement au pilote pour la sécurité de la navigation de même que pour les manoeuvres d'accostage, et on ne posait pas de questions concernant la vitesse ou les ordres à la barre. -- Un pilote

Encouragez les pilotes à discuter de leurs intentions avec l'officier de quart pendant tout le voyage. -- Un officier de quart

Partout dans le monde, la plupart des organisations maritimes sont conscientes de l'importance de la communication entre les membres du personnel à la passerelle, incluant lorsqu'un pilote est à bord.

Le Nautical Institute du Royaume-Uni, dans son guide pour la gestion des ressources sur la passerelle, indique :

Idéalement, le capitaine et son équipe connaissent les intentions du pilote et sont en mesure de questionner celui-ci sur ses actes à n'importe quel stade du voyage. Pour que cela soit possible, il faut :

  1. Que l'équipe à la passerelle soit au courant des difficultés et des obstacles de la zone de pilotage.
  2. Que le pilote soit au courant des caractéristiques et des particularités du navire.
  3. Que le pilote connaisse bien l'équipement mis à sa disposition et sache sur quel appui il peut compter de la part du personnel du navire.

La International Chamber of Shipping, dans sa publication intitulée Bridge Procedures Guide, propose la liste de contrôle ci-après pour s'assurer d'un bon échange de renseignements entre le capitaine et le pilote :

  1. Une fiche de pilotage remplie a-t-elle été remise au pilote?
  2. Le pilote a-t-il été informé de l'emplacement des engins de sauvetage prévus pour lui?
  3. Le plan de route envisagé, les conditions météorologiques, les dispositions pour l'amarrage et l'accostage, le recours à des remorqueurs et l'utilisation d'autres installations extérieures ont-ils été expliqués par le pilote et approuvés par le capitaine?
  4. La progression du navire et l'exécution des ordres sont-elles surveillées par le capitaine et l'officier de quart?

Tel qu'indiqué précédemment, la GCC déclare :

Le capitaine et le pilote doivent échanger des renseignements sur la conduite du navire, les conditions locales et les caractéristiques du navire.

L'importance d'établir une communication efficace lorsqu'un pilote monte à bord est admise par la plupart des pilotes, capitaines et officiers de quart. Au cours des entrevues, certains pilotes ont rapporté que la plupart des navires au long cours ont des méthodes bien établies pour recevoir le pilote à bord. Un officier du navire est chargé d'accueillir le pilote à la coupée et de l'escorter à la passerelle de navigation afin de le présenter au capitaine. Malheureusement, à bord de certains navires, les échanges entre le pilote et le capitaine se limitent à une simple poignée de main. Selon les pilotes interrogés, de plus en plus de capitaines étrangers considèrent l'arrivée d'un pilote à bord comme un allégement de leurs tâches, une façon de se décharger de certaines de leurs responsabilités, une occasion de prendre un peu de repos. Certains de ces capitaines ne viennent sur la passerelle que pour signer la fiche de pilotage au moment du départ du pilote.

Les pilotes et les capitaines conviennent que l'amélioration de la communication entre les membres du personnel à la passerelle est la clé d'une plus grande sécurité des opérations maritimes et d'une meilleure compréhension des fonctions et responsabilités de chacun.

Une question du questionnaire du BST portait sur l'efficacité des communications entre le pilote et le personnel à la passerelle. Environ 81 % des capitaines, 85 % des officiers de pont et 85 % des pilotes ont répondu que les communications sont «toujours» ou «souvent» efficaces. Toutefois, cette évaluation de l'efficacité des communications n'est pas confirmée par l'analyse des réponses aux questions portant sur l'échange de renseignements bien précis.

Dans une autre question, on demandait si le pilote s'assure que l'officier de quart a compris et confirmé ses ordres. Alors que 84 % des pilotes ont répondu qu'ils le font «toujours», 50 % des capitaines et 50 % des officiers de quart ont convenu que les pilotes s'assurent «toujours» que leurs ordres sont compris et confirmés par l'officier de quart.

Comme le montre cette réponse et comme on le verra dans d'autres réponses, il y a des divergences de perception entre les capitaines et officiers de quart et les pilotes en ce qui concerne des aspects particuliers de leurs rapports de travail. Ces différences peuvent tenir au fait que les pilotes et les capitaines n'ont pas toujours la même idée de ce qui est nécessaire. Même si les membres des deux groupes estiment généralement chacun de leur côté qu'ils fournissent des renseignements adéquats, l'autre groupe peut avoir besoin d'information plus détaillée; le fait que plusieurs estiment qu'ils ne sont pas suffisamment informés remet en question l'efficacité de la communication.

À la question visant à déterminer si l'officier de quart demande des précisions lorsqu'il est incertain des intentions du pilote, plus de 90 % des officiers de quart ont répondu qu'ils demandaient «toujours» ou «souvent» des précisions. Environ 76 % des capitaines ont répondu que les officiers de quart demandaient «toujours» ou «souvent» des précisions. Par contraste, 39 % des pilotes croient que les officiers de quart demandent «toujours» ou «souvent» des précisions.

À la question visant à déterminer s'ils hésitent à interroger le pilote sur ses décisions, quelque 92 % des capitaines et 81 % des officiers de pont ont répondu qu'ils étaient, au moins «parfois», hésitants; 11,5 % des officiers de pont ont déclaré qu'ils hésitent «toujours» à interroger le pilote sur ses décisions. Un capitaine a fait observer que, puisque le capitaine se trouve souvent sur la passerelle lorsque le pilote a la conduite du navire, les officiers de pont hésitent à parler, s'en remettant probablement à l'expérience et à l'autorité du capitaine. Un autre capitaine a déclaré :

Nous prenons souvent ce que le pilote dit pour parole d'évangile alors qu'en fait, il n'agit qu'à titre de conseiller.

Le 12 mai 1991, le vraquier yougoslave chargé «MALINSKA» a appareillé de Hamilton (Ontario) à destination du port intermédiaire de Sorel (Québec). Vers 0 h 33 le 13 mai, le navire s'est échoué à environ 20 milles au sud-sud-ouest (SSW) de Kingston (Ontario), après avoir changé de cap au sud de l'île Main Duck. Le BST a déterminé que le «MALINSKA» s'est échoué parce que le navire n'a pas établi avec certitude sa position et sa route avant, pendant ou après le changement de cap au large de l'île Main Duck. Le Bureau a écrit qu'un manque de communication, de coordination et de collaboration entre le capitaine, l'officier de quart et le pilote ont été mis en évidence dans cet événement. L'enquête du BST a révélé qu'il y a eu un manque de communication entre le pilote et l'officier de quart concernant la position du navire reportée sur la carte à minuit. Tant le pilote que le second lieutenant ont calculé chacun de leur côté la position du navire, mais sans se concerter. (M91C2009)

Un pilote a résumé en ces termes les besoins en matière d'échange de renseignements techniques :

Le pilote doit être informé de chaque facteur qui peut avoir une influence appréciable sur son plan de manoeuvre proposé. Les caractéristiques de manoeuvre du navire doivent être communiquées au pilote, et celui-ci doit s'assurer de bien comprendre toute condition particulière qui peut influer sur son travail. Il doit toujours savoir qui est l'officier principal de l'équipe à la passerelle, que ce soit le capitaine ou un autre, et il doit être au courant de toute relève du quart, changement de timonier, etc. En outre, le pilote doit informer le capitaine du plan de manoeuvre qu'il se propose d'adopter et tenir le capitaine au courant au fur et à mesure en fonction de l'évolution des conditions. Les exigences découlant des particularités locales en matière de communications et de règlements doivent être communiquées au capitaine et à l'officier de quart.

Les sections qui suivent portent sur l'échange de renseignements particuliers qui est nécessaire à la conduite sûre d'un navire.

2.1.1 Caractéristiques de manoeuvre du navire

À la question visant à déterminer si le capitaine ou l'officier de quart informe le pilote des caractéristiques de manoeuvre du navire, 75 % des capitaines et 71 % des officiers de pont ont déclaré qu'ils informent «toujours» le pilote; par contre, seulement 19 % des pilotes ont répondu qu'ils étaient «toujours» informés des caractéristiques de manoeuvre des navires. Plusieurs pilotes ont ajouté que l'information leur était toujours fournie quand ils la demandaient, et deux pilotes ont noté que cette information est communiquée moins systématiquement à bord des navires canadiens que des navires étrangers.

Les pilotes savent bien qu'il n'existe pas toujours de procédure établie pour l'échange de renseignements entre le pilote et le capitaine. La plupart du temps, le pilote doit questionner le capitaine ou l'officier de quart pour obtenir des renseignements essentiels concernant la vitesse et la manoeuvrabilité du navire. Toutefois, certains pilotes sont apparemment réticents à communiquer de l'information aux capitaines; certains capitaines et officiers de quart ont déclaré que le pilote, une fois arrivé sur la passerelle, a rarement le temps de consulter les cartes et de renseigner l'officier de quart, car il est accaparé par la conduite du navire.

Les propriétaires et exploitants de navires canadiens ont exprimé l'opinion que les caractéristiques de manoeuvre de leurs navires sont bien connues des pilotes canadiens et que le capitaine a rarement à renseigner ceux-ci à cet égard. La situation est différente en ce qui concerne les navires étrangers.

Certains capitaines ont souligné qu'il est typique des pilotes du monde entier de ne fournir que peu d'information aux officiers de pont et d'agir comme s'ils prenaient le navire en charge. Il semble que rares sont les capitaines de navire qui ont en main une fiche résumant les caractéristiques de leur navire qu'ils peuvent remettre au pilote, tel que le recommande la International Chamber of Shipping. Note de bas de page 4 Ils affirment que le pilote n'aurait peut-être pas le temps de lire cette fiche, qu'il lui faudrait parfois, dans l'obsécuritéé, quitter la passerelle pour en prendre connaissance afin de trouver le renseignement particulier dont il a besoin. Ils soutiennent que la communication verbale est beaucoup plus efficace et a en outre l'avantage d'établir des contacts entre les membres du personnel à la passerelle. Les capitaines indiquent que, par mesure de précaution avant l'accostage du navire, ils communiquent toujours au pilote les données relatives à la manoeuvre du navire, et que lorsque le pilote néglige de les informer de ses intentions, ils lui demandent des précisions à cet égard.

Il semble que les deux groupes reconnaissent l'importance pour la sécurité de communiquer au pilote les renseignements utiles concernant les caractéristiques de manoeuvre du navire, mais considèrent que cela ne doit se faire qu'au besoin. Il pourrait être avantageux de mieux renseigner chacun des deux groupes sur les attitudes et les besoins de l'autre groupe.

2.1.2 Conditions locales

Les réponses à la question visant à déterminer si le pilote renseigne le capitaine au sujet des conditions locales font ressortir à nouveau une divergence de perception d'un groupe à l'autre. Environ 64 % des pilotes soutiennent qu'ils le font «toujours», tandis que seulement 26 % des capitaines et 31 % des officiers de pont sont d'accord pour dire que le pilote les renseigne «toujours» à cet égard.

Les pilotes estiment que les capitaines de navires étrangers qui fréquentent régulièrement les eaux canadiennes connaissent les eaux assujetties au pilotage. Ils estiment qu'à moins de changements dans le réseau d'aides à la navigation ou de la nécessité de tenter des manoeuvres d'accostage ou d'amarrage spéciales, il n'est nullement nécessaire qu'ils informent en détail les capitaines sur la façon dont ils comptent procéder. Cependant, les pilotes de port ont affirmé qu'ils renseignent toujours les capitaines concernant leur plan de manoeuvre et qu'en outre, ils informent normalement le capitaine du navire des instructions du maître de port concernant l'accostage.

Cette impression selon laquelle les capitaines et les officiers de quart connaissent bien les conditions et les usages locaux peut être à l'origine de beaucoup de fausses présomptions chez les pilotes et les officiers de navire. Les deux groupes peuvent supposer qu'ils ont le même modèle mental du secteur et du plan de pilotage, et qu'il est inutile qu'ils s'en assurent de sorte que tant le personnel à la passerelle que le pilote peut avoir de mauvaises surprises. Une situation qui évolue rapidement peut ainsi devenir rapidement hors de contrôle. Quelqu'un qui présume que l'autre évalue la situation de la même façon que lui peut prendre des mesures totalement inattendues pour ce dernier. Cela place alors tous les deux en fâcheuse situation. Les malentendus risquent ainsi de se multiplier, détruisant la collaboration mutuelle ou le travail d'équipe, et pouvant même déboucher sur un conflit. Une discussion préalable en vue de s'entendre sur le plan de pilotage ainsi qu'une acceptation mutuelle des fonctions et des responsabilités de chacun favorise cependant le travail d'équipe.

2.1.3 Plans de manoeuvre et de pilotage

Le 8 mai 1991, alors qu'il descendait le fleuve Saint-Laurent avec un chargement de pétrole, le pétrolier canadien «IRVING NORDIC» a talonné la bordure nord du chenal de navigation, en aval du quai de Grondines. Le BST a déterminé que le «IRVING NORDIC» a touché le fond parce que le navire a quitté le chenal navigable à la suite d'un changement de cap prématuré. Ce changement de cap avait été ordonné par le pilote qui croyait que le «IRVING NORDIC» se trouvait plus en aval qu'il ne l'était en réalité. Le timonier n'a pas avisé le pilote qu'il éprouvait de la difficulté à maintenir le cap du navire. Le pilote n'a pas posé de questions au timonier sur la position de la barre par rapport à l'indicateur d'angle de barre. La méthode qu'utilisait l'officier de quart pour suivre la progression du navire n'était pas assez précise pour empêcher l'événement de se produire. Le Bureau a indiqué qu'un manque de communication et de coordination entre le personnel à la passerelle et le pilote a contribué à l'accident. (M91L3012)

Dans son rapport sur cet échouement, le Bureau, dans son analyse des erreurs qui ont causé l'événement, écrit :

Dans des eaux restreintes, à l'intérieur d'une zone de pilotage obligatoire, l'établissement par le pilote d'un plan de route (plan de pilotage) contenant tous les renseignements de navigation importants comme les points de changement de cap, les points de manoeuvre de la barre, et les endroits où l'exactitude de l'établissement de la position est capitale, etc., pourrait réduire le risque de telles erreurs.

Le 1er juillet 1991, le vraquier des Grands Lacs chargé «HALIFAX» s'est échoué dans le même secteur lui aussi à cause d'un changement de cap prématuré. L'enquête du Bureau a révélé que la position du navire n'avait pas été vérifiée par rapport aux amers et aux aides à la navigation disponibles. L'officier de quart ne surveillait pas les gestes du pilote et ne s'est pas rendu compte que le changement de cap était prématuré. Il semble que l'officier de quart ait eu une confiance totale dans les aptitudes à la navigation du pilote. Lorsque le pilote a transmis aux STM son rapport sur la position du navire, l'officier de quart a noté l'heure, mais il n'a pas pointé la position du navire sur la carte. Si l'officier de quart avait utilisé une méthode précise et reconnue pour surveiller la progression du navire, il aurait peut-être été en mesure de détecter l'erreur du pilote et de contremander l'ordre de changement de cap avant que le nouveau cap n'ait causé l'échouement. Le Bureau a indiqué qu'il n'y avait pas eu suffisamment d'échange de renseignements concernant la navigation et les opérations (notamment le plan de route) entre les officiers du navire et le pilote. (M91L3015)

Les pilotes affirment qu'ils réussissent à établir des rapports de travail efficaces en échangeant des renseignements sur les conditions locales et sur les plans. Les capitaines et les officiers de pont, cependant, ne partagent pas cette opinion. Dans leurs observations écrites, plusieurs pilotes ajoutent des réserves à leurs réponses au questionnaire en précisant qu'ils fournissent des renseignements complets quand c'est nécessaire ou quand on leur en fait la demande. Cela sous-entend que très souvent les pilotes estiment qu'il n'est pas nécessaire qu'ils le fassent ou qu'on ne leur en fait pas la demande. En fait, certains pilotes se plaignent que, dès qu'ils prennent en charge la conduite du navire, les capitaines en profitent souvent pour quitter la passerelle afin d'aller dormir.

Les capitaines et les pilotes interrogés ont confirmé qu'il y a peu d'échange de renseignements à bord. Chacun tient pour acquis que l'autre sait tout ce qu'il a besoin de savoir et que, dans le cas contraire, il n'hésitera pas à poser des questions. À la question visant à déterminer si le pilote avise le capitaine au sujet du plan de manoeuvre qu'il entend adopter pour le navire, moins de la moitié (48,5 %) ont répondu que les pilotes le font «toujours» ou «souvent», tandis que près de 80 % des pilotes soutiennent qu'ils le font.

Dans leurs observations, certains pilotes ont indiqué qu'ils avisent toujours le capitaine du plan de manoeuvre, à moins qu'il ne s'agisse d'une manoeuvre de routine. D'autres ont déclaré qu'ils fournissaient l'information lorsqu'on la leur demandait.

À la question visant à déterminer si le capitaine s'assure que les conditions locales et le plan de pilotage conviennent au navire, environ 83 % des capitaines ont affirmé qu'ils s'assurent «toujours» ou «souvent» que les conditions locales et le plan de pilotage conviennent au navire. Cependant, 37 % seulement des pilotes sont d'accord avec cette affirmation.

Il est possible que le capitaine examine et approuve le plan de pilotage, ou ce qu'il croit être, selon son expérience, le plan de pilotage, sans le faire savoir au pilote. Le pilote présume que, s'il n'y a pas d'objection, il n'y a pas de problème. Un pilote a déclaré :

À vrai dire, c'est un aspect qui doit être amélioré, car «la familiarité engendre le mépris».

À la question visant à déterminer si les pilotes leur fournissent tous les renseignements indispensables concernant le pilotage et les plans de manoeuvre du navire, 25 % des capitaines et 29 % des officiers de pont ont répondu que les pilotes leur fournissent «toujours» les renseignements dont ils ont besoin. Environ 30 % des capitaines et 38 % des officiers ont indiqué que les pilotes leur fournissaient «souvent» ces renseignements.

Les capitaines étrangers qui ne connaissent pas bien les conditions de navigation locales se fient énormément sur les pilotes, et la vérification du plan de pilotage n'est pour eux qu'une formalité. Paradoxalement, les capitaines canadiens qui connaissent bien les conditions locales peuvent eux aussi ne pas porter beaucoup d'attention au plan de pilotage envisagé.

Dans son rapport d'enquête sur l'accident du «IRVING NORDIC», le Bureau conclut ce qui suit au sujet des plans de pilotage :

La connaissance du plan de pilotage permettrait à l'officier de quart de surveiller efficacement les intentions du pilote, la route suivie et la progression du navire. À l'heure actuelle, les pilotes ne remettent que rarement des plans de pilotage au personnel du navire et les administrations de pilotage ne fournissent pas non plus de tels plans à leurs pilotes.

Le Bureau poursuit en recommandant que :

Le ministère des Transports exige que les administrations de pilotage publient des plans de pilotage en bonne et due forme pour les eaux où le pilotage est obligatoire et mettent ces plans à la disposition des capitaines pour faciliter la surveillance du travail du pilote par l'équipe à la passerelle du navire.
Recommandation M94-34 du BST

Dans sa réponse en date du 22 mars 1995, le ministère des Transports a rejeté la recommandation en expliquant que la Loi sur le pilotage ne renferme aucune disposition autorisant le ministère des Transports à obliger les administrations de pilotage à prendre une mesure de la nature de celle proposée.

De plus, le ministère a déclaré que :

Selon les Administrations de pilotage et le Ministère, le pilotage, de par sa nature, est un processus obligeant le pilote à s'adapter constamment à l'évolution de la situation pendant toute la durée d'un voyage. Les points de changement de route et de manoeuvre de la barre dépendent d'un certain nombre de variables, y compris la position initiale d'un navire, sa vitesse, ses caractéristiques de giration, qui elles-mêmes varient suivant son chargement et son assiette, la vitesse et la direction du vent, l'écoulement de la marée et le courant de marée, les conditions météorologiques et l'état des glaces, les limites de profondeur d'eau et l'espace libre sous la quille, ainsi que le trafic dans les voies navigables généralement resserrées en question. Comme on ne peut prévoir tous ces facteurs, on considère qu'un plan de pilotage a une valeur pratique limitée, voire nulle.

Le Bureau est conscient du fait qu'en raison du caractère dynamique du pilotage d'un navire, il y aura invariablement des dérogations à tout plan de manoeuvre ou de pilotage détaillés. Toutefois, cela ne veut pas dire que le pilote ne devrait pas discuter avec le capitaine ou l'officier de quart de ses intentions concernant la conduite du navire. Si le pilote faisait ainsi connaître ses intentions, soit au moyen d'un plan de pilotage détaillé ou général, cela pourrait aider l'officier de quart, surtout en eaux restreintes, à surveiller les mouvements du navire par rapport aux amers et aux alignements radar de sécurité, ce qui contribuerait à la sécurité de la navigation.

2.1.4 Échange de renseignements au moment de la relève à la conduite du navire

Il arrive fréquemment que les capitaines ne connaissent pas les conditions locales et que les pilotes ignorent les caractéristiques de manoeuvre du navire. Par conséquent, un bon échange de renseignements est essentiel au moment de la relève à la conduite du navire, de telle sorte que tant le capitaine, qui a la responsabilité de la sécurité du navire, que le pilote, à qui il incombe de conduire celui-ci à bon port, soient au courant de tous les facteurs qui peuvent influer sur la sécurité de la navigation.

Le 5 août 1990, après avoir appareillé dans le port de Montréal et tenté d'éviter pour mettre le cap vers l'aval, le navire-citerne pour produits chimiques «LAKE ANINA» s'est échoué à l'extérieur du chenal sur un pipeline enfoui sous le fleuve. Le BST a déterminé que le capitaine a conservé la conduite du navire alors que celui-ci se trouvait dans une zone de pilotage obligatoire et qu'un pilote était à bord. Le capitaine a jugé qu'il était mieux en mesure d'exécuter la manoeuvre que le pilote parce qu'il connaissait mieux son navire et qu'il comptait sur les conseils du pilote. Cependant, le capitaine et le pilote avaient des idées différentes concernant les mouvements de barre et de machine nécessaires pour effectuer le virage. En l'occurrence, ce sont les idées du capitaine qui l'ont emporté. Le type et le degré d'appui et de conseil que le pilote devait donner n'avaient pas été établis au préalable. (M90L3016)

Dans son rapport sur cet événement, le Bureau conclut :

On devrait procéder dès que possible à l'échange de tous les renseignements pertinents et s'entendre sur le transfert de la conduite du navire.

L'échange de renseignements au moment de la relève est un ingrédient essentiel du travail d'équipe et de la collaboration. Toutefois, sur ce point aussi, il existe des divergences de perception entre les pilotes d'une part et les capitaines et officiers de pont d'autre part. À la question visant à déterminer si des échanges de renseignements de capitaine à pilote, de pilote à pilote et de pilote à capitaine ont lieu au moment de la relève à la conduite du navire, 77 % des capitaines et 90 % des officiers de pont, contre à peine 40 % des pilotes, ont répondu que c'était «toujours» ou «souvent» le cas; 5 % des pilotes ont répondu «jamais» à cette question.

2.1.5 Communications radio

On a demandé aux capitaines et aux officiers de pont si les pilotes les tenaient au courant de toutes les communications touchant la sécurité de la navigation du navire dans les eaux assujetties au pilotage. Environ 62 % des capitaines et 62 % des officiers de pont ont répondu que les pilotes leur communiquaient «toujours» ou «souvent» ces renseignements.

À la question visant à déterminer si les pilotes leur transmettent les communications pertinentes des Services du trafic maritime ou d'autres navires, 54 % des capitaines et 54 % des officiers de pont ont répondu «toujours» ou «souvent». Quelque 9 % des capitaines ont soutenu par contre que ces communications ne leur étaient «jamais» transmises.

Lorsqu'on les a interrogés, les pilotes ont soutenu qu'ils transmettaient toutes les communications relatives à la navigation et à la sécurité du navire au capitaine ou à l'officier de quart.

2.1.6 Langue

La seule façon d'avoir de meilleurs rapports de travail, c'est d'améliorer la communication entre les pilotes, les capitaines et les officiers de quart. Une des façons serait l'utilisation d'une seule langue commune à l'échelle internationale [....] Comme les exigences en matière d'armement en personnel n'ont pas encore été resserrées de façon vraiment notable, ce problème va subsister jusqu'à ce que l'industrie du transport maritime cesse de rechercher les pavillons où les équipages coûtent le moins cher. Lorsque ces recrues de langue étrangère sont embauchées, le problème de communication subsiste pendant trois à cinq ans jusqu'à ce qu'elles aient atteint un niveau raisonnable de maîtrise de la langue, mais à partir de ce moment, elles commandent des salaires plus élevés et le cycle continue. -- Un pilote

Un nombre croissant de navires étrangers qui fréquentent les eaux canadiennes n'ont, selon les pilotes, personne à bord qui parle anglais ou français. En fait, depuis 1975, il y a eu au moins 24 cas de navires battant pavillon étranger ayant été mis en cause, en eaux canadiennes, dans des événements où une connaissance insuffisante de la langue de travail a été un facteur contributif.

Lorsqu'on a demandé aux pilotes si les barrières linguistiques compliquaient la transmission des ordres au timonier à bord de navires immatriculés à l'étranger, environ 60 % ont répondu que cela se produisait «parfois» alors que 20 % ont déclaré qu'ils avaient «souvent» de la difficulté à communiquer leurs ordres au timonier.

Lorsqu'on leur a demandé si les barrières linguistiques empêchaient l'échange de renseignements avec le capitaine et l'officier de quart à bord des navires immatriculés à l'étranger, près de 55 % des pilotes ont répondu «parfois» et 23 %, «souvent».

Les pilotes interrogés se sont dits inquiets du fait que l'embauche de plus en plus fréquente d'équipages de pays du Tiers-Monde à bord de navires étrangers complique les communications. À bord de certains navires étrangers, les membres de l'équipage peuvent provenir de plusieurs pays et avoir même de la difficulté à communiquer entre eux. Par exemple, sur la côte de la Colombie-Britannique, un navire de croisière avait un équipage comprenant des personnes de 24 nationalités différentes, et il ne serait pas inhabituel pour les cargos d'avoir des équipages composés de personnes de 8 ou 10 nationalités différentes.

De nombreux navires étrangers sont aujourd'hui dirigés par des capitaines et des officiers qui ne connaissent pratiquement pas l'anglais ou le français, ce qui rend les communications très ardues et nécessite une surveillance étroite de la part du pilote, qui doit constamment s'assurer que ses ordres sont correctement interprétés et exécutés. Le pilote est souvent laissé sur la passerelle avec un seul officier et un timonier et, parfois, aucune des personnes présentes n'est capable de comprendre les autres. Le pilote n'a pas d'autre choix que de rester à côté du timonier pour s'assurer que ses ordres sont bien exécutés. De plus, le pilote sert à ce moment-là d'intermédiaire auprès des Services du trafic maritime. Ces facteurs détournent l'attention du pilote de la navigation du navire en toute sécurité.

Selon les pilotes, les barrières linguistiques constituent le principal problème dans le pilotage partout au monde et ils ne peuvent voir comment ce problème linguistique pourrait être résolu dans un proche avenir. Ils craignent qu'il faille à nouveau attendre que cela cause des accidents en mer pour que des mesures correctives soient prises et que des règlements entrent en vigueur.

La Convention internationale sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille, 1978 (STCW) exige que les officiers responsables d'un quart de navigation à bord d'un navire de 200 tjb ou plus, qui font des voyages internationaux, possèdent une connaissance suffisante de l'anglais. En dépit de cette exigence et de l'incapacité manifeste de certains officiers de quart à parler ou à comprendre l'anglais, bon nombre d'États membres de l'OMI continuent de délivrer des brevets de compétence à des personnes qui ne maîtrisent pas suffisamment la langue.

Dans un mémoire au Comité de la sécurité maritime de l'OMI concernant le rôle du facteur humain dans les sinistres maritimes, présenté par le gouvernement des Bahamas, il est souligné qu'il convient de noter qu'en vertu de la Loi, si les membres d'équipage ne possèdent pas une connaissance suffisante de l'anglais et ne parlent pas la même langue, le navire doit être jugé comme inapte à tenir la mer et il faut l'empêcher d'appareiller.

Dans son rapport d'enquête sur l'abordage du «TUO HAI» et du «TENYO MARU» (M91W1051), survenu le 22 juillet 1991, le Bureau a déclaré :

Le Bureau croit que, dans la marine marchande internationale, une connaissance fonctionnelle de la langue anglaise est nécessaire aux fins de la sécurité, pour consulter les publications nautiques, pour comprendre les messages relatifs à la météo et à la sécurité, et pour communiquer efficacement avec d'autres navires ou des stations à terre. Le Bureau craint que l'incapacité des navigateurs de communiquer efficacement des renseignements sur la sécurité continue de contribuer à des événements graves.

Le Bureau poursuit en recommandant que :

Le ministère des Transports, par l'intermédiaire de l'Organisation maritime internationale (OMI), cherche à faire adopter des mesures internationales plus rigoureuses en vue de s'assurer que les États membres se conforment aux normes de la STCW en matière de connaissances linguistiques, lorsqu'ils délivrent des brevets.
Recommandation M95-01 du BST

Dans sa réponse à cette recommandation, le ministère des Transports a déclaré qu'il était d'accord avec l'intention de la recommandation.

2.2 Surveillance des mouvements du navire

Le 16 avril 1993, le «CANADIAN EXPLORER», qui remontait le fleuve Saint-Laurent avec une pleine cargaison dans des conditions de navigation hivernale, a touché le fond du côté sud du chenal devant Lotbinière (Québec). Le BST a déterminé que le fait que le pilote se soit endormi, et que ni celui-ci ni l'officier de quart n'ait surveillé adéquatement la progression du navire, dans un secteur où le courant était fort, ont contribué à l'accident. Il est assez fréquent que les officiers de quart se fient totalement aux pilotes en ne remettant que rarement en cause leurs décisions. Le mode de fonctionnement adopté sur la passerelle du «CANADIAN EXPLORER» permettait au pilote et à l'officier de quart de travailler chacun de son côté. On ne privilégiait pas le travail d'équipe qui aurait permis de maximiser l'efficacité de chacun. Grâce à une collaboration plus étroite entre le pilote et l'officier de quart, on aurait pu assurer une meilleure surveillance de la progression du navire, et l'officier de quart aurait pu détecter les problèmes éventuels, et même prendre des mesures appropriées. (M93L0001)

En plus de l'événement du «CANADIAN EXPLORER», ceux mettant en cause le «IRVING NORDIC», le «MALINSKA» et le «HALIFAX» démontrent clairement les conséquences d'un manque de surveillance des mouvements du navire par l'officier de quart.

Lorsqu'on leur a demandé si l'officier de quart surveillait les mouvements du navire lorsque le pilote en a la conduite, quelque 96 % des officiers de quart ont répondu qu'ils le faisaient «toujours» ou «souvent». Les réponses des capitaines concordent : 95 % ont déclaré que l'officier de quart surveillait «toujours» ou «souvent» les mouvements du navire. Les pilotes, toutefois, sont moins affirmatifs : seulement quelque 50 % d'entre eux croient que l'officier de quart surveille «toujours» ou «souvent» les mouvements du navire.

Les mêmes divergences transparaissent dans la réponse à la question visant à déterminer si l'officier de quart reporte régulièrement sur la carte la position du navire lorsque le pilote en a la conduite. Environ 90 % des capitaines et des officiers de pont ont répondu que l'officier de quart reportait régulièrement sur la carte la position du navire, alors que seulement 49 % des pilotes étaient de cet avis.

À la question visant à déterminer si le pilote aide l'officier de quart à surveiller les mouvements du navire, les membres des trois groupes ont convenu que tel n'était généralement pas le cas. Environ 44 % des pilotes ont dit qu'ils leur aidaient «parfois» et 11 % ont répondu qu'ils ne leur aidaient «jamais».

Ici encore, il y a des différences entre les navires canadiens et les navires étrangers. Les officiers de quart des navires étrangers sont plus enclins à surveiller les mouvements et à reporter les positions du navire sur la carte que les officiers de quart de navires canadiens. En outre, certains pilotes ont fait remarquer qu'il n'est pas très utile de reporter la position sur la carte dans des eaux restreintes et des chenaux étroits comme ceux de la Voie maritime. Un pilote a écrit que, selon son expérience, les officiers de quart sont plus enclins à reporter la position du navire sur la carte après un changement de cap du pilote. Un capitaine a fait observer que, même si les officiers de quart sont censés surveiller les mouvements du navire, certains sont devenus négligents à cet égard.

Les pilotes interrogés ont affirmé que rares sont les navires dont l'officier de quart surveille le travail du pilote, reporte régulièrement la position du navire sur la carte, ou pose des questions en cas d'incertitude concernant une décision prise par le pilote. Les pilotes se sentent seuls et ont l'impression que toutes les responsabilités reposent sur leurs épaules lorsqu'ils se trouvent sur la passerelle de certains navires, et ils ont affirmé que la plupart des officiers ne prenaient pas la peine de reporter la position du navire sur la carte, mais se contentaient de demander au pilote quelle était cette position à la fin de leur quart, de manière à pouvoir la communiquer à l'officier de quart de relève. Nombreux sont ceux qui ont le sentiment que le personnel de quart ne s'occupe pas de ce qu'ils font et les appuie encore moins. Les officiers de pont, toutefois, soutiennent qu'ils surveillent la progression du navire et reportent les positions sur la carte.

Dans son rapport d'enquête sur l'accident du «IRVING NORDIC», le Bureau conclut ce qui suit au sujet de la surveillance de la progression du navire :

Le Bureau estime qu'une surveillance étroite et constante de la progression du navire en fonction d'un plan de route pré-établi est essentielle à la conduite sûre du navire.

2.3 Travail d'équipe

À bord de navires étrangers [...] il m'est arrivé à plusieurs reprises que le capitaine donne au timonier des ordres différents de ceux que je lui avais donnés. J'ai pu le vérifier par le répétiteur d'angles de barre. (En d'autres mots, il mettait en doute mon jugement.) Au cours des 23 dernières années, cela a failli causer des abordages et des échouements. De plus, avec une hélice à pas variable, j'ai eu connaissance d'ordres différents retransmis à la machine pendant la manoeuvre du navire. Encore là, il s'agissait d'une remise en question de mon jugement et de ma compétence ­ ce qui était très dangereux et risquait de créer de la confusion sur la passerelle. À plusieurs occasions, le capitaine a affirmé qu'il y avait eu «erreur du pilote» ­ ce qui n'était pas le cas - maintenant, j'ai toujours un magnétophone pour me protéger. --Un pilote

Le manque de communication sur la passerelle, les procédures interrompues, l'incertitude quant à la situation, l'absence d'esprit d'équipe entre les pilotes et les officiers des navires, etc., ont contribué à plusieurs événements du même genre ces dernières années. Les passages suivants tirés de rapports du BST donnent des exemples d'événements au cours desquels il y a eu de graves manques de travail en équipe entre les officiers de pont :

Cet accident a mis en évidence un manque de communication, de coordination et de collaboration entre le capitaine, l'officier de quart et le pilote. Il n'y a pas eu d'échange véritable de renseignements sur la navigation et les opérations entre les divers membres de l'équipage et le pilote à leur arrivée sur la passerelle vers minuit. Le pilote et le second lieutenant ont calculé chacun de leur côté la position du navire, mais sans se concerter [....] Comme il ne connaissait pas les intentions du pilote, il ne lui a pas posé de question [....]

(«MALINSKA» ­ M91C2009)

Dans les zones de pilotage obligatoire du fleuve Saint-Laurent et de la rivière Saguenay, il s'est produit plusieurs événements graves où le capitaine avait assuré la conduite du navire malgré la présence d'un pilote breveté sur la passerelle [....] Dans tous ces événements, il y a eu manque de communication quant aux intentions du capitaine de relever un pilote breveté à la conduite du navire [....] L'intention du capitaine de prendre en charge la conduite du navire doit être communiquée clairement et sans ambiguïté avant d'amorcer une manoeuvre critique [....] Le Bureau s'inquiète du rôle que jouent le manque de travail en équipe, une connaissance insuffisante des lieux et une mauvaise communication entre le capitaine et le pilote sur la passerelle dans de tels accidents [....]

(«ENERCHEM FUSION» ­ M90L3011)

Il s'agit, une fois de plus, d'un accident maritime attribuable à un manque de communication et de coordination entre le personnel à la passerelle et le pilote. Il n'y a pas eu suffisamment d'échange de renseignements concernant la navigation et les opérations (notamment le plan de pilotage) entre les officiers du navire et le pilote.

(«IRVING NORDIC» ­ M91L3012)

Lors de cet événement, il semble que l'échange de renseignements entre le pilote et le capitaine ait fait défaut, de sorte que ni l'un ni l'autre n'était au courant de ce que l'autre entendait faire [....] Pour que l'équipe de la passerelle fonctionne comme un tout, il faut que, dès l'arrivée du pilote à bord, on définisse clairement le rôle du pilote et le type d'appui que le personnel du navire lui fournira et attendra de lui. On devrait aussi procéder dès que possible à l'échange de tous les renseignements pertinents et s'entendre sur le transfert de la conduite du navire.

(«LAKE ANINA» ­ M90L3016)

Cet accident a encore mis en évidence un manque de communication, de coordination et de collaboration entre le capitaine, l'officier de quart et le pilote canadien.

(«CONCERT EXPRESS» ­ M92M4023)

2.3.1 Facteurs influant sur le travail d'équipe

Attitudes personnelles

Les pilotes, les capitaines et les officiers de pont conviennent généralement que le travail d'équipe est aussi important que la compétence technique pour la sécurité de la navigation. Quelque 96 % des capitaines, 100 % des officiers de pont et 85 % des pilotes ont affirmé que le travail d'équipe était «toujours» ou «souvent» aussi important que la compétence technique. Un capitaine a même écrit «L'un ne va pas sans l'autre».

Lorsqu'on a demandé aux pilotes s'il était possible d'établir de bonnes relations de travail avec le capitaine et l'officier de quart, 47,7 % ont répondu que c'était «toujours» possible et 36,2 %, que c'était «souvent» possible. Cependant, à la question visant à déterminer si le pilote, le capitaine et l'officier de quart travaillent en équipe, 50,7 % des capitaines, 46,2 % des officiers de pont et 37,7 % des pilotes ont affirmé qu'ils le faisaient «toujours».

Les observations suivantes des répondants illustrent bien l'opinion des capitaines et des pilotes concernant l'esprit d'équipe qu'on retrouve à l'heure actuelle sur la passerelle des navires :

[...] Une certaine forme de gestion des ressources sur la passerelle est sans doute nécessaire et existe effectivement de nos jours, mais elle n'est pas structurée et varie d'un navire à l'autre [...] Ce qui peut être «géré» dépend avant tout des ressources disponibles, et celles-ci sont conditionnées par des variables comme le type de navire, les connaissances linguistiques, la compétence, l'organisation et la nationalité des membres de l'équipage. -- Un capitaine

[...] Sur bien des navires canadiens et certains navires étrangers auxquels j'ai été affecté, le capitaine se charge de la majeure partie de la manoeuvre parce qu'il est habitué à son navire, et il a recours au pilote pour obtenir des renseignements sur les conditions locales et sur le poste d'accostage. À bord de ces navires, j'ai trouvé que l'on travaillait davantage en équipe que sur une foule de navires étrangers où le capitaine fait figure de simple observateur et se contente de donner des instructions à ses officiers. -- Un pilote

Ces réponses sont courantes dans un milieu de travail où le personnel, faute de formation et de préparation, ne comprend pas les responsabilités qui lui incombent ni les besoins des autres intervenants. Les pilotes semblent présumer que si le capitaine a besoin davantage de renseignements, il/elle va poser des questions. Il en va de même des officiers de navire qui ont l'impression que les pilotes préfèrent faire leurs petites affaires seuls.

Lorsqu'un pilote monte à bord d'un navire, cela crée une situation où deux ou plusieurs personnes doivent effectuer un travail ensemble. S'il n'y a pas de discussion concernant le partage du travail et des responsabilités, chacun fait des suppositions quant aux attitudes et aux attentes de l'autre. Avec le temps, ces attentes peuvent devenir la norme. Les nouvelles attitudes, les nouvelles valeurs et les nouveaux comportements qui en résultent deviennent partie intégrante de la culture maritime.

Perspectives différentes

Malgré qu'il soit évident qu'un travail d'équipe déficient sur la passerelle est une cause d'accident, il semble qu'on soit réticent à admettre qu'une collaboration plus étroite entre les pilotes et les capitaines peut améliorer la sécurité de la navigation dans les eaux assujetties au pilotage.

Par exemple, un représentant d'une corporation de pilotes a déclaré :

Même en l'absence de collaboration entre le personnel à la passerelle dans certaines circonstances (personnes parlant des langues différentes, entre autres), le pilotage du navire peut très bien se faire en toute sécurité grâce à la compétence professionnelle des pilotes. Il serait dangereux de croire que la sécurité de la navigation puisse être assurée uniquement par une excellente collaboration parmi le personnel à la passerelle ou par la compétence technique du capitaine et des officiers de pont.

Des représentants de l'Association des pilotes maritimes du Canada et de la Guilde de la marine marchande du Canada (GMMC) ont déclaré d'un commun accord que les normes techniques fixées pour l'accréditation d'un pilote dans un réseau de pilotage canadien sont élevées. Ils ont en outre observé que des cours sur les facteurs humains n'ont jamais été offerts, et qu'on peut douter de l'utilité de tels cours pour l'amélioration des relations inter-personnelles sur la passerelle.

Même si aucun lien direct n'a été établi, le coût du pilotage pour les propriétaires de navires est un autre problème qui peut avoir de fâcheux effets sur le maintien d'un bon esprit d'équipe sur la passerelle.

Les droits de pilotage ont été une source de conflits entre les propriétaires de navires et les corporations de pilotes. Des représentants des propriétaires de navires ont soutenu que les laquiers canadiens ne devraient pas être obligés de prendre à bord des pilotes en tout temps. Ils considèrent que le pilotage augmente les coûts pour rien et estiment que les capitaines, avec l'aide de leurs officiers supérieurs, sont en mesure de conduire leur navire en toute sécurité n'importe où dans le chenal maritime du Saint-Laurent.

Un pilote a ainsi commenté cette attitude :

Les attitudes des officiers de pont reflètent l'opinion de leurs compagnies. Si les pilotes ne reçoivent qu'une coopération médiocre sur des navires d'une certaine compagnie, ils montent à bord des navires de cette compagnie avec une idée préconçue qui n'est pas propice à la création d'un bon climat de travail. Par ailleurs, si le pilote est traité comme un autre navigateur et un collègue, il n'y a pas de problème.

Les armateurs et les représentants des pilotes ont tous à coeur la sécurité du transport maritime, cependant, leurs attitudes contraires, découlant de leurs perspectives différentes, risquent de compromettre la sécurité en influant sur les attitudes des membres de l'équipe à la passerelle quant à la nécessité de travailler en équipe et aux avantages qui en découlent.

Exigences en matière de formation

Au Canada, la formation des capitaines, des pilotes et des officiers de navire est axée sur la compétence technique. L'élaboration d'exigences concernant le travail d'équipe et la définition des qualités nécessaires pour de meilleurs rapports de travail parmi les personnes responsables de la conduite du navire sont pratiquement absentes des programmes d'études.

Les capitaines et les officiers de navires canadiens doivent répondre aux exigences établies dans la TP2293 Note de bas de page 5 pour l'obtention des certificats délivrés par Transports Canada. Toutefois, les programmes de formation mettent l'accent sur les compétences en navigation. L'aptitude à travailler en équipe lorsque le navire est sous la conduite d'un pilote ne fait pas partie des sujets à l'étude.

Les exigences pour l'obtention d'un brevet de pilotage varient selon les circonscriptions de pilotage. Cependant, dans toutes les circonscriptions, les candidats doivent être titulaires, soit d'un brevet de capitaine au cabotage, soit d'un brevet d'officier de pont et d'un certificat NO I selon les exigences de Transports Canada. Les candidats doivent aussi avoir suivi un stage de formation pratique sous la supervision d'un pilote breveté, des cours de navigation électronique simulée et des cours de pilotage généraux. Les pilotes se voient aussi offrir périodiquement des cours théoriques et pratiques visant à améliorer leurs habiletés en matière de manoeuvre de navire. Il n'y a aucune exigence dans le programme d'études qui concerne le travail d'équipe ou la gestion des ressources sur la passerelle.

Si les capitaines, les officiers et les pilotes de navire avaient, dans le cadre de leur formation, à discuter des renseignements, des plans, des fonctions et des responsabilités associés aux tâches de chacun des autres groupes, cela serait de nature à les rendre plus aptes et plus enclins au travail d'équipe.

On devrait noter que des mesures ont été prises pour donner plus de formation sur la gestion des ressources à la passerelle. Le Bureau est au courant du fait que l'Administration de pilotage de l'Atlantique, en collaboration avec le Nova Scotia Nautical Institute, a mis sur pied un cours sur la gestion des ressources sur la passerelle. De plus, Transports Canada est en train d'établir des cours de formation facultatifs sur cette question.

Responsabilité des pilotes

J'estime que les pilotes devraient être tenus légalement responsables de leurs décisions/manoeuvres sur les navires qu'ils conduisent; cela pourrait les inciter à mieux renseigner l'officier de quart, ce qui améliorerait les rapports de travail. -- Un capitaine

La question de la responsabilité des pilotes en vertu de la Loi sur le pilotage n'était pas abordée dans le questionnaire, mais plusieurs capitaines ont tout de même fait des observations à cet égard.

L'article 25 de la Loi sur le pilotage précise comme il suit la responsabilité du pilote :

Le pilote breveté qui assure la conduite d'un navire est responsable envers le capitaine de la sécurité de la navigation du navire.

La responsabilité du pilote est limitée à l'article 40 :

Le montant maximal des dommages-intérêts qu'un pilote breveté est tenu de payer pour les dommages ou pertes causés par sa faute, sa négligence ou son impéritie est de mille dollars.

Voici un extrait de l'article 41 qui apporte des précisions :

La présente loi n'a pas pour effet d'exonérer le propriétaire ou le capitaine d'un navire de sa responsabilité pour tous dommages ou pertes causés par son navire à une personne ou à des biens du seul fait que :

a) le navire était sous la conduite d'un pilote breveté;

b) les dommages ou pertes résultent de la faute, de la négligence, de l'impéritie ou d'un acte délictueux d'un pilote breveté.

Les observations suivantes de certains capitaines illustrent bien leurs préoccupations concernant ce point :

[...] Une fois, un pilote a placé mon navire en position difficile et m'a dit que nous aurions besoin de l'aide de remorqueurs. Lorsque je lui ai dit que nous avions toujours accosté jusque-là sans l'aide de remorqueurs, il a quitté la timonerie. J'ai accosté le navire après qu'il ait été mis en position difficile. Je suis toujours responsable de la sécurité du navire. Comme les pilotes ne sont pas tenus responsables de leurs actes, il me semble qu'ils devraient écouter davantage ce que les capitaines leur disent. Malheureusement, tel n'est pas le cas. Les pilotes ne doivent jamais oublier que les capitaines connaissent beaucoup mieux le comportement de leurs navires. Ils les manoeuvrent quotidiennement [....] Je ne voudrais pas mettre tout le monde dans le même panier. J'ai travaillé avec d'excellents pilotes : compétents, toujours disposés à collaborer et à fournir des renseignements utiles. Malheureusement, ce n'est pas des hommes de cette trempe que l'on se rappelle généralement [....]

Dans les zones de pilotage obligatoire, la responsabilité des pilotes devrait être réexaminée pour que ceux-ci soient comptables de leurs actes.

Il faut tenir le pilote responsable de ses actes lorsqu'il a la conduite du navire. Pourquoi un officier de quart devrait-il perdre son emploi ou son brevet parce qu'un pilote s'est endormi trois heures à peine après être monté à bord du navire? Ce n'est que lorsque le capitaine ou l'officier de quart va à l'encontre des conseils du pilote que celui-ci devrait être dégagé de sa responsabilité.

Certains capitaines se sont dit inquiets du fait que les pilotes n'ont qu'une responsabilité limitée devant la loi; toutefois, les enquêtes du Bureau n'ont pas indiqué que ce facteur ait joué un rôle dans les événements en question ou que cette responsabilité limitée ait compromis les rapports entre capitaines et pilotes. Quoi qu'il en soit, les perspectives divergentes du personnel à la passerelle sur des questions aussi fondamentales que la responsabilité des pilotes peuvent être un obstacle à la communication entre les membres de l'équipe de navigation.

2.3.2 Ce qui se fait à l'étranger

Plusieurs organisations du milieu maritime ont reconnu le lien entre l'interaction au sein de l'équipage d'un navire et les accidents :

Le National Transportation Safety Board (NTSB) des États-Unis a cité le manque de collaboration au sein de l'équipage comme un facteur contributif dans plusieurs événements maritimes et a fait des recommandations visant à imposer des exigences en matière de formation en gestion des ressources sur la passerelle aux officiers de quart à la passerelle des navires américains. Par exemple, le NTSB, à la suite de son enquête sur l'échouement du «QUEEN ELIZABETH II» au large de Martha's Vineyard pendant la traversée vers New York en 1992, a conclu que, si le capitaine et le pilote avaient véritablement discuté de la route proposée, l'événement aurait probablement pu être évité. Autant le capitaine que le pilote ont sous-estimé la propension du navire à s'enfoncer de l'arrière à une allure de 25 noeuds.

À la suite de son enquête sur l'échouement du navire-citerne «WORLD PRODIGY» en 1989, le NTSB a recommandé que la U.S. Coast Guard impose des exigences en matière de formation en gestion des ressources sur la passerelle aux officiers de quart à la passerelle des navires américains de plus de 1 600 tjb. Au mois de mars 1992, à la suite de son enquête sur l'échouement du navire-citerne américain «CONNECTICUT» en 1990, le NTSB a de nouveau fait des recommandations visant la formation en gestion des ressources sur la passerelle à l'intention des officiers de navire.

La United States Merchant Marine Academy et le Maritime Institute of Technology and Graduate Studies ont mis sur pied des programmes de formation en gestion des ressources sur la passerelle présentement offerts à l'industrie maritime des États-Unis.

Une société d'assurance mutuelle suédoise a conclu une entente avec la Scandinavian Airlines System et six organisations maritimes afin de mettre sur pied un cours de formation en gestion des ressources sur la passerelle à l'intention des officiers de navire, dans le but de réduire le nombre d'accidents maritimes.

Le Maritime Training and Research Centre, de Toledo en Ohio, offre un programme de formation régulière en gestion des ressources à bord des navires. Le but du cours est d'assurer, parmi les navigateurs expérimentés, un degré plus élevé d'intégration, de coordination et de communication que ce que favorise la tradition maritime. Chaque classe doit mettre au point des applications uniques pour la détection des erreurs, l'information et la planification des voyages, la communication et la coordination permanente, ainsi que la synergie sur le plan de la prise de décisions.

Dans un effort en vue d'améliorer la sécurité maritime, la American Pilots Association (APA) recommande à ses membres de suivre un cours destiné à les aider à mieux communiquer avec des membres d'équipage étrangers. En 1993, le Conseil d'administration de l'APA a aussi demandé d'une part aux associations de pilotes de fournir des cours de gestion des ressources sur la passerelle à leurs membres et à leurs apprentis, et d'autre part aux organismes responsables de la délivrance des brevets de faire de ces cours une condition préalable à la délivrance et au renouvellement d'un brevet de pilotage. En outre, une proposition adoptée à l'unanimité recommande que des cours de recyclage soient suivis au moins tous les trois ans.

3.0 RÉSUMÉ DES FAITS ÉTABLIS

  1. Dans les 273 événements examinés dans le cadre de la présente étude, des malentendus entre le pilote et le capitaine, l'inattention du pilote ou de l'officier de quart, ou un manque de communication entre le pilote et l'officier de quart ont souvent été constatés.
  2. La complexité des rapports entre le capitaine et le pilote est mise en relief par les opinions souvent contradictoires énoncées par les capitaines et officiers de quart et les pilotes dans leurs réponses au questionnaire du BST.
  3. La vaste majorité des capitaines, des officiers de pont et des pilotes qui ont répondu au questionnaire estiment que le travail d'équipe est aussi important que la compétence technique pour la sécurité de la navigation.
  4. De récents événements indiquent qu'il subsiste des problèmes en ce qui concerne le travail d'équipe sur la passerelle; p.ex., absence d'un plan de route accepté de part et d'autre, manque de communication, de coordination et de collaboration entre les membres de l'équipe à la passerelle, manque de surveillance de la progression du navire par l'officier de quart, etc.
  5. Les divergences fondamentales des perspectives des officiers de navire et pilotes sur des questions comme la nécessité du pilotage et la limitation de la responsabilité des pilotes ne favorisent pas l'esprit d'équipe sur la passerelle.
  6. Bien que la majorité des pilotes, des capitaines et des officiers de quart soient d'accord pour dire que l'amélioration de la communication parmi le personnel à la passerelle est capitale pour la sécurité des opérations maritimes, une proportion importante de capitaines et d'officiers de pont ont indiqué qu'ils hésitaient à questionner un pilote sur ses décisions.
  7. Souvent, il existe des divergences de perception entre les capitaines et officiers de quart et les pilotes concernant la nécessité d'un échange de renseignements à savoir si les renseignements fournis de part et d'autre sont suffisants.
  8. La plupart des capitaines et des officiers de pont qui ont répondu au questionnaire ont soutenu qu'ils informent toujours le pilote des caractéristiques de manoeuvre du navire, mais peu de pilotes ont déclaré qu'ils étaient toujours mis au courant des renseignements.
  9. La majorité des capitaines et des officiers de pont estiment que les pilotes ne fournissent pas toujours en temps voulu des renseignements sur les conditions locales. Les pilotes ont déclaré qu'ils estimaient que les capitaines de navires étrangers qui fréquentent régulièrement les eaux canadiennes connaissent assez bien les conditions locales.
  10. Bon nombre de capitaines et d'officiers de pont ont indiqué que les pilotes ne renseignent pas toujours le capitaine ou l'officier de quart concernant le plan de pilotage qu'ils entendent adopter; la plupart des pilotes soutiennent qu'ils le font.
  11. Les pilotes et les capitaines sont aussi en désaccord concernant les échanges de renseignements au moment de la relève à la conduite du navire; la plupart des capitaines et officiers de quart disent qu'ils fournissent les renseignements nécessaires, tandis que les pilotes affirment en majorité que tel n'est pas le cas.
  12. Bon nombre de capitaines et d'officiers de quart sont d'avis que les pilotes ne transmettent pas toujours les renseignements essentiels à la sécurité de la navigation qu'ils reçoivent par communications radio.
  13. En ce qui concerne l'échange général de renseignements entre les pilotes d'une part, et les capitaines et officiers de quart d'autre part, chaque groupe présume apparemment que les membres de l'autre groupe savent tout ce qu'ils ont besoin de savoir et que, si tel n'est pas le cas, ils vont poser des questions.
  14. La fausse impression selon laquelle les membres de l'autre groupe connaissent les caractéristiques de manoeuvre du navire, ou les conditions locales et le plan de pilotage envisagé, peut être à l'origine d'importants malentendus et de mauvaises surprises pour les membres de l'équipe à la passerelle.
  15. Depuis 1975, il y a eu dans les eaux canadiennes au moins 24 événements maritimes mettant en cause des navires étrangers où l'on a identifié une connaissance inadéquate de la langue de travail comme un facteur contributif.
  16. La majorité des pilotes ont indiqué que les barrières linguistiques les empêchent «parfois» de communiquer clairement avec le capitaine et l'officier de quart; plusieurs ont répondu que les barrières linguistiques sont «souvent» un obstacle à la communication.
  17. Les pilotes et officiers de pont divergent d'opinion sur la façon dont les officiers de quart surveillent la progression du navire, les pilotes exprimant un certain mécontentement au sujet de la façon dont le personnel de quart les appuie ou surveille leur travail. Toutefois, les deux groupes sont d'accord pour dire que les pilotes aident rarement l'officier de quart à surveiller les mouvements du navire.
  18. La plupart des faits établis qui précèdent révèlent l'existence de barrières importantes dans les rapports entre les pilotes, les capitaines et les officiers de quart, barrières qui les empêchent de fonctionner comme une équipe cohérente.
  19. Plusieurs organisations étrangères ont reconnu qu'une mauvaise interaction entre les membres de l'équipage peut être une cause d'accidents, et ont commencé à mettre en place divers cours de formation en matière de gestion des ressources sur la passerelle.
  20. Au Canada, la formation des capitaines, des officiers de pont et des pilotes est axée sur la compétence technique. Il n'est pas nécessaire d'avoir suivi une formation préalable ou subséquente au travail d'équipe sur la passerelle pour être titulaire d'un certificat valide au Canada.

4.0 RECOMMANDATIONS

4.1 Échange de renseignements au moment de la relève à la conduite du navire

Dans les 273 événements examinés dans le cadre de la présente étude, on a souvent constaté un manque de communication entre les membres de l'équipe à la passerelle. Les enquêtes du BST sur des événements subséquents ont continué de démontrer que les communications interpersonnelles entre les membres de l'équipe à la passerelle étaient inadéquates.

Les résultats du questionnaire montrent qu'en ce qui concerne le besoin d'échange de renseignements, il existe des divergences entre les perceptions et les attentes des pilotes d'une part, et celles des capitaines et officiers de quart d'autre part. Il semble que, lorsqu'il n'y a pas de communication ni d'échange d'information efficaces, les membres des deux groupes font des hypothèses concernant les plans et les gestes de l'autre ou l'inaction de celui-ci.

En réponse à une question d'ordre général sur l'efficacité des communications, plus de 80 % des répondants de chaque groupe ont répondu qu'elles étaient efficaces. Cependant, lorsqu'on les a interrogés sur des points précis, ils ont été plus critiques.

Les ordres à la barre et d'autres renseignements, lorsqu'ils sont transmis, sont bien transmis. Cependant, ce qui est important, c'est l'information qui n'est pas transmise systématiquement. Les réponses au questionnaire ainsi que les données sur les accidents montrent que, dans bien des cas, les plans de pilotage, les caractéristiques du navire et les conditions locales ne sont pas bien communiqués. Même lorsque les officiers de quart sont incertains des intentions d'un pilote, il semble que bon nombre d'entre eux hésitent à interroger celui-ci. On donne bien des raisons pour expliquer la non-communication d'information. Bon nombre croient que les pilotes connaissent bien les caractéristiques de manoeuvre des navires immatriculés au Canada. Les pilotes peuvent croire que les officiers canadiens connaissent bien les routes et les plans de route usuels; il n'est donc pas nécessaire d'en discuter. L'habitude, ou l'usage normal, est probablement un autre facteur. Si on demandait régulièrement aux pilotes de faire connaître leur plan de route, ils finiraient probablement par s'y attendre et par préparer systématiquement l'information. De la même façon, si les pilotes demandaient toujours des renseignements au sujet du navire et de ses caractéristiques, les équipes à la passerelle seraient prêtes à les fournir.

Quoi qu'il en soit, habituellement, peu de renseignements sont fournis systématiquement et il semble qu'il y ait peu de demande en ce sens. Ce n'est que lorsqu'on les a interrogés sur des points particuliers touchant la communication que les membres des deux groupes ont fait des commentaires négatifs. En pratique, les gens essaient de répondre aux attentes. Il est évident que ni les pilotes ni les officiers de navire ne s'attendent à beaucoup d'échanges d'information; il n'y en a donc pas beaucoup. Si des méthodes favorisant l'échange d'information étaient mises en oeuvre et appliquées, ce deviendrait la norme avec le temps.

Étant donné que l'absence chronique de communications efficaces entre les officiers de pont et les pilotes a débouché sur une culture qui ne favorise pas les échanges, et que les différences fondamentales dans les attentes des deux groupes engendrent souvent une incompréhension mutuelle, et compte tenu des conséquences démontrées d'une telle incompréhension, des mesures rigoureuses doivent être prises pour améliorer l'efficacité de l'équipe à la passerelle grâce à un meilleur échange d'information. De toute évidence, les dispositions actuelles du Code recommandé des méthodes et pratiques nautiques de la GCC concernant l'échange d'information sur «les méthodes de navigation, les conditions locales et les caractéristiques du navire» ne sont pas appliquées efficacement. Par conséquent, le Bureau recommande que :

Le ministère des Transports exige qu'il y ait un échange de renseignements en bonne et due forme entre le capitaine et le pilote lorsqu'un pilote prend son service dans des eaux où le pilotage est obligatoire, et que cet échange porte obligatoirement sur les méthodes de navigation prévues, les conditions locales et les caractéristiques du navire.
Recommandation M95-06 du BST

et que :

Le ministère des Transports s'assure que la formation des officiers et pilotes de navires canadiens inclue des exercices pratiques sur les méthodes de relève à la conduite du navire pour favoriser la navigation en toute sécurité dans les eaux assujetties au pilotage.
Recommandation M95-07 du BST

4.2 Langue

Les barrières linguistiques à bord des navires étrangers demeurent un sérieux obstacle à la sécurité de la navigation dans les eaux où le pilotage est obligatoire. Puisque l'échange efficace de renseignements est essentiel à la sécurité de la navigation, cette dernière est compromise à bord des navires où les pilotes sont incapables de communiquer avec l'équipage. Non seulement ces barrières linguistiques font que les membres de l'équipe à la passerelle ne se comprennent pas, mais les officiers de pont ne peuvent pas avoir la situation bien en main s'ils ne comprennent pas les communications radio des STM ou autres; en outre, la charge de travail du pilote est plus lourde parce que celui-ci doit exercer une surveillance pour s'assurer que ses directives sont suivies en temps opportun et à la lettre.

Le Bureau constate que le ministère des Transports est d'accord avec l'esprit de la recommandation M95-01 du rapport d'enquête sur l'abordage du «TUO HAI» et du «TENYO MARU», survenu le 22 juillet 1991, dans lequel le Bureau a recommandé que :

Le ministère des Transports, par l'intermédiaire de l'Organisation maritime internationale (OMI), cherche à faire adopter des mesures internationales plus rigoureuses en vue de s'assurer que les États membres se conforment aux normes de la STCW en matière de connaissances linguistiques, lorsqu'ils délivrent des brevets.

En conséquence, le Bureau ne recommande pas d'autres mesures de sécurité pour le moment. Toutefois, étant donné l'importance de la question, comme en témoigne les données sur les accidents et les commentaires reçus de représentants de l'industrie, le Bureau demeure préoccupé par le non-respect des normes en matière de connaissances linguistiques par les États membres et continuera de surveiller les progrès dans ce domaine.

4.3 Surveillance des mouvements du navire

Plusieurs événements récents auraient possiblement pu être évités si un régime efficace avait été en place pour surveiller la progression du navire. Trop souvent, le système en place peut faire en sorte qu'une seule décision erronée de la part du pilote mène à la catastrophe; sans surveillance efficace des ordres du pilote qui a la conduite du navire, il n'existe que peu de moyens d'assurer la sécurité de la navigation.

Il y a énormément de différence dans les expériences relatées par les capitaines et officiers de quart et les pilotes au sujet de la surveillance des mouvements du navire sous la conduite d'un pilote. Presque tous les capitaines et officiers de quart qui ont répondu au questionnaire ont dit qu'ils surveillaient «toujours» ou «souvent» les mouvements du navire et reportaient sa position sur la carte. Environ la moitié seulement des pilotes étaient d'accord. Ces divergences d'opinion peuvent être dues à un manque de communication. Les capitaines et les officiers de quart peuvent effectivement reporter régulièrement les positions sur la carte et surveiller la progression du navire, mais si le pilote n'en est pas informé, il aura vraiment le sentiment d'être le seul et unique responsable de la conduite du navire.

Il est essentiel de surveiller les mouvements du navire et de reporter sa position sur la carte pour bien évaluer la situation; or, l'évaluation de la situation est difficile lorsque l'on manque d'information ou qu'il n'y a pas d'échange de renseignements. Les événements mettant en cause le «CANADIAN EXPLORER», le «HALIFAX» et le «IRVING NORDIC» sont des exemples d'un manque de surveillance des mouvements du navire et de perte de maîtrise de la situation.

La surveillance des mouvements du navire est essentielle à la sécurité de la navigation dans les eaux où le pilotage est obligatoire et ne peut se faire que grâce à une communication efficace entre les membres de l'équipe à la passerelle. Pour surveiller efficacement les mouvements du navire, l'officier de quart devrait connaître le plan de pilotage du pilote. Pour conserver la situation bien en main, le pilote doit être tenu au courant, par l'officier de quart, de la position du navire par rapport au plan.

Le Bureau a déjà recommandé que :

Même si le ministère a rejeté cette recommandation, le Bureau constate qu'une mauvaise surveillance de la position d'un navire est souvent associée à des échouements ou des heurts violents. Le Bureau considère qu'une surveillance étroite et constante de la progression du navire en fonction d'un plan de pilotage pré-établi est essentielle à la conduite du navire. Par conséquent, le Bureau recommande également que :

Le ministère des Transports exige que les pilotes, au moment de l'échange de renseignements lors de la relève à la conduite du navire :

  1. obtiennent l'approbation du capitaine au sujet du plan de pilotage prévu;
  2. incitent les membres de l'équipe à la passerelle à participer à la navigation du navire en demandant à l'officier de quart de reporter, à des intervalles réguliers, la position du navire sur la carte et l'informer de la position du navire par rapport à celle prévue dans le plan de pilotage convenu.
Recommandation M95-08 du BST

4.4 Travail d'équipe

Des malentendus entre les membres de l'équipe à la passerelle, le manque d'échange d'information adéquate, une mauvaise compréhension des manoeuvres prévues, une mauvaise appréciation de la situation et l'absence de surveillance de la progression du navire, etc., comme le montrent les données sur les événements maritimes au Canada, sont symptomatiques de problèmes plus fondamentaux dans les pratiques à la passerelle. De tels facteurs sous-entendent des lacunes dans les méthodes actuelles de gestion des ressources sur la passerelle dans les zones de pilotage obligatoire.

L'absence du travail d'équipe sur la passerelle des navires dans des eaux assujetties au pilotage au Canada continue de compromettre la sécurité de la navigation. Le manque de communication et de collaboration apparaissent comme des facteurs dans les récents événements mettant en cause le «CONCERT EXPRESS», le «LAKE ANINA», le «MALINSKA» et le «IRVING NORDIC».

Comme il l'a déjà mentionné, le Bureau continue de croire qu'en mettant davantage l'accent sur l'échange d'information et la collaboration, on pourrait améliorer la gestion de l'équipe à la passerelle et, par conséquent, la sécurité de la navigation. La formation systématique des officiers de navire et des pilotes maritimes sur les méthodes et pratiques de fonctionnement destinées à améliorer l'échange d'information et la collaboration entre tous les membres de l'équipe à la passerelle est nécessaire.

Une majorité écrasante des pilotes, des capitaines et des officiers de pont qui ont répondu au questionnaire du Bureau ont affirmé que le travail d'équipe est aussi important que les compétences techniques pour la sécurité de la navigation. Par ailleurs, moins de la moitié des répondants ont dit qu'ils travaillaient toujours en équipe. Les données sur les accidents confirment que les méthodes et pratiques actuelles sur la passerelle font souvent ressortir l'absence de travail d'équipe.

Lorsqu'il a rejeté la recommandation M94-34 du Bureau concernant les plans de pilotage, le ministère des Transports a déclaré (22 mars 1995) :

Nous croyons toutefois qu'un système plus efficace de gestion des ressources à la passerelle (incluant de meilleures communications entre le pilote et l'officier de quart), plutôt qu'un plan de pilotage, aurait pu contribuer à éviter l'incident.

Le Bureau constate que le ministère des Transports a l'intention de mettre sur pied des cours facultatifs de formation en matière de gestion des ressources sur la passerelle. Cependant, le Bureau est préoccupé par le fait qu'il se peut que la formation facultative n'ait pas l'effet souhaité au sein de l'industrie. Les principaux intervenants de l'industrie maritime ne se sont pas tous montrés vraiment en faveur d'une telle formation.

La gestion des ressources sur la passerelle, gestion des ressources humaines et techniques dans un milieu maritime opérationnel, est une fonction à plusieurs volets. Elle comprend, entre autres, des communications efficaces, des échanges d'information ainsi que la création d'un milieu où tous les membres de l'équipe à la passerelle se sentent libres de remettre en question les hypothèses et les gestes posés.

À la suite des problèmes relevés dans la présente étude concernant l'absence d'échange de renseignements au moment de la relève à la conduite du navire et la surveillance inefficace de la position du navire, et compte tenu de la fréquence des événements mettant en cause des manquements démontrés aux règles établies du travail d'équipe, le Bureau recommande que :

Le ministère des Transports exige que le programme de formation initiale de tous les officiers de navire soit modifié de façon à comporter un volet sur les compétences en gestion des ressources sur la passerelle.
Recommandation M95-09 du BST

que :

Le ministère des Transports exige que tous les officiers de navire fassent la preuve de leurs compétences en gestion des ressources sur la passerelle avant de se voir délivrer des certificats de maintien des compétences.
Recommandation M95-10 du BST

et que :

Le ministère des Transports exige que tous les pilotes fassent la preuve de leurs compétences en gestion des ressources sur la passerelle avant de se voir délivrer un brevet de pilotage ou avant le renouvellement de ce dernier.
Recommandation M95-11 du BST

Le Bureau reconnaît que l'effort unilatéral d'un seul pays ne résoudra pas vraiment le problème global du travail d'équipe inefficace avec des membres d'équipage de nationalités différentes à bord de navires étrangers. L'action concertée des grands pays maritimes sera nécessaire pour réaliser les changements culturels nécessaires pour intégrer la gestion des ressources sur la passerelle aux pratiques quotidiennes sur la passerelle. Il faudra sensibiliser davantage toute l'industrie aux avantages de la gestion des ressources sur la passerelle pour rendre la navigation sûre et, du même coup, rentable. Par conséquent, le Bureau recommande que :

Le ministère des Transports, par l'intermédiaire de l'Organisation maritime internationale, fasse activement la promotion d'un cours de formation en gestion des ressources sur la passerelle en bonne et due forme à l'intention des officiers et des pilotes de navire, ainsi que des avantages d'un tel cours.
Recommandation M95-12 du BST

5.0 ANNEXES

ANNEXE A ­ EXPÉRIENCE DES CAPITAINES ET DES PILOTES

Les données recueillies grâce aux réponses aux 20 premières questions du questionnaire sont exposées ci-dessous sous forme de tableau. 1. Selon mon expérience, de bonnes communications, un bon esprit d'équipe et une bonne coopération du personnel de la passerelle sont aussi importants que les compétences techniques en ce qui a trait à la sécurité et à la manoeuvre du navire.

  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
CAPITAINES 85,9% 9,9% 2,1% 0,0% 2,1%
OFFICIERS DE PONT 94,2% 5,8% 0,0% 0,0% 0,0%
PILOTES 66,1% 19,2% 5,4% 3,1% 6,2%
2. Selon mon expérience, dès l'arrivée du pilote à bord, le capitaine ou l'officier de quart avise ce dernier des particularités de manoeuvre du navire dans son état présent.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
CAPITAINES 75,2% 18,3% 5,6% 0,0% 0,9%
OFFICIERS DE PONT 71,1% 23,1% 5,8% 0,0% 0,0%
PILOTES 19,3% 22,3% 56,9% 0,0% 1,5%
3. Selon mon expérience, le pilote renseigne le capitaine au sujet des conditions locales pouvant influer sur le pilotage durant le voyage.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
CAPITAINES 26,1% 34,5% 37,3% 1,4% 0,7%
OFFICIERS DE PONT 30,8% 44,2% 21,2% 3,8% 0,0%
PILOTES 63,9% 22,3% 11,5% 0,8% 1,5%
4. Selon mon expérience, le pilote avise le capitaine au sujet du plan de manoeuvre qu'il entend adopter pour le navire.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
CAPITAINES 23,9% 24,6% 44,4% 6,3% 0,7%
OFFICIERS DE PONT 34,6% 23,1% 30,8% 11,5% 0,0%
PILOTES 50,8% 28,5% 14,6% 2,3% 3,8%
5. Selon mon expérience, le capitaine s'assure que les conditions locales et le trajet qu'entend suivre le pilote conviennent au navire.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
CAPITAINES 65,5% 17,6% 12,0% 1,4% 3,5%
OFFICIERS DE PONT 59,6% 21,2% 19,2% 0,0% 0,0%
PILOTES 16,2% 20,8% 43,8% 13,8% 5,4%
6. Selon mon expérience, l'officier de quart surveille les mouvements du navire lorsque le pilote en a la conduite.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
CAPITAINES 73,3% 21,8% 4,2% 0,0% 0,7%
OFFICIERS DE PONT 86,6% 9,6% 1,9% 1,9% 0,0%
PILOTES 13,8% 36,9% 46,3% 1,5% 1,5%
7. Selon mon expérience, l'officier de quart rapporte régulièrement sur la carte la position du navire lorsque le pilote en a la conduite.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
CAPITAINES 66,9% 23,3% 7,7% 2,1% 0,0%
OFFICIERS DE PONT 71,2% 17,3% 9,6% 1,9% 0,0%
PILOTES 15,4% 33,1% 49,2% 0,8% 1,5%
8. Selon mon expérience, le pilote aide l'officier de quart à suivre les déplacements du navire.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
CAPITAINES 16,9% 26,8% 40,8% 12,7% 4,8%
OFFICIERS DE PONT 19,2% 23,1% 44,3% 11,5% 1,9%
PILOTES 26,9% 21,5% 42,3% 6,2% 3,1%
9. Selon mon expérience, le pilote s'assure que l'officier de quart a compris et confirmé ses ordres.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
CAPITAINES 50,0% 25,4% 17,6% 7,0% 0,0%
OFFICIERS DE PONT 50,0% 26,9% 17,3% 5,8% 0,0%
PILOTES 83,8% 10,8% 2,3% 0,8% 2,3%
10. Selon mon expérience, si l'officier de quart est incertain des intentions du pilote, il demande des précisions.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
CAPITAINES 46,5% 29,6% 22,5% 0,7% 0,7%
OFFICIERS DE PONT 69,2% 21,2% 9,6% 0,0% 0,0%
PILOTES 20,7% 18,5% 50,0% 5,4% 5,4%
11. Selon mon expérience, des échanges d'informations de capitaine à pilote, de pilote à pilote et de pilote à capitaine ont lieu au moment de la relève à la conduite du navire.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
CAPITAINES 46,5% 29,6% 22,5% 0,7% 0,7%
OFFICIERS DE PONT 69,2% 21,2% 9,6% 0,0% 0,0%
PILOTES 20,7% 18.5% 50,0% 5,4% 5,4%
12. Selon mon expérience, les communications entre le pilote et le personnel de la passerelle sont efficaces.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
CAPITAINES 52,8% 28,9% 15,5% 1,4% 1,4%
OFFICIERS DE PONT 51,9% 32,7% 13,5% 0,0% 1,9%
PILOTES 43,1% 42,3% 12,3% 0,0% 2,3%
13. Selon mon expérience, le pilote, le capitaine et l'officier de quart font équipe quant à la conduite du navire.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
CAPITAINES 50,7% 33,1% 14,8% 1,4% 0,0%
OFFICIERS DE PONT 46,1% 40,4% 13,5% 0,0% 0,0%
PILOTES 37,6% 25,4% 28,5% 6,9% 1,5%
14. Selon mon expérience, les officiers de pont hésitent à interroger le pilote sur ses décisions.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
CAPITAINES 6,3% 31,7% 54,3% 7,7% 0,0%
OFFICIERS DE PONT 11,5% 21,2% 44,3% 19,2% 3,8%
PILOTES 6,9% 33,1% 39,2% 16,2% 4,6%
15. Selon mon expérience, il est possible d'établir de bonnes relations de travail avec le capitaine et l'officier de quart.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
PILOTES 47,6% 36,2% 10,8% 0,0% 5,4%
16. Selon mon expérience, dans le cas des navires immatriculés à l'étranger, les barrières linguistiques gênent la transmission des ordres au timonier.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
PILOTES 1,5% 20,0% 60,1% 14,6% 3,8%
17. Selon mon expérience, dans le cas des navires immatriculés à l'étranger, les barrières linguistiques empêchent le pilote d'échanger des informations avec le capitaine et l'officier de quart.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
PILOTES 1,5% 23,1% 54,7% 16,9% 3,8%
18. Selon mon expérience, les pilotes fournissent tous les renseignements utiles concernant le pilotage et les plans de manoeuvre du navire.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
CAPITAINES 24,7% 30,3% 38,7% 4,9% 1,4%
OFFICIERS DE PONT 28,8% 38,5% 30,8% 1,9% 0,0%
19. Selon mon expérience, les pilotes me transmettent les communications pertinentes des centres de contrôle du trafic maritime ou d'autres navires.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
CAPITAINES 24,6% 29,6% 33,1% 9,2% 3,5%
OFFICIERS DE PONT 26,9% 26,9% 40,5% 3,8% 1,9%
20. Selon mon expérience, les pilotes me préviennent de tout message ayant trait à la sécurité de la navigation du navire dans les eaux assujetties au pilotage.
  TOUJOURS SOUVENT PARFOIS JAMAIS PAS DE RÉPONSE
CAPITAINES 32,4% 29,6% 29,6% 4,9% 3,5%
OFFICIERS DE PONT 38,4% 28,8% 26,9% 7,7% 3,8%

ANNEXE B ­ RENSEIGNEMENTS DÉMOGRAPHIQUES

Pilotes ­ 130 questionnaires reçus Note de bas de page 6

Administration
  Nombre %
Atlantique 27 20,8
Laurentides 54 41,5
Grands Lacs 25 19,2
Pacifique 16 12,3
Pas de réponse 8 6,2
Expérience (années)
  0-5 5-10 10-15 15-20 20+ Pas de réponse
En tant que pilote 9,2% 8,5% 11,5% 25,4% 40,0% 5,4%
En tant que captaine 19,2% 10,0% 3,8% 5,4% 32,4% 29,2%
En tant qu'officier de pont 16,9% 27,7% 7,7% 2,3% 13,1% 32,3%

Capitaines ­ 142 questionnaires reçus Note de bas de page 7

Type de voyage
  Nombre %
Long cours (LC) 66 46,5
Cabotage (CA) 26 11,3
Eaux intérieures (EI) 32 22,5
LC & CA 4 2,8
LC & EI 1 0,7
CA & EI 13 9,2
Pas de réponse 10 7,0
Expérience (années)
  0-5 5-10 10-15 15-20 20+ Pas de réponse
En tant que captaine 24,7% 13,4% 21,8% 14,8% 23,9% 1,4%
En tant qu'officier de pont 2,8% 21,1% 22,5% 13,4% 13,4% 26,8%

Officiers de pont ­ 52 questionnaires reçus Note de bas de page 8

Type de voyage
  Nombre %
Long cours (LC) 19 36,5
Cabotage (CA) 8 15,4
Eaux intérieures (EI) 14 26,9
LC & CA 0 0,0
LC & EI 0 0,0
CA & EI 9 17,3
Pas de réponse 2 3,9
Expérience (années)
  0-5 5-10 10-15 15-20 20+ Pas de réponse
En tant que captaine 15,4% 0,0% 7,7% 7,7% 3,8% 65,4%
En tant qu'officier de pont 1,9% 21,2% 40,4% 26,9% 9,6% 0,0%
Zones de pilotage que les capitaines et les officiers de pont connaissent le mieux.
Région de pilotage CAPITAINES OFFICIERS DE PONT
Atlantique (ATL) 8,5% 11,5%
Laurentides (LN) 16,9% 19,2%
Grands Lacs (GL) 10,5% 5,8%
Pacifique (PAC) 10,6% 5,8%
Artique (ARC) 0,7% 0,0%
ATL & LN 6,3% 5,8%
ATL & LN & GL 9,9% 13,5%
LN & GL 19,7% 28,8%
Pas de réponse 16,9% 9,6%
Nombre de fois où les capitaines et les officiers de pont ont navigué dans des eaux canadiennes assistés d'un pilote au cours des cinq dernières années :
  0-5 5-10 10-15 15+ Pas de réponse
CAPITAINES 11,3% 10,6% 7,7% 69,0% 1,4%
OFFICIERS DE PONT 3,8% 7,7% 5,8% 82,7% 0,0%