Recommandation A07-04 du BST

Prise de décision du pilote

la Direction Générale de l'Aviation Civile française et d'autres autorités de l'aviation civile obligent les pilotes de transport aérien à suivre une formation leur permettant d'être mieux préparés à prendre la décision d'atterrir dans des conditions météo qui se dégradent.

Rapport d’enquête sur la sécurité du transport aérien
Date à laquelle la recommandation a été émise
Date de la dernière réponse
Mars 2012
Date de la dernière évaluation
Novembre 2011
Évaluation de la réponse à la recommandation
Attention en partie satisfaisante
État du dossier
En veilleuse

Les réponses présentées sont celles des intervenants du BST dans le cadre de communications écrites et sont reproduites intégralement. Le BST corrige sans indiquer les erreurs typographiques dans le contenu qu’il reproduit, mais utilise des crochets [ ] pour indiquer d’autres changements ou montrer qu’une partie de la réponse a été omise parce qu’elle n’était pas pertinente.

Résumé de l’événement

L'Airbus A340-313 d'Air France immatriculé F-GLZQ, de numéro de série 0289, quitte Paris en France à 11 h 53, temps universel coordonné (UTC), pour effectuer le vol 358 d'Air France, une liaison à horaire fixe à destination de Toronto (Ontario). À bord se trouvent 297 passagers et 12 membres d'équipage. Avant de partir, l'équipage obtient les prévisions météo à l'arrivée qui font état d'un risque d'orages. En approche finale, l'équipage est avisé que l'équipage d'un avion qui vient de se poser a signalé que le freinage était mauvais. Le radar météorologique du vol 358 d'Air France montre de fortes précipitations qui atteignent la piste par le nord-ouest. À quelque 200 pieds au-dessus du seuil de piste, lors de l'approche ILS (système d'atterrissage aux instruments) de la piste 24L, avec le pilote automatique et la poussée automatique débrayés, l'avion dévie de sa trajectoire pour se retrouver au-dessus de la trajectoire de descente, et la vitesse sol se met à augmenter. L'avion franchit le seuil de piste à quelque 40 pieds au-dessus de la trajectoire de descente.

Lors de l'arrondi, l'avion traverse une zone de forte pluie, et le contact visuel avec la piste est fortement réduit. L'équipage décide de poursuivre l'atterrissage. L'avion touche des roues à quelque 3800 pieds au-delà du seuil de la piste de 9000 pieds. L'avion ne peut s'arrêter sur la piste et sort en bout de piste à une vitesse sol d'environ 80 nœuds. L'avion finit sa course dans un ravin à 20 h 2 UTC (16 h 2, heure avancée de l'Est) et prend feu. Tous les passagers et membres d'équipage réussissent à évacuer l'appareil avant que le feu n'atteigne les voies d'évacuation. Deux membres d'équipage et 10 passagers sont grièvement blessés lors de l'accident et de l'évacuation.

Le Bureau a terminé son enquête. Le rapport d'enquête A05H0002 a été publié le 12 décembre 2007.

Justification de la recommandation

D'après les indices perçus ou compris, on peut dire que les décisions prises dans le poste de pilotage ont deux composantes : l'évaluation de la situation et le choix du plan d'action. Les indices, ou les renseignements sur la situation, peuvent varier de clairs à ambigus. Des indices clairs permettent de prendre des décisions avec facilité. Les indices ambigus sont beaucoup plus difficiles à saisir, à comprendre et à assimiler. Par conséquent, plus un indice est ambigu ou complexe, plus il y a de risques que la décision soit loin d'être idéale.

On a déjà beaucoup écrit sur le processus de prise de décision des pilotes en général au moment de l'atterrissage. Quoi qu'il en soit, l'accident du 2 août 2005 et d'autres accidents indiquent clairement qu'il existe encore des risques associés à la prise de décision. Le Bureau croit que la capacité à saisir et à interpréter des indices essentiels dans le processus entourant la décision d'atterrir est insuffisante, notamment quand ces indices sont ambigus ou ne sont pas immédiatement dissuasifs. En conséquence, des pilotes vont continuer à atterrir dans des conditions météo qui se dégradent, une fois que la décision d'atterrir aura été prise, même si des indices révèlent qu'une remise des gaz ou une approche interrompue devrait être exécutée. En conséquence, le Bureau a recommandé que :

la Direction Générale de l'Aviation Civile française et d'autres autorités de l'aviation civile obligent les pilotes de transport aérien à suivre une formation leur permettant d'être mieux préparés à prendre la décision d'atterrir dans des conditions météo qui se dégradent.
Recommandation A07-04 du BST

Réponses et évaluations antérieures

Réponse de la Direction Générale de l'Aviation Civile

Dans sa réponse, la Direction Générale de l'Aviation Civile (DGAC) indique que, pour permettre une prise de décision optimale, l'équipage doit avant tout disposer des informations les plus pertinentes au moment adéquat. Elle estime que des améliorations sont possibles dans ce domaine comme indiqué en réponse à la recommandation A07-02.

Le recueil des informations pertinentes et la prise de décision sont au cœur même des principes de formation initiale et continue du personnel navigant technique. Il est aujourd'hui admis que des formations théoriques sur la gestion des ressources de l'équipage, la gestion des erreurs et des menaces, l'enseignement basé sur l'acquisition des compétences sont des compléments efficaces permettant à l'équipage de mieux gérer les situations dans lesquelles la prise de décision est critique.

La DGAC envisage d'étendre ces concepts largement utilisés dans la formation de pilote en équipage multiple, à d'autres types de formation aux licences et aux qualifications d'instructeurs, de telle sorte qu'un pilote y soit sensibilisé aux différents stades de sa formation. La DGAC sensibilise également les examinateurs à ces concepts. Des mesures similaires au niveau européen sont attendues.

Parmi les éléments de décision plus techniques à mettre à la disposition des équipages lorsque les conditions se dégradent, la DGAC a également retenu une meilleure sensibilisation sur les atterrissages de précaution, ainsi qu'une meilleure connaissance des performances réelles de freinage. En conséquence, la DGAC envisage de rendre ces exercices obligatoires lors des entraînements et contrôles périodiques.

De façon générale, il convient également de communiquer sur le caractère souhaitable et positif de la décision de remise de gaz, comme la DGAC l'a par exemple fait dans le cadre de ses travaux et publications consacrés aux approches non stabilisées.

Évaluation du Bureau

La réponse de la DGAC à cette recommandation est une indication claire qu'un meilleur entraînement du personnel navigant technique est à la source de mesures devant être prises si l'on veut améliorer leur prise de décision. La DGAC envisage donc d'étendre les concepts tels la gestion des ressources de l'équipage, la gestion des erreurs et des menaces et l'enseignement basé sur l'acquisition des compétences à d'autres types de formation aux licences et aux qualifications d'instructeurs, de telle sorte qu'un pilote y soit sensibilisé aux différents stades de sa formation. La DGAC sensibilise également les examinateurs à ces concepts. Elle indique par ailleurs que des mesures similaires au niveau européen sont attendues. La DGAC rapporte qu'il convient également de communiquer sur le caractère souhaitable et positif de la décision de remise de gaz, comme la DGAC l'a par exemple fait dans le cadre de ses travaux et publications consacrés aux approches non stabilisées.

En conséquence, le Bureau juge que les mesures prises par la DGAC permettront de réduire les lacunes faisant l'objet de la recommandation A07-04. Le Bureau estime donc que la réponse de la DGAC dénote une intention satisfaisante.

Suivi exercé par le BST

Le personnel du BST continuera son suivi des accidents dans lesquels des causes et des lacunes de sécurité ont été soulevées dans cette recommandation, afin de pouvoir déterminer si les mesures prises jusqu'à maintenant ainsi que celles contemplées par la DGAC auront un effet positif sur la réduction de ce type d'accident, à court et long terme.

Octobre 2010 : Réponse de la direction générale de l'Aviation civile à la recommandation A07-04

La DGAC mentionne que pour optimiser la prise de décision, l'équipage doit disposer des informations les plus précises au moment adéquat. La DGAC estime que des améliorations sont possibles dans ce domaine.

Le recueil des informations pertinentes et la prise de décision sont au cœur même des principes de formation initiale et continue du personnel navigant technique. Il est aujourd'hui admis que des formations théoriques sur la gestion des ressources de l'équipage, la gestion des erreurs et des menaces ainsi que la formation assistée par ordinateur sont des compléments efficaces permettant à l'équipage de mieux composer avec les situations dans lesquelles la prise de décision est critique. La DGAC prévoit appliquer ces concepts à la formation de pilote en équipage multiple et à la formation relative aux licences d'instructeurs. L'intention serait d'accroître la sensibilisation aux différents stades de la formation. La DGAC prévoit également exposer ses examinateurs en vol à ces concepts. Des mesures similaires au niveau européen sont attendues.

De plus, la DGAC est d'avis qu'une plus grande sensibilisation aux techniques d'atterrissage recommandées et aux performances réelles de freinage compte parmi les éléments essentiels à l'optimisation de la prise de décision des équipages lorsque les conditions se dégradent. En conséquence, la DGAC prévoit rendre ces sujets obligatoires dans le cadre des exercices et des examens relatifs à la formation des pilotes.

En général, comme elle l'a fait en ce qui a trait à la gestion des approches non stabilisées, la DGAC prévoit promouvoir le fait que la décision de « remettre les gaz » peut être souhaitable lorsque les conditions météo se dégradent.

Mars 2011 : Réévaluation du Bureau en réponse à la recommandation A07-04

Le Bureau remarque que la DGAC a l'intention d'introduire la gestion des ressources de l'équipage, la gestion des erreurs et des menaces ainsi que la formation assistée par ordinateur, qui sont des compléments efficaces permettant à l'équipage de mieux composer avec les situations dans lesquelles la prise de décision est critique. Le Bureau remarque que la DGAC prévoit appliquer ces concepts à la formation de pilote en équipage multiple et à la formation relative aux licences d'instructeurs. La mention de ces intentions est encourageante, mais le Bureau est déçu de l'absence de mesures opportunes visant à réduire les risques identifiés dans sa recommandation A07-04.

Le Bureau estime donc que la réponse de la DGAC dénote une intention satisfaisante.

Mars 2011 : Suivi exercé par le BST

Le personnel du BST communiquera avec la DGAC pour effectuer un suivi de ses mesures prévues et pour déterminer si ces dernières auront un effet positif sur la réduction de ce type d'accident, à court et long terme.

Réponse et évaluation les plus récentes

Novembre 2011 : Réponse de la Direction générale de l'Aviation civile à la recommandation A07‑04

La DGAC a fourni des liens vers des pages de son site Web qui décrivent les travaux réalisés pour répondre à la recommandation A07-04. Elle a aussi indiqué qu'elle ne prendrait plus de mesures au sujet de la recommandation A07-04.

La DGAC a bien reçu la lettre du 21 octobre relative aux recommandations de l'accident de l'A340 à Toronto.

Voici le lien qui donne l'état d'avancement de ce dossier sur le site internet de la DGAC : http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/e2007_006.pdf

Vous pourrez constater sur cette page qu'elles ont été closes (pour la DGAC) suite au symposium DSAC de 2010
http://www.developpement-durable.gouv.fr/25-novembre-2010-Conditions.html

Mars 2012 : Réévaluation du Bureau de la réponse à la recommandation A07-04

Le Bureau est heureux de la publication du guide de meilleures pratiques titré Conditions météorologiques dégradées, Aide à la décision des équipages pour l'approche et l'atterrissage qui sera distribué aux exploitants et qui pourra être consulté sur son site Web. Ce guide est fondé sur les conclusions du groupe de travail et vise à mieux aider les membres d'équipage au cours du processus de prise de décision. Il sera sûrement un outil précieux pour les pilotes à court et à moyen termes.

Dans sa réponse du mois d'octobre 2010, la DGAC indique qu'elle a l'intention de lancer de nouvelles formations sur la gestion des ressources d'équipages, la gestion des erreurs et des menaces ainsi que la formation assistée par ordinateur, qui sont des compléments efficaces permettant à l'équipage de mieux composer avec les situations dans lesquelles la prise de décision est critique. La DGAC prévoit appliquer ces concepts à la formation de pilotes en équipage multiple et à la formation relative aux licences d'instructeurs. Toutefois, dans sa plus récente réponse, la DGAC n'a fourni aucun renseignement sur l'évolution de cette initiative.

Le Bureau est déçu de constater que la DGAC ne prendra aucune mesure additionnelle pour obliger les pilotes de transport aérien à suivre une formation leur permettant d'être mieux préparés à prendre la décision d'atterrir dans des conditions météo qui se dégradent comme le demande la recommandation A07-04. La DGAC juge que le dossier est clos.

Le Bureau estime que la réponse est en partie satisfaisante.

État du dossier

Le BST surveillera les progrès que TC accomplit à l’égard de ses mesures planifiées.

Le présent dossier est en veilleuse.