Rapport d’enquête sur la sécurité du transport ferroviaire R19T0147

Mort d’un employé
Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada Système de télécommande de locomotive
Manœuvre de triage à butte double YDHF60
Point milliaire 0,0, subdivision de Halton
Gare de triage MacMillan
Vaughan (Ontario)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Le 15 août 2019, vers 1 h 10 (heure avancée de l’Est) Note de bas de page 1, la manœuvre de triage à butte double YDHF60 (la manœuvre) de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (le CN) tirait 82 wagons vers le nord sur la voie W100 de la gare de triage MacMillan du CN, situé dans le quartier industriel Concord, à Vaughan (Ontario), à l’aide d’un système de télécommande de locomotive (STL). La manœuvre était commandée à distance par un seul employé d’exploitation du triage du CN muni d’un appareil Beltpack. Lorsque la manœuvre était dans une courbe de 15 degrés vers la gauche (dans le sens de la marche), l’extrémité arrière du 26e wagon ainsi que les wagons aux positions 27 à 29 ont été mis en ligne droite et ont déraillé. Le 29e wagon s’est séparé du 30e wagon. Le 30e wagon s’est renversé et s’est immobilisé à l’extérieur de la courbe, parallèlement à la voie. Les wagons aux positions 31 à 34 ont déraillé en demeurant attelés ensemble, sans se renverser. Les 9 wagons étaient des wagons plats et vides à plusieurs étages servant au transport de véhicules (c.-à-d. des wagons porte-automobiles). Pendant le déraillement, les wagons aux positions 27 à 29 se sont renversés avant de s’immobiliser sur le côté, vers l’intérieur de la courbe. L’employé d’exploitation du triage a été coincé sous le 27e wagon et, par conséquent, a subi des blessures mortelles.

    L’accident

    Le 15 août 2019, vers 0 h 45, la manœuvre de triage de l’embranchement industriel ouest CN 2100 a été attelée à une rame de 34 wagons chargés à l’extrémité sud de la rame de 24 wagons porte-automobiles, qui avait été laissée sur W100. La rame de 34 wagons pesait 3391 tonnesNote de bas de page 2 et faisait 2074 pieds, alors que les 24 wagons porte-automobiles pesaient 1245 tonnes et faisaient 2252 pieds. Cinq minutes plus tard, le contremaître de la manœuvre CN 2100 a informé la coordonnatrice de trains par radio que les tâches avaient été accomplies. La coordonnatrice de trains en a ensuite informé les responsables du contrôle des wagons du CN.

    Vers 1 h, la manœuvre dans l’événement à l’étude est arrivée sur W100 avec une rame de 24 wagons, qui pesait 1938 tonnes et faisait 1652 pieds, en provenance de E008, et a été attelée aux 58 wagons qui se trouvaient sur W100. Une fois le groupe de traction de triage à butte attelé aux 82 wagons de marchandises, la manœuvre pesait 7086 tonnes et faisait 6166 pieds au total.

    Ni le chef de triage, ni l’apprenti chef de triage, ni l’employé d’exploitation du triage ne savaient, à ce moment, que 44 % du poids de la manœuvre se trouvait désormais dans la portion de 25 % en queue de train et que, par conséquent, la manœuvre avait un poids important en queue.

    Après avoir attelé le 24e wagon au 25e wagon, l’employé d’exploitation du triage s’est dirigé vers le sud, à pied, pour desserrer les freins à main des 3 wagons porte-automobiles (positions 25 à 27), et a monté à bord du 27e wagon, à l’avant, pendant que la manœuvre était arrêtée.

    Vers 1 h 08, la manœuvre a commencé à tirer les 82 wagons vers le nord en empruntant la courbe vers la gauche de 15 degrés à destination de la voie de refoulement ouest. Environ 2 minutes plus tard, la communication entre la locomotive de commande et l’appareil Beltpack a été interrompue. Après la panne de communication, le STL a fonctionné comme prévu en plaçant les locomotives au ralenti, en serrant les freins à air à fond, en serrant les freins indépendants de locomotive et en immobilisant la manœuvre de manière contrôlée automatiquement.

    L’enquête a permis de déterminer que l’arrière du 26e wagon a été mis en ligne droite. Les roues gauches du bogie arrière ont chevauché le rail, ce qui a entraîné le déraillement du wagon à l’intérieur d’une courbe de 15 degrés. Les wagons porte-automobiles vides aux positions 27 à 29, qui sont demeurés attelés, ont perdu leurs bogies, ont été séparés des wagons de tête et se sont renversés sur le côté, à environ 2 pieds de la voie. Les observations sur les lieux cadraient avec les caractéristiques courantes d’un déraillement par mise en ligne droite. L’employé d’exploitation du triage, qui se tenait sur le côté gauche du 27e wagon, a été coincé sous le bout A (avant) du wagon et a subi des blessures mortelles.

    L’employé d’exploitation du triage a effectué les manœuvres avant l’accident et pendant l’utilisation du STL au moyen de l’appareil Beltpack conformément aux exigences de la compagnie et à la formation qu’il a suivie.

    Utilisation de systèmes de télécommande de locomotive

    Le système d’exploitation du STL est programmé de manière à ce que la vitesse sélectionnée soit atteinte le plus rapidement possible tout en respectant les paramètres programmés qui déterminent la vitesse produite. Quand la vitesse sélectionnée est atteinte, le STL contrôle automatiquement le manipulateur et les freins de locomotive de manière à maintenir la vitesse.

    Une accélération brusque du STL dépend de l’écart entre la vitesse réelle du groupe de traction et la vitesse sélectionnée; toutefois, une accélération brusque est également possible si l’opérateur effectue une série de réglages pour augmenter la vitesse progressivement ou s’il sélectionne immédiatement « Max speed » (vitesse maximale; 15 mi/h). Par conséquent, au moment de l’événement, les opérateurs du STL, comme l’employé d’exploitation du triage dans l’événement à l’étude, ne pouvaient pas contrôler directement l’augmentation progressive de la vitesse de la locomotive pour veiller à l’accélération lente et en douceur d’une manœuvre.

    Rapport entre les forces latérales et verticales et potentiel de déraillement

    Une combinaison de forces latérales (L) et verticales (V) est présente à l’interface entre la roue et le rail. Le rapport entre les forces latérales et verticales (L/V) indique si un déraillement était possible. Lorsqu’une grande force latérale est conjuguée à une faible force verticale (p. ex., un wagon vide), la grande force latérale aura tendance à pousser le boudin de la roue vers le haut, par-dessus le côté intérieur du rail et, ainsi, à causer un déraillement par chevauchement du rail.

    Un rapport L/V pour une seule roue supérieur à environ 0,82 indique le risque qu’un wagon de marchandises cause un déraillement en chevauchant le champignon de rail. Les wagons longs et vides munis d’appareils de choc hydrauliques à longue course en bout de wagon, comme les wagons porte-automobiles dans l’événement à l’étude, sont particulièrement vulnérables à ces forces. Un rapport L/V pour un côté de bogie supérieur à 0,65 indique le risque qu’un bogie de wagon de marchandises cause un déraillement en renversant un rail.

    Quand un train est tiré dans une courbe, les forces de traction ont tendance à étirer le train, ou à le « mettre en ligne droite », alors que les boudins de roue sont pressés contre l’intérieur du rail dans la courbe. Si la force de traction que génèrent les locomotives est trop importante ou si l’effet de traction des attelages est considérable, le rapport L/V peut atteindre un niveau critique qui fait chevaucher la roue sur le champignon d’un rail et entraîne un déraillement.

    Simulations de la dynamique du train

    Les simulations de la dynamique sont théoriques et sont souvent réalisées dans le cadre d’enquêtes sur les déraillements. Toute simulation de la dynamique effectuée vise notamment à déterminer la combinaison de facteurs et de forces menant à des résultats correspondant le plus fidèlement aux preuves matérielles observées sur les lieux d’un accident. Dans le cas de l’événement à l’étude, 7 simulations différentes ont été réalisées.

    Dans la 1re simulation, on a modélisé la voie telle qu’elle a été relevée et le train réel sans freins serrés (il roulait librement). Le script relatif à la conduite du train était fondé sur la conduite du train réelle enregistrée par le CEL. Cette simulation a permis de confirmer que le tonnage ajouté à l’arrière des wagons porte-automobiles sur la voie W100 a fait en sorte que la manœuvre avait un poids important en queue, les wagons porte-automobiles vides et légers se trouvant dans une position vulnérable, et a causé le dépassement des seuils critiques des rapports L/V pour une seule roue et pour un côté de bogie des wagons aux positions 26 à 28.

    Les 2e et 3e simulations, avec une force retardatrice des freins sur le 63e wagon, ont généré des rapports L/V aussi élevés sur les wagons aux positions 26 à 29. Étant donné les forces dynamiques en jeu, que les freins soient serrés ou non sur le 63e wagon, les probabilités d’un déraillement étaient élevées.

    Les simulations 4 à 7 ont permis d’évaluer d’autres stratégies d’atténuation qui pourraient réduire le risque de déraillement par mise en ligne droite.

    Les simulations de la dynamique du train ont permis de confirmer que les effets combinés de la réaction brusque du manipulateur en raison de la programmation du STL, la position vulnérable dans laquelle se trouvaient les wagons porte-automobiles vides munis d’appareils de choc hydrauliques en bout de wagon entre les 2 rames de wagons plus lourdes ainsi que le poids de la rame de 34 wagons en queue de train ayant été ajoutée à la manœuvre derrière les wagons porte-automobiles ont engendré les circonstances ayant donné lieu à cet accident.

    Diffusion à plus grande échelle des procédures essentielles à la sécurité

    Après un accident similaire avec mise en ligne droite survenu sur la voie W100 en 2013, le CN a mené des enquêtes sur cet accident et a pris des mesures correctives. Malgré le fait qu’une procédure avait été mise en œuvre pour prévenir les accidents avec mise en ligne droite sur la voie W100, la procédure n’avait pas été bien consignée ni diffusée à plus grande échelle, et elle a cessé d’être appliquée, ce qui a éliminé une mesure de sécurité et a probablement contribué à cet accident.

    Mesures de sécurité prises

    Transports Canada

    Transports Canada (TC) a mené une enquête en vertu de la partie II du Code canadien du travail et a émis 2 instructions à l’intention du CN. TC a examiné les mesures correctives mises en œuvre par le CN et les a jugées satisfaisantes. Les résultats de l’enquête ont été communiqués au CN et à son comité de santé et de sécurité au travail, conformément aux exigences de la partie II du Code canadien du travail.

    Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada

    Le CN a publié les avis nos 1908-15 et 1908-21 comprenant des instructions à jour visant les wagons des entreprises clientes dételés dans le triage sud, les wagons tirés sur la voie W100 et la conduite du train pendant que des wagons sont tirés en provenance de la voie W100.

    Les documents de formation du CN ont été mis à jour pour mettre en évidence les zones dangereuses des voies ayant des courbes prononcées et recommander aux employés de monter à bord de la locomotive ou du wagon de queue quand ils sont sur une voie ayant des courbes de plus de 12 degrés.

    La courbe gauche de 15 degrés de la voie W100 a été reconfigurée pour en réduire la courbure de 15 degrés à 12 degrés.

    Un processus a été élaboré pour vérifier que l’information essentielle à la sécurité communiquée par l’entremise d’avis est aussi incluse dans le bulletin sommaire subséquent et, au besoin, dans le manuel d’exploitation de la gare de triage respective.

    En collaboration avec General Electric et Cattron Intellectual Property Corporation, le fabricant de l’appareil Beltpack, des modifications ont été apportées à la programmation du STL afin de pouvoir augmenter la vitesse de manière plus progressive pendant les activités effectuées au moyen du STL.

    1.0 Renseignements de base

    Le 14 août 2019, vers 23 h 30Note de bas de page 3, l’équipe de la manœuvre de triage à butte double YDHF60 de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (le CN) déplaçait des wagons au nord de la gare de triage MacMillan du CN, à l’aide d’un système de télécommande de locomotive (STL). Cette gare de triage couvre une superficie d’environ 5 milles carrés et se trouve dans le quartier industriel Concord à Vaughan (Ontario), dans la région du Grand Toronto, en Ontario (figure 1).

    Figure 1. Emplacement de la gare de triage MacMillan de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (Source : Association des chemins de fer du Canada, Atlas des chemins de fer canadiens, avec annotations du BST)
    Image
    Emplacement de la gare de triage MacMillan de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (Source : Association des chemins de fer du Canada, Atlas des chemins de fer canadiens, avec annotations du BST)

    1.1 Gare de triage MacMillan

    La gare de triage MacMillan est la principale gare de triageNote de bas de page 4 du CN dans l’est du Canada. On y pratique la manœuvre en palier ou à butteNote de bas de page 5 pour répartir les wagons sur diverses voies en vue de leur placement dans différents trains. Les activités à la gare de triage MacMillan sont assujetties à la règle 105 du Règlement d’exploitation ferroviaire du Canada (REF). Les trains peuvent circuler à une vitesse maximale de 15 mi/h, et ils doivent pouvoir s’arrêter en deçà de la moitié de la distance de visibilité et s’immobiliser avant un aiguillage mal orienté, un dérailleur en position de déraillement ainsi qu’un drapeau bleuNote de bas de page 6 ou rougeNote de bas de page 7 indiquant une protection mise en place sur la voie.

    La gare de triage reçoit jusqu’à 1 million de wagons par année. Chaque jour, on peut y trouver jusqu’à 150 employés d’exploitation chargés de 15 à 20 manœuvres diverses (manœuvres locales, de triage et de triage à butte).

    Les trains entrants arrivent à la gare de triage par la subdivision de York ou la subdivision de Halton, à l’extrémité sud de la partie basse de la gare de triage. Les trains sont dirigés vers les voies d’arrivée du côté est de la gare de triage et sont garés sur un faisceau de réception, à l’est de la gare de triage principale. Une fois les wagons garés dans le faisceau de réception, les locomotives sont dételées, on mène une inspection autorisée des wagons, le système de freins à air est complètement vidé, et on fait des réparations mineures au besoin. Les wagons de marchandises sont ensuite manœuvrés en palier ou à butte pour être redistribués dans différents trains aux destinations diverses.

    1.1.1 Activités de triage à butte double à la gare de triage MacMillan

    Le triage à butte est effectué à l’extrémité nord du triage, où se trouve le sommet de la butte double. Le triage à butte double comprend 2 voies de refoulementNote de bas de page 8 (est et ouest) d’une longueur d’environ 5600 pieds chacune et constitue une zone désignée de protection des mouvements non accompagnés (PPZ)Note de bas de page 9. C’est pourquoi le CN n’a pas l’habitude de tirer des trains d’une longueur de plus de 5600 pieds en provenance de la voie W100 vers la voie de refoulement ouest. Plusieurs autres voies permettent d’accéder aux voies de refoulement.

    Il y a 2 groupes de traction consacrés au triage à butte qui consistent chacun en 2 locomotives de 3000 hp séparées par un auxiliaire de traction Note de bas de page 10 (figure 2).

    Figure 2. Groupe de traction de triage à butte de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada à la gare de triage MacMillan (Source : BST)
    Image
    Groupe de traction de triage à butte de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada à la gare de triage MacMillan (Source : BST)

    Les 2 groupes de traction de triage à butte fonctionnent indépendamment l’un de l’autre et sont utilisés 7 jours sur 7. Ils tirent les wagons vers le nord, des voies de triage jusqu’à l’une des 2 voies de refoulement en prévision du triage à butte.

    Chaque manœuvre est contrôlée par un seul chef de train qualifié, l’employé d’exploitation du triage, par l’entremise d’un STL qui fonctionne au moyen d’un appareil BeltpackNote de bas de page 11. En temps normal, les wagons à manœuvrer arrivent continuellement. Pendant qu’un employé d’exploitation du triage effectue des manœuvres à butte, l’autre employé d’exploitation récupère une rame de wagons pour la manœuvrer sur l’autre voie de refoulement. Quand les wagons sont manœuvrés vers une voie de refoulement avant le triage à butte, le sélecteur de vitesse de l’appareil Beltpack est généralement réglé à 15 mi/h. Les transpondeurs situés le long de l’emprise de la voie de refoulement commencent automatiquement à ralentir le mouvement vers le nord à environ 2600 pieds de l’extrémité de la voie. À partir de cet endroit, des transpondeurs supplémentaires continuent de réduire la vitesse de la locomotive de manière à l’immobiliser à environ 250 pieds au sud de l’extrémité de la voie. Si le wagon de queue du mouvement se trouve sur la voie de refoulement avant que la locomotive ne soit automatiquement arrêtée, l’employé d’exploitation du triage arrêtera le mouvement.

    Étant donné que ces manœuvres visent uniquement à tirer les wagons jusqu’aux voies de refoulement, puis à les pousser par-dessus la butte, les employés d’exploitation du triage chargés de les effectuer ont rarement un plan de manœuvre; ils reçoivent plutôt des directives visant à récupérer des wagons à partir de diverses voies. Ils ne connaissent pas nécessairement la longueur, le poids ou le type de wagons tirés par la manœuvre. Bien que l’employé puisse à l’occasion avoir à desserrer 2 ou 3 freins à main des wagons qu’il doit récupérer sur une voie, les freins à air des wagons visés par une manœuvre de triage à butte ne sont habituellement pas serrés.

    Un superviseur général des transports et un chef de triage du CN communiquent fréquemment avec les employés d’exploitation du triage à mesure qu’ils établissent l’ordre de priorités des mouvements de wagons en provenance de différents endroits dans la gare de triage aux fins de triage à butte.

    Une tour de contrôle se trouve au sommet de la butte double. À partir du sommet de la butte, les wagons de marchandises dans les voies de refoulement sont graduellement poussés, dételés, puis relâchés (figure 3).

    Figure 3. Triage à butte à la gare de triage MacMillan (Source : BST)
    Image
    Triage à butte à la gare de triage MacMillan (Source : BST)

    Lorsqu’on forme les trains, chaque wagon relâché descend la pente librement en direction sud, en franchissant une série de freins de voie qui contrôlent sa vitesse et divers aiguillages automatiques qui le dirigent vers l’une des 80 voies de classement.

    La voie W100 (W100) est une voie orientée nord-sud d’une longueur d’environ 2,7 milles dans la partie ouest du triage. W100 est également une voie d’accès pour de nombreux clients à proximité, notamment un dépôt d’automobiles, de nombreuses entreprises de ferrailles d’acier et de produits de papier, ainsi que des entrepôts.

    Quand une manœuvre récupère des wagons de clients ayant accès à W100, l’équipe d’exploitation de la manœuvre procède à une inspection visuelle des wagons avant de les déplacer pour vérifier que ni les freins à main ni les freins à air ne sont serrés.

    Généralement, à la gare de triage MacMillan, un chef de triage du CN supervise tous les déplacements de wagons de marchandises dans la gare de triage, tandis que les coordonnateurs de trains se chargent principalement des manœuvres visant le déplacement de wagons de marchandises pour les entreprises clientes. Habituellement, quand on déplace des wagons des entreprises clientes vers la gare de triage MacMillan, un coordonnateur d’exploitation, un superviseur ou un coordonnateur de trains en avise les responsables du contrôle des wagons du CN. Ceux-ci mettent à jour la base de données du système Service Reliability Strategy (SRS) du CN qui situe ensuite, en temps réel, l’emplacement des wagons dans l’ensemble des voies du réseau du CN en Amérique du Nord.

    Habituellement, les équipes du CN effectuent les manœuvres le long de W100 et laissent ensuite les wagons à l’extrémité nord de W100 en serrant un nombre suffisant de freins à main aux wagons les plus au nord pour les immobiliser. Les wagons du dépôt d’automobiles sont manœuvrés le matin et ceux des autres entreprises clientes, la nuit. Par conséquent, des wagons sont laissés sur W100 2 fois par jour.

    Au moment de l’accident, il n’y avait aucun processus, formel ou informel, visant à empêcher l’attelage de wagons lourdement chargés utilisés pour les entreprises clientes derrière une rame de wagons plats et vides à plusieurs étages pour le transport de véhicules (c.-à-d. des wagons porte-automobiles), laissée à l’extrémité nord de W100.

    L’extrémité nord de W100 est reliée à la voie de refoulement ouest à l’aiguillage W100. L’extrémité sud de W100 est en alignement (c-.à-d. qu’elle est droite) et comporte une légère pente ascendante. À l’approche de l’extrémité nord de W100, il y a une courbe de 8 degrés vers la droite, un court tronçon de voie en alignement, puis une courbe de 15 degrés vers la gauche menant à l’aiguillage W100 et à la voie de refoulement ouest.

    1.2 L’accident

    Le 14 août 2019, vers 10 h, un train de manœuvre du CN tirait une rame de 24 longs wagons porte-automobiles vides du dépôt d’automobiles vers l’extrémité nord de W100. Les wagons porte-automobiles étaient chacun d’une longueur d’environ 94 pieds et munis d’attelages de 60 pouces et d’appareils de choc hydrauliques en bout de wagon à longue course (10 pouces).

    Les wagons porte-automobiles avaient été laissés à l’extrémité nord de W100 et immobilisés à l’aide d’un frein à main serré sur chacun des 3 wagons les plus au nord. Ces 3 wagons porte-automobiles se trouvaient dans la courbe de 8 degrés vers la droite, leur bout A en tête (figure 4). Puisque les 3 wagons étaient tous orientés dans la même direction, leurs freins à main étaient tous situés du côté nord de la voie, ce qui correspond au côté extérieur de la courbe vers la droite et au côté intérieur de la courbe vers la gauche.

    Figure 4. Carte de l’extrémité nord de la gare de triage MacMillan de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada montrant le lieu approximatif du train de manœuvre avant le début du mouvement en direction nord (Source : Association des chemins de fer du Canada, données cartographiques d’OpenStreetMap, avec annotations du BST)
    Image
    Carte de l’extrémité nord de la gare de triage MacMillan de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada montrant le lieu approximatif du train de manœuvre avant le début du mouvement en direction nord (Source : Association des chemins de fer du Canada, données cartographiques d’OpenStreetMap, avec annotations du BST)

    Vers 23 h 30, l’employé d’exploitation du triage dans l’événement à l’étude s’est présenté au travail à la tour de la butte double. Le personnel de supervision du CN en service à ce moment comprenait un superviseur général des transports, une coordonnatrice de trains, un chef de triage et un apprenti chef de triage. L’employé d’exploitation du triage avait une bonne connaissance des activités effectuées à la gare de triage, satisfaisait aux normes de condition physique et de repos, et répondait aux exigences de son poste.

    Vers 23 h 55, l’employé d’exploitation du triage a signalé sa présence au travail à l’apprenti chef de triage. L’apprenti chef de triage a affecté l’employé à la manœuvre de triage à butte double YDHF60 (la manœuvre), qui était exploitée à ce moment sur la voie de refoulement est.

    La manœuvre était entraînée par un groupe de traction de triage à butte composé de la locomotive CN 6020, de l’auxiliaire de traction CN 232 et de la locomotive CN 6019. Le groupe de traction de triage à butte avait une capacité de 6000 hp; il pesait 512 tonnes Note de bas de page 12 et faisait 188 pieds. Il était doté d’un STL et était commandé au moyen d’un appareil Beltpack. L’employé d’exploitation du triage avait reçu la directive de terminer de pousser les wagons par-dessus le sommet de la voie de butte est. L’employé a terminé la tâche initiale sans incident et a attendu les prochaines directives.

    Le 15 août 2019, vers 0 h 30, l’apprenti chef de triage a demandé à l’employé d’exploitation du triage de récupérer une rame de 24 wagons qui se trouvait sur la voie E008 (E008). La rame de wagons était composée de 16 wagons chargés et de 8 wagons vides; elle pesait 1938 tonnes et faisait 1652 pieds.

    L’employé d’exploitation du triage a aussi reçu la directive de tirer la rame de 24 wagons vers le nord à partir de E008, de franchir l’aiguillage W100, d’aligner l’aiguillage vers W100, d’inverser la marche de la manœuvre et d’atteler la manœuvre à la rame de 24 wagons porte-automobiles vides, pesant 1245 tonnes et faisant 2252 pieds, qui avait été laissée sur W100. Une fois attelée aux wagons qui se trouvaient sur W100, la manœuvre devait tirer les 48 wagons sur W100 jusqu’au bout de la voie de refoulement ouest dans le but de les pousser par-dessus le sommet de la voie de butte ouest et de les trier à butte dans le faisceau de triage.

    Environ au même moment, la manœuvre de triage de l’embranchement industriel ouest CN 2100 avait récupéré des wagons des entreprises à proximité, au sud de la gare de triage. Vers 0 h 45, la manœuvre de triage de l’embranchement industriel ouest CN 2100 a été attelée à une rame supplémentaire de 34 wagons à l’extrémité sud des 24 wagons porte-automobiles qui occupaient déjà W100. La rame de 34 wagons était composée de 26 wagons chargés, dont 22 wagons-tombereaux découverts transportant de la ferraille d’acier (wagons aux positions 59 à 80), et de 8 wagons vides. La rame de 34 wagons pesait 3391 tonnes et faisait 2074 pieds.

    Vers 0 h 50, le contremaître de la manœuvre de triage de l’embranchement industriel ouest CN 2100 a informé la coordonnatrice de trains par radio que la rame de 34 wagons chargés avait été attelée à l’extrémité sud des wagons qui occupaient W100. La coordonnatrice de trains en a informé les responsables du contrôle des wagons du CN, et le système SRS a été mis à jour.

    Vers 0 h 55, la manœuvre à l’étude a été attelée aux 24 wagons en provenance de E008 et a été tirée vers le nord jusqu’à la voie de refoulement ouest.

    Vers 1 h, l’employé d’exploitation du triage a arrêté la manœuvre au nord de l’aiguillage W100, est descendu du train et a aligné l’aiguillage W100 vers la voie W100. Il est ensuite monté à bord du wagon de queue et la manœuvre a poussé les 24 wagons de E008 vers le sud jusqu’à W100 pour les atteler aux 58 wagons qui s’y trouvaient déjà. En comptant tous les wagons attelés les uns aux autres, la manœuvre était désormais composée de 2 locomotives et d’un auxiliaire de traction (pesant 512 tonnes), et de 82 wagons de marchandises (pesant 6574 tonnes); le poids combiné total était de 7086 tonnes et la longueur, de 6166 pieds (annexe A).

    Après avoir attelé le 24e wagon Note de bas de page 13 au 25e wagon Note de bas de page 14, l’employé d’exploitation du triage a dû se rendre à pied en direction sud pour desserrer les freins à main des wagons porte-automobiles aux positions 25, 26 et 27 qui étaient à l’avant de la rame de 58 wagons nouvellement attelés. L’employé est ensuite vraisemblablement remonté à bord de la manœuvre, à l’avant du 27e wagon (TTGX 995540), pendant qu’elle était arrêtée.

    Vers 1 h 08, la manœuvre a commencé à tirer l’ensemble des 82 wagons vers le nord, empruntant la courbe de 15 degrés vers la gauche en direction de la voie de refoulement ouest. Après environ 90 secondes, le sélecteur de vitesse de l’appareil Beltpack a été réglé à « Coast » (marche sur l’erre) et, 23 secondes plus tard, alors que la manœuvre roulait à environ 10 mi/h, le sélecteur a été réglé de nouveau à 15 mi/h.

    À 1 h 10 min 29 s, il y a eu une interruption de la communication entre la locomotive de commande CN 6020 et l’appareil Beltpack. Après la panne de communication, les événements suivants sont survenus :

    • À 1 h 10 min 31 s, la locomotive a été mise au ralenti.
    • À 1 h 10 min 35 s, un serrage à fond des freins à air a été automatiquement initié sur le groupe de traction.
    • À 1 h 10 min 36 s, les freins indépendants de locomotive ont été serrés.
    • À 1 h 10 min 57 s, la manœuvre s’est immobilisée.

    Vers 1 h 20, l’apprenti chef de triage s’est rendu compte que l’aiguillage n’avait pas été actionné pour la voie W100 et s’en est inquiété. L’apprenti chef de triage, le chef de triage et le superviseur général des transports ont chacun tenté de communiquer avec l’employé d’exploitation du triage par radio, mais sans réponse. À l’aide des caméras vidéo dans la gare de triage servant à surveiller le secteur, l’apprenti chef de triage a constaté que la manœuvre s’était dételée. On a alors demandé à la coordonnatrice de trains de se rendre sur les lieux pour voir ce qui s’était produit.

    Vers 1 h 35, la coordonnatrice de trains est arrivée à l’aiguillage W100 en compagnie d’un superviseur des services mécaniques. Ils ont découvert que 9 wagons porte-automobiles vides (aux positions 26 à 34 derrière les locomotives) avaient déraillé. Plus particulièrement, les 3 wagons aux positions 27 à 29 s’étaient renversés avant de s’immobiliser sur le côté, vers l’intérieur de la courbe de 15 degrés vers la gauche.

    Vers 1 h 50, après avoir mené une brève recherche, on a retrouvé l’employé d’exploitation du triage sous le bout A (avant) du 27e wagon s’étant renversé (TTGX 995540). Des intervenants d’urgence ont immédiatement été dépêchés sur les lieux, mais l’employé avait malheureusement subi des blessures mortelles pendant l’accident.

    Au moment de l’accident, la température ambiante était de 17 °C, le ciel était dégagé, et le vent soufflait de l’est à 21 km/h.

    1.3 Examen des lieux

    Au départ, le personnel ferroviaire avait signalé le déraillement de 9 wagons porte-automobiles vides (aux positions 26 à 34) au total. Les freins à main de ces wagons étaient desserrés.

    Le groupe de traction de triage à butte et les 26 premiers wagons s’étaient immobilisés toujours attelés, la tête à environ 2100 pieds au nord de l’aiguillage W100 sur la voie de refoulement ouest.

    Le 26e wagon, le wagon porte-automobile vide TTGX 995076, avait déraillé sans se renverser. Le bogie du bout A (avant) n’avait pas déraillé, mais les 4 roues du bogie du bout B (arrière) avaient déraillé avant de s’immobiliser dans le ballast, du côté ouest de la voie, tout juste au nord de l’aiguillage W100 (figure 5). Avant de s’immobiliser, le wagon avait heurté l’aiguillage W100 et l’avait endommagé. Les autres wagons à l’avant de la manœuvre ont été inspectés, et on n’a constaté aucun défaut.

    Figure 5. Bogie du bout B (arrière) du 26e wagon (TTGX 995076) ayant déraillé; le bogie du bout A est demeuré sur les rails (Source : BST)
    Image
    Bogie  du bout B (arrière) du 26<sup>e</sup> wagon (TTGX 995076) ayant déraillé; le  bogie du bout A est demeuré sur les rails (Source : BST)

    À partir de l’aiguillage W100, on a constaté qu’il y avait des marques de roues dans le ballast, en direction sud, sur une distance de 400 pieds. Les marques dans le ballast prenaient fin près de l’extrémité avant du 27e wagon (TTGX 995540). Le bogie du bout A (avant) du wagon TTGX 995540 était intact; il n’avait pas déraillé et avait continué de rouler sur la voie, séparé du wagon. Il s’était immobilisé sur les rails à environ 40 pieds au nord du wagon (figure 6).

    Figure 6. Vue vers le sud à partir de l’aiguillage W100 (Source : BST)
    Image
    Vue vers le sud à partir de l’aiguillage W100 (Source : BST)

    Les 27e, 28e et 29e wagons étaient attelés ensemble, avaient perdu leurs bogies et s’étaient renversés sur le côté avant de s’immobiliser à l’intérieur de la courbe de 15 degrés (figure 7).

    Figure 7. Lieu de l’événement (Source : BST)
    Image
    Lieu de l’événement (Source : BST)

    Chacun des 3 wagons s’était immobilisé à environ 2 pieds du rail intérieur de la courbe (figure 8).

    Figure 8. Vue de l’arrière du 29e wagon, immobilisé à environ 2 pieds du rail intérieur de la courbe. À noter qu’il y a des bogies manquants (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)
    Image
    Vue de l’arrière du 29<sup>e</sup> wagon, immobilisé à environ 2 pieds du rail intérieur de la courbe. À noter qu’il y a des bogies manquants (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)

    Le bogie du bout B (arrière) du 26e wagon avait déraillé.

    Le bogie du bout A du 27e wagon s’étant renversé (TTGX 995540) avait continué de rouler, sans le wagon, avant de s’immobiliser sur la voie au nord du wagon. Le bogie du bout B du 27e wagon était intact, dans l’ensemble, mais avait été heurté par l’extrémité avant du 31e wagon (TTGX 982102) lors du déraillement. Le bogie du bout B du 27e wagon s’était immobilisé devant le 31e wagon qui se trouvait à côté du bout B du 27e wagon (figure 9).

    Figure 9. Extrémité avant du 31e wagon (TTGX 982102) et bogie arrière du 27e wagon (Source : BST)
    Image
    Extrémité avant du 31<sup>e</sup> wagon (TTGX 982102) et bogie arrière du 27<sup>e</sup> wagon (Source : BST)

    Les bogies des 28e et 29e wagons avaient été éparpillés sur les lieux de l’événement par suite du déraillement des wagons de queue. Le 29e wagon s’était dételé du 30e wagon. Le 30e wagon s’était renversé avant de s’immobiliser à l’extérieur de la courbe, parallèlement à la voie.

    Les wagons aux positions 31 à 34 ne s’étaient pas renversés et étaient toujours attelés. Le rail extérieur de la courbe s’était renversé vers l’extérieur (direction est) sous ces wagons. Toutes les roues des wagons aux positions 31 à 33 avaient déraillé le long de la voie, tandis que seulement les roues de l’extrémité avant du 34e wagon avaient déraillé (figure 10).

    Figure 10. Emplacement des wagons ayant déraillé (Source : Google Earth, avec annotations du BST)
    Image
    Emplacement des wagons ayant déraillé (Source : Google Earth, avec annotations du BST)

    Aucun des 48 wagons de queue (aux positions 35 à 82) qui se trouvaient sur W100 n’avait déraillé. Un examen subséquent de ces wagons effectué par le CN a permis de déterminer que le piston de cylindre de frein du 63e wagon (DJTX 318030) transportant de la ferraille d’acier était déployé et que les semelles de frein étaient pressées contre les roues. Même si ces observations indiquent que le frein à air de ce wagon pourrait avoir été serré, aucun suivi n’a été fait à ce moment, et il n’y pas eu de confirmation sur les lieux de l’événement qu’un frein à main ou que les freins à air étaient serrés.

    De petites marques de boudin de roue ont été observées sur la surface de roulement du rail ouest du raccordement de sortie de la courbe de 15 degrés, qui devenait un tronçon en alignement de W100. Les marques se trouvaient à environ 5 pieds au nord du 27e wagon s’étant renversé. Elles s’étendaient du côté intérieur au côté extérieur du rail et se poursuivaient à l’ouest dans le ballast adjacent, du côté intérieur de la courbe, en direction nord vers l’aiguillage W100 (figure 11).

    Figure 11. Marques de boudin de roue sur le champignon de rail et dans le ballast (Source : BST)
    Image
    Marques de boudin de roue sur le champignon de rail et dans le ballast (Source : BST)

    L’aiguillage W100 et un tronçon de la voie d’environ 350 pieds étaient endommagés.

    1.4 Renseignements consignés

    Le STL de la locomotive de tête CN 6020 était utilisé pour contrôler la manœuvre. Même si les données du consignateur d’événements de locomotive (CEL) de la locomotive CN 6020 étaient corrompues, les données du CEL de la locomotive de queue CN 6019 ont pu être récupérées. L’annexe B comprend un résumé des renseignements tirés du CEL de la locomotive CN 6019 et du registre de la télécommande de locomotive Beltpack de la locomotive CN 6020. Les événements présentés à l’annexe B commencent après l’attelage de la manœuvre entre les 24e et 25e wagons, à l’extrémité avant de la rame de 58 wagons à laquelle la manœuvre a été attelée sur W100.

    1.5 Instructions d’exploitation de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada

    Le CN dispose de diverses méthodes pour donner des instructions aux équipes d’exploitation, notamment les Instructions générales d’exploitation (IGE) et des bulletins diffusés à l’échelle du réseau par les responsables des pratiques d’exploitation du CN ainsi que des instructions locales sous forme d’avis et de manuels d’exploitation du triage. Toutefois, si les avis et les manuels d’exploitation du triage locaux ne sont pas diffusés par les responsables des pratiques d’exploitation du CN, l’information locale essentielle à la sécurité risque de ne pas toujours être mise à jour ou rediffusée.

    1.5.1 Instructions générales d’exploitation

    La section 8 des IGE du CN (2015) comprend des consignes de la compagnie concernant les déplacements sur du matériel roulant. Le point 12.4, Déplacement sur du matériel roulant, précise en partie ce qui suit :

    Les membres du personnel qui se déplacent sur du matériel roulant DOIVENT TOUJOURS :

    […]

    • se tenir à l’échelle latérale à l’avant du matériel roulant dans la direction du mouvement, sauf s’il s’agit du dernier wagon ou de la dernière locomotive du groupe de traction dans le sens du mouvement; 

    1.5.2 Bulletin à l’échelle du réseau

    Le 1er novembre 2018, les responsables des pratiques d’exploitation du CN ont diffusé un bulletin d’exploitation à l’échelle du réseau. Le bulletin no 015 2018 indiquait que pour réduire le risque de blessures au moment de monter à bord de matériel roulant ou d’en descendre, à compter du 5 novembre 2018, les IGE du CN seraient modifiées afin qu’il soit interdit de monter à bord du matériel roulant ou d’en descendre s’il est en mouvement. Le matériel roulant doit toujours être en position d’arrêt avant qu’on puisse y monter à bord ou en descendre. Cette modification s’applique à tous les types de matériel roulant.

    1.5.3 Manuel d’exploitation du triage MacMillan

    Le manuel d’exploitation du triage MacMillan comprend des instructions sur l’immobilisation pour différentes voies dans la gare de triage MacMillan. Le point 3.29 du manuel porte sur les freins à main et exige que le frein à main soit serré sur la voie W100 comme suit :

    • 1 wagon = 1 frein à main
    • 2 wagons = 2 freins à main
    • 3 wagons ou plus = 3 freins à main

    On s’attend à ce que les freins à main soient serrés en tout temps à l’extrémité nord de la voie compte tenu de sa dénivellation.

    1.6 Employé d’exploitation du triage

    L’employé d’exploitation du triage s’est joint au CN en tant qu’apprenti chef de train le 18 juin 2018. Il a suivi toutes les formations obligatoires et s’est qualifié comme chef de train le 5 décembre 2018. Pendant sa formation, l’employé a effectué 7 quarts de travail aux manœuvres de triage à butte à la butte double de la gare de triage MacMillan.

    Une fois devenu chef de train qualifié, du 5 décembre 2018 au 15 août 2019, l’employé a effectué au total 27 quarts de travail à la butte double en tant qu’employé d’exploitation du triage; on estime qu’il connaissait bien les tâches à effectuer lors de manœuvres de triage à butte.

    On a rapporté que l’employé avait une bonne attitude et une bonne éthique du travail, et qu’il semblait aimer les défis autant analytiques que physiques de son travail. Même s’il n’avait que 14 mois d’expérience, l’employé était considéré comme compétent et bien informé à l’égard de son travail.

    1.7 Formation de chef de train et sur le système de télécommande de locomotive à la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada

    Au Canada, les nouveaux employés d’exploitation du CN doivent obtenir une qualification de chef de train et commencer en tant qu’apprenti chef de train. Les apprentis commencent par suivre une formation de chef de train au centre de formation du CN à Winnipeg (Manitoba), qui comprend une formation de 5 semaines sur les règles, suivie d’une formation pratique de 2 semaines sur le terrain. Une fois qu’ils ont réussi la formation initiale, les apprentis retournent à leur gare d’attache pour terminer la formation.

    Puisque toutes les manœuvres à la gare de triage MacMillan se font à l’aide du STL, les apprentis suivent une formation d’une semaine sur l’appareil Beltpack du STL parallèlement au programme de formation régulier de chef de train. Une fois qu’ils ont réussi les modules théoriques et pratiques, les apprentis doivent consolider leurs acquis dans le cadre d’une formation supervisée en cours d’emploi tout en travaillant aux manœuvres de ligne et de triage.

    Pour obtenir une qualification de chef de train, les apprentis doivent aussi effectuer au moins 60 voyages sous la supervision d’un chef de train qualifié. Ces voyages, effectués dans le cadre d’une formation en cours d’emploi, sont une combinaison de services de marchandises (voie principale) et de manœuvres de triage au moyen d’un STL. La formation de chef de train du CN se poursuit jusqu’à ce qu’un gestionnaire local juge que les apprentis sont qualifiés, ce qui prend habituellement de 5 à 7 mois. Une fois qu’ils ont obtenu leur qualification, les chefs de train peuvent se voir attribuer des tâches régulières en voie principale ou à la gare de triage.

    1.7.1 Formation sur le système de télécommande de locomotive à la gare de triage MacMillan

    La formation sur le STL à la gare de triage MacMillan est d’environ une semaine et comprend des modules théorique et pratique. Pour le module théorique, les apprentis doivent étudier le guide de participation pour la formation d’opérateur Beltpack avec un moniteur en milieu de travail.

    Pour le module pratique, le moniteur en milieu de travail offre une formation aux apprentis pour les familiariser avec la gare de triage MacMillan. Dans le cadre de cette formation, les apprentis sont appelés à cerner les zones dans la gare de triage où l’utilisation du STL présente un plus grand défi que la normale et reçoivent des conseils pour travailler dans ces zones en toute sécurité.

    1.7.2 Guide de participation pour la formation d’opérateur Beltpack

    Le guide aborde les principales composantes d’une locomotive, la façon d’initialiser le STL, le fonctionnement de l’appareil Beltpack et certains éléments de la conduite de trains et du diagnostic des anomalies. Le module 7 du guide aborde la conduite des trains et explique que les forces de compression et de traction ainsi que les forces verticale et latérale peuvent avoir une incidence sur la conduite d’une rame de wagons en mouvement sur une voie. Le guide décrit ces forces et définit la mise en ligne droiteNote de bas de page 15 comme la tendance qu’ont les longues rames de wagons à court-circuiter une courbe quand elles sont tirées (figure 12); ce problème s’aggrave lorsque des trains lourds dans lesquels des wagons légers précèdent des wagons beaucoup plus lourds sont manœuvrés.

    Figure 12. Mouvement de traction entraînant une mise en ligne droite vers l’intérieur d’une courbe (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)
    Image
    Mouvement de traction entraînant une mise en ligne droite vers l’intérieur d’une courbe (Source : Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada)

    Le guide mentionne également que le risque de mise en ligne droite augmente lorsqu’on manœuvre des wagons légers dans un train lourd. Toutefois, le guide ne contient pas de directive plus précise pour déceler les conditions pouvant entraîner une mise en ligne droite ni des conseils pour l’éviter.

    Pour ce qui est de la conduite de trains, le module 7 du guide comprend les instructions suivantes (en partie) [traduction] :

    Changer la vitesse progressivement – laisser les wagons s’ajuster à la vitesse commandée avant d’augmenter ou de réduire la vitesse.

    […]

    Lorsque des wagons sont tirés à partir d’une position d’arrêt, déplacer le sélecteur de vitesse à la position Couple (1 mi/h) pendant environ 50 pieds de mouvement. Une fois les wagons étirés, déplacer le sélecteur à la vitesse désirée.

    Lors d’un arrêt, déplacer le sélecteur de vitesse à la position Coast d’abord pendant 5 ou 10 secondes, puis à la position Coast B pour permettre aux wagons de se comprimer. Lorsqu’on entend les attelages se comprimer, déplacer le sélecteur de vitesse à STOP pour un arrêt plus rapide sans jeu des attelages.

    Un examen du registre de l’appareil Beltpack a permis de déterminer que l’employé d’exploitation du triage avait utilisé l’appareil conformément à ces instructions.

    1.8 Utilisation du système de télécommande de locomotive

    Le STL est essentiellement un système de contrôle basé sur la vitesse qui fait augmenter la vitesse sur le manipulateur de la locomotive de commande automatiquement en fonction de la vitesse sélectionnée par l’opérateur du STL. Le STL comprend les 3 principaux éléments suivants :

    • une ou des locomotives télécommandées;
    • un ordinateur de commande de bord installé dans la locomotive télécommandée servant d’interface avec les commandes;
    • une télécommande de locomotive communément appelée « Beltpack ». La télécommande de locomotive est un appareil léger de télécommande qui s’attache au gilet de sécurité de l’opérateur.

    Les appareils Beltpack ont plusieurs fonctions de sécurité, notamment :

    • une fonction de surveillance de l’inclinaison visant à protéger l’opérateur en cas de chute. Dès qu’une télécommande de locomotive est inclinée à plus de 45 degrés, elle transmet une commande de freinage d’urgence qui serre d’urgence les freins de la locomotive et les freins de tous les wagons connectés par la ligne de train automatiquement;
    • une fonction empêchant toute interruption de la communication entre l’appareil Beltpack et la locomotive de commande. Lorsqu’il y a une interruption de la communication entre l’appareil Beltpack et la locomotive, le manipulateur passe automatiquement de la position sélectionnée à la position de ralenti et un serrage à fond des freins à air est automatiquement déclenché.
    Figure 13. Télécommande de locomotive, aussi appelée « Beltpack » (Source : BST)
    Image
    Télécommande de locomotive, aussi appelée « Beltpack » (Source : BST)

    L’opérateur de l’appareil Beltpack sélectionne une vitesse parmi plusieurs réglages prédéterminés : « Stop » (arrêt), « Coast », « Couple » (attelage; 1,5 mi/h), « Hump » (triage à butte; 2,0 mi/h), « HumpF » (triage à butte – rapide; 2,7 mi/h), 4 mi/h, 8 mi/h et « Max speed » (vitesse maximale; 15 mi/h)Note de bas de page 16. Une fois la vitesse sélectionnée, le STL transmet la commande au manipulateur de la locomotive afin d’atteindre la vitesse sélectionnée. Quand la vitesse sélectionnée est atteinte, le STL contrôle automatiquement le manipulateur et les freins de locomotive de manière à maintenir la vitesse sélectionnée, avec une marge d’erreur de ±0,5 mi/h. Le système s’adapte au relief de façon réactive, sans tenir compte de la longueur, du tonnage ou du jeu des attelages du train.

    Lorsqu’on met un mouvement en marche à partir d’une position d’arrêt, le taux d’augmentation de la vitesse par le STL est déterminé en fonction de la différence entre la vitesse cible sélectionnée et la vitesse réelle de la locomotive télécommandée. Plus l’intervalle de temps est grand entre les changements de vitesse, plus la vitesse augmente lentement. Toutefois, à mesure qu’augmente la différence entre la vitesse cible et la vitesse réelle, l’intervalle entre les changements de vitesse est réduit, ce qui entraîne une augmentation beaucoup plus rapide de la vitesse.

    Le STL est programmé de manière à ce que la vitesse sélectionnée soit atteinte le plus rapidement possible tout en respectant les paramètres programmés qui déterminent la vitesse produite. Les paramètres de configuration de la vitesse qui étaient programmés sur la locomotive télécommandée au moment de l’événement étaient les paramètres originaux du contrôleur de vitesse, tels que définis par CANAC Railway Services Inc.

    Quand l’opérateur augmente la vitesse sur la télécommande de locomotive, le groupe de locomotives télécommandées reçoit une commande d’augmentation de la vitesse. En réponse à cette commande, le manipulateur de la locomotive télécommandée peut parfois passer au cran 8 (maximal) rapidement. Bien que la réaction du manipulateur dépende de la différence entre la vitesse réelle du groupe de locomotives télécommandées et la vitesse sélectionnée, le manipulateur peut passer au cran 8 rapidement, peu importe si l’opérateur exécute une série de petites augmentations de vitesse progressives ou s’il sélectionne d’emblée la vitesse maximale, selon les circonstances.

    Les opérateurs de STL ne peuvent pas commander des changements progressifs à la vitesse de la locomotive. Il s’agit d’une caractéristique de conception volontaire. Le STL de l’appareil Beltpack est un STL de contrôle de la vitesse. Par conséquent, le STL a le contrôle total sur l’activation du manipulateur.

    Dans l’événement à l’étude, l’employé d’exploitation du triage a mis le mouvement en marche avec un réglage de basse vitesse. Une fois tous les wagons en mouvement, il a réglé le sélecteur de vitesse de la télécommande de locomotive à 15 mi/h; c’est la vitesse à laquelle on s’attend étant donné que le réglage à 15 mi/h est presque toujours celui qu’utilisent les employés d’exploitation du triage du CN pour terminer une manœuvre sur une voie de refoulement dans une PPZ de voie de refoulement de triage à butte.

    Après l’accident, le CN a passé en revue les téléchargements de l’appareil Beltpack des autres locomotives au triage à butte double et a constaté que l’employé d’exploitation du triage dans l’événement à l’étude avait exécuté les manœuvres de façon comparable à l’exécution des manœuvres par d’autres employés d’exploitation du triage.

    1.9 Forces exercées dans le train

    Des attelages sont installés à chaque extrémité des wagons de marchandises pour les atteler les uns aux autres dans le but de former un train. Selon la fonction pour laquelle un wagon est conçu, on y installe à chaque extrémité soit des appareils de traction standard Note de bas de page 17, soit des appareils de choc en bout de wagon pour aider à absorber l’énergie produite par les mouvements du train. Les appareils de traction et les appareils de choc en bout de wagon sont essentiellement des amortisseurs de choc conçus pour se comprimer et s’étirer jusqu’à un certain point lorsqu’une force y est appliquée. Par conséquent, le point de raccordement entre les wagons attelés comprend un certain jeu, selon les propriétés des appareils de traction.

    Les termes « jeu » et « jeu des attelages » font référence au mouvement (ou déplacement) longitudinal aux extrémités d’un wagon et au mouvement cumulatif des wagons du train. Ce mouvement se produit quand les appareils de traction sont comprimés sous une force de compression ou étirés sous une force de traction à mesure que les forces exercées dans le train se propagent d’un wagon à l’autre pendant l’exploitation du train. Le jeu des attelages peut causer un écart de vitesse dans le train sous forme d’un effet de compression Note de bas de page 18 ou de traction Note de bas de page 19 des attelages.

    Quand le train commence à avancer un wagon à la fois, le jeu des attelages augmente. Le jeu peut varier en fonction du type d’appareil de traction ou d’appareil de choc en bout de wagon installé sur chaque wagon. Par exemple :

    • Quand le train est immobile, il y a environ 1 pouce de jeu à chaque extrémité des wagons. Quand un wagon est attelé à un autre, il y a environ 2 pouces de jeu à chaque attelage.
    • À chaque extrémité de wagons équipés d’appareils de traction standard, il peut y avoir environ 3,25 pouces de mouvement additionnel en raison de la force de compression ou de traction.
    • Pour ce qui est des wagons munis d’appareils de choc en bout de wagon, il y a entre 1 et 22 pouces de jeu additionnel à chaque extrémité, selon les propriétés des appareils de choc. Les appareils de choc les plus courants ont une contrainte de précharge et peuvent avoir un jeu d’environ 10 pouces à 15 pouces sous les forces de compression. Les appareils de choc en bout de wagon sont aussi appelés appareils de choc hydrauliques en bout de wagon.

    Dans l’événement à l’étude, les wagons porte-automobiles vides étaient munis d’un appareil de choc en bout de wagon à chaque extrémité, chacun offrant jusqu’à 10 pouces de jeu lorsqu’il est comprimé au maximum. Pour chacun des appareils de choc en bout de wagon, la contrainte de précharge était de 50 000 livres, ce qui signifie qu’une force de compression de 50 000 livres est nécessaire avant que l’appareil commence à se comprimer. Quand les appareils de choc en bout de wagon sont en position neutre, il n’y a qu’un pouce de jeu à chaque extrémité d’attelage. Par conséquent, même si ces wagons porte-automobiles sont munis d’appareils de choc en bout de wagon, le jeu s’utilise très rapidement quand on passe de la position d’arrêt à la capacité maximale d’étirement lorsqu’ils sont tirés dans un train.

    Les appareils de choc en bout de wagon sont conçus pour amortir les forces exercées dans le train et réduire au minimum tout dommage au chargement. Toutefois, un nombre élevé d’appareils de choc en bout de wagon regroupés dans un train peut également augmenter de manière considérable le jeu des attelages total. Lorsqu’un train est formé de rames de wagons munis d’appareils de choc en bout de wagon, le mécanicien de locomotive ou l’opérateur de la manœuvre doit être vigilant afin de contrôler le jeu des attelages. Sinon, une force de compression ou de traction soudaine soumise aux attelages pourrait entraîner un déraillement par rupture d’attelage, mise en ligne droite ou mise en portefeuille.

    Selon le Train Make-Up ManualNote de bas de page 20 de l’Association of American Railroads (AAR), les wagons munis d’appareils de choc en bout de wagon font augmenter le jeu des attelages et peuvent augmenter de manière considérable les forces exercées dans le train. En général, les rames de wagons vides munis d’appareils de choc en bout de wagon ne devraient pas être placées devant de longues rames de wagons chargés munis d’appareils de traction standard pour les trains exploités sur la voie principale. Même si ce manuel ne s’applique pas aux gares de triage, les forces exercées dans le train produites par de telles configurations pourraient aussi s’appliquer dans certaines situations dans ces gares, selon la configuration du train et de la voie.

    1.10 Règles relatives à la formation des trains de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada

    Il y a environ 10 ans, le CN a élaboré une série de règles administratives relatives à la formation des trains, abordant principalement la répartition du poids dans les trains, dans le but de gérer les forces exercées dans le train de manière plus efficace lorsque des trains sont exploités en voie principale. Le CN se fonde sur une règle générale de répartition du poids des trains (règle 1) visant à empêcher un train d’avoir un poids important en queue. Selon la règle 1 relative à la formation des trains du CN, la portion arrière du train composant 25 % de la longueur du train ne doit pas excéder 33 % du poids du train.

    Pour ce qui est des opérations du CN en voie principale, les critères de formation des trains du CN n’obligent pas précisément que les wagons vides ou légèrement chargés, comme les wagons porte-automobiles munis d’appareils de choc en bout de wagon, soient placés en queue de train.

    Les règles relatives à la formation des trains du CN ne s’appliquent pas aux manœuvres effectuées dans une gare de triage.

    1.11 Profil de longueur et de tonnage de la manœuvre

    Le profil de longueur de la manœuvre (figure 14) montre la position du groupe de traction de triage à butte, des 9 wagons porte-automobiles longs et vides qui ont déraillé, et du 63e wagon, dont le piston de cylindre de frein à air était déployé.

    Figure 14. Profil de longueur de la manœuvre (Source : BST)
    Image
    Profil de longueur de la manœuvre (Source : BST)

    Le profil de tonnage de la manœuvre (figure 15) montre la répartition du poids dans la manœuvre.

    La figure 15 illustre également la position des 3 rames de wagons, les wagons munis d’appareils de choc en bout de wagon et les wagons munis d’appareils de traction standard. En particulier, la rame de wagons lourds ajoutée à l’arrière de la manœuvre comprenait aussi le 63e wagon dont le piston de cylindre de frein à air était déployé.

    Figure 15. Profil de tonnage de la manœuvre (Source : BST)
    Image
    Profil de tonnage de la manœuvre (Source : BST)

    1.12 Rapport entre les forces latérales et verticales et potentiel de déraillement

    Une combinaison de forces latérales (L) et verticales (V) est présente à l’interface entre la roue et le rail (figure 16). Le rapport entre les forces latérales et verticales (L/V) indique si un déraillement était probable. Lorsqu’une grande force latérale est conjuguée à une faible force verticale (p. ex., un wagon vide), la grande force latérale aura tendance à pousser le boudin de la roue vers le haut, par-dessus le côté intérieur du rail et, ainsi, à causer un déraillement par chevauchement du rail.

    Figure 16. Forces latérales et verticales entre la roue et le rail (Source : Association of American Railroads, avec annotations du BST)
    Image
    Forces latérales et verticales entre la roue et le rail (Source : Association of American Railroads, avec annotations du BST)

    Bien que de nombreux facteurs puissent entrer en ligne de compte, il est généralement reconnu dans l’industrie que :

    • un rapport L/V pour un côté de bogie étant supérieur à 0,65 indique le risque qu’un bogie de wagon de marchandises cause un déraillement en renversant le rail;
    • un rapport L/V pour une seule roue excédant environ 0,82 indique le risque qu’un wagon de marchandises cause un déraillement par chevauchement du champignon de rail, ce qui peut se produire lors d’un mouvement d’au moins 6 pieds environNote de bas de page 21. Lorsqu’un tel déraillement se produit, on peut souvent apercevoir de petites marques de boudin de roue sur la surface du rail bas. Les longs wagons vides munis d’appareils de choc en bout de wagon (comme les wagons porte-automobiles et les wagons plats à parois de bout et à support central en A) sont tout particulièrement vulnérables à ces forces.

    1.13 Accidents avec mise en ligne droite

    Quand un train est tiré dans une courbe, les forces de traction ont tendance à étirer le train, ou à le « mettre en ligne droite », alors que les boudins de roue sont pressés contre l’intérieur du rail dans la courbe. Cette force latérale exercée sur le rail varie en fonction de l’effort de traction de la locomotive, de la pente de la voie, du degré de la courbe et des angles d’attelage entre les wagons. Si la force de traction que génèrent les locomotives est trop importante ou si l’effet de traction des attelages est considérable, le rapport L/V peut atteindre un niveau critique qui fait chevaucher la roue sur le champignon du rail intérieur dans une courbe et entraîne un déraillement du côté extérieur du rail bas. Les wagons vides peuvent être particulièrement plus vulnérables dans certaines situations.

    Les déraillements par mise en ligne droite sont causés par une grande charge de traction, qui peut être une charge statique ou, plus souvent, un effet de traction dynamique des attelages. Les déraillements par mise en ligne droite présentent les caractéristiques suivantesNote de bas de page 22 [traduction] :

    • Les déraillements par mise en ligne droite des wagons surviennent dans des courbes et non dans les tronçons de voie en alignement.
    • Une mise en ligne droite des wagons est souvent associée à l’application d’une puissance excessive en marche avant; souvent, ce sont les wagons de tête d’un train qui déraillent lorsqu’un train qui allait à faible vitesse accélère dans une section où la courbe est prononcée (scénario classique).
    • Ce sont généralement des wagons longs, vides ou légèrement chargés (comme des wagons porte-automobiles et des wagons plats à parois de bout et à support central en A) ou des combinaisons de wagons courts et longs qui déraillent.
    • Les wagons déraillés sont tirés par-dessus le rail bas, habituellement en ligne droite, mais il arrive parfois que le rail bas se renverse et que la roue du rail supérieur tombe entre les rails.
    • Il y a de petites marques de boudin de roue sur la surface du rail bas ou sur l’âme et le raccord âme-patin, selon que la roue a chevauché le rail ou que le rail s’est renversé.

    1.14 Accidents antérieurs avec mise en ligne droite sur la voie W100

    On a passé en revue l’historique des déraillements sur W100 ainsi que les rapports de clôture du CN sur 2 déraillements similaires survenus sur W100 en 2012 Note de bas de page 23 et en 2013 Note de bas de page 24.

    1.14.1 Accident avec mise en ligne droite de 2012

    Le 30 mai 2012, dans une rame de 23 wagons chargés ajoutés à la queue d’une autre rame de wagons qui était arrêtée sur W100, 8 wagons de marchandises avaient leurs freins à air serrés; ainsi, les conditions sous-jacentes d’un événement avec mise en ligne droite étaient présentes.

    Un employé d’exploitation du triage effectuait la manœuvre et tirait les wagons sur W100, conformément aux procédures de triage, vers la voie de refoulement ouest. Après un ralentissement de la manœuvre visant à permettre à l’employé de descendre du train à l’aiguillage W100, le sélecteur de vitesse de l’appareil Beltpack a été réglé de nouveau à 15 mi/h. Un déraillement par mise en ligne droite s’est produit alors que 5 longs wagons plats à support central en A vides munis d’appareils de choc en bout de wagon ont déraillé à l’intérieur de la courbe de 15 degrés.

    En guise de mesure corrective, le CN a mis en œuvre une procédure d’inspection obligeant le service de la mécanique à veiller à ce que les freins à air de tous les wagons se trouvant sur W100 soient desserrés avant que les wagons soient déplacés vers la voie de refoulement. Cependant, il semble que cette pratique ait pris fin entre mai 2012 et août 2019.

    1.14.2 Accident avec mise en ligne droite de 2013

    Le 14 septembre 2013, une rame de wagons chargés a été ajoutée immédiatement derrière une rame de longs wagons de plusieurs étages vides qui avait été laissée sur W100. Un employé d’exploitation du triage effectuait la manœuvre conformément aux procédures de triage et tirait les wagons sur W100 vers la voie de refoulement ouest. L’employé a progressivement réduit la vitesse de 15 mi/h à 4 mi/h. Il est ensuite descendu du train à l’aiguillage W100 et a réglé la vitesse à 15 mi/h. Presque aussitôt après l’augmentation de la vitesse, 8 wagons vides se trouvant derrière le groupe de traction ont été mis en ligne droite et ont déraillé du côté intérieur de la courbe de 15 degrés.

    Par la suite, le CN a diffusé un avis exigeant que les wagons chargés laissés sur W100 soient placés à l’extrémité nord (à l’avant) de la voie. Cette exigence devait faire en sorte que la majorité du poids d’une manœuvre se trouve près du groupe de traction de l’extrémité avant, ce qui permettrait de réduire les risques d’un événement avec mise en ligne droite.

    Une recherche de documents du CN n’a pas permis de retrouver l’avis diffusé par suite de cet événement. Puisque l’avis n’avait été diffusé qu’à l’échelle locale, et non par l’intermédiaire des responsables des pratiques d’exploitation du CN, l’information n’a pas été diffusée à plus grande échelle ni incluse dans le bulletin sommaire subséquent ou dans le manuel d’exploitation du triage MacMillan. Par conséquent, cette pratique a pris fin entre septembre 2013 et août 2019.

    1.14.3 Règlement sur le système de gestion de la sécurité ferroviaire (2001)

    Au moment où les 2 autres accidents avec mise en ligne droite similaires à l’accident à l’étude sont survenus sur W100 (en 2012 et en 2013), le Règlement sur le système de gestion de la sécurité ferroviaire (2001) était en vigueur. Le règlement stipulait ce qui suit (en partie) :

    […]

    2     Toute compagnie de chemin de fer doit mettre en œuvre et conserver un système de gestion de la sécurité qui comporte au moins les composantes suivantes :

    […]

    (e) un processus qui a pour objet :

    1. d’une part, de déterminer les problèmes et préoccupations en matière de sécurité, y compris ceux qui sont associés aux facteurs humains, aux tiers et aux modifications d’importance apportées aux opérations ferroviaires,
    2. d’autre part, d’évaluer et de classer les risques au moyen d’une évaluation du risque;

    (f) des stratégies de contrôle du risque;

    (g)  des mécanismes visant la déclaration des accidents et incidents, les analyses et les enquêtes s’y rapportant, et les mesures correctives;

    […]

    1.15 Simulations de la dynamique

    Les simulations de la dynamique sont théoriques et sont souvent réalisées dans le cadre d’enquêtes sur les déraillements. Les données utilisées pour la simulation comprennent diverses informations enregistrées (du CEL) et de relevés techniques de la voie, combinées à certaines hypothèses raisonnables fondées sur l’expérience. Toute simulation de la dynamique vise notamment à déterminer la combinaison de facteurs et de forces menant à des résultats correspondant le plus fidèlement aux preuves matérielles observées sur les lieux d’un accident. Habituellement, d’autres simulations sont aussi effectuées pour fournir des clarifications quant aux stratégies d’atténuation potentielles. Il s’agit de la démarche qui a été prise pour l’événement à l’étude.

    Pour contribuer à ces efforts, le BST a retenu les services d’un cabinet d’analyse et d’enquête en matière de sciences et d’ingénierie, Engineering Systems Incorporated (ESi), pour effectuer des simulations de la dynamique au moyen du logiciel Train Energy and Dynamics Simulator (TEDS).

    L’examen des lieux par le BST a permis de déterminer que 9 wagons de marchandises, aux positions 26 à 34 situés derrière le groupe de traction de triage à butte, ont déraillé sur la voie W100 à environ 400 pieds au sud de l’aiguillage W100. L’arrière du 26e wagon a déraillé vers la partie basse d’une longue courbe vers la gauche (dans le sens de la marche) dont l’alignement variait de 11 à 15 degrés. Les wagons aux positions 27 à 29 sont demeurés attelés ensemble, ont perdu leurs bogies, se sont séparés des wagons de tête et se sont renversés sur le côté à environ 2 pieds de la voie.

    Les simulations à l’ordinateur de la dynamique des trains ont été effectuées pour examiner les activités et mieux comprendre les facteurs ayant entraîné le déraillement. À des fins de comparaison, d’autres simulations ont aussi été effectuées en modifiant la conduite du train et la courbure de la voie, et en réduisant le tonnage du train.

    1.15.1 Données

    Les simulations de la dynamique des trains ont été effectuées à l’aide du modèle informatique TEDS afin de déterminer les forces d’attelage longitudinales et les rapports L/V à l’aide des éléments suivants :

    • Les données sur la conduite du train étaient fondées sur les données réelles enregistrées par le CEL de la manœuvre. Les données du CEL ont ensuite été modifiées afin d’évaluer d’autres scénarios de conduite du train.
    • Les données sur la voie provenaient d’un relevé de la voie effectué par le CN immédiatement après l’accident.
    • Les données sur les wagons de marchandises provenaient des données accessibles sur les wagons à l’étude dans la base de données Universal Machine Language Equipment Register (UMLER), wagons qu’on a identifiés au moyen du plan de manœuvre de l’événement à l’étude. Les profils de longueur et de tonnage de la manœuvre, utilisés pour la modélisation, ont aussi été élaborés à partir de ces données.
    • Dans les simulations, on présumait que les freins à main ou les freins à air n’avaient pas de composants usés, et que l’efficacité du freinage était à 100 %.

    1.15.2 Résumé des simulations et résultats

    Sept simulations ont été effectuées. Elles portaient principalement sur les longs wagons porte-automobiles vides, aux positions 25 à 29, qui étaient mis en cause dans l’accident. Les simulations 1 à 3 ont permis d’évaluer les causes et facteurs contributifs potentiels, alors que les simulations 4 à 7 ont permis d’évaluer de possibles stratégies d’atténuation. Les résultats de ces simulations sont présentés ci-dessous.

    1.15.2.1 1re simulation

    Dans la 1re simulation, on a modélisé la voie telle qu’elle a été relevée et le train réel sans freins serrés (il roulait librement). Le script relatif à la conduite du train était fondé sur la conduite du train réelle enregistrée par le CEL. La simulation a donné les résultats suivants :

    • Les forces d’attelage variaient d’environ −150 kips Note de bas de page 25 (compression) à +230 kips (traction) pour les wagons porte-automobiles de tête alors qu’ils avançaient dans la courbe de 15 degrés.
    • Le rapport L/V pour une seule roue dépassait 0,82 pour plusieurs roues sur de nombreux wagons, et il a atteint 1,01 à la roue gauche arrière (rail bas à l’intérieur de la courbe de 15 degrés) du bogie arrière du 28e wagon de la manœuvre.
    • Le rapport L/V pour un côté de bogie dépassait 0,65 pour plusieurs bogies, avec des valeurs maximales de 0,93 du côté gauche du bogie arrière du 28e wagon.
    1.15.2.2 2e simulation

    Dans la 2e simulation, on a modélisé la voie telle qu’elle a été relevée et le train réel avec le frein à main du 63e wagon serré. Le script relatif à la conduite du train était fondé sur la conduite du train réelle enregistrée par le CEL. La simulation a donné les résultats suivants :

    • Les forces d’attelage étaient légèrement différentes de celles de la 1re simulation, avec des forces maximales qui variaient de −130 kips (compression) à +260 kips (traction) pour les wagons porte-automobiles de tête alors qu’ils avançaient dans la courbe de 15 degrés.
    • Le rapport L/V pour une seule roue atteignait ou dépassait 0,82 pour plusieurs roues sur de nombreux wagons. Le rapport L/V pour une seule roue le plus élevé était de 1,13 pour la roue gauche arrière (rail bas à l’intérieur de la courbe de 15 degrés) du bogie arrière du 27e wagon.
    • Le rapport L/V pour un côté de bogie a dépassé 0,65 pour plusieurs bogies, avec des valeurs maximales de 1,06 pour le côté gauche du bogie arrière du 27e wagon.
    1.15.2.3 3e simulation

    Dans la 3e simulation, on a modélisé la voie telle qu’elle a été relevée et le train réel avec le frein à air du 63e wagon serré d’urgence. Le script relatif à la conduite du train était fondé sur la conduite du train réelle enregistrée par le CEL. La simulation a donné les résultats suivants :

    • Les forces d’attelage variaient de −115 kips (compression) à +245 kips (traction) pour les wagons porte-automobiles de tête alors qu’ils roulaient dans la courbe de 15 degrés.
    • Le rapport L/V pour une seule roue atteignait ou dépassait 0,82 pour plusieurs roues sur de nombreux wagons.
    • Le rapport L/V pour une seule roue le plus élevé était de 1,14 pour la roue arrière gauche (rail bas à l’intérieur de la courbe de 15 degrés) du bogie arrière du 26e wagon.
    • Le rapport L/V pour un côté de bogie a dépassé 0,65 pour plusieurs bogies, avec une valeur maximale de 1,08 pour le côté gauche du bogie arrière du 26e wagon.
    1.15.2.4 4e simulation

    Dans la 4e simulation, on a modélisé la voie telle qu’elle a été relevée et le train réel sans freins serrés (il roulait librement). Cependant, le script relatif à la conduite du train a été modifié de manière à ce que la vitesse de la locomotive augmente progressivement jusqu’au cran 4 sur le manipulateur. La simulation a donné les résultats suivants :

    • En réglant le manipulateur au cran 4 pour faire avancer la manœuvre progressivement, celle-ci a atteint une vitesse d’environ 8 ou 9 mi/h avant d’arriver à l’endroit où le déraillement est survenu. Le taux d’accélération était légèrement moins élevé que si l’on avait réglé le manipulateur au cran 8, mais la vitesse atteinte n’était pas beaucoup moins élevée que la vitesse réelle avant l’accident.
    • Avec le manipulateur réglé à un cran inférieur, les forces de compression et de traction des attelages étaient beaucoup plus faibles. Les forces d’attelage variaient de −15 kips (compression) à +85 kips (traction) pour les wagons porte-automobiles de tête alors qu’ils avançaient dans la courbe de 15 degrés.
    • Les rapports L/V pour une seule roue étaient tous inférieurs à 0,50.
    • Tous les rapports L/V pour les côtés de bogie étaient de moins de 0,45.
    1.15.2.5 5e simulation

    Dans la 5e simulation, on a modélisé la voie telle qu’elle a été relevée et un train à tonnage réduit sans les 12 wagons de queue; une telle composition aurait permis aux wagons d’emprunter les voies de refoulement est ou ouest, d’une longueur d’environ 5600 pieds chacune. En incluant les locomotives, le modèle de 70 wagons à tonnage réduit avait un poids de 5758 tonnes et faisait 5432 pieds.

    Le train à tonnage réduit était exploité sans freins serrés (il roulait librement). Le script relatif à la conduite du train était fondé sur la conduite réelle du train enregistrée par le CEL. La simulation a donné les résultats suivants :

    • Les forces maximales de compression et de traction des attelages étaient presque identiques à celles de la manœuvre réelle (simulations 1 à 3).
    • Sans modifier la conduite, le train à tonnage réduit (5758 tonnes) a atteint une vitesse maximale d’environ 11 ou 12 mi/h comparativement à la manœuvre réelle (7086 tonnes) qui avait atteint une vitesse de 10 mi/h.
    • Le rapport L/V le plus élevé pour une seule roue du train à tonnage réduit était de 0,90 pour la roue arrière gauche du bogie arrière du 27e wagon.
    • Le côté gauche du bogie arrière du 27e wagon a généré le rapport L/V maximal le plus élevé de 0,82. Les rapports L/V enregistrés pour les autres côtés du bogie étaient en deçà du seuil critique de 0,65.
    1.15.2.6 6e simulation

    Dans la 6e simulation, on a modélisé la voie telle qu’elle a été relevée et un train à tonnage réduit sans les 12 wagons de queue. En incluant les locomotives, le modèle de 70 wagons à tonnage réduit avait un poids de 5758 tonnes et une longueur de 5432 pieds, et aucun frein n’était serré (il roulait librement). Le script relatif à la conduite du train a été modifié de manière à régler progressivement le manipulateur de la locomotive jusqu’au cran 4. La simulation a donné les résultats suivants :

    • Un train à tonnage réduit dont la vitesse était limitée au cran 4 sur le manipulateur a atteint une vitesse d’environ 9 mi/h au moment d’arriver au lieu du déraillement.
    • Les forces d’attelage variaient de −15 kips (compression) à +70 kips (traction) pour les wagons porte-automobiles de tête alors qu’ils avançaient dans la courbe de 15 degrés.
    • Les rapports L/V pour une seule roue des wagons porte-automobiles de tête ne dépassaient pas 0,50.
    • Les rapports L/V pour les côtés de bogie étaient inférieurs à 0,40.
    1.15.2.7 7e simulation

    Dans la 7e et dernière simulation, on a modélisé la voie telle qu’elle a été relevée, sauf que la courbe où l’accident a eu lieu a été réalignée de manière à en réduire la courbure à une constante de 12 degrés. La manœuvre modèle était fondée sur la composition de la manœuvre réelle, sans freins serrés (elle roulait librement), et le script relatif à la conduite du train, sur la conduite réelle enregistrée par le CEL. La simulation a donné les résultats suivants :

    • L’exploitation de la manœuvre dans la courbe constante de 12 degrés en utilisant la conduite réelle enregistrée par le CEL a généré une vitesse qui correspondait aux autres simulations comparables. Par conséquent, toute différence observée au cours de cette simulation dans la force et/ou dans le rapport L/V est attribuable uniquement au changement de courbure et non à des différences notables dans la conduite.
    • Les forces d’attelage variaient de −180 kips (compression) à +230 kips (traction) pour les wagons porte-automobiles de tête alors qu’ils avançaient dans la courbe de 12 degrés. Ces résultats sont similaires à ceux des autres simulations comparables. On pouvait s’y attendre étant donné que la modification à la voie dans la courbe où l’accident est survenu n’aurait pas entraîné un changement notable dans les forces de résistance au roulement.
    • Les rapports L/V pour une seule roue ont atteint ou dépassé la limite critique de 0,82 pour plusieurs roues sur de nombreux wagons. Le rapport L/V pour une seule roue le plus élevé était de 0,88 dans le cas de la roue avant droite du bogie avant du 25e wagon.
    • Les rapports L/V pour les côtés de bogie ont dépassé 0,65 dans le cas de plusieurs bogies, avec une valeur maximale de 0,84 dans le cas du côté du bogie avant droit du 25e wagon.
    • Le fait de réaligner la voie et de réduire la courbure à une constante de 12 degrés dans la courbe où l’accident est survenu a réduit les valeurs L/V globalement. Cependant, on a constaté que, toutes les autres variables étant inchangées par ailleurs (tonnage, composition, conduite, vitesse, etc.), les valeurs L/V étaient équivalentes ou légèrement supérieures aux rapports L/V pour une seule roue de 0,82 et aux rapports L/V pour les côtés de bogie de 0,65 à différents endroits sur les wagons aux positions 25 et 28. Cette observation laisse entendre que même si l’on réduit la courbure dans la courbe où l’accident a eu lieu, de 15 degrés à une constante de 12 degrés, il y a toujours un risque de déraillement dans certaines conditions.

    Les résultats des forces longitudinales maximales de compression et de traction pour les wagons aux positions 24 à 29 ont été enregistrés pour chaque simulation et sont présentés à l’annexe C.

    Les résultats des rapports L/V maximum pour une seule roue et pour les côtés de bogie des wagons aux positions 24 à 29 pour chaque simulation sont présentés à l’annexe D.

    1.16 Rapports additionnels

    Le BST a conclu un contrat de sous-traitance pour produire le rapport d’ingénierie suivant dans le cadre de cette enquête :

    • Rapport d’Engineering Systems Incorporated (ESi) intitulé Train Dynamics Simulation Analysis Derailment of CN Job YDHF60 at MacMillan Yard, 15 August 2019, pour le Bureau de la sécurité des transports du Canada, daté du 17 février 2021.

    2.0 Analyse

    Le groupe de traction de triage à butte et les wagons en cause dans le déraillement étaient en bon état. L’analyse portera sur les circonstances ayant mené à l’accident, notamment :

    • l’utilisation du système de télécommande de locomotive (STL);
    • le positionnement vulnérable d’une rame de wagons plats et vides pour le transport de véhicules (c.-à-d. des wagons porte-automobiles) munis d’appareils de choc hydrauliques en bout de wagon;
    • l’ajout d’une rame de 34 wagons (3391 tonnes) derrière les wagons porte-automobiles avant que la manœuvre commence à se déplacer sur la voie W100 (W100).

    L’analyse portera également sur l’évaluation de la formation du chef de train et de son utilisation de l’appareil Beltpack ainsi que des lacunes dans le processus visant à diffuser l’information essentielle à la sécurité à plus grande échelle et communiquer les changements concernant l’emplacement des wagons de marchandises.

    2.1 L’accident

    Le 15 août 2019, vers 0 h 45, la manœuvre de triage de l’embranchement industriel ouest CN 2100 a été attelée à une rame de 34 wagons chargés à l’extrémité sud de la rame de 24 wagons porte-automobiles, qui avait été laissée sur W100. La rame de 34 wagons pesait 3391 tonnes et faisait 2074 pieds, alors que les 24 wagons porte-automobiles pesaient 1245 tonnes et faisaient 2252 pieds. Cinq minutes plus tard, le contremaître de la manœuvre CN 2100 a informé la coordonnatrice de trains par radio que les tâches avaient été accomplies. La coordonnatrice de trains en a ensuite informé les responsables du contrôle des wagons du CN.

    Vers 1 h, la manœuvre dans l’événement à l’étude est arrivée sur W100 avec une rame de 24 wagons, qui pesait 1938 tonnes et faisait 1652 pieds, en provenance de E008, et a été attelée aux 58 wagons qui se trouvaient sur W100. Une fois tous les wagons attelés, la manœuvre était composée d’un groupe de traction de triage à butte de 512 tonnes et d’un total de 82 wagons de marchandises de 6574 tonnes. Le poids total du groupe de traction et des wagons était de 7086 tonnes et la longueur, de 6166 pieds.

    Ni le chef de triage, ni l’apprenti chef de triage, ni l’employé d’exploitation du triage ne savaient, à ce moment, que 44 % du poids de la manœuvre se trouvait désormais dans la portion de 25 % en queue de train et que, par conséquent, la manœuvre avait un poids important en queue.

    Après avoir attelé le 24e wagon au 25e wagon, l’employé d’exploitation du triage s’est dirigé vers le sud, à pied, pour desserrer les freins à main des 3 wagons porte-automobiles (aux positions 25 à 27). Étant donné l’emplacement du frein à main à l’arrière du 27e wagon, et conformément aux Instructions générales d’exploitation (IGE) du CN, l’employé d’exploitation du triage devait soit monter à bord du wagon suivant (à la position 28), à l’avant, ou retourner à pied à l’avant du 27e wagon, à environ 90 mètres au nord. Compte tenu des observations sur les lieux, l’employé d’exploitation du triage a probablement monté à bord du 27e wagon (TTGX 995540), à l’avant, pendant que la manœuvre était arrêtée, ce qui cadre également avec un bulletin du CN pour l’ensemble du réseau exigeant qu’une manœuvre soit en position d’arrêt avant qu’un membre de l’équipe d’exploitation monte à bord ou en descende.

    Vers 1 h 08, la manœuvre a commencé à tirer les 82 wagons vers le nord en empruntant la courbe vers la gauche de 15 degrés à destination de la voie de refoulement ouest.

    À 1 h 10 min 29 s, il y a eu une interruption de la communication entre la locomotive de commande CN 6020 et l’appareil Beltpack. Après la panne de communication, le STL a fonctionné comme prévu en plaçant les locomotives au ralenti, en serrant les freins à air à fond et en serrant les freins indépendants du groupe de traction automatiquement.

    À 1 h 10 min 57 s, la manœuvre s’est immobilisée.

    Le groupe de traction de triage à butte et les 26 premiers wagons se sont immobilisés en demeurant attelés les uns aux autres, la locomotive de tête à environ 2100 pieds au nord de l’aiguillage W100 sur la voie de refoulement ouest. Le 26e wagon, un wagon porte-automobile vide (TTGX 995076) avait déraillé sans se renverser. Le bogie avant du bout A n’a pas déraillé, mais les 4 roues du bogie arrière du bout B ont déraillé avant de s’immobiliser dans le ballast, du côté ouest de la voie, tout juste au nord de l’aiguillage W100.

    À partir de l’aiguillage W100, on a constaté qu’il y avait des marques de roue dans le ballast en direction sud sur une distance d’environ 400 pieds. Ces marques de roue prenaient fin près de l’avant du 27e wagon, où on a aussi constaté de petites marques de boudin de roue sur la surface de roulement du rail ouest, dans le raccordement de sortie de la courbe de 15 degrés. Ces marques de boudin de roue étaient une indication que les roues gauches du bogie arrière du 26e wagon avaient chevauché le rail.

    Le bogie du bout A (avant) du 27e wagon est resté intact, n’a pas déraillé et a continué de rouler sur la voie sur une distance d’environ 40 pieds, séparé du wagon. Le bogie du bout B du 27e wagon était généralement intact; toutefois, dans l’accident, il a été heurté par l’avant du 31e wagon, a déraillé et s’est immobilisé sur la voie devant le 31e wagon.

    Les wagons aux positions 27, 28 et 29 sont demeurés attelés, ont perdu leurs bogies et se sont renversés avant de s’immobiliser du côté intérieur de la courbe de 15 degrés, le long de la voie. Compte tenu des observations sur les lieux, et similairement au 27e wagon, les bogies des 28e et 29e wagons sont demeurés intacts sur la voie jusqu’à ce qu’ils soient heurtés par les wagons de queue, après quoi ils ont été éparpillés lorsque les wagons déraillaient.

    Ces observations cadraient avec ce qui est considéré comme étant des caractéristiques courantes d’un déraillement avec mise en ligne droite.

    Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

    L’accident est survenu quand l’arrière du 26e wagon ainsi que les wagons aux positions 27 à 29 ont été mis en ligne droite et ont déraillé à l’intérieur d’une courbe de 15 degrés.

    Le 29e wagon s’est séparé du 30e wagon. Le 30e wagon s’est renversé et s’est immobilisé à l’extérieur de la courbe, parallèlement à la voie. Les wagons aux positions 31 à 34 ont déraillé en demeurant attelés ensemble, sans se renverser.

    Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

    L’employé d’exploitation du triage, qui se tenait sur le côté gauche du 27e wagon s’étant renversé, a été coincé sous le bout A (avant) du wagon et a subi des blessures mortelles.

    2.2 Utilisation du système de télécommande de locomotive

    L’appareil Beltpack comprend un sélecteur de vitesse, un sélecteur de marche avant et arrière et un sélecteur de frein avec une fonction de freinage d’urgence. L’opérateur de l’appareil Beltpack sélectionne une vitesse parmi plusieurs réglages prédéterminés : « Stop » (arrêt), « Coast » (marche sur l’erre), « Couple » (attelage; 1,5 mi/h), « Hump » (triage à butte; 2,0 mi/h), « HumpF » (triage à butte – rapide; 2,7 mi/h), 4 mi/h, 8 mi/h et « Max speed » (vitesse maximale; 15 mi/h).

    Les manœuvres dans la gare de triage sont habituellement effectuées à une vitesse de 15 mi/h, dans la mesure du possible, à moins d’indication contraire.

    Une fois la vitesse sélectionnée sur l’appareil Beltpack, le STL commande le manipulateur de la locomotive afin d’atteindre la vitesse sélectionnée. Quand la vitesse sélectionnée est atteinte, le STL contrôle automatiquement le manipulateur et les freins de locomotive de manière à maintenir la vitesse sélectionnée, avec une marge d’erreur de ±0,5 mi/h. Le STL s’adapte au relief de façon réactive, sans tenir compte de la longueur du train, du tonnage ou du jeu des attelages.

    Le système d’exploitation du STL est programmé de manière à ce que la vitesse sélectionnée soit atteinte le plus rapidement possible tout en respectant les paramètres programmés qui déterminent la vitesse produite. Quand l’opérateur augmente la vitesse sur l’appareil Beltpack, le STL peut mettre le manipulateur de la locomotive télécommandée en position maximale afin d’atteindre rapidement le cran 8 représentant la vitesse maximale. Cela contredit la formation que suivent les mécaniciens de locomotive, qui doivent habituellement éviter de régler le manipulateur ou de conduire le train de manière brusque.

    Une accélération brusque du STL dépend de l’écart entre la vitesse réelle du groupe de traction et la vitesse sélectionnée; toutefois, une accélération brusque est également possible si l’opérateur effectue une série de réglages pour augmenter la vitesse progressivement ou s’il sélectionne immédiatement « Max speed » (15 mi/h). Par conséquent, les opérateurs du STL, comme l’employé d’exploitation du triage dans l’événement à l’étude, ne peuvent pas contrôler directement l’augmentation progressive de la vitesse de la locomotive pour veiller à l’accélération lente et en douceur de la manœuvre.

    2.2.1 Renseignements consignés

    Un examen des données du consignateur d’événements de locomotive (CEL) de la locomotive menée (CN 6019) et des données du registre de la télécommande de locomotive Beltpack de la locomotive de commande (CN 6020) a permis de déterminer les faits suivants :

    • À 1 h 08 min 0 s, le sélecteur de vitesse de l’appareil Beltpack est passé à 1,5 mi/h (« Couple ») afin d’étirer les attelages avant de tirer les wagons en provenance de W100. Vingt-trois secondes plus tard, on a réglé le manipulateur de locomotive au cran 4 au moyen du STL; la manœuvre roulait à une vitesse de 1 mi/h.
    • À 1 h 08 min 26 s, la manœuvre n’avait pas beaucoup bougé; le sélecteur de vitesse de l’appareil Beltpack a été réglé à 2 mi/h (« Hump »).
    • À 1 h 08 min 42 s, la manœuvre n’avait toujours pas beaucoup bougé; le sélecteur de vitesse de l’appareil Beltpack a été réglé à « Max speed » (15 mi/h); la vitesse de la locomotive a commencé à augmenter.
    • À 1 h 08 min 57 s, le manipulateur de la locomotive était passé au cran 8; la vitesse avait augmenté à 3 mi/h.
    • À 1 h 09 min 31 s, le sélecteur de vitesse de l’appareil Beltpack était réglé à « Coast ».
    • À 1 h 09 min 35 s, le manipulateur de la locomotive était de retour en position de ralenti; la manœuvre roulait à une vitesse de 10 mi/h.
    • La manœuvre a continué de marcher sur l’erre (« Coast ») pendant 23 secondes. Pendant ce temps, la manœuvre avec un poids important en queue aurait été assujettie à des forces de compression et aurait subi une décélération à 8 mi/h. Pendant ce temps, comme il a été constaté dans les simulations de la dynamique, la force de compression était suffisante pour comprimer les appareils de choc en bout de wagon dont étaient munis les wagons porte-automobiles.
    • À 1 h 09 min 54 s, le sélecteur de vitesse de l’appareil Beltpack a de nouveau été réglé de « Coast » à 15 mi/h. À partir de ce moment et jusqu’à 1 h 10 min 13 s, le STL a fait augmenter la vitesse de la locomotive de la position de ralenti au cran 7, mais la manœuvre a continué de rouler à une vitesse de 8 mi/h.
    • À 1 h 10 min 16 s, le STL a fait augmenter la vitesse de la locomotive au cran 8 et la manœuvre a commencé à accélérer.

    Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

    Puisque les appareils de choc hydrauliques en bout de wagon avaient été comprimés pendant la décélération précédente, l’accélération de la manœuvre suivant le réglage du manipulateur de la locomotive au cran 8 a probablement causé un effet de traction soudain des attelages, ce qui a contribué au déraillement par mise en ligne droite.

    • À 1 h 10 min 29 s, alors que la manœuvre roulait à 10 mi/h, il y a eu une interruption de la communication entre l’appareil Beltpack et la locomotive de commande (CN 6020).

    Compte tenu des circonstances, les wagons aux positions 26 à 29 ont probablement déraillé peu après 1 h 10 min 16 s, entraînant l’interruption de la communication entre la locomotive de commande (CN 6020) et la télécommande de locomotive Beltpack à 1 h 10 min 29 s par suite du renversement du 27e wagon sur son côté.

    Comme le démontre cet accident, l’incapacité à contrôler l’accélération lente et en douceur d’une manœuvre peut poser problème et entraîner un accident avec mise en ligne droite, surtout dans la conduite d’une longue manœuvre ayant un poids important en queue au moment de négocier une courbe serrée dans une gare de triage.

    Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

    Une réaction brusque du STL, causée par la programmation en vigueur au moment de l’accident, a entraîné une accélération rapide et un effet de traction des attelages de la manœuvre ayant un poids important en queue, ce qui a contribué à la mise en ligne droite des wagons porte-automobiles au moment où ils sortaient de la courbe de 15 degrés.

    2.3 Simulations de la dynamique

    Vers 1 h, la manœuvre est arrivée sur W100 avec la rame de 24 wagons en provenance de E008. Elle a été attelée aux 58 wagons qui se trouvaient déjà sur W100. Au total, cette manœuvre avait un poids de 7086 tonnes et une longueur de 6166 pieds.

    Ni l’apprenti chef de triage ni l’employé d’exploitation du triage ne savaient, à ce moment, que 44 % du poids de la manœuvre se trouvait dans la portion de 25 % en queue de train, que la manœuvre avait un poids important en queue, et qu’une rame de wagons porte-automobiles vides relativement légers munis d’appareils de choc en bout de wagon se trouvait dans une position vulnérable entre 2 rames de wagons lourds.

    Selon les directives du CN, il aurait été interdit d’exploiter un train ayant une telle composition sur une ligne principale. Cela étant dit, les manœuvres d’une telle composition avec un poids important en queue peuvent être exploitées dans les gares de triage où, comme il a été démontré dans le cas présent et confirmé par des simulations de la dynamique, présentent des risques considérables pour les employés d’exploitation.

    Sept simulations différentes ont été menées dans le but de déterminer la combinaison de facteurs et de forces capables de produire des résultats qui correspondent étroitement à ce qui a été observé sur le site de l’accident. D’autres simulations ont aussi été menées afin de clarifier les stratégies possibles d’atténuation des risques.

    Les principaux résultats des simulations indiquaient les forces longitudinales de compression et de traction ainsi que les rapports entre les forces latérales et verticales (L/V) pour une seule roue et pour un côté de bogie.

    Un rapport L/V pour une seule roue supérieur à 0,82 indique le risque qu’une roue d’un wagon de marchandises cause un déraillement en chevauchant le champignon de rail. Un rapport L/V pour un côté de bogie supérieur à 0,65 indique le risque qu’un bogie de wagon de marchandises cause un déraillement en renversant un rail. Les wagons longs et vides munis d’appareils de choc à longue course en bout de wagon, comme les wagons porte-automobiles dans l’événement à l’étude, sont particulièrement vulnérables à ces forces.

    Les résultats des 7 simulations sont résumés ci-dessous, dans 2 grandes catégories. Les simulations 1 à 3 visaient à évaluer les causes et facteurs contributifs potentiels, alors que les simulations 4 à 7 visaient à évaluer de possibles stratégies d’atténuation.

    2.3.1 Simulations 1 à 3

    Dans la 1re simulation, on a modélisé la voie telle qu’elle a été relevée et le train réel sans freins serrés (il roulait librement). Le script relatif à la conduite du train était fondé sur la conduite du train réelle enregistrée par le CEL.

    Lors de l’examen du site après l’accident, on a constaté que le piston de cylindre de frein du 63e wagon (DJTX 318030, transportant de la ferraille d’acier) était déployé et que les semelles de frein étaient pressées contre les roues. Cette constatation a permis de déterminer que les freins à air étaient probablement toujours serrés dans une certaine mesure sur ce wagon.

    Pour observer l’effet que le serrage des freins a pu avoir sur le 63e wagon, la modélisation de la 2e simulation était la même que celle de la 1re simulation, sauf qu’un frein à main était serré sur le 63e wagon. De même, la modélisation de la 3e simulation était la même que celle de la 1re simulation, sauf que le frein à air était serré d’urgence sur le 63e wagon.

    Les résultats des simulations 1 à 3 sont résumés au tableau 1.

    Tableau 1. Résumé des simulations de la dynamique 1 à 3
    Simulation Force de compression maximale (kips) Force de traction maximale (kips) Rapport L/V maximal pour une seule roue Rapport L/V maximal pour un côté de bogie Lieu du rapport L/V maximal
    1 (manœuvre réelle, aucun serrage de freins) −150 +230 1,01 0,93
    • Une seule roue : roue arrière gauche (rail bas à l’intérieur de la courbe de 15 degrés) du bogie arrière du 28e wagon
    • Côté de bogie : côté du bogie gauche (rail bas à l’intérieur de la courbe de 15 degrés) du bogie arrière du 28e wagon
    2 (manœuvre réelle, frein à main serré sur le 63e wagon) −130 +260 1,13 1,06
    • Une seule roue : roue arrière gauche (rail bas à l’intérieur de la courbe de 15 degrés) du bogie arrière du 27e wagon
    • Côté de bogie : côté du bogie gauche (rail bas à l’intérieur de la courbe de 15 degrés) du bogie arrière du 27e wagon
    3 (manœuvre réelle, frein à air serré d’urgence sur le 63e wagon) −115 +245 1,14 1,08
    • Une seule roue : roue arrière gauche (rail bas à l’intérieur de la courbe de 15 degrés) du bogie arrière du 26e wagon
    • Côté de bogie : côté du bogie gauche (rail bas à l’intérieur de la courbe de 15 degrés) du bogie arrière du 26e wagon

    D’après les simulations 1 à 3, il y avait une forte possibilité que des conditions propices au déraillement étaient présentes avec ou sans le serrage de freins à main ou à air sur le 63e wagon. De plus, les rapports L/V pour une seule roue et pour les côtés de bogie étaient bien au-delà des seuils critiques.

    Fait établi : Autre

    Bien qu’on ait retrouvé le 63e wagon avec son piston de frein déployé, étant donné les forces dynamiques en jeu, que les freins soient serrés ou non sur le 63e wagon, les probabilités d’un déraillement étaient élevées.

    Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

    Les simulations de la dynamique ont permis de confirmer que le tonnage remorqué ajouté à l’arrière des wagons porte-automobiles sur W100 a fait en sorte que la manœuvre avait un poids important en queue, les wagons porte-automobiles légers se trouvant dans une position vulnérable, et que les rapports L/V pour une seule roue et pour les côtés de bogie dépassaient les seuils critiques.

    2.3.2 Simulations 4 à 7

    Les résultats des simulations 4 à 7 sont résumés au tableau 2.

    Tableau 2. Résumé des simulations de la dynamique 4 à 7
    Simulation Force de compression maximale (kips) Force de traction maximale (kips) Rapport L/V maximal pour une seule roue Rapport L/V maximal pour un côté de bogie Lieu du rapport L/V maximal
    4 (vitesse réduite [cran 4]) −15 +85 Tous moins de 0,50 Tous moins de 0,45 S.O.
    5 (tonnage réduit en retirant 12 wagons) −150 +217 0,90 0,82
    • Une seule roue : roue gauche arrière (rail bas à l’intérieur de la courbe de 15 degrés) du bogie arrière du 27e wagon
    • Côté de bogie : bogie arrière du 27e wagon
    6 (tonnage réduit et vitesse réduite [cran 4]) −15 +70 Tous moins de 0,50 Tous moins de 0,40 S.O.
    7 (réduction de la courbure [12 degrés]) −180 +230 0,88 0,84 On a constaté que les valeurs L/V étaient égales ou légèrement supérieures aux rapports L/V pour une seule roue de 0,82 et aux rapports L/V pour les côtés de bogie de 0,65 à plusieurs endroits sur les wagons aux positions 25 et 28.

    Selon la 4e simulation, la méthode la plus efficace pour réduire les risques de déraillement est la conduite de train moins brusque, selon laquelle on limite la vitesse réglée par le manipulateur de la locomotive au cran 4. La 6e simulation a produit des résultats similaires même si le tonnage était inférieur après le retrait des 12 wagons en queue.

    Fait établi : Autre

    D’après les simulations de la dynamique dans lesquelles la conduite de train était moins brusque, les forces de compression et de traction étaient considérablement moins élevées et les rapports L/V pour une seule roue et pour les côtés de bogie étaient bien en deçà des seuils maximum voulus.

    Dans la 5e simulation, on a modélisé une composition de train à tonnage réduit dans laquelle les 12 wagons de queue ont été retirés, ce qui a fait en sorte que la manœuvre pouvait emprunter la voie de refoulement est ou ouest.

    Fait établi : Autre

    Bien qu’une simulation de la dynamique avec tonnage réduit ait produit des rapports L/V pour une seule roue et pour les côtés de bogie considérablement supérieurs aux seuils maximum voulus, il aurait été possible de réduire davantage les valeurs L/V en réduisant encore plus le tonnage en queue.

    Dans la 7e simulation, on a modélisé la courbe où l’accident a eu lieu en la réalignant de manière à en réduire la courbure à une constante de 12 degrés. Bien que cela ait réduit les valeurs L/V globalement, on a constaté que, toutes les autres variables étant inchangées par ailleurs (tonnage, composition, conduite, vitesse, etc.), les valeurs L/V maximum restaient égales ou légèrement supérieures aux rapports L/V pour une seule roue de 0,82 et aux rapports L/V pour les côtés de bogie de 0,65 à plusieurs endroits pour les wagons aux positions 25 et 28.

    Fait établi : Autre

    Les résultats d’une simulation de la dynamique avec réduction de la courbure de 15 degrés à 12 degrés indiquaient qu’il y avait toujours un risque de déraillement dans certaines conditions.

    2.4 Combinaison de facteurs de causalité

    L’examen du site et les simulations de la dynamique ont permis de déterminer que l’accident et ses conséquences néfastes sont survenus en raison d’une combinaison de facteurs. La modification ou l’élimination de l’un ou l’autre de ces facteurs aurait produit un résultat différent.

    Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

    Les effets combinés de la réaction brusque du manipulateur en raison de la programmation du STL, la position vulnérable dans laquelle se trouvaient les wagons porte-automobiles vides munis d’appareils de choc hydrauliques en bout de wagon entre les 2 rames de wagons plus lourdes ainsi que le poids de la rame de 34 wagons en queue de train ayant été ajoutée à la manœuvre derrière les wagons porte-automobiles ont engendré les circonstances ayant donné lieu à cet accident.

    2.5 Formation de l’employé d’exploitation du triage

    L’employé d’exploitation du triage était qualifié, satisfaisait aux exigences en matière de repos et de condition physique, et connaissait bien les procédures de triage à butte. Il a commencé à travailler au CN comme apprenti chef de train le 18 juin 2018 et est devenu chef de train pleinement qualifié le 5 décembre 2018.

    Une fois devenu chef de train qualifié, du 5 décembre 2018 au 15 août 2019, l’employé a effectué au total 27 quarts de travail à la butte double comme employé d’exploitation du triage; on estime qu’il connaissait bien les tâches liées aux manœuvres de triage à butte.

    Même s’il n’avait que 14 mois d’expérience, l’employé d’exploitation du triage était considéré comme compétent et bien informé à l’égard de son travail.

    2.5.1 Guide de participation pour la formation d’opérateur Beltpack de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada

    Le guide de participation pour la formation d’opérateur Beltpack du CN aborde la conduite du train et explique l’effet que peuvent avoir les forces latérale et verticale et les forces de compression et de traction sur une rame de wagon en mouvement sur une voie. Le guide définit la mise en ligne droite comme étant la tendance d’une longue rame de wagons à court-circuiter une courbe quand elle est tirée (problème qui s’aggrave dans le cas d’un train lourd, lorsque des wagons légers précèdent des wagons très lourds en queue). Cependant, le guide de formation ne contient aucune directive précise pour déceler les conditions susceptibles de causer une mise en ligne droite ni aucun conseil pour l’éviter.

    Comme les manœuvres du CN dans la gare de triage étaient effectuées à une vitesse de 15 mi/h, dans la mesure du possible, la plupart des employés d’exploitation du triage à la gare de triage MacMillan sélectionnaient « Max speed » (15 mi/h) sur l’appareil Beltpack pour effectuer les manœuvres sur les voies de refoulement avant le triage à butte. De plus, lorsqu’il circule à l’intérieur d’une zone de protection des mouvements non accompagnés (PPZ), un mouvement est dispensé de s’arrêter en deçà de la moitié de la distance de visibilité.

    Dans l’événement à l’étude, l’employé d’exploitation du triage a sélectionné une faible vitesse pour amorcer le mouvement. Quand tous les wagons étaient en mouvement, le sélecteur de vitesse de la télécommande de locomotive a été réglé à 15 mi/h, conformément au réglage de vitesse de 15 mi/h presque toujours utilisé par les employés d’exploitation du triage du CN dans la PPZ de la voie de refoulement de triage à butte. Par conséquent, l’employé d’exploitation du triage a utilisé l’appareil Beltpack de la même manière que d’autres opérateurs pour des activités similaires qui ont été menées à bien sans conséquences néfastes.

    Fait établi : Autre

    L’employé d’exploitation du triage a effectué les manœuvres avant l’accident et pendant l’utilisation du STL au moyen de l’appareil Beltpack conformément aux exigences de la compagnie et à la formation qu’il a suivie.

    Même si l’employé d’exploitation du triage a respecté la formation et les méthodes normalisées de la compagnie, les simulations de la dynamique ont permis de déterminer qu’un réglage plus progressif de la vitesse sur la télécommande de locomotive est un choix plus sécuritaire pour conduire une manœuvre.

    Fait établi quant aux risques

    Si les compagnies de chemin de fer ne rappellent pas aux employés les options de conduite de train sécuritaire et en douceur pour les activités dans les gares de triage effectuées au moyen d’un STL, et si elles ne fournissent pas des directives plus précises pour déceler les conditions susceptibles d’engendrer une mise en ligne droite, les risques d’une autre mise en ligne droite demeurent présents.

    2.6 Diffusion à plus grande échelle des procédures essentielles à la sécurité

    Comme l’ont démontré la 4e simulation de la dynamique (réduction de la vitesse; cran 4 maximum) ainsi que les mesures correctives qu’a prises le CN par suite de 2 accidents avec mise en ligne droite à la gare de triage MacMillan, il existe d’autres méthodes d’exploitation pouvant être adoptées pour W100 afin de prévenir un accident similaire avec mise en ligne droite.

    À la suite de 2 accidents similaires avec mise en ligne droite survenus sur W100 en 2012 et en 2013, conformément au Règlement sur le système de gestion de la sécurité ferroviaire (2001)en vigueur à ce moment-là, le CN a mené des enquêtes sur ces accidents et a pris les mesures correctives suivantes :

    • En mai 2012, le CN a mis en œuvre une procédure d’inspection obligeant le service de la mécanique à s’assurer que les freins à air sont desserrés sur tous les wagons se trouvant sur W100 avant que ceux-ci puissent être déplacés vers la voie de refoulement.
    • En septembre 2013, le CN a diffusé un avis pour exiger que les wagons chargés se trouvant sur W100 soient placés à l’extrémité nord (à l’avant) de la voie. Le but de cette exigence était de s’assurer que la majorité du poids d’une manœuvre se trouve près du groupe de traction, en tête de la manœuvre plutôt qu’en queue, pour atténuer les risques de mise en ligne droite. Une recherche dans les documents du CN n’a pas permis de retrouver cet avis. Puisque l’avis n’a été diffusé qu’à l’échelle locale, et non par l’intermédiaire des responsables des pratiques d’exploitation du CN, cette information essentielle à la sécurité n’a pas été diffusée à plus grande échelle ni incluse dans le bulletin sommaire subséquent ou dans le manuel d’exploitation du triage MacMillan.

    Toutefois, la seule mention des mesures correctives que le CN avait mises en œuvre par suite des 2 accidents précédents sur W100 se trouve dans les rapports de clôture du CN respectifs. Ni l’une ni l’autre des mesures correctives n’a été consignée ni diffusée à plus grande échelle comme procédure essentielle à la sécurité à la gare de triage MacMillan. Par conséquent, ces 2 procédures ont cessé d’être suivies à un certain moment avant l’accident du 15 août 2019.

    Le fait de ne pas avoir diffusé à plus grande échelle l’exigence interdisant les wagons chargés à l’arrière des trains sur la voie W100 a éliminé une mesure de sécurité qui aurait pu prévenir cet accident.

    Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

    Malgré le fait qu’une procédure essentielle à la sécurité avait été mise en œuvre pour prévenir les accidents avec mise en ligne droite sur la voie W100 par suite d’un tel accident survenu en 2013, la procédure n’avait pas été bien consignée ni diffusée à plus grande échelle, et elle a cessé d’être appliquée, ce qui a probablement contribué à cet accident.

    2.7 Communication des changements concernant l’emplacement des wagons de marchandises

    Le 15 août 2019, vers 0 h 50, le contremaître de la manœuvre de triage de l’embranchement industriel ouest CN 2100 a communiqué par radio avec la coordonnatrice de trains pour l’informer que 34 wagons chargés venaient d’être attelés à l’extrémité sud de la rame de wagons porte-automobiles vides qui se trouvait sur W100. La coordonnatrice de trains en a ensuite informé les responsables du contrôle des wagons du CN, et le système Service Reliability Strategy (SRS) a été mis à jour de manière à inclure les wagons additionnels attelés à l’arrière des wagons porte-automobiles sur W100. Cependant, l’employé d’exploitation du triage, le chef de triage et l’apprenti chef de triage n’en ont pas été informés et pensaient qu’il y avait seulement 24 wagons porte-automobiles vides (1245 tonnes et 2252 pieds) sur W100. Ils avaient prévu atteler les 24 wagons en provenance de E008 (1938 tonnes et 1652 pieds) au wagon porte-automobile de tête sur W100 et tirer les 48 wagons (3183 tonnes et 3904 pieds) vers la voie de refoulement est en prévision du triage à butte.

    Ni l’employé d’exploitation du triage, ni le chef de triage, ni l’apprenti chef de triage ne savaient qu’il y avait déjà 58 wagons sur W100. Quand l’employé d’exploitation du triage a attelé les 24 wagons en provenance de E008 au wagon porte-automobile de tête sur W100, la manœuvre était désormais composée de 82 wagons de marchandises, avait un poids important en queue et faisait 6166 pieds, soit 500 pieds de plus de ce que peuvent supporter les voies de refoulement. Pour que la manœuvre puisse emprunter la voie de refoulement ouest, il aurait fallu dételer, au minimum, les 12 wagons de queue avant de commencer les manœuvres de triage à butte.

    La base de données du système SRS du CN a pour but de déterminer en temps réel l’emplacement des wagons sur toute voie du réseau nord-américain du CN; cependant, le processus comporte des lacunes qui peuvent faire en sorte que les équipes d’exploitation ne savent pas le nombre de wagons qu’elles manœuvreront.

    Fait établi quant aux risques

    Si l’emplacement des wagons dans une gare de triage n’est pas communiqué aux chefs de triage et aux employés d’exploitation du triage en temps opportun, les employés d’exploitation pourraient ne pas être en mesure d’évaluer les risques liés aux mouvements prévus et aux wagons manœuvrés, ce qui augmente la probabilité qu’un accident survienne.

    3.0 Faits établis

    3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

    Il s’agit des conditions, actes ou lacunes de sécurité qui ont causé l’événement ou y ont contribué.

    1. L’accident est survenu quand l’arrière du 26e wagon ainsi que les wagons aux positions 27 à 29 ont été mis en ligne droite et ont déraillé à l’intérieur d’une courbe de 15 degrés.
    2. L’employé d’exploitation du triage, qui se tenait sur le côté gauche du 27e wagon s’étant renversé, a été coincé sous le bout A (avant) du wagon et a subi des blessures mortelles.
    3. Puisque les appareils de choc hydrauliques en bout de wagon avaient été comprimés pendant la décélération précédente, l’accélération de la manœuvre suivant le réglage du manipulateur de la locomotive au cran 8 a probablement causé un effet de traction soudain des attelages, ce qui a contribué au déraillement par mise en ligne droite.
    4. Une réaction brusque du système de télécommande de locomotive, causée par la programmation en vigueur au moment de l’accident, a entraîné une accélération rapide et un effet de traction des attelages de la manœuvre ayant un poids important en queue, ce qui a contribué à la mise en ligne droite des wagons porte-automobiles au moment où ils sortaient de la courbe de 15 degrés.
    5. Les simulations de la dynamique ont permis de confirmer que le tonnage ajouté à l’arrière des wagons porte-automobiles sur la voie W100 a fait en sorte que la manœuvre avait un poids important en queue, les wagons porte-automobiles légers se trouvant dans une position vulnérable, et que les rapports entre les forces latérales et verticales (L/V) pour une seule roue et pour les côtés de bogie dépassaient les seuils critiques.
    6. Les effets combinés de la réaction brusque du manipulateur en raison de la programmation du système de télécommande de locomotive, la position vulnérable dans laquelle se trouvaient les wagons porte-automobiles vides munis d’appareils de choc hydrauliques en bout de wagon entre les 2 rames de wagons plus lourdes ainsi que le poids de la rame de 34 wagons en queue de train ayant été ajoutée à la manœuvre derrière les wagons porte-automobiles ont engendré les circonstances ayant donné lieu à cet accident.
    7. Malgré le fait qu’une procédure essentielle à la sécurité avait été mise en œuvre pour prévenir les accidents avec mise en ligne droite sur la voie W100 par suite d’un tel accident survenu en 2013, la procédure n’avait pas été bien consignée ni diffusée à plus grande échelle, et elle a cessé d’être appliquée, ce qui a probablement contribué à cet accident.

    3.2 Faits établis quant aux risques

    Il s’agit des conditions, des actes dangereux, ou des lacunes de sécurité qui n’ont pas été un facteur dans cet événement, mais qui pourraient avoir des conséquences néfastes lors de futurs événements. 

    1. Si les compagnies de chemin de fer ne rappellent pas aux employés les options de conduite de train sécuritaire et en douceur pour les activités dans les gares de triage effectuées au moyen d’un système de télécommande de locomotive, et si elles ne fournissent pas des directives plus précises pour déceler les conditions susceptibles d’engendrer une mise en ligne droite, les risques d’une autre mise en ligne droite demeurent présents.
    2. Si l’emplacement des wagons dans une gare de triage n’est pas communiqué aux chefs de triage et aux employés d’exploitation du triage en temps opportun, les employés d’exploitation pourraient ne pas être en mesure d’évaluer les risques liés aux mouvements prévus et aux wagons manœuvrés, ce qui augmente la probabilité qu’un accident survienne.

    3.3 Autres faits établis

    Ces éléments pourraient permettre d’améliorer la sécurité, de régler une controverse ou de fournir un point de données pour de futures études sur la sécurité.

    1. Bien qu’on ait retrouvé le 63e wagon avec son piston de frein déployé, étant donné les forces dynamiques en jeu, que les freins soient serrés ou non sur le 63e wagon, les probabilités d’un déraillement étaient élevées.
    2. D’après les simulations de la dynamique dans lesquelles la conduite de train était moins brusque, les forces de compression et de traction étaient considérablement moins élevées et les rapports L/V pour une seule roue et pour les côtés de bogie étaient bien en deçà des seuils maximum voulus.
    3. Bien qu’une simulation de la dynamique avec tonnage réduit ait produit des rapports L/V pour une seule roue et pour un côté de bogie considérablement supérieurs aux seuils maximum voulus, il aurait été possible de réduire davantage les valeurs L/V en réduisant encore plus le tonnage en queue.
    4. Les résultats d’une simulation de la dynamique avec réduction de la courbure de 15 degrés à 12 degrés indiquaient qu’il y avait toujours un risque de déraillement dans certaines conditions.
    5. L’employé d’exploitation du triage a effectué les manœuvres avant l’accident et pendant l’utilisation du système de télécommande de locomotive au moyen de l’appareil Beltpack conformément aux exigences de la compagnie et à la formation qu’il a suivie.

    4.0 Mesures de sécurité

    4.1 Mesures de sécurité prises

    4.1.1 Transports Canada

    Transports Canada (TC) a mené une enquête en vertu de la partie II du Code canadien du travail, et, par conséquent, a émis 2 instructions à l’intention de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (le CN) : une le 15 août 2019 et une autre le 11 octobre 2019.

    TC a examiné les mesures correctives mises en œuvre par le CN et les a jugées satisfaisantes.

    L’enquête en vertu de la partie II du Code canadien du travail a été achevée. Les résultats ont été communiqués à l’employeur et à son comité de santé et de sécurité au travail conformément aux exigences de la partie II du Code canadien du travail.

    4.1.2 Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada

    4.1.2.1 Wagons des entreprises clientes tirés dans le triage sud

    Le 15 août 2019, le CN a publié l’avis no 1908-15 comprenant des instructions à jour visant les wagons des entreprises clientes dételés dans le triage sud. L’avis, qui entrait en vigueur immédiatement, indiquait qu’à moins d’indication contraire :

    • Aucun wagon dételé dans le triage sud (S031 et S032) et dans le centre de distribution de métal (W109 et W110) ne doit être placé sur la voie W100 aux fins de triage à la butte double.
    • Les wagons qui se trouvent sur la voie W100 (W100) doivent être tirés seuls (ne pas y ajouter des wagons des autres voies aux fins de triage à butte).
    • Les mouvements de W100 à la voie de refoulement ouest ne doivent pas se faire à une vitesse supérieure à 8 mi/h.
    4.1.2.2 Instructions modifiées pour les wagons tirés sur la voie W100

    Le 21 août 2019, le CN a publié l’avis no 1908-21 comprenant des instructions à jour sur les wagons des entreprises clientes dételés qui sont tirés dans le triage sud et sur W100. Les instructions dans l’avis entraient en vigueur immédiatement et jusqu’à nouvel ordre.

    4.1.2.2.1 Nouvelles instructions additionnelles

    En raison des courbes prononcées à l’extrémité nord de W100, le CN a éliminé l’obligation d’arrêter le mouvement et de le remettre en marche avant de descendre du train à l’aiguillage W100 afin d’éliminer les forces exercées dans le train ainsi que le risque de déraillement dans de telles courbes. Voici les exigences de la nouvelle procédure :

    • L’employé d’exploitation du triage doit desserrer les freins à main sur W100, puis traverser vers le côté sud-est de la voie en accordant une attention particulière aux mouvements possibles sur les voies d’entrée et de sortie de l’atelier diesel.
    • On ne peut commencer à tirer les wagons en direction nord que lorsque l’employé d’exploitation du triage s’est rendu à pied vers l’est devant le groupe de traction; l’employé doit demeurer à une distance d’au moins 50 pieds de la partie avant de W100 pendant que les wagons sont tirés.
    • La rame de wagons entière en provenance de W100 doit avoir franchi le passage à niveau avant que l’employé d’exploitation du triage puisse se rendre à pied à l’aiguillage W100 pour l’aligner avec la voie de refoulement ouest en direction du sommet de la butte.
    4.1.2.2.2 Conduite du train pendant que des wagons sont tirés en provenance de la voie W100

    Une fois que le mouvement a commencé à avancer et que la vitesse a été réglée à 8 mi/h sur le sélecteur (vitesse maximale permise pour tirer des wagons de W100 vers la voie de refoulement ouest), le sélecteur de vitesse devrait uniquement être réglé à « Coast » (marche sur l’erre) pour arrêter le mouvement, sauf en cas d’urgence.

    • Ne pas régler le sélecteur à un cran représentant une vitesse inférieure à 8 mi/h.
    • Ne jamais utiliser le sélecteur de frein indépendant de la locomotive.

    Les instructions qui avaient été publiées précédemment dans l’avis no 1908-15 visant les wagons des entreprises clientes dételés dans le triage sud étaient en vigueur.

    4.1.2.3 Autres mesures correctives de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada

    Le CN a aussi mis en œuvre les mesures correctives suivantes :

    • Les documents de formation ont été mis à jour pour :
      • mettre en évidence les zones dangereuses des voies ayant des courbes prononcées;
      • recommander aux employés du CN de monter à bord de la locomotive ou du wagon de queue quand ils sont sur une voie ayant des courbes de plus de 12 degrés.
    • La courbe gauche de 15 degrés sur W100 a été reconfigurée pour en réduire la courbure de 15 degrés à 12 degrés.
    • Un processus a été élaboré pour vérifier que l’information essentielle à la sécurité communiquée par l’entremise d’avis est aussi incluse dans le bulletin sommaire subséquent et, au besoin, dans le manuel d’exploitation de la gare de triage respective.
    • En collaboration avec General Electric et Cattron Intellectual Property Corporation, le fabricant de l’appareil Beltpack, des modifications ont été apportées à la programmation du système de télécommande de locomotive (STL) afin de pouvoir augmenter la vitesse de manière plus progressive pendant les activités effectuées au moyen du STL.

    Le présent rapport conclut l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été publié pour la première fois le .

    Correction

    Après la publication du présent rapport le 5 avril 2022, le BST a reçu d’autres renseignements relatifs aux sections Analyse et Faits établis. Par conséquent, le BST a examiné le rapport et a conclu que l’enquête ne permettait pas de confirmer quel wagon, parmi ceux aux positions 26 à 29, a déraillé en premier par mise en ligne droite. Des révisions ont été apportées au rapport pour mettre en lumière cette conclusion.

    Les simulations 1 à 3 prédisaient toutes des rapports élevés entre les forces latérales et verticales (L/V) pour les wagons aux positions 26 à 29. Étant donné que les simulations au moyen du logiciel Train Energy and Dynamics Simulator (TEDS) permettent d’effectuer des calculs théoriques des forces qui peuvent être utilisées pour estimer les rapports L/V, l’enquête n’a pas permis de confirmer que l’arrière du 26e wagon a déraillé en premier. Toutefois, les calculs et les preuves recueillies ont permis de confirmer que l’arrière du 26e wagon a été mis en ligne droite, qu’il a déraillé comme les wagons aux positions 27 à 29 et que le chef de train a été coincé sous le 27e wagon à l’intérieur de la courbe de 15 degrés. Par conséquent, les sections 1.3 (Examen des lieux), 1.15 (Simulations de la dynamique), 1.15.2.3 (3e simulation), 2.1 (L’accident), 2.2.1 (Renseignements consignés), 2.3.1 (Simulations 1 à 3) et 3.1 (Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs) ont été modifiées pour en tenir compte.

    De plus, la section 2.3.1.1 (Effets des freins sur le 63e wagon) a été supprimée pour retirer le frein à air résiduel comme facteur contributif dans l’accident, car l’enquête n’a pas permis de déterminer quelle était la force de freinage présente sur le wagon après qu’il eut été immobile pendant 46 heures. Bien qu’on ait retrouvé le 63e wagon avec son piston de frein déployé, étant donné les forces dynamiques en jeu, que les freins soient serrés ou non sur le 63e wagon, les probabilités d’un déraillement étaient élevées. Des modifications ont aussi été apportées aux sections 1.7.2 (Guide de participation pour la formation d’opérateur Beltpack), 2.4 (Combinaison de facteurs de causalité), 2.5.1 (Guide de participation pour la formation d’opérateur Beltpack de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada), 2.6 (Diffusion à plus grande échelle des procédures essentielles à la sécurité), 3.1 (Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs) et 3.3 (Autres faits établis) en raison de ces changements.

    En outre, le Résumé a été révisé et modifié pour tenir compte des changements apportés au rapport final.

    Cette correction a été approuvée par le Bureau le ; la version corrigée du rapport a été publiée le .

    Annexes

    Annexe A – Composition de la manœuvre

    Position dans la manœuvre Numéro du wagon Longueur (pieds) Poids (tonnes) Type de wagon selon l’Association of American Railoads Type d’attelage Longueur de l’attelage (pouces) Jeu des appareils de choc en bout de wagon (pouces) Espacement central estimé entre les bogies (pieds)
    0,1 CN 6020 65,8 194 Locomotive SD-40 S.O. S.O. S.O. S.O.
    0,2 CN 232 56,2 124 Auxiliaire de traction S.O. S.O. S.O. S.O.
    0,3 CN 6019 65,8 194 Locomotive SD-40 S.O. S.O. S.O. S.O.
    1 ETTX 802338 93,7 77 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,3
    2 DJJX 950873 53,1 26 Wagon-tombereau GT E60 28,5   39,8
    3 CN 668139 93,8 107 Wagon plat E69 60,0 10 70,4
    4 ARMN 902141 64,9 122 Wagon réfrigérant E60 28,5 20 43,3
    5 MBKX 250298 52,1 120 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 15 39,1
    6 SHQX 9526 59,2 42 Wagon-citerne E60 28,5 S.O. 44,4
    7 TTGX 693526 93,8 67 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    8 UFTX 20017 53,1 26 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 39,8
    9 ATW 400563 70,8 139 Wagon-tombereau non équipé E68 43,0 S.O. 53,1
    10 CN 48974 87,8 142 Matériel d’entretien de la voie E68 43,0 S.O. 65,8
    11 OFOX 60869 45,4 128 Wagon-trémie couvert E60 28,5 S.O. 31,3
    12 DLRX 520021 57,8 37 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 43,4
    13 UTLX 211030 59,3 125 Wagon-citerne E60 28,5 S.O. 44,5
    14 TTGX 971983 93,7 67 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,3
    15 TTGX 978174 93,7 66 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,3
    16 TTGX 704952 93,8 64 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    17 TTGX 704952 93,8 65 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    18 UTLX 65730 43,0 31 Wagon-citerne E60 28,5 S.O. 32,3
    19 TR 86305 58,9 36 Wagon couvert équipé E60 28,5 15 44,2
    20 UTLX 670329 55,4 36 Wagon-citerne E60 28,5 S.O. 41,6
    21 SHPX 222517 59,3 125 Wagon-citerne E60 28,5 S.O. 44,5
    22 SHPX 222386 59,3 125 Wagon-citerne E60 28,5 S.O. 44,5
    23 CN 110732 59,0 31 Wagon-trémie couvert E60 28,5 S.O. 44,3
    24 NOKL 320202 57,2 134 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 42,9
    25 TTGX 996790 93,8 52 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    26 TTGX 995076 (déraillé) 93,8 52 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 66,0
    27 TTGX 995540 (déraillé) 93,8 52 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    28 TTGX 697632 (déraillé) 93,8 49 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    29 TTGX 922201 (déraillé) 94,7 56 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    30 CTTX 691364 (déraillé) 93,8 52 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    31 TTGX 982102 (déraillé) 93,8 55 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    32 CN 704642 (déraillé) 93,8 48 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    33 CN 704288 (déraillé) 93,8 54 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    34 TTGX 965970 (déraillé) 93,8 53 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    35 TTGX 994291 93,8 52 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    36 CTTX 692688 93,8 54 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    37 TTGX 953697 93,8 51 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    38 KCS 8688 93,8 51 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    39 BNSF 301247 93,8 50 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    40 NKCR 7583 93,8 50 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    41 TTGX 696834 93,8 49 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    42 TTGX 973991 93,8 55 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    43 TTGX 990478 93,8 55 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    44 NS 171683 93,7 48 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,3
    45 KCS 8750 93,8 50 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    46 TTGX 982199 93,8 55 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    47 TTGX 965704 93,8 53 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    48 TTGX 694744 93,8 49 Wagon porte-automobile E69 60,0 10 70,4
    49 UP 961356 68,1 56 Wagon couvert équipé E68 43,0 18 51,1
    50 LW 62160 73,0 40 Wagon plat E68 43,0 15 48,1
    51 CIGX 805097 70,4 38 Wagon-tombereau équipé E68 43,0 S.O. 55,8
    52 IC 3702 71,2 36 Wagon-tombereau non équipé E68 43,0 S.O. 53,4
    53 SMW 380543 52,9 125 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 14 39,7
    54 WC 22209 67,9 80 Wagon couvert équipé E68 43,0 15 46,3
    55 TFM 20024 69,7 72 Wagon couvert équipé E68 43,0 15 52,3
    56 AOK 473347 58,9 35 Wagon couvert équipé E60 28,5 15 44,2
    57 TR 86239 58,9 36 Wagon couvert équipé E60 28,5 15 44,2
    58 AOK 473319 58,9 35 Wagon couvert équipé E60 28,5 15 44,2
    59 CN 135305 56,8 126 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 43,9
    60 WC 54066 58,0 127 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 43,5
    61 DJJX 315816 57,2 123 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 42,9
    62 DJJX 3175 57,8 125 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 43,4
    63 DJTX 318030 (piston de cylindre de frein à air déployé) 57,2 128 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 42,9
    64 DJJX 19293 56,9 126 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 42,7
    65 DJTX 318161 57,2 128 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 42,9
    66 TFOX 3301 58,6 120 Wagon-tombereau GT E60 28,5 S.O. 43,9
    67 OMNX 1205 57,8 128 Wagon-tombereau non équipé E60 28,5 S.O. 43,4
    68 OMNX 597 57,8 127 Wagon-tombereau non équipé E60 28,5 S.O. 43,7
    69 OMNX 572 57,8 127 Wagon-tombereau non équipé E60 28,5 S.O. 43,4
    70 CN 135207 56,8 125 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 42,6
    71 IC 245902 56,4 125 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 42,3
    72 DJJX 19335 57,1 126 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 42,8
    73 DJJX 19324 56,9 126 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 42,7
    74 DJJX 19280 56,9 125 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 42,7
    75 WC 54137 58,0 127 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 43,5
    76 WC 54210 58,0 127 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 43,5
    77 WC 54174 58,0 127 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 43,5
    78 BLE 30122 56,6 127 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 42,4
    79 WC 54163 58,0 127 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 43,5
    80 WC 54225 58,0 127 Wagon-tombereau équipé E60 28,5 S.O. 43,5
    81 NOKL 734507 80,4 32 Wagon plat E68 43,0 10 60,3
    82 DWC 627570 79,6 32 Wagon plat E68 43,0 10 59,7
      Total 6166 7086          

    Annexe B – Données consignées

    Événement Heure Distance parcourue (pieds) Vitesse (mi/h) PCG* (lb/po2) PCF** (lb/po2) Manipulateur du CEL Commande sur la télécommande de locomotive
    Commande de vitesse 1 h 06 min 51 s 0  0  88  66  Ralenti « Stop »
    Ralenti 1 h 06 min 56 s 0 1 88 66 Ralenti S.O.
    Atteler et arrêter 1 h 06 min 59 s 0 0 88 66 Ralenti S.O.
    Commande de vitesse 1 h 08 min 0 s S.O. S.O. S.O.  S.O.  S.O.  1,50 mi/h – « Couple »
    T3 1 h 08 min 02 s 0 0 88 66 3 S.O.
    T4 1 h 08 min 23 s 53 1 88 0 4 S.O.
    Commande de vitesse 1 h 08 min 26 s S.O. S.O. S.O.  S.O.  S.O.  2 mi/h – « Hump »
    Commande de vitesse 1 h 08 min 42 s S.O. S.O. S.O.  S.O.  S.O.  15
    T5 1 h 08 min 47 s 53 2 88 0 5 S.O.
    T6 1 h 08 min 51 s 106 2 88 0 6 S.O.
    T7 1 h 08 min 54 s 106 2 88 0 7 S.O.
    Commande de vitesse 1 h 08 min 55 s S.O. S.O. S.O.  S.O.  S.O.  15
    T8 1 h 08 min 57 s 106 3 88 0 8 S.O.
    Réinitialisation de l’odomètre 1 h 09 min 30 s S.O. S.O. S.O.  S.O.  S.O.  8
    Commande de vitesse 1 h 09 min 30 s S.O. S.O. S.O.  S.O.  S.O.  1,50 mi/h – « Couple »
    Commande de vitesse 1 h 09 min 31 s S.O. S.O. S.O.  S.O.  S.O.   « Coast »*** 
    T1 1 h 09 min 32 s 475 10 88 0 1 S.O.
    Ralenti 1 h 09 min 35 s 528 10 88 0 Ralenti S.O.
    Commande de vitesse 1 h 09 min 54 s S.O. S.O. S.O.  S.O.  S.O.  15
    T3 1 h 09 min 56 s 792 8 88 0 3 S.O.
    T4 1 h 10 min 03 s 845 8 88 0 4 S.O.
    T5 1 h 10 min 06 s 898 8 88 0 5 S.O.
    T6 1 h 10 min 10 s 950 8 88 0 6 S.O.
    T7 1 h 10 min 13 s 950 8 88 0 7 S.O.
    T8 1 h 10 min 16 s 1003 9 88 0 8 S.O.
    T8 (événement probable) 1 h 10 min 19 s 1043 9 88 0 8 S.O.
    Interruption de la communication entre la télécommande de locomotive et CN 6020 1 h 10 min 29 s  1166 10 88   0  8 15
    Transition automatique du cran 8 au ralenti par suite d’une panne de communication 1 h 10 min 30 s S.O.  S.O. S.O.  S.O.  S.O.  15
    Ralenti 1 h 10 min 31 s 1219 11 88 0 Ralenti S.O.
    Serrage à fond automatique des freins à air 1 h 10 min 35 s 1267 11 86 0 Ralenti S.O.
    Serrage du frein indépendant 1 h 10 min 36 s 1267 11 84 5 Ralenti S.O.
    Accumulation de PCF lors du serrage automatique des freins à air 1 h 10 min 37 s 1320 11 82 10 Ralenti S.O.
    PCF 15 lb/po2 1 h 10 min 38 s 1320 10 82 15 Ralenti S.O.
    PCF 20 lb/po2 1 h 10 min 39 s 1320 10 80 20 Ralenti S.O.
    PCF 25 lb/po2 1 h 10 min 41 s 1373 9 78 25 Ralenti S.O.
    PCF 31 lb/po2 1 h 10 min 41 s 1373 9 76 31 Ralenti S.O.
    PCF 36 lb/po2 1 h 10 min 42 s 1373 9 76 36 Ralenti S.O.
    PCF 41 lb/po2 1 h 10 min 43 s 1373 8 75 41 Ralenti S.O.
    PCF 46 lb/po2 1 h 10 min 44 s 1373 8 75 46 Ralenti S.O.
    PCF 51 lb/po2 1 h 10 min 44 s 1373 8 73 51 Ralenti S.O.
    PCF 56 lb/po2 1 h 10 min 45 s 1426 8 73 56 Ralenti S.O.
    PCF 61 lb/po2 1 h 10 min 46 s 1426 7 71 61 Ralenti S.O.
    PCF 67 lb/po2 1 h 10 min 47 s 1426 7 69 67 Ralenti S.O.
    PCF 72 lb/po2 1 h 10 min 47 s 1426 7 69 72 Ralenti S.O.
    PCF 77 lb/po2 1 h 10 min 48 s 1426 6 67 77 Ralenti S.O.
    Serrage maximal du frein indépendant 1 h 10 min 49 s 1426 5 67 82 Ralenti S.O.
    Arrêt 1 h 10 min 57 s 1478 0 55 82 Ralenti S.O.

    * PCG : pression dans la conduite générale
    ** PCF : pression aux cylindres de frein
    *** « Coast » : signifie généralement marcher sur l’erre sans augmentation de la vitesse ou serrage des freins par l’opérateur. Cependant, le système peut serrer les freins automatiquement, au besoin, pour maintenir la vitesse sélectionnée, durant une accélération causée par le mouvement du train ou dans une pente descendante. Si le système de télécommande de locomotive (STL) est toujours réglé à « Coast », la manœuvre marchera sur l’erre avant de s’arrêter, parce qu’à mesure que la vitesse diminue, la faible vitesse devient la vitesse maximale permise par le STL sans serrage de freins.

    Annexe C – Forces maximales de compression et de traction pour les wagons aux positions 24 à 29 (toutes les simulations)

    Composition de la manœuvre Voie et conduite Type de force Forces maximales sur les véhicules sur la liste (kips)
    Train complet (véhicule) Véhicule 27 (24e wagon) Véhicule 28 (25e wagon) Véhicule 29 (26e wagon) Véhicule 30 (27e wagon) Véhicule 31 (28e wagon) Véhicule 32 (29e wagon)
    Train de l’incident : 2 locomotives, 1 auxiliaire de traction, 82 wagons, 6574 tonnes Voie réelle : conduite réelle selon le consignateur d’événements Traction 240 (3) 228 229 230 231 231 231
    Compression −207 (62) −125 −133 −136 −139 −143 −146
    Train de l’incident : 2 locomotives, 1 auxiliaire de traction, 82 wagons, 6574 tonnes Voie réelle : conduite réelle selon le consignateur d’événements avec serrage d’un frein à main sur le véhicule 66 (63e wagon) Traction 275 (17) 261 259 257 255 253 249
    Compression −181 (61) −111 −119 −122 −124 −127 −129
    Train de l’incident : 2 locomotives, 1 auxiliaire de traction, 82 wagons, 6574 tonnes Voie réelle : conduite réelle selon le consignateur d’événements avec serrage d’urgence du frein à air sur le véhicule 66 (63e wagon) Traction 257 (13) 247 245 244 244 246 246
    Compression −138 (67) −95 −115 −109 −112 −109 −108
    Train de l’incident : 2 locomotives, 1 auxiliaire de traction, 82 wagons, 6574 tonnes Voie réelle : augmentation graduelle de la vitesse jusqu’au cran maximal de 4 Traction 117 (3) 81 81 81 81 81 82
    Compression −21 (2) −8 −11 −4 −3 0 0
    Train à tonnage réduit : 2 locomotives, 1 auxiliaire de traction, 67 wagons, 5246 tonnes Voie réelle : conduite réelle selon le consignateur d’événements Traction 227 (17) 216 216 216 216 217 217
    Compression −168 (51) −129 −139 −143 −147 −150 −153
    Train à tonnage réduit : 2 locomotives, 1 auxiliaire de traction, 67 wagons, 5246 tonnes Voie réelle : augmentation graduelle de la vitesse jusqu’au cran maximal de 4 Traction 109 (3) 70 69 69 69 68 67
    Compression −20 (51) −8 −11 −4 −3 0 0
    Train de l’incident : 2 locomotives, 1 auxiliaire de traction, 82 wagons, 6574 tonnes Réduction de la courbe où l’incident est survenu à 12 degrés : conduite réelle selon le consignateur d’événements Traction 249 (15) 228 222 223 224 224 223
    Compression −195 (55) −141 −160 −165 −173 −175 −177

    Source : BST, à partir des données d’Engineering Systems Incorporated

    Annexe D – Rapports maximum entre les forces latérales et verticales (L/V) pour les wagons aux positions 24 à 29 (toutes les simulations)

    Composition de la manœuvre Conduite Véhicule (wagon) Bogie avant Bogie arrière
    Roue gauche avant Roue droite avant Roue gauche arrière Roue droite arrière Côté gauche du bogie Côté droit du bogie Roue gauche avant Roue droite avant Roue gauche arrière Roue droite arrière Côté gauche du bogie Côté droit du bogie
    Train de l’incident : 2 locomotives, 1 auxiliaire de traction, 82 wagons, 6574 tonnes Voie réelle : conduite réelle selon le consignateur d’événements 27 (24) 0,35 0,42 0,29 0,18 0,32 0,30 0,35 0,45 0,21 0,12 0,28 0,29
    28 (25) 0,52 0,86 0,79 0,66 0,66 0,76 0,52 0,58 0,65 0,28 0,58 0,43
    29 (26) 0,39 0,77 0,60 0,59 0,50 0,68 0,52 0,62 0,66 0,51 0,59 0,57
    30 (27) 0,57 0,68 0,87 0,39 0,72 0,54 0,71 0,56 0,89 0,29 0,80 0,41
    31 (28) 0,72 −0,81 0,92 0,55 0,82 0,63 0,84 0,62 1,01 0,59 0,93 0,60
    32 (29) 0,52 0,58 0,77 −0,22 0,65 0,40 0,35 0,45 0,14 0,07 0,24 0,25
    Train de l’incident : 2 locomotives, 1 auxiliaire de traction, 82 wagons, 6574 tonnes Voie réelle : conduite réelle selon le consignateur d’événements avec un frein à main serré sur le véhicule 66 (63e wagon) 27 (24) 0,35 0,42 0,29 0,18 0,32 0,30 0,35 0,44 0,19 0,11 0,27 0,28
    28 (25) 0,50 0,78 0,77 0,52 0,64 0,65 0,51 0,56 0,64 0,22 0,58 0,39
    29 (26) 0,52 0,74 0,77 0,51 0,65 0,62 0,59 0,61 0,76 0,47 0,68 0,55
    30 (27) 0,79 −0,83 1,12 0,30 0,93 −0,53 0,98 0,52 1,13 0,16 1,06 0,34
    31 (28) 0,42 0,69 0,70 0,50 0,57 0,59 0,59 0,61 0,76 0,56 0,68 0,59
    32 (29) 0,69 −0,77 0,91 −0,23 0,80 −0,54 0,35 0,45 0,14 0,07 0,24 0,25
    Train de l’incident : 2 locomotives, 1 auxiliaire de traction, 82 wagons, 6574 tonnes Voie réelle : Conduite réelle selon le consignateur d’événements avec serrage d’urgence du frein à air sur le véhicule 66 (63e wagon) 27 (24) 0,35 0,42 0,29 0,18 0,32 0,30 0,35 0,45 0,18 0,12 0,26 0,29
    28 (25) 0,55 0,64 0,82 0,25 0,69 0,45 0,54 0,58 0,68 0,30 0,62 0,43
    29 (26) 0,82 −0,95 1,10 0,37 0,95 −0,62 1,00 0,62 1,14 0,53 1,08 0,58
    30 (27) 0,50 −0,58 0,76 −0,19 0,64 −0,42 0,60 0,51 0,75 0,20 0,68 0,35
    31 (28) 0,75 −0,76 0,98 0,34 0,87 −0,50 0,88 0,59 1,03 0,53 0,95 0,56
    32 (29) 0,44 0,60 0,68 −0,20 0,56 0,40 0,35 0,44 0,15 0,07 0,25 0,25
    Train de l’incident : 2 locomotives, 1 auxiliaire de traction, 82 wagons, 6574 tonnes Voie réelle : augmentation graduelle de la vitesse jusqu’au cran maximal de 4 27 (24) 0,35 0,42 0,29 0,18 0,32 0,30 0,35 0,42 0,20 0,09 0,27 0,26
    28 (25) 0,37 0,45 0,53 −0,13 0,45 0,25 0,35 0,47 0,40 0,11 0,38 0,26
    29 (26) 0,35 0,49 0,43 −0,11 0,39 0,29 0,35 0,47 0,40 0,11 0,38 0,27
    30 (27) 0,35 0,49 0,43 −0,12 0,39 0,28 0,39 0,47 0,45 −0,11 0,42 0,27
    31 (28) 0,35 0,49 0,39 −0,11 0,37 0,29 0,35 0,46 0,33 −0,11 0,34 0,26
    32 (29) 0,35 0,48 0,34 0,09 0,35 0,29 0,35 0,44 0,15 0,06 0,25 0,25
    Train à tonnage réduit : 2 locomotives, 1 auxiliaire de traction, 67 wagons, 5246 tonnes Voie réelle : conduite réelle selon le consignateur d’événements 27 (24) 0,35 0,42 0,29 0,18 0,32 0,30 0,35 0,42 0,20 0,10 0,28 0,26
    28 (25) 0,37 0,45 0,53 −0,13 0,45 0,25 0,44 0,63 0,54 0,24 0,49 0,44
    29 (26) 0,35 0,49 0,43 −0,11 0,39 0,29 0,43 0,63 0,54 0,54 0,49 0,59
    30 (27) 0,35 0,49 0,43 −0,12 0,39 0,28 0,72 0,60 0,90 0,45 0,82 0,53
    31 (28) 0,35 0,49 0,39 −0,11 0,37 0,29 0,52 0,62 0,68 0,60 0,61 0,61
    32 (29) 0,35 0,48 0,34 0,09 0,35 0,29 0,35 0,45 0,14 0,07 0,24 0,25
    Train à tonnage réduit : 2 locomotives, 1 auxiliaire de traction, 67 wagons, 5246 tonnes Voie réelle : augmentation graduelle de la vitesse jusqu’au cran maximal de 4 27 (24) 0,35 0,42 0,29 0,18 0,32 0,30 0,35 0,42 0,19 0,09 0,27 0,26
    28 (25) 0,36 0,46 0,49 −0,12 0,43 0,25 0,35 0,47 0,36 0,10 0,36 0,27
    29 (26) 0,35 0,49 0,40 −0,11 0,38 0,29 0,35 0,46 0,36 0,10 0,35 0,26
    30 (27) 0,35 0,49 0,40 −0,09 0,38 0,29 0,35 0,46 0,37 −0,11 0,36 0,26
    31 (28) 0,35 0,49 0,38 −0,10 0,37 0,29 0,35 0,46 0,32 −0,10 0,33 0,26
    32 (29) 0,35 0,48 0,34 0,07 0,34 0,29 0,35 0,44 0,15 0,06 0,25 0,25
    Train de l’incident : 2 locomotives, 1 auxiliaire de traction, 82 wagons, 6574 tonnes Réduction de la courbe où l’incident est survenu à 12 degrés : conduite réelle selon le consignateur d’événements 27 (24) 0,35 0,40 0,21 0,11 0,28 0,26 0,35 0,39 0,15 0,05 0,24 0,22
    28 (25) 0,52 0,88 0,79 0,80 0,66 0,84 0,50 0,61 0,63 0,52 0,57 0,57
    29 (26) 0,40 0,70 0,60 0,48 0,50 0,59 0,51 0,63 0,64 0,59 0,58 0,61
    30 (27) 0,44 0,71 0,65 0,50 0,55 0,60 0,55 0,61 0,69 0,53 0,62 0,57
    31 (28) 0,55 0,72 0,84 0,53 0,70 0,62 0,65 0,62 0,81 0,57 0,73 0,60
    32 (29) 0,43 0,71 0,65 0,48 0,55 0,59 0,35 0,43 0,11 0,06 0,22 0,23

    Source : BST, à partir des données d’Engineering Systems Incorporated