Inflammation et incendie dans l'enceinte de la vanne d'isolement MOV-0409
Westcoast Energy Inc., exploitée sous la raison
sociale Spectra Energy Transmission
Station de compression N4
Près de Wonowon (Colombie-Britannique)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
Le 23 juin 2012, vers 12 h, heure normale des Rocheuses, une inflammation se produit et un incendie se déclare dans l’enceinte d’une vanne de la station de compression N4 de Spectra Energy Transmission, située à environ 160 km au nord-ouest de Fort St. John (Colombie-Britannique). Deux employés d’entretien subissent des brûlures lorsque du gaz naturel non corrosif qui s’échappe d’une vanne de la station de compression s’enflamme. Les 2 employés effectuaient à ce moment des travaux d’inspection annuels sur des vannes motorisées. Les blessés sont transportés à l’hôpital de Fort St. John par voie aérienne. Un des employés reçoit son congé de l’hôpital le jour même, tandis que le deuxième est transféré à un centre de brûlés à Vancouver.
This report is also available in English.
Renseignements de base
Westcoast Energy Inc., exploitée sous la raison sociale Spectra Energy Transmission (Spectra), effectuait une inspection des vannes motorisées de la station de compression N4 (CS-N4) dans le cadre d’un arrêt annuel aux fins d’entretien. La station CS-N4, une station de compression qui fait partie du gazoduc Transmission North de Spectra, est située à 160 km environ au nord-ouest de Fort St. John (Colombie-Britannique) (figure 1).
[traduction]
Accident Site | Lieu de l’accident |
---|---|
Linepack Status | État du gaz stocké en conduite |
Spectra FS Gas Plant | Usine à gaz FS de Spectra |
Delivery Location | Lieu de livraison |
3rd Party Plant | Usine d’un tiers |
3rd Party Pipeline | Conduite d’un tiers |
Gathering Pipeline | Conduite de collecte |
Compressor Station | Station de compression |
City/Town | Ville |
Fort St. John Gathering Area | Région de collecte de Fort St. John |
L’accident s’est produit à l’intérieur de l’enceinte de protection contre les intempéries qui abritait la vanne motorisée 0409 (MOV-0409) (figure 2). Cette vanne motorisée commande le débit de la conduite de décharge en boucle du gazoduc de 91,44 cm (36 pouces) de la station de compression.
En 1993, les vannes MOV-0409 et MOV-0417 (en service depuis les années 1960) ont été recouvertes d’enceintes de protection contre les intempéries. Les 2 enceintes ont un mur en commun dans lequel se trouve une ouverture permettant l’accès entre les 2 enceintes par l’intérieur (figure 3). La vanne MOV-0409 commande le débit de la conduite de décharge en boucle du gazoduc de 91,44 cm (36 po), et la vanne MOV-0417 commande le débit de la conduite de purge d’urgence de la station de compression. Ces 2 vannes sont munies d’un mécanisme de commande à moteur électrique à courant continu de 130 volts logé dans le carter de l’interrupteur de fin de course. Il n’y a aucun autre appareil électrique dans ces enceintes. Dans des conditions de fonctionnement normales, la vanne MOV-0409 est en position d’ouverture totale, c’est-à-dire que le gaz haute pression circule dans la vanne sans interruption. Si une séquence d’arrêt d’urgence est déclenchée à la station de compression, la vanne MOV-0409 passe automatiquement en position de fermeture totale. Les travaux d’entretien sur la vanne MOV-0409 nécessitaient la mise sous pression de la conduite.
La structure de l’enceinte entourant la vanne MOV-0409 mesure 2,4 m sur 3,7 m (8 pieds sur 12 pieds) environ. La structure de l’enceinte entourant la vanne MOV-0417 mesure 3,7 m sur 3,1 m (8 pieds sur 10 pieds) environ.
Spectra transporte du gaz naturel depuis son usine à gaz de Fort Nelson jusqu’à la frontière canado-américaine. Le tronçon de gazoduc qui relie l’usine de Fort Nelson à la station CS-2 a une capacité de 50,72 millions de mètres cubes (1,8 milliard de pieds cubes) de gaz par jour. Ce tronçon compte également 4 stations de compression intermédiaires (CS-N2, CS-N3, CS-N4 et CS-N5). Au moment de l’événement, 2 stations de compression suffisaient à assurer la demande de production et de fourniture.
Le produit contenu dans le gazoduc était du gaz naturel non corrosif et non odorisé de qualité commerciale. Le gaz naturel se compose principalement de gaz méthane (95 %) et n’est pas toxique. Il est extrêmement inflammable et peut former un mélange explosif s’il est mélangé à l’air. Il est connu pour être asphyxiant et peut déplacer l’oxygène dans un espace fermé. La concentration de méthane dans l’air pouvant produire un mélange inflammable ou explosif se situe aux alentours de 5 à 15 %.
Le jour de l’événement, la pression d’exploitation de la conduite de décharge de 91,44 cm (36 pouces) de la station de compression était de 4295 kilopascals (kPa) (pression manométrique de 623 livres par pouce carré). Quant à la pression d’exploitation de la conduite de la station de compression, elle était de 4309 kPa (pression manométrique de 625 livres par pouce carré).
Le milieu de travail à une station de compression est classé comme zone dangereuse et porte la désignation de classe 1, zone 0, groupe D du Code canadien de l’électricité de l’Association canadienne de normalisation (CSA). Cette désignation est définie comme suit :
- Classe I : Emplacement dans lequel un gaz ou des vapeurs inflammables peuvent être présents en quantité suffisante dans l’air pour constituer un mélange explosif ou inflammable;
- Zone 0 : Emplacement dans lequel une atmosphère explosive gazeuse est présente de façon continue ou durant une longue période;
- Groupe D : Le type de produit présent est le benzène, le butane, le méthane et/ou le propane.
Activités d’exploitation précédant l’événement
Un certain nombre d’activités et de décisions d’exploitation prises à compter d’environ 10 mois avant l’événement est présenté ci-dessous. À noter que les employés de Spectra comprennent les personnes suivantes :
- Le technicien principal en électricité et en instrumentation (SP–1), qui travaillait principalement sur le gazoduc Transmission South de Spectra et qui avait reçu l’accréditation d’opérateur de station pour la station CS-N4;
- Le technicien en électricité et en instrumentation (SP–2), qui assumait le rôle d’opérateur de station pour la station CS-N2;
- Le technicien en électricité et en instrumentation (SP–3), qui assumait le rôle d’opérateur de station pour la station CS-N3;
- Le technicien mécanicien (SP–4) de la station CS-N4.
Activités et décisions d’exploitation précédant l’événement
Activités et décisions d’exploitation précédant l’événement
16 août 2011
- Les émissions fugitives de gazNote de bas de page 1 faisaient l’objet d’inspections et étaient quantifiées à la vanne MOV-0409. (Remarque : des fuites de la vanne MOV-0409 avaient été détectées depuis 2006; elles faisaient l’objet d’un suivi depuis au moins les 10 derniers mois.)
- Une étiquette signalant une émission fugitive de gaz (photo 1) a été fixée à l’unique entrée des enceintes jumelées (porte piétonne) dans la section de l’enceinte de la vanne MOV-0417.
Fin août 2011
- On a tenté à plus d’une reprise de colmater la fuite au niveau de la tige de la vanne en injectant de la graisse pour haute pression dans la cavité du joint de cette tige.
- L’évent à indicateur a été remplacé par un bouchon pour haute pression dans l’espoir de réduire la fuite de gaz dans l’enceinte.
- L’émission fugitive de gaz a été consignée dans le système d’avis de mauvais fonctionnement de Spectra. Comme la réparation nécessitait la purge de la vanne et des conduites correspondantes de tout leur gaz, elle a été repoussée à l’arrêt annuel suivant de la station CS-N4.
- Une porte de sortie a été ajoutée à l’enceinte de la vanne MOV-0409. Cette porte n’était pas dotée d’une prise d’essai pour vérifier la qualité de l’air (photo 2).
8 mai 2012
- Le SP–4 a commencé sa formation comme opérateur de station à la station CS-N4. Cette formation comprend notamment l’étude du manuel de l’opérateur de station sous le mentorat d’opérateurs de station certifiés. Ces derniers évaluent les progrès des apprentis et observent les apprentis sur le terrain. L’apprenti obtient sa certification lorsque 2 mentors attestent de façon indépendante que l’apprenti a satisfait aux exigences pour être un opérateur de station. En général, le processus de mentorat dure 3 mois.
20 mai 2012
- L’entrepreneur chargé de l’entretien des vannes a déterminé que la vanne MOV-0409 présentait possiblement une fuite au niveau de la tige, et que les pièces nécessaires pour effectuer la réparation n’étaient pas disponibles immédiatement.
30 mai 2012
- Le service de planification des travaux de Spectra a produit le calendrier des travaux de juin 2012 pour la station CS-N4.
- L’activité d’entretien annuelle des vannes motorisées figurait sur le calendrier. Les travaux d’entretien périodique comprenaient l’essai des interrupteurs de fin de course des vannes motorisées, le réglage du couple des interrupteurs de fin de course du carter de commande et l’essai de l’actionneur électrique de marche-arrêt (actionneur) situé sur la partie supérieure de chaque vanne. Toutefois, comme les travaux de réparation de la vanne MOV-0409 ne pouvaient être effectués en raison de la non-disponibilité des pièces, l’avis de mauvais fonctionnement lié à cette émission fugitive de gaz ne figurait pas dans le calendrier des travaux.
1 juin 2012
- Début de l’arrêt programmé de la station CS-N4.
8 juin 2012
- Le SP–1 est arrivé à la station CS-N4 depuis Dawson Creek (Colombie-Britannique).
18 juin 2012
- Le chef d’équipe de Transmission North a analysé et validé le plan de démarrage après l’arrêt de la station CS-N4.
- Les opérateurs habituels de la station CS-N4 (les mentors du SP–4) ont quitté les lieux.
21 juin 2012
La station a été remise sous pression avec du gaz naturel jusqu’à la pression normale d’exploitation du gazoduc. La mise sous pression était une condition obligatoire pour réaliser les travaux d’entretien des vannes motorisées.
Activités d’exploitation le jour de l’événement
Dans le cadre de l’arrêt annuel aux fins d’entretien de la station CS-N4, on devait réaliser les travaux d’entretien préventifs des vannes et les essais de fonctionnement du compresseur le 23 juin. Les activités et les décisions d’exploitation du jour de l’événement sont présentées ci-dessous.
Activités d’exploitation le jour de l’événement (heure approximatives)Note de bas de page 2
7 h
- Le SP–2 est arrivé à la station CS-N4.
- Le SP–1 a affecté le SP–2 à une réparation ne concernant pas une vanne motorisée.
9 h
- Le SP–3 est arrivé à la station CS-N4. (Remarque : le SP–2 et le SP–3 s’étaient déjà rendus sur les lieux à différents moments au cours de l’arrêt, mais cette journée ne représentait que la deuxième journée qu’ils se trouvaient sur les lieux en même temps. Le SP–1 avait été réaffecté temporairement à la station CS-N4, et était un opérateur de station certifié. En outre, le SP–4 était affecté en permanence à la station CS-N4, mais était en formation pour devenir opérateur de station. Trois des 4 techniciens d’entretien étaient des opérateurs de station, et le quatrième était en voie d’obtenir sa certification à ce titre. Pour cette raison, le SP–1 et le SP–4 ont chacun cru que l’autre agissait comme opérateur de station pour la station CS-N4.)
9 h 15
- Le SP–1 a tenu une séance d’information avec le SP–2, le SP–3 et le SP–4 pour discuter des travaux à exécuter. Cette séance a porté sur l’ordre dans lequel il fallait effectuer les travaux d’entretien des vannes.
- On a établi que les activités suivantes devaient être effectuées à chaque vanne motorisée :
- Ouvrir le couvercle du carter des interrupteurs de fin de courseNote de bas de page 3, Note de bas de page 4 de l’actionneur de la vanne;
- Manipuler les boutons poussoirs d’ouverture et de fermeture pour en vérifier le fonctionnement;
- S’assurer que les vannes motorisées s’arrêtent aux points de consigne prédéterminés lorsqu’elles sont actionnées;
- Vérifier s’il y a présence d’humidité à l’intérieur du couvercle du carter;
- Écouter le moteur de vanne pour déceler tout bruit inhabituel;
- Vérifier le serrage des vis de tous les points de raccordement électriques.
9 h 30
- Le SP–1 a demandé au SP–2 et au SP–3 de retirer les boulons du couvercle du carter antidéflagrant de l’interrupteur de fin de course de chaque vanne motorisée. (Remarque : à titre de technicien principal en électricité et en instrumentation, le SP–1 souhaitait faire participer les autres techniciens en électricité et en instrumentation ainsi que le technicien mécanicien à un exercice de formation pratique sur les procédures d’entretien annuelles. En retirant les boulons du couvercle à l’avance, on facilitait ainsi l’exercice de formation pratique en réduisant le temps d’attente nécessaire au retrait des boulons.)
10 h
- Le SP–3 est entré dans l’enceinte de la vanne MOV-0409 par la porte piétonne sud non marquée (celle qui ne portait pas l’étiquette d’émission fugitive de gaz). La porte s’est refermée derrière le SP-3.
- Le SP–3 a remarqué la présence de gaz, mais a continué la tâche qui lui était assignée, c’est-à-dire de retirer les boulons du couvercle de l’actionneur de la vanne MOV-0409. (Remarque : le couvercle n’a pas été ouvert après le retrait des boulons.)
- Le SP–3 est ensuite passé dans l’enceinte de la vanne MOV-0417. Là encore, le SP-3 a remarqué la présence de gaz.
- Le SP–3 a retiré les boulons du couvercle de l’actionneur de la vanne MOV-0417.
- Le SP–3 est sorti de l’enceinte par la porte de la vanne MOV-0417. En sortant, le SP-3 a calé la porte pour qu’elle reste ouverte.
- Lorsque le SP–3 a rencontré le SP–2 à l’extérieur de l’enceinte, le SP–3 a passé un commentaire sur la présence de gaz. Le SP–2 a indiqué que l’émission fugitive de gaz était un problème connu, et que la vanne dans cette enceinte fuyait depuis un bon moment.
- Le SP–3 a ensuite remarqué l’étiquette d’émission fugitive de gaz fixée à la porte piétonne. Comme il s’agissait d’une situation connue, le SP–3 et le SP–2 ont tous deux tenu pour acquis qu’un plan avait été établi pour ventiler l’enceinte ultérieurement.
11 h
- Le SP–3 a commencé son inspection des vannes motorisées.
11 h 15
- Le SP–1 a reçu un appel téléphonique du centre de contrôle d’acheminement du gaz de Vancouver (Vancouver Gas Control Centre [VCGC]) de Spectra l’informant qu’il pourrait y avoir un problème à la station CS-N3 parce qu’elle s’était arrêtée.
11 h 20
- Le SP–1 a informé le SP–3 que sa station (CS-N3) s’était arrêtée.
- Le SP–4 et le SP–3 sont retournés dans la salle de commande locale pour retrouver le SP–1 afin d’aider à rectifier la situation à la station CS-N3.
- Après des tentatives infructueuses de régler le problème à distance, on a décidé que le SP–3 devait retourner à la station CS-N3.
11 h 30
- Le VGCC a été informé que la station CS-N4 n’était pas en mesure de fournir la puissance nécessaire aux transports de gaz prévus pour ce jour-là.
- L’équipe d’entretien a alors décidé que les travaux d’entretien à la station CS-N4 pouvaient être exécutés avant le redémarrage de la station CS-N3.
11 h 40
- Le SP–1 et le SP–4 ont réparé un assemblage de couple et un microrupteur défectueux de l’une des vannes sur lesquelles travaillaient le SP–3 et le SP–4. Ces travaux nécessitaient la coupure de l’alimentation électrique de la vanne, ce qui a été fait.
- Une fois la réparation terminée, le SP–4 a regagné la salle de commande locale pour rétablir le courant qui alimentait la vanne réparée.
11 h 50
- Le SP–1 s’est rendu à l’enceinte de la vanne MOV-0409 et y est entré par la porte piétonne sud. Le bruit du gaz qui s’échappait était audible dès l’entrée dans l’enceinte. (Remarque : il est arrivé à l’occasion au SP–1 de travailler à proximité de fuites de gaz; par conséquent, le bruit du gaz qui s’échappait ne constituait pas à lui seul un élément pouvant le dissuader d’entrer dans l’enceinte.)
- Le SP–1 s’est approché de la vanne, est monté sur le bloc de béton qui facilite l’accès à l’actionneur de la vanne et a commencé l’inspection.
- Le SP–1 a soulevé le couvercle de l’actionneur pour observer le mouvement des contacteurs de couple tout en appuyant sur les boutons situés sur la face extérieure du couvercle (photo 3).
12 h
- Après avoir remarqué la présence accrue de gaz, le SP–1 a refermé le couvercle de l’actionneur et a appuyé sur le bouton STOP (arrêt), puis sur le bouton CLOSE (fermer) (photo 4).
- Pendant ce temps, le SP–4 est revenu de la salle de commande locale et s’apprêtait à pénétrer dans l’enceinte par la porte sud, le SP–1 pouvant ainsi bien l’apercevoir. Après avoir remarqué une forte présence de gaz, le SP–4 a commencé à avertir le SP–1.
- À ce moment, le gaz s’est enflammé, et un incendie s’est ensuite déclaré. Sous le souffle puissant de la déflagration, le SP–4 a été projeté par la porte piétonne à une distance de 7,62 mètres (25 pieds) environ de l’enceinte.
- Le SP–4 et le SP–1 ont tous deux subi des brûlures au deuxième degré aux mains et au visage. Le SP–1 a subi des brûlures au troisième degré aux mains et aux bras ainsi que des brûlures au deuxième degré au dos. (Remarque : le SP–1 et le SP–4 portaient une combinaison de travail ignifuge en NOMEX IIIa.)
12 h 02
- Les travailleurs présents à proximité des lieux ont prodigué des premiers soins et ont essayé d’éteindre l’incendie au moyen d’extincteurs portatifs. La station CS-N4 ainsi que ses canalisations ont été isolées et purgées du gaz qu’elles contenaient.
Le 16 juillet 2012, à 10 h 45 environ, la station CS-N4 a été remise en service normal après que les travaux de réparation des joints de la tige de la vanne MOV-0409 ont été effectués et que les autres travaux de réparation connexes de l’enceinte ont été accomplis. Le lanterneau du toit de l’enceinte a été réinstallé. Il avait été retiré pour laisser le gaz s’échapper de l’enceinte.
Examen des lieux
Durant l’examen des lieux, on a pu établir les faits suivants :
- La structure de l’enceinte n’a subi que des dommages mineurs.
- Les parties supérieures de l’intérieur de l’enceinte ont été endommagées par l’incendie. La pellicule de polyéthylène recouvrant le lanterneau a été endommagée par l’incendie. Le revêtement d’aluminium du plafond a été endommagé par l’incendie.
- Le couvercle de l’actionneur de la vanne MOV-0409 présentait des marques de brûlure.
- L’évent à indicateur monté sur la vanne MOV-0409 avait été remplacé par un bouchon pour haute pression (figures 4 et 5). L’évent à indicateur est un dispositif de sécurité de la vanne conçu pour avertir les employés de l’accumulation de gaz qui fuit dans la cavité de la vanne et d’un danger inhérent.
- La vanne MOV-0409 était ouverte au tiers, ce qui avait permis au gaz sous pression du gazoduc de s’échapper. Les interrupteurs de fin de course étaient sous tension.
Évaluation des sources potentielles d’inflammation
Spectra a retenu les services de la firme GC Phillips Consulting Ltd (GC Phillips) pour effectuer une évaluation des conditions qui ont mené à l’incendie. Elle a analysé 4 sources possibles d’inflammation du gaz qui s’échappait à l’intérieur de l’enceinte :
- Une étincelle électrique ou l’inflammation spontanée du réchauffeur de l’actionneur présent dans le carter;
- Une étincelle électrique produite par l’activation du commutateur OPEN de la vanne;
- Une étincelle mécanique produite par la fermeture du couvercle de l’interrupteur de fin de course;
- Une étincelle électrique produite par l’interrupteur d’arrêt du moteur.
L’évaluation a permis d’établir ce qui suit :
- Il est fort probable que la source d’inflammation ait été une étincelle du commutateur d’arrêt du moteur qui s’est produite lorsque la commande CLOSE a été actionnée.
- Cette étincelle aurait été suffisante pour enflammer le mélange inflammable de gaz présent dans l’enceinte.
Exigences réglementaires pour la gestion de l’intégrité des pipelines
L’article 40 du Règlement de 1999 sur les pipelines terrestres de l’Office national de l’énergie (ONÉ), DORS/99-294 (OPR-99) stipule, en partie, que les compagnies pipelinières sous réglementation fédérale sont tenues d’établir un programme de gestion de l’intégrité des pipelines et de prendre des mesures pour corriger les défectuosités connues ou dépassant les critères établis par la norme CSA Z662–11.
L’article 3.2 de la norme CSA Z662–11 (programme de gestion de l’intégrité des réseaux de pipeline) de l’Association canadienne de normalisation stipule ce qui suit :
[Traduction]
Les compagnies exploitantes doivent concevoir et mettre en place un programme de gestion de l’intégrité qui comprend des procédures efficaces pour gérer l’intégrité du réseau de pipeline de façon à ce qu’il convienne au service continu, y compris des procédures pour surveiller les conditions qui peuvent causer des ruptures, pour prévenir ou atténuer de telles conditions et pour gérer l’intégrité des données. Ces programmes de gestion de l’intégrité doivent comprendre une description des engagements et des responsabilités de la compagnie exploitante, des objectifs quantifiables et des méthodes pour :
- évaluer les risques actuels et potentiels;
- établir des méthodes d’atténuation des risques et déterminer des mesures correctives;
- mettre en œuvre le programme de gestion de l’intégrité;
- assurer un suivi des résultats.
Système de gestion de l’intégrité des pipelines de Spectra
Le manuel du système de gestion de l’intégrité des pipelines de Spectra est le document régissant la gestion de l’intégrité de ses installations de pipelines. Le manuel aborde de façon systématique la manière de déceler et d’atténuer les risques potentiels pour le pipeline.
Le système de gestion de l’intégrité des pipelines sert également à l’élaboration du programme d’entretien annuel des pipelines de la compagnie. Ensemble, le système de gestion de l’intégrité des pipelines et le programme d’entretien des pipelines font appel à un processus fondé sur les risques pour assurer la sécurité et la fiabilité d’exploitation du réseau de pipeline.
Hiérarchie de la maîtrise des dangers
La hiérarchie de la maîtrise des dangers couramment employée pour les milieux de travail à haut risque se divise en 4 catégories générales :
- Élimination du danger;
- Autres méthodes d’inspection ou mesures d’ingénierie;
- Mesures administratives;
- Exigences en matière d’équipement de protection individuelle.
Comme le définit le Quality Systems Toolbox (figure 6), les différentes mesures sont classées par ordre d’efficacité et de durabilitéNote de bas de page 5 :
- La mesure de maîtrise la plus efficace et la plus durable est l’élimination du danger.
- Les moyens les moins efficaces sont les mesures administratives et l’utilisation d’équipement de protection individuelle. Ces moyens nécessitent la participation et la supervision accrues de l’employeur afin qu’il soit possible d’atteindre le degré d’atténuation des risques nécessaire.
[traduction]
Hierarchy of Control | Hiérarchie de la maîtrise |
---|---|
Apply the highest level of control commensurate with the risk level-lower value controls may be used in the interim until long-term controls are implemented. | Appliquer la mesure la plus élevée en fonction du risque – Des mesures inférieures peuvent être employées dans l’intervalle jusqu’à ce que les mesures à long terme soient mises en œuvre. |
ELIMINATION | ÉLIMINATION |
SUBSTITUTION | SUBSTITUTION |
ENGINEERING | INGÉNIERIE |
ADMINISTRATIVE | ADMINISTRATIVE |
BEHAVIOUR | COMPORTEMENT |
PPE | Équipement de protection individuelle |
Increasing effectiveness and sustainability | Efficacité et durabilité accrues |
Increasing participation and supervision needed | Nécessité d’une participation et d’une supervision accrues |
Gestion des fuites de gaz : élimination
Le document énonçant les pratiques exemplaires de l’Association canadienne des producteurs pétroliersNote de bas de page 6 concernant la gestion des émissions fugitives de gazNote de bas de page 7 stipule (en partie) ce qui suit :
[Traduction]
Autant que possible, les travaux de réparation et de remplacement doivent être effectués dans les 45 jours suivant le jour où la fuite a été détectée. Si un arrêt important s’avère nécessaire pour faciliter l’exécution de ces travaux ou si la rentabilité de la réparation des composants est faible, les travaux de réparation ou de remplacement peuvent être repoussés jusqu’à l’arrêt de production programmé suivant, pourvu que cela ne pose aucun risque pour la sécurité, la santé et l’environnement.
Le délai de réparation d’une fuite est fondé sur le coût et sur le risque en cause. Le coût est évalué d’après la quantité de produit perdu et les conséquences sur l’environnement.
Des fuites avaient été détectées sur la vanne MOV-0409 depuis 2006. Depuis, on a essayé à maintes reprises d’effectuer une réparation temporaire en injectant de la graisse haute pression. Ces efforts se sont révélés infructueux. En août 2011, l’émission fugitive de gaz provenant de la vanne MOV-0409 a été quantifiée au moyen d’un relevé des émissions fugitives. Ce relevé sert à déceler les émissions de gaz naturel et d’autres hydrocarbures émanant des conduites sous pression et de l’équipement connexe. Le relevé a permis d’évaluer la perte de produit par la vanne MOV-0409 à environ 245 tonnes de CO2 (équivalent CO2). La valeur de cette perte de produit est estimée à 48 000 $. Le seuil auquel une émission de gaz doit être déclarée au gouvernement de la province de la Colombie-Britannique est de 10 000Note de bas de page 8 tonnes. Une émission de gaz doit être déclarée à Environnement Canada lorsque la quantité de la perte atteint 50 000Note de bas de page 9 tonnes. L’émission fugitive de gaz de la station CS-N4 était donc bien en deçà des 2 seuils de déclaration.
Au moment de l’événement, 8 vannes sur les quelque 1000 vannes de Spectra présentaient des fuites de gaz.
Selon une pratique exemplaire provenant de l’extérieur de l’industrie canadienne des pipelines, la documentation et la classification des émissions d’hydrocarbures constituent un indicateur clé de rendement en matière de santé et de sécurité pour l’association Oil and Gas UKNote de bas de page 10. En Amérique du Nord, l’industrie pétrolière extracôtière développe actuellement un système de classification qui définit 3 catégories de risques pour la santé et la sécurité fondées sur l’étendue des dommages potentiels. Le critère de fuite de ces niveaux de risques n’a pas encore été fixé. En ce qui concerne les pipelines sous réglementation fédérale, l’Office national de l’énergie (ONÉ) de même que le Bureau de la sécurité des transports (BST) exigent que toutes les émissions de gaz naturel soient déclarées.
Manuel de transmission des avis de Spectra : mesures administratives
En août 2007, une amélioration a été apportée au système d’avis d’entretien de Spectra pour permettre de saisir les relevés d’émissions fugitives et documenter les réparations consécutives effectuées aux stations de compression. Ce système d’avis attribue à toutes les défaillances une priorité qui permet de déterminer l’urgence de l’intervention requise. Spectra distingue les catégories de priorités de la façon suivante :
[Traduction]
Urgence (Emergency) : comprend les travaux qui doivent être effectués obligatoirement en raison du risque pour la sécurité du personnel, des conséquences environnementales immédiates, d’un bris ayant des répercussions sur la production ou des dommages importants que pourrait subir l’équipement. L’intervention doit être immédiate et les heures supplémentaires sont justifiées. Le délai d’exécution de ce niveau de priorité est fixé à 2 jours.
Urgent : comprend les travaux qui doivent être effectués promptement pour prévenir la détérioration d’une pièce d’équipement ou du système d’exploitation. La situation ne présente aucune menace immédiate, mais des mesures doivent être prises le plus tôt possible. Ces travaux ne sont pas prioritaires par rapport aux travaux au calendrier. La main-d’œuvre n’est pas réaffectée, et les heures supplémentaires ne sont pas justifiées. Ces travaux sont placés en priorité dans la période de planification suivante. Le délai d’exécution de ce niveau de priorité est fixé à 7 jours.
Prochain entretien préventif (Next PM) : comprend l’entretien préventif ou les travaux qui seront effectués au prochain entretien préventif prévu. Le délai d’exécution de ce niveau de priorité est fixé à 45 jours.
Routine : comprend les travaux rigoureusement planifiés et programmés pour profiter de la capacité disponible. Il s’agit notamment des réparations de routine, des remplacements de pièces, des améliorations et des travaux sur des projets qui ne sont pas déterminants pour l’exploitation de l’installation. Le délai d’exécution de ce niveau de priorité est fixé à 45 jours.
Sécurité (Safety) et inspection : ces 2 niveaux de priorité ne sont pas utilisés dans les avis.
Le niveau de priorité attribué par Spectra à l’avis de mauvais fonctionnement de la vanne MOV-0409 était celui de « sécurité ». Aucun délai d’exécution n’est associé à ce niveau de priorité, et ce niveau n’est pas employé dans les avis. Dans le présent cas, la réparation nécessitait l’arrêt de la station. Comme aucun délai d’exécution n’est associé à ce niveau de priorité, on l’utilisait pour les réparations dont le délai d’exécution était supérieur à 45 jours.
Gestion de la qualité de l’air à l’intérieur des enceintes : mesures d’ingénierie
Au moment de la construction de l’enceinte, l’accès aux vannes MOV-0417 et MOV-0409 se faisait par une seule porte d’entrée donnant sur la vanne MOV-0417. Dans l’enceinte de la vanne MOV-0409, on avait installé une prise d’air près du sol, et un évent d’évacuation à environ 1 m (3 pieds) sous le toit du bâtiment (figure 7). En 2006, on a équipé la porte piétonne de l’enceinte de la vanne MOV-0417 d’une prise d’essai pour vérifier la qualité de l’air et posé les panneaux d’affichage correspondants (photo 5).
En août 2001, soit 2 semaines après le relevé d’émission fugitive de gaz effectué sur la vanne MOV-0409, une deuxième porte a été installée sur l’enceinte dans la portion abritant la vanne MOV-0409. Cette deuxième porte visait à permettre au personnel d’évacuer rapidement l’enceinte s’il venait à être incommodé dans la section de la vanne MOV-0409 de l’enceinte. Ladite porte n’a pas été équipée d’une prise d’essai pour vérifier la qualité de l’air, qui est réservée habituellement aux entrées piétonnes des enceintes.
Le fait de faciliter l’évacuation de l’enceinte de la vanne MOV-0409 garantissait que la structure n’était pas désignée comme espace clos, conformément à la réglementation fédérale et provinciale en matière de santé et sécurité au travail. Spectra classe les enceintes des vannes MOV comme des espaces fermés plutôt que comme des espaces clos. Dans son manuel de formation des opérateursNote de bas de page 11, Spectra indique les précautions à prendre avant de pénétrer dans l’enceinte d’une vanne :
- L’employé doit vérifier la présence d’une accumulation de gaz au moyen d’un détecteur de gaz portatif qu’il passe à travers la prise extérieure de contrôle de la qualité de l’air située sur la porte piétonne.
- On demande à l’employé de ne pas entrer si l’atmosphère dépasse les limites recommandées dans les pratiques de travail sécuritaires.
- Une fois dans l’espace fermé, l’employé doit tenir la porte piétonne ouverte tant qu’il y a quelqu’un dans l’enceinte. Dans le cas présent, un madrier était disponible pour caler la porte en position ouverte. (Remarque : le jour de l’événement, il n’y avait aucune surveillance continue de la qualité de l’air ni aucune surveillance de la ventilation.)
- Si l’enceinte doit être occupée sur une période prolongée, l’employé doit consulter les indications concernant les espaces clos dans les pratiques de travail sécuritaires. (Remarque : il n’y a aucune indication de la période de temps qui détermine le reclassement d’un espace fermé en espace clos.)
Un sondage restreint mené auprès des employés sur les mesures de la qualité de l’air dans les enceintes a permis d’établir les constatations suivantes :
- Les employés d’entretien de Spectra ont décrit la différence entre un espace fermé et un espace clos en termes d’entrée et de sortie.
- Les enceintes des vannes motorisées n’étaient pas perçues comme des espaces clos.
- Les employés reconnaissaient le fait qu’un espace clos aurait des exigences d’entrée plus rigoureuses et qu’il nécessiterait la présence d’au moins 3 personnes en tout temps.
- Les employés ne connaissaient pas la capacité de ventilation des enceintes.
- Les employés ont déclaré qu’il était pratique courante de laisser la porte piétonne de l’enceinte ouverte pendant un moment avant d’entrer pour exécuter les travaux d’entretien préventif.
Planification du travail : mesures administratives
Spectra a fondé ses cycles d’entretien des composants de transport du gaz sur les pratiques exemplaires de l’industrie et sur les recommandations du fabricant. La coordination du calendrier des travaux d’entretien et de réparation est assurée par son groupe de gestion des actifs, qui utilise à cette fin un logiciel de production de plans de travail. Le processus de planification des travaux est réalisé une fois par mois de la manière suivante :
- Chaque mois, on utilise les cycles d’entretien pour créer des plans de travail automatisés pour les travaux d’électricité et de mécanique sur les composants de transport du gaz.
- Le personnel sur le terrain peut également générer des avis de mauvais fonctionnement qui sont intégrés aux plans mensuels automatisés.
- Un agent d’ordonnancement du service de planification passe en revue les plans automatisés du mois à venir pour s’assurer que l’on dispose d’un nombre suffisant d’employés et d’entrepreneurs ainsi que des matériaux pour exécuter les travaux.
- Certains travaux d’entretien nécessitent l’arrêt de la station de compression. Dans ce cas, les travaux sont reportés au moment où on procédera à l’arrêt de la station de compression (p. ex., durant l’arrêt annuel aux fins d’entretien). Comme l’arrêt d’une station exige la purge du système de tout gaz naturel, et que toute émission entraîne des répercussions sur l’environnement ainsi que sur la prestation des services, les réparations non critiques sont généralement prévues durant les arrêts annuels. Cette façon de procéder est pratique courante pour l’industrie du pétrole et du gazNote de bas de page 12.
- Le plan de travail pour un mois donné est imprimé. Le personnel sur les lieux le passe ensuite en revue.
- Comme la liste des travaux est triée par corps de métier (p. ex., technicien ou entrepreneur), l’ordonnancement des travaux est laissé à la discrétion du personnel sur les lieux. Le plan de travail est le document central qui détermine les tâches à accomplir durant le quart de travail.
Le plan de travail de juin 2012 contenait 39 ordres de travail d’entretien préventif ou anticipé pour la station CS-N4. L’avis de mauvais fonctionnement de la vanne MOV-0409 ne figurait pas dans le plan de juin 2012 en raison du manque de pièces. Les travailleurs sur le terrain ont souligné qu’il leur semblait que des avis de mauvais fonctionnement disparaissaient souvent du plan de travail.
En outre, le système de planification du travail ne considère pas qu’une tâche est accomplie tant qu’une heure de fin de tâche n’est pas entrée. Il a été noté qu’on n’entrait pas systématiquement les heures de fin de tâche. En conséquence, pour la planification de l’entretien et pour l’agent d’ordonnancement, la tâche apparaît comme incomplète et se trouve sur la liste de travaux en retard aux fins de nettoyage. Environ 65 % (estimation) des travaux en retard était attribuable à des champs de données non remplis dans le système de planification du travail.
Permis de travail – Mesures administratives
La section du manuel des pratiques de travail sécuritaires de Spectra portant sur la pratique à adopter en matière de permis de travail définit la gamme de permis et leurs exigences. Dans cette pratique, on indique que l’opérateur de station doit délivrer des permis de travail aux employés et aux entrepreneurs s’il détermine qu’il y aura des répercussions potentielles sur la sécurité durant l’exécution des travaux. Le permis consiste en un formulaire unique comportant des cases à cocher et est configurable en fonction de tout type de travaux, notamment le travail à chaud, le travail à froid et l’entrée dans un espace clos. Selon le manuel des pratiques de travail sécuritaires de Spectra, la délivrance d’un permis de travail à chaud est conditionnelle à la conduite d’essais de mesure des gaz. La section sur la pratique en matière de permis de travail sécuritaire définit en quoi consiste le permis d’entrée dans un espace clos, mais ne cite ni ne donne aucune indication sur le permis d’entrée dans un espace fermé. Sur le permis lui-même, l’émetteur peut choisir le type et la fréquence des mesures de l’atmosphère. Toutefois, aucun espace n’est prévu sur le permis pour indiquer si la mesure de l’atmosphère a été effectuée avant l’entrée dans l’espace en question.
Parmi les pratiques de Spectra concernant les permis de travail, on compte :
- Les permis de travail doivent être délivrés avant le début des travaux.
- Un opérateur de station peut se délivrer un permis si cela n’entraîne aucune répercussion sur l’exploitation de la station de compression. L’autodélivrance de permis est pratique courante dans l’industrie pour les installations qui sont souvent exploitées par une seule personne.
- L’opérateur de station n’est pas tenu de délivrer un permis pour les tâches routinières d’exploitation (p. ex., les inspections, les travaux autres que l’entretien et les listes de vérification quotidiennes, hebdomadaires ou mensuelles).
- Une fois délivré, un permis est conservé sur place durant 2 ans.
On utilise les permis de travail pour le travail à chaud ainsi que pour le travail à froid. Certains employés sur le site ne savaient pas si les travaux d’inspection du programme d’entretien des pipelines prévus ce jour-là nécessitaient un permis de travail à chaud ou un permis de travail à froid. Toutefois, étant donné que les travaux au programme ne comprenaient pas de soudage, de coupage, de brûlage, de meulage ou d’utilisation d’outils sans sécurité intrinsèque, on a suivi le processus de travail à froid.
À la station CS-N4, la pratique sur le terrain relative à l’autodélivrance de permis avait évolué au point où il n’était pas rare de consigner les détails du permis une fois les travaux effectués.
Au Canada, l’industrie des pipelines a élaboré un certain nombre de stratégies pour aborder la question de l’autodélivrance de permis. Par exemple, la filiale canadienne d’une grande compagnie de pétrole et de gazNote de bas de page 13 emploie un mécanisme de rétroaction dans le cadre duquel un employé communique avec une autorité émettrice avant et après l’exécution des travaux. Une fois le travail terminé, le travailleur signe le permis et communique avec l’autorité émettrice pour l’informer de l’avancement des travaux et pour signaler que le travailleur quitte les lieux. Une autre stratégie employée consiste à intégrer la gestion des permis de travail dans le logiciel de planification de l’entretien du produitNote de bas de page 14.
Détecteurs de gaz individuels : équipement de protection individuelle
En mars 2011, Spectra a commencé à former ses employés sur l’utilisation de détecteurs de gaz individuels portatifs à main pour les travaux exécutés aux stations de compression. Spectra a envoyé un certain nombre d’employés chez le fabricant pour qu’ils y reçoivent une formation sur l’utilisation et l’entretien des détecteurs de gaz individuels. On comptait sur le fait que les employés ayant reçu la formation partagent leur savoir avec leurs collègues selon la formule « formation des formateurs ». Au moment de l’événement, la transition de l’utilisation de détecteurs de gaz individuels portatifs à l’utilisation de détecteurs de gaz prêt-à-porter était encore en cours.
Prise de décisions et adaptation aux risques
La prise de décisions dans les contextes à haut risque comme celui de la station de compression CS-N4 de Spectra repose sur l’expérienceNote de bas de page 15, laquelle à son tour, est guidée et renforcée par les conséquences des comportements en matière de gestion des risquesNote de bas de page 16. Plus les avantages des comportements risqués et les coûts des comportements sécuritaires augmentent par rapport aux coûts des comportements risqués et aux avantages des comportements sécuritaires, plus les employés sont prêts à accepter davantage de risques. Le seuil qui définit la gestion de risques acceptables dérive alors lentement vers ce qui est perçu comme une plus grande efficacité, mais glisse souvent, sans qu’on le sache, dans une zone encore plus risquée.
Les pressions sociales de normalisation ont tendance à répandre des comportements parmi les membres d’un groupe. En l’absence de dangers identifiables, d’accidents ou de quasi-accidents signalés, il est possible que les organisations n’admettent pas le fait que les adaptations normales ont pour effet de repousser le seuil de risque dans une zone où la probabilité d’une issue néfaste est accrue. C’est ce qu’on appelle l’adaptation aux risques.
En outre, dans son modèle intitulé « expectation primed decision making », Klein souligne que plus une personne est compétente, plus grande est la probabilité que ses attentes influeront sur les décisions qu’elle prendra. L’inconvénient de ce comportement tient au fait que les attentes peuvent masquer des indices subtils qui indiquent que la situation ne correspond pas aux attentes et qu’elle est susceptible d’être plus risquée que prévu. Il s’ensuit que les situations sembleront normales ou familières, à moins que l’ampleur des éléments « qui sortent de l’ordinaire » soit suffisamment importante pour attirer l’attention et susciter une analyse par la suite.
Il faut donc s’employer rigoureusement à ancrer des comportements dans lesquels la gestion des risques sur le terrain est identique à la description qui en est faite dans les documents et les manuels des politiques. Parmi les stratégies habituelles permettant de garantir que les comportements soient conformes aux attentes en matière de gestion des risques, citons : la réévaluation des risques et les stratégies d’atténuation des risques en fonction de l’évolution du contexte; l’élaboration d’une documentation des procédures d’exploitation normalisées spécifique et adaptée au contexte pour les opérations où la sécurité est primordiale; et le contrôle des pratiques d’exploitation visant à garantir qu’elles concordent avec les procédures. Cette concordance entre le comportement et les politiques en place est une exigence essentielle qui caractérise les systèmes de gestion des risques en boucle ferméeNote de bas de page 17. En l’absence de conséquences fâcheuses, les employés de même que la direction finissent par percevoir la concrétisation de cet effort en termes de coûtsNote de bas de page 18.
Analyse
L'accident
Au moment de l’événement, les employés de Spectra effectuaient des travaux d’entretien préventif et des inspections sur la vanne MOV-0409 dans le cadre d’un programme global annuel d’inspection des vannes motorisées de la station CS-N4. La vanne MOV-0409 était abritée dans une enceinte de protection contre les intempéries. Les travaux d’entretien consistaient à faire l’essai des interrupteurs de fin de course de la vanne et à effectuer les réglages de couple dans le carter des actionneurs électriques des vannes. Avant de pénétrer dans l’enceinte, les employés de Spectra n’ont pas effectué d’essai pour révéler la présence de gaz, et ces employés ne portaient pas de détecteur de gaz individuel.
Une fuite dans la vanne MOV-0409 a été signalée dès 2006. Comme la fuite de gaz était continue depuis au moins le mois d’août 2011, il est probable que le mélange inflammable de gaz était présent dans la partie supérieure de l’enceinte avant le début des travaux. En outre, l’évent à indicateur de la vanne MOV-0409 avait été remplacé par un bouchon pour haute pression. Avec ce bouchon en place, la seule voie que pouvait emprunter le gaz fuyant par la tige de la vanne pour s’échapper du corps de la vanne était par le sommet de l’actionneur de vanne. Le fait de remplacer l’évent à indicateur par un bouchon pour haute pression a supprimé la fonction de sécurité de la vanne conçue pour avertir les employés de la présence potentiellement dangereuse de gaz naturel. L’accident s’est produit lorsqu’on a actionné la vanne MOV-0409 pour la faire passer de la position de fermeture totale à la position d’ouverture totale, ce qui a eu pour effet d’accroître le débit de gaz naturel passant par la tige de la vanne. Le gaz du gazoduc s’est échappé dans l’enceinte par la tige de la vanne. Durant la tentative de fermeture de la vanne, il est probable qu’une étincelle ait été produite par l’interrupteur d’arrêt du moteur lorsque le bouton de fermeture CLOSE a été actionné. Cette étincelle a été suffisante pour provoquer l’inflammation du mélange inflammable de gaz présent dans l’enceinte et causer l’incendie, l’explosion et les blessures subséquentes à 2 employés d’entretien.
Gestion des fuites de gaz
À compter du mois d’août 2011, lorsque le relevé des émissions fugitives a révélé la fuite de la vanne MOV-0409, une étiquette d’émission fugitive de gaz a été fixée sur la face extérieure de la porte piétonne de l’enceinte de la vanne MOV-0417 pour signaler le danger. Toutefois, lorsqu’on a installé une deuxième porte piétonne d’accès à l’enceinte du côté de la vanne MOV-0409, on n’y a pas fixé une autre étiquette d’émission fugitive de gaz. Lorsque les étiquettes d’émission fugitive de gaz ne sont pas installées à toutes les entrées des enceintes dans lesquelles une vanne présente une fuite, les employés d’entretien peuvent sous-estimer les dangers potentiels présents, ce qui augmente les risques de blessures et de décès auxquels ils sont soumis.
Les critères d’analyse des coûts-avantages et des répercussions sur l’environnement constituent des facteurs déclencheurs bien connus pour motiver la réparation des fuites de gaz. Toutefois, on peut attendre 45 jours, voire plus, pour corriger une émission fugitive de gaz, selon qu’il faut arrêter l’installation ou non pour effectuer la réparation. Dans le cas à l’étude, la fuite était connue, documentée et suivie depuis au moins 10 mois. Comme les pièces de rechange nécessaires à la réparation n’étaient pas disponibles, la réparation n’a pas été programmée pour l’arrêt de juin 2012 de la station. Spectra a produit un manuel de formation des opérateurs qui décrit la marche à suivre pour pénétrer dans les enceintes des vannes. On y précise la nécessité d’effectuer un essai de l’air pour relever la présence de gaz ainsi que les exigences relatives à l’équipement de protection individuelle. Dans la hiérarchie généralement reconnue de la gestion des risques, cette fuite était visée par des mesures administratives au niveau du site. Le fait de compter sur des mesures administratives et sur le port d’équipement de protection individuelle comme principal moyen d’atténuation des risques est en soit une solution moins efficace que la correction du problème.
Gestion de la qualité de l’air à l’intérieur des enceintes
Dans l’enceinte de la vanne MOV-0409, des évents d’aération ont été installés, un près du sol et un autre à environ 1 m (3 pieds) sous le toit du bâtiment. L’emplacement de l’évent supérieur n’était pas optimal, car le gaz pouvait s’accumuler près du plafond. À l’origine, l’enceinte a été construite avec une seule porte d’entrée, soit la porte ouest de l’enceinte abritant la vanne MOV-0417. En 2006, une prise d’essai pour vérifier la qualité de l’air a été installée sur cette porte. En août 2011, lorsque des émissions fugitives de gaz provenant de la vanne MOV-0409 ont été détectées, une deuxième porte de sortie a été ajoutée. Spectra a essentiellement mis l’accent sur l’ajout d’une porte de sortie; elle a donc installé la deuxième porte sans prise d’essai pour vérifier la qualité de l’air, cette prise d’essai étant une caractéristique courante sur les autres enceintes. En l’absence de normes de l’industrie ou de lignes directrices recommandées pour la conception, la construction et l’installation d’enceintes, il se peut que la conception de certaines enceintes ne soit pas optimale pour assurer la qualité de l’air, ce qui augmente les risques de blessures et de décès pour les travailleurs.
Planification du travail
Spectra emploie un logiciel de planification de travail pour programmer ses travaux d’entretien et de réparation. On a noté un certain nombre de lacunes quant aux données saisies et des incohérences dans l’utilisation du système de planification de travail :
- Le plan de travail mensuel indique les travaux à exécuter au cours du mois. Dans le cas à l’étude, le plan de travail de juin 2012 comprenait l’entretien préventif annuel d’une vanne qui présentait une fuite depuis au moins 10 mois. Durant le processus de planification du travail, on a établi que les pièces nécessaires à la réparation n’étaient pas disponibles. En conséquence, cette activité de réparation a été programmée à une date ultérieure, et elle a été retirée du plan de travail. Les travailleurs sur le terrain ont souligné qu’il leur semblait que des avis de mauvais fonctionnement disparaissaient souvent du plan de travail.
- Le danger préexistant (l’émission fugitive de gaz) que présentait la vanne MOV-0409 ne figurait pas sur plan de travail mensuel, ce qui éliminait ainsi le lien entre les données d’état de la réparation et le calendrier d’entretien courant. Aucune mention n’a alors été faite dans plan d’entretien sur la manière d’exécuter les travaux dans le contexte d’une vanne qui fuyait. La seule stratégie d’atténuation du risque ne reposait donc que sur la mémoire du chef d’équipe et du personnel d’entretien, lesquels devaient se rappeler l’état de réparation de l’équipement de leur installation et devaient discuter des conséquences au cours de la séance d’information précédant les travaux.
- On a estimé que 65 % des travaux en retard chaque mois étaient attribuables à des champs de données non remplis sur le terrain, en raison de la confusion qui régnait quant à la manière et au moment où les heures de travail par défaut du système devaient être mises à jour.
- Le niveau de priorité attribué à l’avis de mauvais fonctionnement de la vanne MOV-0409 était celui de « sécurité » (safety). Comme aucun délai d’exécution n’est associé à ce niveau de priorité, on s’en servait généralement lorsque le délai de réparation dépassait 45 jours. Les techniciens d’entretien ont adapté un niveau de priorité non recommandé pour saisir les données des réparations pour lesquelles on ne dispose pas de date précise d’exécution.
L’outil de planification du travail de Spectra ne concordait donc pas avec les attentes d’exploitation des techniciens sur le terrain.
Autodélivrance de permis
L’autodélivrance de permis par les opérateurs de station constitue une nécessité dans les installations où il n’y a normalement qu’un seul employé. Cette mesure garantit que les employés autonomes peuvent continuer leur travail tout en respectant le processus d’évaluation des dangers et d’atténuation des risques. Cependant, lorsque l’émetteur est en même temps le récepteur, l’activité de délivrance de permis devient une réflexion; aucun dialogue ne s’établit entre les 2 personnes. Au fil du temps, le processus d’autodélivrance de permis peut devenir répétitif et perdre de sa pertinence. Sans renforcement approprié, il peut être considéré comme de la paperasserie qui nuit à l’efficacité du flux de travail et qui peut être reportée.
À la station CS-N4, les employés de Spectra avaient adapté les pratiques de délivrance de permis sur le terrain au point où il n’était pas rare que les détails du permis soient consignés une fois les travaux exécutés. Lorsqu’ils ne remplissent pas les permis de travail avant le début des travaux, les employés risquent de ne pas tenir compte de tous les dangers potentiels que présente le lieu de travail, ce qui accroît les risques d’accident de travail.
Chez Spectra, il n’existe aucun lien entre la production du calendrier de travail mensuel et la délivrance des permis de travail sécuritaire connexes, qu’ils soient autodélivrés ou délivrés par l’opérateur de station. Les permis de travail sécuritaire sont produits sur place et sont conservés dans les stations de compression. Cette pratique sert à isoler les pratiques d’atténuation des risques sur le terrain des planificateurs de l’administration, des agents d’ordonnancement et du chef d’équipe. Dans ces conditions, il est très difficile pour la direction éloignée des stations de connaître l’évolution de l’autodélivrance des permis. Comme un opérateur de la station CS-N4 qui connaissait bien l’installation ne suivait pas un processus rigoureux de délivrance de permis, les cadres supérieurs ont manqué une occasion de renforcer l’interprétation appropriée des politiques d’entreprise et des documents connexes dans la pratique sur le terrain.
Adaptation aux risques dans la prise de décision des employés d’entretien
Au moment de l’événement, l’équipe d’entretien avait adapté considérablement sa perception des risques. Les employés étaient si habitués à cette fuite de longue date qu’ils en étaient venus à considérer qu’il n’était pas plus risqué d’entrer dans l’enceinte de la vanne MOV-0409 que d’entrer dans toute autre enceinte de vanne motorisée. Certains facteurs ont renforcé cette adaptation aux risques, notamment :
- L’absence de limites clairement définies concernant la capacité des configurations d’aération passive dans les enceintes de vanne motorisée, ce qui a donné lieu à un manque d’uniformité quant à la détermination des conditions dans lesquelles la porte d’entrée devait demeurer ouverte.
- L’absence d’étiquette d’émission fugitive de gaz sur toutes les portes d’entrée.
- L’absence d’information sur l’état de réparation de la vanne dans les feuilles de travail d’entretien.
- Le processus d’autodélivrance de permis a été adapté progressivement au point où les permis étaient remplis après l’exécution des travaux. L’absence de mécanisme établissant un lien serré entre, d’une part, la délivrance de permis et l’évaluation des risques associés et, d’autre part, les tâches à accomplir avant le début des travaux, a permis l’évolution de ce comportement adaptatif.
- L’absence de procédures d’exploitation normalisées spécifiques évaluées en matière de risques a eu pour conséquence que les techniciens d’entretien ont élaboré des procédures à partir de différents documents de méthodes et guides du fabricant (p. ex., remplacement de l’évent indicateur par un bouchon pour haute pression et enlèvement des boulons du couvercle du carter des interrupteurs de fin de course pendant que l’équipement était sous tension).
- L’expérience antérieure de travail dans des milieux où une fuite de gaz était présente a engendré une sous-estimation des risques associés au bruit produit par l’échappement de gaz.
Lorsqu’une adaptation au risque s’installe et que la perception du risque diminue, on ne remarque pas les indices d’une situation potentiellement dangereuse (p. ex., la présence d’une fuite de gaz), ce qui augmente le potentiel d’accidents de travail.
Pratiques de gestion de l’installation
Chez Spectra, la gestion des procédures d’exploitation sur le terrain concernant notamment la délivrance de permis, l’entrée dans les espaces fermés, l’entretien des vannes et l’utilisation d’équipement de protection individuelle se faisait principalement en boucle ouverte. Cela signifie qu’on exigeait des employés qu’ils lisent les politiques et les méthodes documentées et qu’ils répondent de façon satisfaisante à des questionnaires à choix multiples visant à renforcer les notions acquises. On tenait pour acquis que les pratiques d’exploitation avaient été élaborées en conséquence de façon appropriée. On ne surveillait ni ne documentait pas de façon courante les nouveaux dangers au niveau local (p. ex., la vanne qui fuyait), et on ne disposait d’aucune procédure d’exploitation normalisée déjà évaluée en matière de risques qui aurait pu servir de référence pour évaluer les pratiques sur le terrain. En comparaison, dans un système de gestion en boucle fermée, on dispose de mécanismes de rétroaction continue pour s’assurer que le système fonctionne dans les limites prévues. En l’absence d’une surveillance et d’une évaluation des risques continues, les pratiques de gestion de site en boucle ouverte sont susceptibles de renforcer l’adaptation aux risques des employés, ce qui peut donner lieu à des pratiques d’exploitation qui ne concordent pas avec la réalité des risques.
Faits établis
Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs
- L’accident s’est produit lorsque du gaz naturel qui s’échappait de la tige d’une vanne a trouvé une source d’inflammation et s’est enflammé.
- La tige de la vanne MOV-0409 fuyait à cause de la défaillance de 2 joints toriques d’étanchéité.
- L’inflammation du gaz naturel s’est probablement produite lorsque le bouton de fermeture de la vanne motorisée a été actionné pour interrompre l’augmentation du débit de gaz. Cette action a produit une étincelle de contact dans l’actionneur électrique alors que le carter était ouvert, ce qui a enflammé le gaz.
- La présence de gaz n’avait pas été vérifiée dans l’enceinte avant le début des travaux, et les employés de Spectra ne portaient pas de détecteurs de gaz individuels.
- Le danger préexistant (c.-à-d. l’émission fugitive de gaz) que posait la vanne MOV-0409 ne figurait pas dans le plan de travail, de sorte que le plan d’entretien ne donnait aucune indication sur la manière d’accomplir les travaux en présence d’une vanne qui fuit.
Faits établis quant aux risques
- Lorsque les étiquettes d’émission fugitive de gaz ne sont pas posées à toutes les entrées des enceintes dans lesquelles une vanne présente une fuite, les employés d’entretien peuvent sous-estimer les dangers potentiels présents, ce qui augmente les risques de blessures et de décès auxquels ils sont soumis.
- En l’absence de normes de l’industrie ou de lignes directrices recommandées pour la conception, la construction et l’installation d’enceintes, la conception de certaines enceintes peut ne pas être optimale pour assurer la qualité de l’air, ce qui augmente les risques de blessures et de décès des travailleurs.
- Lorsqu’ils ne remplissent pas les permis de travail avant le début des travaux, les employés risquent de ne pas tenir compte de tous les dangers potentiels que présente le lieu de travail, ce qui accroît les risques d’accident de travail.
- Lorsqu’une adaptation au risque s’installe et que la perception du risque diminue, on ne remarque pas les indices d’une situation potentiellement dangereuse (p. ex., la présence d’une fuite de gaz), ce qui augmente les possibilités d’accidents de travail.
- En l’absence d’une surveillance et d’une évaluation des risques continues, les pratiques de gestion de site en boucle ouverte sont susceptibles de renforcer l’adaptation aux risques des employés, ce qui peut donner lieu à des pratiques d’exploitation qui ne concordent pas avec la réalité des risques.
Autres faits établis
- Le fait de compter sur des mesures administratives et sur le port d’équipement de protection individuelle comme principal moyen d’atténuation des risques est en soit une solution moins efficace que la correction du problème.
- Le fait de remplacer l’évent à indicateur par un bouchon pour haute pression a supprimé la fonction de sécurité de la vanne, qui devait avertir les employés de la présence de gaz.
- L’outil de planification du travail de Spectra ne concordait pas avec les attentes d’exploitation des techniciens sur le terrain.
- Comme un opérateur de la station CS-N4 qui connaissait bien l’installation ne suivait pas un processus rigoureux de délivrance de permis, les cadres supérieurs ont manqué une occasion de renforcer l’interprétation appropriée des politiques d’entreprise et des documents connexes dans la pratique sur le terrain.
Mesures de sécurité
Mesures de sécurité prises
Le 10 juillet 2012, le Bureau de la sécurité des transports (BST) a fait parvenir à l’Office national de l’énergie (ONÉ) une lettre d’information sur la sécurité l’avisant de cet événement et du fait que les employés de Spectra ne portaient pas de détecteur de gaz individuel.
En réponse à cet événement, l’ONÉ a pris les mesures de sécurité suivantes :
- Un agent de santé et sécurité de l’ONÉ a émis une promesse de conformité volontaire conformément au Code canadien du travail demandant à Westcoast de soumettre son programme de prévention des dangers ainsi que les évaluations des dangers menées pour les enceintes de vannes, l’entretien préventif et les réparations des vannes et le travail en présence de gaz naturel. Cette promesse de conformité volontaire enjoignait également à Westcoast de soumettre un plan de mesures correctives portant sur les recommandations contenues dans le rapport de la firme GC Phillips. L’ONÉ prévoit mener des activités de suivi de la conformité, notamment des inspections, pour évaluer la mise en œuvre des engagements qu’a pris Westcoast à la suite de la promesse de conformité volontaire.
Westcoast a pris les mesures de sécurité suivantes à la suite de l’événement :
- Un relevé des fuites de gaz naturel a été effectué dans toutes les installations de la division de transport, y compris dans les stations de compression et dans les stations de comptage. Un processus de déclaration des fuites a été mis en œuvre pour s’assurer que toutes les fuites, y compris les émissions fugitives, qui ne sont pas réparées immédiatement sont entrées dans le système d’apprentissage et de prévention sur les incidents de Westcoast et qu’un avis d’entretien est entré dans le système général d’administration de Westcoast qui gère la planification de l’entretien des installations. Les nouveaux avis d’entretien sont examinés de façon hebdomadaire, et les avis de fuites sont codés pour permettre le suivi des réparations.
- Tous les emplacements présentant des émissions fugitives ont été étiquetés, et les zones concernées ont été délimitées par un ruban. Si la fuite présentait une menace pour les employés, le public ou l’environnement, l’équipement a été retiré du circuit et réparé, ou des mesures ont été prises pour atténuer la menace. Toutes les émissions fugitives qui n’ont pas pu faire l’objet d’une réparation immédiate ont été mises au programme des réparations dans le cadre du prochain arrêt de l’équipement.
- Un processus de relevé des émissions fugitives a été élaboré et sera mené avant un arrêt important de l’installation.
- Toutes les enceintes de vannes du réseau de transport ont fait l’objet d’une vérification et les lacunes concernant les prises d’essai de l’atmosphère interne et l’affichage connexe ont été corrigées.
- On a amélioré la norme de conception des enceintes de vannes pour qu’elle traite de la conception, de la construction et des matériaux. Toutes les enceintes de vannes seront évaluées en fonction de cette norme et seront soit mises à niveau conformément à la norme, soit retirées si elles ne sont plus nécessaires.
- Tous les seuils permis pour certains travaux dans des atmosphères dangereuses ont été réduits à 0 % de la limite d’exploitation minimale pour les installations de transport.
- En fonction de cet événement ainsi que des pratiques actuelles de l’industrie, le permis de travail sécuritaire pour les installations de transport a été modifié de manière à mieux prévoir les dangers potentiels en milieu de travail.
- La méthode d’entrée dans les enceintes de vannes a été modifiée.
- Un projet de mesures correctives en cas d’incident majeur a été mis sur pied dans toutes les exploitations de Westcoast dans l’Ouest canadien afin d’analyser et d’améliorer, le cas échéant, les mesures et les normes de sécurité de Westcoast, y compris les permis de travail.
- Le programme de prévention des dangers en milieu de travail des exploitations de Westcoast dans l’Ouest canadien a été révisé. Conformément à ce programme, les évaluations des dangers en milieu de travail de toutes les installations de transport seront terminées d’ici le 31 décembre 2013.
- Les évaluations de la sécurité sur le terrain sont désormais obligatoires et sont intégrées dans un formulaire de planification du travail sécuritaire.
- Les employés qui travaillent aux installations de transport doivent porter un détecteur de gaz individuel à 4 têtes.
On a rappelé aux employés (direction et travailleurs) qu’ils doivent se conformer aux pratiques et aux procédures de travail sécuritaires sous peine de mesures disciplinaires.
Le présent rapport met un terme à l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le . Il est paru officiellement le 26 septembre 2013.