Rapport d’enquête sur la sécurité du transport aérien A18A0088

Atterrissage avec train d’atterrissage partiellement sorti
PAL Airlines Ltd.
Bombardier DHC-8-315, C-FPAE
Stephenville (Terre-Neuve-et-Labrador)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Le 15 novembre 2018, l’avion Bombardier DHC-8-315 (immatriculation C‑FPAE, numéro de série 562) de PAL Airlines Ltd. effectuant le vol PVL1922 selon les règles de vol aux instruments, a décollé de Churchill Falls (Terre-Neuve-et-Labrador; T.‑N.‑L.) en direction de Deer Lake (T.-N.-L.). L’avion comptait 4 membres d’équipage et 47 passagers.

    À 10 h 57, heure normale de Terre-Neuve, au cours de l’approche à Deer Lake, l’équipage de conduite a commandé la sortie du train d’atterrissage. Cependant, un voyant d’avertissement du système de référence air-sol ainsi que des voyants de signalisation se sont allumés, indiquant que le train d’atterrissage avant n’était pas en position sortie et verrouillée. L’équipage a effectué une remise des gaz et a entamé un circuit d’attente afin de corriger le problème. À 12 h 02, il a demandé un déroutement vers Stephenville (T.‑N.‑L.) et a déclaré une urgence. À 12 h 30, l’avion a atterri à Stephenville avec le train d’atterrissage avant partiellement sorti. Au toucher des roues, le train d’atterrissage avant s’est complètement affaissé et la structure du nez de l’aéronef est entrée en contact avec la piste. L’avion a alors glissé avant de s’immobiliser environ à mi-chemin sur la piste.

    Tous les occupants sont sortis de l’avion et aucune blessure n’a été signalée. L’appareil a été légèrement endommagé. Il n’y a pas eu d’incendie après l’impact. La force de l’impact n’était pas suffisante pour activer automatiquement la radiobalise de repérage d’urgence. L’accident s’est produit pendant les heures de clarté.

    1.0 Renseignements de base

    1.1 Déroulement du vol

    L’annexe 13 de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) exige des États qui effectuent des enquêtes sur les accidents de protéger les enregistrements des conversations dans le poste de pilotageNote de bas de page 1. Le Canada se conforme à cette exigence en protégeant tous les équipements d’enregistrement embarqués – y compris les enregistreurs de conversations de poste de pilotage (CVR) – privilégiés en vertu de la Loi sur le Bureau canadien d’enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports. Même si le BST peut faire usage de toute l’information que contiennent les enregistreurs de bord dans l’intérêt de la sécurité des transports, il n’est pas autorisé à divulguer sciemment toute partie d’un enregistrement de bord qui n’a aucun rapport avec les causes ou les facteurs contributifs d’un accident ou avec la détermination des lacunes de sécurité.

    La raison pour laquelle on protège l’information que contiennent les CVR se fonde sur le principe selon lequel cette protection aide à assurer que les pilotes continuent de s’exprimer librement et que ces données essentielles sont mises à la disposition des enquêtes de sécurité. Le BST a toujours pris très au sérieux ses obligations en la matière et a rigoureusement limité l’usage des données des CVR dans ses rapports. À moins que le contenu du CVR soit requis pour étayer un fait établi et cerner une lacune importante à la sécurité, il n’est pas inclus dans le rapport du BST.

    Pour valider les enjeux de sécurité soulevés par la présente enquête, le BST s’est servi de l’information provenant du CVR dans son rapport. Dans chaque cas, les données ont été soigneusement examinées pour s’assurer qu’elles étaient nécessaires pour promouvoir la sécurité des transports.

    Le 15 novembre 2018, un aéronef BombardierNote de bas de page 2 DHC-8-315 (immatriculation C‑FPAE, numéro de série 562) du transporteur aérien PAL Airlines Ltd. (PAL) effectuait le vol PVL1922 de l’aéroport de Wabush (CYWK) (T.-N.-L.), vers l’aéroport international de St. John’s (CYYT), (T.‑N.‑L.), avec des escales aux aéroports de Churchill Falls (CZUM) (T.‑N.‑L.), et de Deer Lake (CYDF) (T.‑N.‑L.). Le voyage de CYWK à CZUM constituait le 1er vol de la journée pour l’équipage et l’aéronef. Avant le décollage, le premier officier (P/O) a effectué une inspection extérieure de l’aéronef.

    Ce vol s’est déroulé sans encombre. À CZUM, le P/O a effectué une autre inspection extérieure de l’aéronef.

    L’aéronef a quitté CZUM en direction de CYDF à 9 h 25Note de bas de page 3, avec 4 membres d’équipage et 47 passagers à son bord. Les pilotes ont consigné une charge de carburant au départ de 4400 livres. Le commandant était le pilote aux commandes.

    À environ 10 h 48, au cours de la descente vers CYDF, l’équipage a établi le contact initial avec la station d’information de vol (FSS) de CYDF, qui lui a fourni les renseignements sur l’aéroport et un rapport d’état de la surface de la piste. La piste en usage était la piste 25. Les vents signalés soufflaient du 300° magnétique (M) à 17 nœuds, avec des rafales à 30 nœuds. Le rapport d’état de la surface de la piste 07-25, publié à 10 h 23, fournissait l’information suivante :

    • largeur dégagée de 130 pieds, dont 55 % comportait des traces de neige mouillée, 15 % était couvert de neige compactée et 30 % était nu et sec;
    • largeur restante couverte à 100 % de neige sèche reposant sur 1 pouce de neige compactée.

    À 10 h 57, l’aéronef procédait à l’approche finale en vue d’atterrir sur la piste 25 à CYDF. L’équipage a commandé la sortie du train d’atterrissage, et le voyant jaune du système de référence air-sol s’est allumé sur le tableau des voyants d’avertissement. Sur le tableau de commande du train d’atterrissage, le voyant de signalisation rouge de train avant non verrouillé et les voyants de signalisation jaunes de porte de train ouverte et de train d’atterrissage en mouvement étaient tous allumés. Le voyant vert de train avant en position sortie et verrouillée n’était pas allumé.

    L’équipage a ouvert la trappe du système de sortie de secours du train d’atterrissage, a vérifié les témoins de vérification de train en position sortie et verrouillée pour confirmer que le train avant n’était pas sorti, puis a refermé la trappe.

    Le commandant a commandé un cycle de manœuvre du train d’atterrissage. Même si le train d’atterrissage principal est rentré et ressorti sans signaler de défaillance, les indications du train d’atterrissage avant et les voyants du système de référence air-sol sont restés allumésNote de bas de page 4.

    À 10 h 59, l’équipage a interrompu son approche à CYDF et a demandé à la FSS si quelqu’un pouvait vérifier visuellement la position du train avant pendant que l’aéronef survolait la piste. La FSS a indiqué à l’équipage que le train avant était visible, mais pas verrouillé. L’équipage a ensuite travaillé en coordination avec le centre de contrôle régional (ACC) de Gander afin de prendre de l’altitude et d’entreprendre un circuit d’attente pour pouvoir continuer à dépanner le train d’atterrissage.

    Pendant la montée, le commandant a informé le chef de cabine de la situation et a fait une annonce aux passagers afin de les informer de la situation. L’équipage de conduite a ensuite effectué la liste de vérification figurant dans le document Dash 8 Quick Reference HandbookNote de bas de page 5 (QRH) de PAL. Puisque la liste de vérification « WT ON WHEELS » (référence air-sol; voir l’annexe A) du QRH ne fournit que des conseils, l’équipage a employé la liste de vérification LDG GEAR INOP (train d’atterrissage non fonctionnel) du QRH, qui exige de suivre la liste de vérification ALTERNATE LANDING GEAR EXTENSION (extension de secours du train d’atterrissage) (voir l’annexe B). Cette liste de vérification précise qu’il est impossible de rentrer le train d’atterrissage une fois la liste complétée.

    À 11 h 04, tandis que l’équipage parcourait les éléments de la liste de vérification, un autre vol de PAL, à savoir le vol PVL1928, a communiqué avec la FSS et a reçu un rapport d’état de la surface de la piste avant d’entamer son approche à CYDF. Ce rapport indiquait que des congères s’était formées sur la piste en raison de la détérioration des conditions météorologiques et que le personnel de l’aéroport procédait à la mesure du coefficient canadien de frottement sur piste (CRFI)Note de bas de page 6. La FSS a ensuite vérifié si le vol PVL1928 pouvait maintenir un circuit d’attente pour permettre aux véhicules aéroportuaires de mener des opérations de nettoyage.

    L’équipage de l’aéronef à l’étude a d’abord reporté la sortie du train d’atterrissage jusqu’à ce que l’aéroport de destination soit choisi, car la sortie du train d’atterrissage principal aurait diminué le rayon d’action de l’appareil. L’équipage a ensuite appris que le vol PVL1928 avait interrompu son approche et avait été autorisé à maintenir un circuit d’attente.

    À 11 h 11, la FSS a informé l’équipage que le CRFI était de 0,19, que le nettoyage de la piste était en cours et qu’une mise à jour des conditions de piste serait disponible dans 10 minutes. L’équipage a continué la liste de vérification LDG GEAR INOP notamment tirer sur le levier de déverrouillage du train avant.

    À 11 h 19, les téléphones intelligents des membres de l’équipage indiquaient qu’un service cellulaire était disponible. Le casque d’écoute du commandant était compatible avec la norme Bluetooth et jumelé avec son téléphone intelligent. Le commandant a appelé le service de régulation de PAL à CYYT, qui a organisé une conférence téléphonique avec le pilote en chef, le directeur des opérations aériennes, le directeur de la qualité, sécurité et formation, ainsi qu’un superviseur de quart de l’équipe de maintenance (équipe de CYYT). On a donné au P/O le numéro de téléphone de l’un des membres de l’équipe de CYYT pour lui permettre de faire un appel vidéo à l’équipe par l’entremise d’une application sur son téléphone intelligent. Le P/O a placé son téléphone intelligent de façon à ce que la caméra montre le poste de pilotage, puis l’a jumelé avec son casque d’écoute Bluetooth pour pouvoir suivre la conversation de l’équipe de CYYT.

    Le commandant a dû rappeler l’équipe de CYYT 4 fois et l’équipe a dû le rappeler 1 fois pour maintenir la connexion cellulaire, car le service cellulaire avait été interrompu plusieurs fois. Ces appels ont duré plus de 66 des 71 minutes suivantes, soit environ jusqu’à ce que l’aéronef atterrisse à l’aéroport de Stephenville (CYJT).

    L’équipe de CYYT a été informée de problème touchant le train avant et a passé en revue les tâches de la liste de vérification déjà accomplies. Le commandant a remis le contrôle de l’aéronef au P/O, puis a effectué les éléments de la liste de vérification au fur et à mesure que l’équipe de CYYT les lisait de vive voix. Les éléments de la liste ALTERNATE LANDING GEAR EXTENSION ont été exécutés plusieurs fois pour le train avant, en particulier celle consistant à tirer sur le levier de déverrouillage du train avant.

    Le P/O a maintenu les radiocommunications avec l’ACC et avec la FSS, et a suivi l’exécution de la liste de vérification .

    L’équipage a ensuite reçu la mise à jour suivante sur les conditions de la surface de la piste : vents du 310°M à 24 nœuds, avec rafales à 38 nœuds. Le rapport de condition de la surface de la piste 07/25, émis à 11 h 16, présentait les renseignements suivants :

    • largeur dégagée de 130 pieds, dont 55 % comportait des traces de neige sèche, 15 % était couvert de neige compactée et 30 % était nu et sec;
    • largeur restante couverte à 100 % de neige sèche reposant sur 1 pouce de neige compactée;
    • CRFI de 0,41.

    À 11 h 27, l’ACC a communiqué avec l’équipage à l’étude pour l’informer que le vol PVL1928 effectuait une autre approche à CYDF. À 11 h 35, le vol PVL1928 a appelé la FSS pour lui indiquer qu’il avait interrompu son approche de la piste 25 en raison de la faible visibilité causée par la poudrerie et qu’il avait effectué un déroutement. Le P/O et la FSS ont discuté des intentions du vol PVL1922 en ce qui concerne l’atterrissage; il a été convenu que les balayeurs poursuiveraient leur travail afin de dégager la piste pendant que l’équipage continuerait de dépanner le train d’atterrissage.

    Le commandant et l’équipe de CYYT ont discuté de diverses possibilités de dépannage, après quoi le commandant a décidé de réaliser des manœuvres pour tenter de sortir le train avant et a effectué une annonce aux passagers à ce sujet. Le P/O a remis le contrôle de l’aéronef au commandant, qui a désactivé le pilote automatique et, à 11 h 49, a effectué 3 manœuvres en tangage brusques et chaque fois plus appuyées. Chacune de ces manœuvres a causé une augmentation brusque de l’angle de tangage et de la charge verticale de l’aéronefNote de bas de page 7. L’équipage a travaillé en coordination avec l’ACC afin de gagner de l’altitude aux fins de dépannage.

    À 11 h 54, après être monté à 9600 pieds, l’aéronef a entamé sa descente et a atteint une vitesse indiquée de 185 nœuds (KIAS). Au cours de cette descente, le pilote aux commandes a effectué sept sollicitations consécutives de la gouverne de profondeur, causant une fois de plus des augmentations brusques de l’angle de tangage et de la charge verticale de l’aéronefNote de bas de page 8.

    À 11 58, après que l’ACC lui eut demandé quelles étaient ses intentions concernant l’atterrissage à CYDF, l’équipage a examiné les conditions météorologiques à CYDF et à CYJT. Il a ensuite consulté l’équipe de CYYT au sujet de la décision de se dérouter vers CYJT. Même si les conditions de la piste et la visibilité s’étaient améliorées à CYDF, il a été convenu que la piste plus longue et plus large de CYJT, combinée à la visibilité, au plafond et à la vitesse du vent plus favorables, faisaient de cet aéroport un meilleur endroit où atterrir que CYDF.

    À 12 h 02, l’équipage a demandé de se dérouter vers CYJT, ce que l’ACC a autorisé. Le commandant a ensuite déclaré une urgence à l’ACC et lui a indiqué le nombre d’occupants à bord ainsi que la quantité de carburant restante, à savoir 1300 livres.

    Le commandant et le chef de cabine ont passé en revue la liste de vérification en cas d’atterrissage d’urgence. Le chef de cabine a effectué une annonce aux passagers au sujet de l’atterrissage d’urgence, notamment les positions de protection et la façon de s’y préparer, l’appel à la mise en position de protection et l’emplacement des issues de secours. L’exposé sur l’évacuation a mis l’emphase sur le fait qu’à leur sortie, les passagers devaient laisser tous leurs biens personnels dans l’aéronef.

    Le P/O a perdu la connexion avec l’équipe de CYYT sur son téléphone intelligent et ne pouvait donc plus l’entendre dans son casque d’écoute. L’équipe de CYYT et le commandant ont poursuivi leurs discussions au sujet de la position du train d’atterrissage avant et des mesures à prendre pour le faire sortir.

    De 12 h 02 jusqu’à l’atterrissage, on a abordé à plusieurs reprises la façon d’actionner le levier de déverrouillage du train avant, par exemple la question de savoir s’il fallait tirer sur le levier à partir d’une position debout ou non. Le commandant et l’équipe de CYYT ont également parlé des actions à réaliser au toucher des roues et ont discuté à maintes reprises de la position adéquate des volets à l’atterrissageNote de bas de page 9.

    Pendant ce temps, le P/O a tenté d’assurer la coordination avec le commandant au sujet de la descente, de l’approche et de l’atterrissage. Le commandant communiquait régulièrement avec l’équipe de CYYT lors de ces tentatives de coordination, obligeant le P/O à répéter ses messages ou ses questions. L’examen de la liste de LANDING GEAR FAILS TO EXTEND (train d’atterrissage qui refuse de sortir) a été réalisé principalement par le commandant et l’équipe de CYYT. Les facteurs à prendre en compte pour l’atterrissage, par exemple déterminer si les hélices représentent un danger de contact avec le sol ou encore déterminer quel réglage de volet est recommandé, ont été confirmés tard au cours du vol. Un plan a été mis au point en collaboration avec l’équipe de CYYT, selon lequel l’équipage devait intentionnellement atterrir fermement sur le train d’atterrissage principal pendant que le P/O actionnait simultanément le levier de déverrouillage du train avant en vue de dégager ce dernier.

    Figure 1. Aéronef à l’étude, au repos, le nez au sol (Source : PAL Airlines Ltd.)
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    Aéronef à l’étude, au repos, le nez au sol (Source : PAL Airlines Ltd.)

    L’équipage a effectué une approche vers la piste 27 au moyen du système d’atterrissage aux instruments (ILS), conformément à l’autorisation reçue. Le chef de cabine a informé le commandant une fois la cabine sécurisée conformément aux procédures d’utilisation normalisées (SOP). À 12 h 27, alors que l’aéronef se trouvait à 6 NM de l’aéroport et effectuait son approche finale, le commandant a décidé que les volets seraient réglés à 35 degrés, ce qui a été fait environ 1 minute plus tard.

    À 12 h 30, alors que le commandant était toujours au téléphone avec l’équipe de CYYT, l’aéronef a atterri fermement sur le train d’atterrissage principal pendant que le P/O tirait, au même moment, sur le levier de déverrouillage du train avantNote de bas de page 10. Le commandant a décrit l’atterrissage à l’équipe de CYYT, alors que le fuselage avant s’abaissait davantage et que le train avant partiellement sorti entrait en contact avec la piste. L’aéronef a d’abord glissé sur le train partiellement sorti, dans une attitude de piqué. Ensuite, le train avant a rentré de force et le nez de l’aéronef a glissé brièvement sur la surface de la piste. L’aéronef s’est arrêté environ à mi-chemin sur la piste (figure 1). La radiobalise de repérage d’urgence ne s’est pas déclenchée.

    Une fois l‘aéronef immobilisé, le commandant a coupé les moteurs et l’alimentation électrique. Les passagers et les membres de l’équipage sont sortis sans incident par la porte principale avant gauche et par la porte d’urgence avant droite. Aucune blessure n’a été signalée. L’autorité aéroportuaire a pris les dispositions nécessaires pour que des taxis puissent transporter les occupants de l’aéronef jusqu’au terminal.

    1.2 Tués et blessés

    Tableau 1. Tués et blessés
    Blessures Équipage Passagers Autres Total
    Mortelles 0 0 0
    Graves 0 0 0
    Légères/Aucun 4 47 51
    Total 4 47 51

    1.3 Dommages à l’aéronef

    L’avion a subi des dommages mineurs.

    1.4 Autres dommages

    Sans objet.

    1.5 Renseignements sur le personnel

    Tableau 2. Renseignements sur le personnel
      Commandant de bord Premier officier
    Licence de pilote Licence de pilote de ligne (ATPL) Licence de pilote professionnel (CPL)
    Date d’expiration du certificat médical 01 mai 2019 01 juillet 2019
    Heures de vol total 19 000 1200
    Heures de vol sur type 10 000 700
    Heures de vol au cours des 7 jours précédant l’événement 17,6 15,7
    Heures de vol au cours des 30 jours précédant l’événement 74,3 88,5
    Heures de vol au cours des 90 jours précédant l’événement 238,7 207,5
    Heures de vol sur type au cours des 90 derniers jours 238,7 207,5
    Heures de service avant l’événement 4,5 4,5
    Heures hors service avant la période de travail 14 14

    Les membres de l’équipage de conduite possédaient les certifications et qualifications nécessaires pour ce vol, conformément aux règlements existants. Ils avaient tous deux suivi toutes les formations nécessaires, y compris celle relative à la gestion des ressources de l’équipage (CRM) fournie par le transporteur aérien.

    Le commandant travaillait chez PAL depuis 1997 et le P/O, depuis 2018.

    L’examen des horaires de travail et de repos des membres de l’équipage de conduite a permis d’écarter la fatigue comme facteur contributif à cet événement.

    1.6 Renseignements sur l’aéronef

    Tableau 3. Renseignements sur l’aéronef
    Constructeur Bombardier
    Type, modèle et immatriculation DHC-8-315, C-FPAE
    Année de construction 2001
    Numéro de série 562
    Date d’émission du certificat de navigabilité 30 septembre 2010
    Total d’heures de vol cellule 36 072,8 heures
    Type de moteur (nombre) Pratt & Whitney Canada PW123E (2)
    Type d’hélice ou de rotor (nombre) Hamilton Standard 14SF-23 (2)
    Masse maximale autorisée au décollage 19 504,47 kg
    Type(s) de carburant recommandé(s) Jet A, Jet A-1, Jet B
    Type de carburant utilisé Jet A-1

    Le DHC-8-315 est un avion de ligne bimoteur turbopropulsé de la série d’avions Dash 8 de de Havilland. L’aéronef à l’étude était configuré pour accueillir 50 passagers.

    1.6.1 Train d’atterrissage

    1.6.1.1 Généralités

    L’aéronef est doté d’un train d’atterrissage tricycle escamotable. Il s’agit d’un système hydraulique à commande électronique et à verrouillage mécanique en position rentrée et en position sortie. Le fonctionnement du train d’atterrissage est commandé et surveillé depuis le panneau de commande du train d’atterrissage, sur le tableau de bord (figure 2).

    Figure 2. Panneau de commande du train d’atterrissage (Source : Bombardier, avec annotations du BST)
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    Panneau de commande du train d’atterrissage (Source : Bombardier, avec annotations du BST)

    On entre ou sort le train d’atterrissage au moyen du levier de commande du train d’atterrissage. Un voyant de signalisation jaune s’allume dans le levier lorsque le train d’atterrissage est en mouvement (c’est-à-dire que sa position ne correspond pas à celle commandée). Neuf voyants de signalisation dans le haut du tableau de commande indiquent les positions du train d’atterrissage et des portes du train. Un voyant de signalisation jaune de porte ouverte s’allume lorsque la porte qui lui est associée est ouverte. Un voyant de signalisation vert s’allume lorsque le train d’atterrissage qui lui est associé se trouve en position sortie et verrouillée. Un voyant de signalisation rouge de train d’atterrissage non verrouillé s’allume lorsque le train d’atterrissage qui lui est associé ne se trouve ni en position sortie et verrouillée, ni en position rentrée et verrouillée.

    1.6.1.2 Système de secours de sortie du train d’atterrissage

    Il est possible de faire appel à un système de secours de sortie du train d’atterrissage en cas de défaillance du système principal.

    L’utilisation de ce système de secours débute par l’ouverture de la trappe du système de déverouillage du train d’atterrissage principal au plafond du poste de pilotage. Ceci actionne une valve de dérivation afin de couper l’alimentation hydraulique des vérins de rentrée des trains d’atterrissage principal et avant. La poignée de déverrouillage du train d’atterrissage qui se trouve derrière cette trappe permet de déverrouiller et de faire sortir le train d’atterrissage principal.

    Il faut ensuite ouvrir la trappe du système de secours de sortie du train d’atterrissage qui se trouve au plancher du poste de pilotage, révélant ainsi une pompe à main qui peut être utilisée pour faire sortir complètement le train d’atterrissage principal, au besoin. La poignée de déverrouillage du train avant (figure 3) se trouve à côté de cette pompe. Tirer sur cette poignée déverrouille les portes avant du train avant en premier lieu, puis déverrouille le train avant de sa position rentrée, qui sort complètement grâce à la gravité et à l’écoulement d’air en vol. Un système secondaire de vérification de la position sortie et verrouillée permet de vérifier que le train d’atterrissage qui lui est associé se trouve dans cette position.

    Figure 3. Trappe du système de secours de sortie du train d’atterrissage (Source : Bombardier, avec annotations du BST)
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    Trappe du système de secours de sortie du train d’atterrissage (Source : Bombardier, avec annotations du BST)
    1.6.1.3 Train d’atterrissage avant

    La jambe à amortisseur du train avant a été fabriqué par Safran Landing Systems, Canada Inc. (SafranLS) pour Bombardier. Elle absorbe l’impact de l’atterrissage et assure la stabilité et le contrôle directionnel pendant la circulation au sol. Elle se rétracte vers le haut et vers l’avant dans son puit de roue de la section avant du fuselage. Quand le train d’atterrissage à roues jumelées se trouve en position rentrée, il est entièrement couvert par des portes. Les portes avant sont à ouverture et fermeture hydraulique tandis que les portes arrière sont mécaniquement connectées à la jambe à amortisseur. Lorsqu’on abaisse le train d’atterrissage en position sortie et verrouillée, les portes avant vont normalement se refermer et les portes arrière restent ouvertes (figure 4).

    Figure 4. Séquence de fonctionnement normale du train d’atterrissage avant (Source : BST, selon les renseignements de FlightSafety Canada et de Bombardier)
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    Séquence de fonctionnement normale du train d’atterrissage avant (Source : BST, selon les renseignements de FlightSafety Canada et de Bombardier)

    La jambe à amortisseur du train avant est conçu selon une géométrie de suspension à bras oscillant. Elle est constituée d’un cylindre externe, d’un cylindre interne et d’un bras oscillant (figure 5). Les roues jumelées sont installées sur un essieu monté près de l’extrémité arrière du bras oscillant.

    Figure 5. Jambe à amortisseur du train avant, avec vue détaillée de composants sélectionnés du cylindre interne (Source : Safran Landing Systems, Canada Inc., avec annotations du BST)
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    Jambe à amortisseur du train avant, avec vue détaillée de composants sélectionnés du cylindre interne (Source : Safran Landing Systems, Canada Inc., avec annotations du BST)

    Les composants de l’ensemble cylindre interne et piston absorbent l’impact de l’atterrissage. Cet ensemble est rempli de liquide hydraulique et d’azote gazeux. Le bras oscillant pivote autour de la patte de fixation du cylindre interne et est raccordé par une bielle au piston, qui va et vient dans le cylindre interne. Le piston glisse dans un palier monté à l’intérieur de l’alésage inférieur de ce cylindreNote de bas de page 11.

    Le diamètre interne du palier comporte une rainure usinée en vue de l’installation d’une bague d’étanchéité. Cette dernière sert à empêcher le liquide hydraulique et l’azote gazeux de fuir par le joint glissant entre la surface interne du palier et le piston. Une bague d’étanchéité semblable, installée dans une rainure sur le diamètre externe du palier, sert à empêcher toute fuite au joint statique entre le diamètre extérieur de ce palier et l’alésage inférieur du cylindre interne.

    SafranLS exige une révision de la jambe à amortisseur du train avant après 10 ans d’utilisation ou 25 000 atterrissages, selon la première éventualité. Les révisions sont effectuées conformément au manuel de maintenance des composants (CMM) de SafranLS, qui fournit les directives de démontage, d’inspection, de mesure, de réparation, de remise à neuf et de réinstallation de la jambe à amortisseur du train avantNote de bas de page 12.

    Le palier est fixé à l’intérieur de l’alésage du cylindre interne, ce qui crée un joint statique qui ne subit généralement pas de mouvement relatif ni d’usure. Lors d’une révision, on vérifie l’état du diamètre externe du palier et l’état de l’alésage inférieur du cylindre. Leurs dimensions ne doivent être mesurées que si on constate une condition qui les rend inutilisables, par exemple la présence d’usure ou de corrosion.

    Si on constate une forte corrosion, l’une des réparations prescrites dans le CMM exige de réusiner l’alésage inférieur du cylindre interne, ce qui agrandit le diamètre interne de l’alésage inférieur du cylindre interne, et d’ajouter une marque permanente spécifique sur la patte de fixation de ce cylindre pour indiquer que cette réparation a été effectuée et que le cylindre interne est surdimensionné. Le CMM explique que le réassemblage d’un cylindre interne portant cette marque particulière exige de choisir dans les instructions fournies et d’installer un ensemble spécial de palier surdimensionné (dont le diamètre externe est plus grand)Note de bas de page 13.

    Si on installe un palier de taille standard dans un cylindre interne réusiné et doté d’un alésage inférieur de plus grande taille, il existe alors un espace trop important entre ces composants.

    1.6.1.4 Examen du train d’atterrissage avant

    Après l’événement à CYJT, l’aéronef a été soulevé au moyen d’un camion-grue et de courroies. On a alors constaté que le train avant était complètement rentré, après avoir été forcé dans cette position au cours de l’atterrissage. Lorsqu’on a tiré sur la poignée de déverrouillage du train avant, le train avant s’est déverrouillé, a quitté la position rentrée et a basculé en position sortie et verrouillée. La jambe à amortisseur du train avant présentait des signes de fuite de liquide hydraulique, et la faible hauteur d’extension du piston montrait qu’une mise au point d’azote gazeuxNote de bas de page 14 était nécessaire. Les marques et les dommages constatés sur les pneus ainsi que sur les portes arrières du train d’atterrissage indiquaient que les pneus du train avant s’étaient déplacés de façon à coincer les portes en questionNote de bas de page 15. Bombardier et le BST avaient pris en note un événement antérieur semblable mettant en cause un aéronef Dash 8, au cours duquel une jambe à amortisseur avec une faible hauteur d’extension du piston avait contribué à empêcher le train d’atterrissage avant de se déployer complètement (voir la section 1.18.1 du présent rapport)Note de bas de page 16.

    Lorsque l’équipage a tenté de sortir le train d’atterrissage, l’écoulement aérodynamique a compressé la jambe à amortisseur du train avant en raison de sa pression statique interne inférieure. Puisque la jambe se trouvait ainsi raccourcie et compressée, les pneus du train avant sont entrés en contact avec les portes arrières du train d’atterrissage, coinçant alors le train en position partiellement sortie (figure 6).

    Figure 6. Jambe à amortisseur du train avant présentant une perte de pression statique interne, entraînant le coinçage du train avant en position partiellement sortie (Source : BST, selon les renseignements de FlightSafety Canada et de Bombardier)
    Image
    Jambe à amortisseur du train avant présentant une perte de pression statique interne, entraînant le coinçage du train avant en position partiellement sortie (Source : BST, selon les renseignements de FlightSafety Canada et de Bombardier)

    On a vérifié que la jambe à amortisseur du train avant ne présentait aucune fuite, puis on a préparé l'aéronef pour un vol de convoyage afin d’aller effectuer d’autres réparationsNote de bas de page 17. Le démontage et l’examen subséquents de la jambe à amortisseur du train avant ont permis de déterminer que le volume de liquide hydraulique était inférieur de 450 ml au volume exigé.

    On a constaté que l’alésage inférieur du cylindre interne avait déjà été réparé, là où le palier est installé. Cette réparation avait agrandi le diamètre de l’alésage, comme l’indique le CMM.

    Aucune marque permanente n’avait été apposée sur le cylindre interne pour signaler que l’alésage inférieur du cylindre avait été réusiné. Le palier installé dans le cylindre interne était de taille standard, alors que le CMM exige l’installation d’un palier surdimensionné pour cette réparation. Par conséquent, l’espacement entre le palier et l’alésage inférieur du cylindre interne, mesuré à l’emplacement de la bague d’étanchéité, était de 0,015 pouce supérieur à l’espacement spécifié.

    En raison de cet espace excessif, la bague d’étanchéité subissait moins d’interférence (c.-à-d. qu’elle était moins déformée ou serrée) qu’une bague d’étanchéité installée avec l’espacement prescrit. Par conséquent, la bague n’assurait plus une aussi bonne étanchéité.

    Au moment de l’événement, la jambe à amortisseur du train avant installée sur l’aéronef à l’étude comptait 6364 atterrissage depuis sa dernière révision et 46 573 atterrissages au total. Sa dernière révision avait été effectuée le 2 décembre 2014 par SafranLS. La jambe à amortisseur avait alors 40 209 atterrissages à son actif et avait été prélevée sur un aéronef exploité et immatriculé aux États-Unis.

    Lors de la révision effectuée en 2014, SafranLS n’a consigné aucune opération de réusinage ni de réparation touchant l’alésage inférieur du cylindre interne. Puisque les registres de la révision précédente, alors que l’appareil était exploité aux États-Unis, n’étaient plus disponibles, il a été impossible de déterminer le lieu ou la nature des derniers travaux de révision effectués.

    Le 9 octobre 2018, après qu’un pilote eut signalé une défaillance décrite comme un fonctionnement irrégulier du train avant lors de la ciculation au sol, on a remarqué que la hauteur de débattement de la jambe à amortisseur du train avant était trop faible sur l’aéronef à l’étude. Le personnel de maintenance a corrigé cette situation en faisant le plein de liquide hydraulique et en rétablissant la pression d’azote gazeux dans la jambe à amortisseur, conformément aux instructions d’entretien du manuel de maintenance de l’appareilNote de bas de page 18. Aucune autre défaillance associée à la jambe à amortisseur du train avant n’a été consignée pendant les 37 jours suivants, jusqu’au vol à l’étude. La jambe à amortisseur avait alors accumulé 233 atterrissages depuis le dernier entretien.

    1.6.2 Jauges de carburant

    La quantité de carburant disponible dans les réservoirs de gauche et de droite est indiquée par 2 jauges de carburant situées dans la partie centrale inférieure du tableau de bord, dans le poste de pilotage de l’avion. La jauge de gauche indique la quantité de carburant disponible dans le réservoir de gauche et la jauge de droite, dans celui de droite, en milliers de livres, avec gradation en centaines de livres.Note de bas de page 19

    Les données sur la quantité de carburant sont également saisies dans le système de gestion de vol (FMS), qui emploie les données sur le débit de carburant provenant des capteurs de débit de carburant des moteurs pour fournir les intrants nécessaires à l’intégration des renseignements en temps réel sur la gestion du carburant aux fonctions de navigation. Au cours d’un vol, le FMS met automatiquement à jour les données relatives au carburant à bord et à son poids brut, ainsi que celles sur les besoins en carburant en fonction du débit de carburant et de la vitesse sol. Ces renseignements sont affichés à l’intention des pilotes.

    1.6.3 Radiobalise de repérage d’urgence

    Selon l’information consignée dans l’enregistreur de données de vol (FDR), l’impact n’était pas assez important pour déclencher automatiquement la radiobalise de repérage d’urgence.Note de bas de page 20

    1.6.4 Limites de vitesse anémométrique de l’aéronef

    Le manuel de vol de l’aéronef indique les limites de vitesse anémométrique associées à l’emploi du train d’atterrissageNote de bas de page 21. Le manuel limite la vitesse à 140 KIAS lors de l’utilisation du système de secours de sortie du train d’atterrissage, car toutes les portes de train d’atterrissage sont alors ouvertes. Le manuel indique en outre que la vitesse maximale à laquelle l’aéronef peut voler de façon sécuritaire alors que le train d’atterrissage est sorti (VLE) est de 173 KIAS et que la vitesse maximale à laquelle on peut rentrer ou sortir le train en toute sécurité (VLO) est de 163 KIAS.

    Selon les données du FDR, l’aéronef a atteint une vitesse de 185 KIAS au cours des manœuvres de montée et descente en alternance.

    1.7 Renseignements météorologiques

    Les prévisions d’aérodrome (TAF) pour CYDF, publiées à 10 h 08, faisaient état des conditions météorologiques suivantes entre 10 h 30 et 14 h 30 : 

    • vent du 280° vrai (V) à 20 nœuds, avec rafales à 30 nœuds;
    • visibilité de 1 mille terrestre (SM) dans de la neige légère et de la poudrerie;
    • plafond de nuages fragmentés à 1500 pieds au-dessus du sol (AGL).

    On prévoyait les changements temporaires suivants aux conditions météorologiques entre 10 h 30 et 14 h 30 :

    • visibilité de 6 SM dans de la neige légère;
    • plafond de nuages fragmentés à 3000 pieds AGL.

    Le message d’observation météorologique régulière d’aérodrome (METAR) de 10 h 30 pour CYDF faisait état des conditions météorologiques suivantes :

    • vent du 280°V à 22 nœuds, avec rafales à 33 nœuds;
    • visibilité de 1 SM dans de la neige légère et de la poudrerie;
    • nuages dispersés à 1000 pieds AGL;
    • plafond de nuages fragmentés à 2200 pieds AGL, nuages fragmentés à 16 000 pieds AGL;
    • température −3 °C, point de rosée −6 °C.

    Le METAR de 11 h 30 pour CYDF faisait état des conditions suivantes :

    • vent du 280°V à 21 nœuds, avec rafales à 38 nœuds;
    • visibilité de 1 SM dans de la neige légère et de la poudrerie;
    • nuages dispersés à 1000 pieds AGL;
    • plafonds de nuages fragmentés à 1900 pieds AGL et à 16 000 pieds AGL;
    • température −3 °C, point de rosée −6 °C.

    Un message d’observation météorologique spéciale d’aérodrome (SPECI) émis à 11 h 58 pour CYDF fournissait l’information suivante :

    • vent du 290°V à 23 nœuds, avec rafales à 38 nœuds;
    • visibilité de 2½ SM dans de la neige légère et de la poudrerie;
    • quelques nuages à 700 pieds AGL;
    • nuages dispersés à 1700 pieds AGL;
    • plafond de nuages fragmentés à 16 000 pieds AGL;
    • température −3 °C, point de rosée −7 °C.

    Les TAF pour CYJT, publiées à 08 h 08, prévoyaient les conditions météorologiques suivantes entre 08 h 30 et 14 h 30 :

    • vent du 300°V à 30 nœuds, avec rafales à 40 nœuds;
    • visibilité de plus de 6 SM;
    • plafond couvert à 2000 pieds AGL.

    On prévoyait les changements temporaires suivants aux conditions météorologiques entre 08 h 30 et 14 h 30 :

    • visibilité de 4 SM dans des averses de neige légère et de la poudrerie;
    • plafond de nuages fragmentés à 3000 pieds AGL.

    On prévoyait également pour cette période 30 % de probabilité de visibilité de 2 SM dans des averses de neige légère et de la poudrerie.

    Les METAR émises à 10 h 30, à 11 h 30 et à 12 h 30 pour CYJT présentaient les similarités suivantes :

    • une visibilité de 12 SM, qui a augmenté à 15 SM à 11 h 30;
    • un plafond de nuages fragmentés à 2100 pieds AGL;
    • température −3 °C, point de rosée −7 °C, qui est passé à −7 °C à 12 h 30.

    Ces METAR faisaient état des vents suivants :

    • à 10 h 30, les vents étaient du 310°V à 19 nœuds, avec rafales à 31 nœuds;
    • à 11 h 30, les vents étaient du 310°V à 22 nœuds, avec rafales à 32 nœuds;
    • à 12 h 30, les vents étaient du 330°V à 19 nœuds, avec rafales à 27 nœuds.

    1.8 Aides à la navigation

    L’équipage de conduite a effectué l’approche ILS vers la piste 25 à CYDF et l’approche ILS vers la piste 27 à CYJT. Aucune anomalie associée à ces approches ni aux systèmes connexes n’a été signalée.

    1.9 Communications

    Aucune anomalie dans la qualité des transmissions radio avec les services de circulation aérienne n’a été remarquée pendant le vol.

    1.10 Renseignements sur l’aérodrome

    L’aéroport CYDF comporte 1 piste d’asphalte, la piste 07/25, d’une longueur de 8005 pieds sur une largeur de 150 pieds.

    L’aéroport CYJT comporte 1 piste d’asphalte, la piste 09/27, d’une longueur de 10 011 pieds sur une largeur de 200 pieds.

    Aucune anomalie relative aux systèmes d’aérodrome n’a été signalée.

    1.11 Enregistreurs de bord

    L’aéronef était muni d’un FDR et d’un enregistreur de conversations de poste de pilotage (CVR), tous deux à semi-conducteurs. Ceux-ci ont été envoyés au laboratoire d’ingénierie du BST, avec les données de l’incident toujours intactes.

    Le FDR a enregistré et stocké les données de plus de 26 heures de vol, y compris le vol à l’étude.

    Le CVR a enregistré et stocké les 30 dernières minutes des sons dans le poste de pilotage. Au moment de la rédaction du présent rapport, l’article 625.34 du Règlement de l’aviation canadien (RAC) stipule que « le CVR installé à bord d’un aéronef construit après le 31 décembre 2002, doit conserver toute l’information enregistrée pendant le temps d’utilisation de l’aéronef, ou pendant ses deux dernières heures d’utilisation, selon la plus courte de ces périodesNote de bas de page 22. » Pour tous les autres aéronefs qui doivent être munis d’un CVR, la capacité d’enregistrement doit être d’au moins 30 minutes. Puisque l’événement s’est produit sur un avion construit en 2001, le CVR à bord respectait les exigences réglementaires canadiennes.

    Les avantages d’enregistrements de CVR plus longs sont bien connus. L’absence de périodes d’enregistrement plus longues des voix et autres sons continue de nuire aux enquêtes sur les événements et de retarder ou d’empêcher l’identification des lacunes de sécurité.

    1.11.1 Recommandation antérieure du BST sur la durée de l'enregistrement de l'enregistreur de conversations de poste de pilotage

    Le 2 septembre 1998, un McDonnell Douglas MD-11 (vol 111 de Swissair) s’est écrasé dans l’eau près de Peggy's Cove (Nouvelle-Écosse), blessant mortellement les 220 occupants à bordNote de bas de page 23.

    Une des lacunes constatées lors de l'enquête était la capacité d'enregistrement limitée du CVR. Le CVR n'a pu enregistrer que pendant 30 minutes; il n'a donc pas enregistré le moment où un incendie s'est déclaré.

    Le 9 mars 1999, le Bureau a publié la Recommandation A99-02 à l’intention de Transports Canada (TC) et des Joint Aviation Authorities (autorités conjointes de l’aviation) européennes, leur demandant que :

    dès le 1er janvier 2005, tous les aéronefs qui doivent être équipés d'un FDR et d'un CVR soient tenus d'être équipés d'un CVR d'une capacité d'enregistrement d'au moins deux heures.
    Recommandation A99-02 du BST

    Dans sa réponse d’octobre 2019 à la Recommandation A99-02, TC a indiqué qu’il est d’accord avec cette recommandation. Il a également indiqué que la version définitive du Règlement qui traite de la portion de cette recommandation se rapportant aux CVR (et exige une capacité d’enregistrement d’au moins 2 heures) a été publiée dans la Partie II de la Gazette du Canada en mai 2019Note de bas de page 24.

    Le nouveau règlement exige un CVR ayant une capacité d’enregistrement d’au moins 2 heures sur tous les aéronefs multimoteurs à turbomoteur qui sont configurés pour accueillir au moins 6 passagers et qui doivent avoir 2 pilotes aux termes de leur certificat de type ou de la sous-partie en vertu de laquelle ils sont exploités. Ce nouveau règlement entrera en vigueur en mai 2023, soit 4 ans après sa publication.

    Dans la réévaluation de la réponse de TC par le BST, en mars 2020, le Bureau estimait que ces modifications combleront les lacunes de sécurité associées à cette recommandation et que la dernière réponse à la Recommandation A99-02 dénotait une attention entièrement satisfaisante, puis a fermé le dossier.

    1.11.2 Connexion des téléphones intelligents à l’enregistreur de conversations de poste de pilotage

    Puisque les téléphones intelligents des membres de l’équipage n’étaient pas connectés à l’architecture du système audio de l’aéronef, le CVR n’a pas enregistré les transmissions vocales de l’équipe de CYYT pendant ses conversations avec l’équipage de conduite.

    1.12 Renseignements sur l’épave et sur l’impact

    Les portes avant et arrière du train d’atterrissage avant ont subi des dommages causés par l’abrasion et l’écrasement. Les pneus du train avant ont subi des dommages causés par l’abrasion. La partie de la structure de l’aéronef où était fixée la charnière de la porte du train avant était déformée. Le revêtement derrière le logement du train avant, ainsi qu’une antenne montée là, ont subi des dommages causés par l’abrasion.

    1.13 Renseignements médicaux et pathologiques

    Sans objet.

    1.14 Incendie

    Sans objet.

    1.15 Questions relatives à la survie des occupants

    Sans objet.

    1.16 Essais et recherche

    1.16.1 Rapports de laboratoire du BST

    Le BST a produit le rapport de laboratoire suivant dans le cadre de la présente enquête :

    • LP254/2018 – Analyse des données du FDR

    1.17 Renseignements sur les organismes et sur la gestion

    PAL est autorisé à exploiter des services de navette et de transport aérien en vertu des sous-parties 704 et 705 du RAC, respectivement. PAL exploite 18 aéronefs à turbopropulseurs, dont 8 aéronefs de la gamme Dash 8. L’entreprise est dotée d’un système de gestion de sécurité (SGS) approuvé par Transports Canada.

    1.18 Renseignements supplémentaires

    1.18.1 Incident antérieur mettant en cause un train avant partiellement sorti

    En 1998, le BST a documenté un incident sembable touchant un aéronef de type Dash 8Note de bas de page 25.

    Au cours de cet incident, lorsqu’on a commandé la sortie du train d’atterrissage, l’indicateur de position sortie et verrouillée du train avant ne s’était pas activé. On a utilisé le système de secours de sortie du train d’atterrissage, sans succès. Ensuite, une vérification visuelle a confirmé que le train avant était partiellement sorti. L’équipage a atterri avec le train avant partiellement sorti; les passagers sont sortis indemnes de l’aéronef.

    L’examen du train avant a révélé que la jambe à amortisseur du train avant s’était dégonflée en vol en raison d’un élément endommagé de l’ensemble de bague d’étanchéité de la jambe à amortisseur. On a déterminé qu’à la sortie du train d’atterrissage, l’écoulement aérodynamique a compressé la jambe à amortisseur, poussant les roues en travers des portes arrière du train avant et coinçant ainsi le train avant en position partiellement sortie.

    Bombardier a effectué des essais après l’événement et a reproduit le problème sur un aéronef de référence. Bombardier a publié le « All Operator Message no 466 » [message à tous les exploitants no 466], qui faisait état des conclusions de son enquête et indiquait [traduction] :

    On rappelle aux exploitants qu’en raison de la géométrie du système de sortie et de rentrée du train d’atterrissage avant, il faut s’assurer que ce dernier est bien entretenu et en bon état avant d’autoriser le départ de l’avion. Si l’amortisseur oléopneumatique du train connaissait une perte de liquide hydraulique ou de charge d’azote, les roues avant pourraient se coincer dans les portes arrière du puits du train avant, empêchant ainsi sa pleine extensionNote de bas de page 26.

    Ce message recommandait également aux exploitants de revoir leurs pratiques de maintenance actuelles relatives à l’entretien du train d’atterrissage.

    1.18.2 Appareils électroniques portatifs

    1.18.2.1 Interférence avec les systèmes d’aéronef

    Le Circulaire d’information (CI) de TC numéro 700-005, Utilisation d’appareils électroniques portatifs émetteurs et non émetteurs, définit un appareil électronique portatif (AEP) comme « tout appareil léger alimenté électriquement. Il s’agit habituellement d’appareils électroniques grand public [...], comme les tablettes, les lecteurs électroniques et les téléphones intelligents [...], les lecteurs MP3 et les jouets électroniquesNote de bas de page 27. » Un AEP non émetteur désigne un AEP dont les fonctions de transmission de radiofréquences sont désactivées ou qui est en « mode avion ». Un AEP émetteur (comme les appareils de contrôle à distance et les téléphones cellulaires, satellites, Wi-Fi ou Bluetooth) renferme un émetteur d’ondes intentionnellesNote de bas de page 28.

    Une grande partie de la réglementation portant sur l’emploi des AEP dans les aéronefs se rapporte aux préoccupations en matière d’interférence électromagnétique et au fait que les signaux de ces appareils « peuvent être émis aux mêmes fréquences que celles utilisées par les communications, la navigation, les commandes de vol et l’équipement électronique très sensibles de l’aéronefNote de bas de page 29. »

    En ce qui a trait à l’emploi d’AEP, l’article 602.08 du RAC stipule :

    1. Il est interdit à l’utilisateur d’un aéronef de permettre l’utilisation d’un appareil électronique portatif à bord de l’aéronef si l’utilisation de l’appareil risquerait de compromettre l’utilisation de l’aéronef ou le fonctionnement des systèmes ou de l’équipement de l’aéronef.

    2. Il est interdit à toute personne d’utiliser un appareil électronique portatif à bord d’un aéronef, à moins qu’elle n’y soit autorisée par l’utilisateur de l’aéronef.Note de bas de page 30

    Le paragraphe 705.40(4) du RAC comporte une exception qui autorise l’emploi d’un AEP dans un aéronef si l’exploitant aérien a établi des procédures qui respectent les Normes de service aérien commercial et qui figurent dans son manuel d’exploitation de la compagnieNote de bas de page 31. Le manuel d’exploitation de PAL interdit l’utilisation de téléphones cellulaires à bord de ses aéronefs, sauf lors de la circulation au sol jusqu’à la porte d’embarquement à l’arrivéeNote de bas de page 32.

    Depuis 2007, Transports Canada autorise l’utilisation accrue des AEP par l’entremise d’exemptions. Certaines exemptions sont d’envergure nationale et touchent tous les exploitants aériens, car elles se rapportent à l’emploi de ces appareils au cours de phases de vol bien précises (par exemple l’utilisation d’AEP lors de la circulation au sol après l’atterrissage). De plus, il existe de multiples exemptions individuelles qui se rapportent à des types d’aéronefs particuliers employés par un exploitant aérien donné, qui définissent les conditions que celui-ci doit respecter quant à l’emploi des AEP.

    Entre 2011 et 2013, TC a réalisé des évaluations du risque dans le cadre desquelles il a examiné divers rapports rédigés par plusieurs autres organisations (la Radio Technical Commission for Aeronautics, la Federal Aviation Administration et Boeing), portant sur l’emploi d’AEP à bord d’un aéronef. Les dangers potentiels posés par l’interférence des AEP avec les systèmes d’aéronef ont été évalué, et TC a convenu que cette interférence serait plus grave si elle se produisait au cours des phases critiques d’un vol.

    Il arrive parfois que des AEP ne soient pas éteints au cours de toutes les phases d’un vol. Cependant, aucun des rapports des autres organisations ne fait état d’incidents découlant de l’utilisation d’AEP. Les évaluations du risque menées par TC ont permis de conclure que :

    divers AEP pouvaient être autorisés en toute sécurité à bord des aéronefs à condition que des contrôles supplémentaires soient en place par l’exploitant aérien (p. ex. demander aux passagers de désactiver tous les AEP s’il y avait des interférences détectées par les pilotes). Note de bas de page 33

    Depuis 2007, TC n’a reçu aucun rapport d’incident associé à l’interférence des AEP avec les systèmes d’aéronefs à bord d’appareils canadiens. La préoccupation à l’égard des AEP demeure le risque qu’ils prennent feu en raison de leurs piles au lithium.

    Le 10 mai 2019, le Conseil consultatif sur la réglementation aérienne canadienne (CCRAC)de TC a émis l’avis de proposition de modification (AMP) numéro 2019-004, dans lequel il propose des modifications du RAC et aux Normes de service aérien commercial en ce qui a trait aux exemptions pour les AEP. Cet AMP vise à codifier les exemptions existantes qui permettent l’emploi accru d’AEP à bord des aéronefs, ainsi qu’à appliquer de nouvelles dispositions aux activités régies par les sous-parties 703, 704 et 705 du RAC. Ces nouvelles dispositions exigent entre autres que les exploitants aériens tiennent un registre qui précise le type, la série et le modèle des aéronefs sur lesquels ils autorisent l’emploi d’AEP et sur lesquels ils ont confirmé que l’utilisation d’AEP ne causera aucune interférence avec les systèmes d’aéronef ou l’équipement au cours de toutes les phases du vol. Ces nouvelles dispositions exigeraient également de signaler à TC toute interférence causée par un AEP et interdiraient alors immédiatement à l’exploitant d’utiliser cet AEPNote de bas de page 34.

    1.18.2.2 Intégration d’appareils électroniques portatifs dans le poste de pilotage

    Bien que certains règlements imposent des restrictions quant à l’utilisation d’AEP lors d’un vol, TC fournit des lignes directrices aux exploitants aériens pour les aider à mettre au point un programme d’organisateur électronique de poste de pilotage (OEPP). Le programme d’OEPP a pour but de remplacer les versions imprimées des manuels, cartes, feuilles de percées et autres documents utilisés dans le poste de pilotage par des versions électroniques que l’équipage de conduite peut consulter au sol comme en cours de vol. Les OEPP peuvent être des systèmes portatifs (généralement des tablettes) ou des dispositifs fixes intégrés aux systèmes d’aéronef.

    TC exige  que la certification, la navigabilité et l’utilisation des AEP employées par les exploitants aériens dans le cadre d’un programme d’OEPP soient approuvées. Dans la CI no 700‑020, Organiseurs électroniques de poste de pilotage, le ministère décrit de nombreux aspects du programme d’OEPP d’un exploitant qui sont pris en compte au cours d’une évaluation, notamment les éléments suivantsNote de bas de page 35 :

    • L’exploitant a-t-il mis au point des procédures pour l’équipage et les a-t-il intégrées dans les SOP?
    • L’exploitant a-t-il élaboré un programme de formation comprenant la formation sur la GRE et sur les facteurs humains?
    • S’est-on assuré que l’appareil ne distrait pas les pilotes au cours des phases critiques du vol?
    • A-t-on évalué l’appareil afin de relever des problèmes d’affichage, par exemple relatifs au champ de vision critique, au codage de couleur, à l’éblouissement et à la lisibilité de nuit?
    • L’exploitant a-t-il pris des mesures pour réduire la probabilité de défaillances matérielles et logicielles?

    TC n’a pas fourni de lignes directrices semblables aux exploitants aériens quant à l’utilisation d’AEP comme des téléphones intelligents en cours de vol par l’équipage de conduite. PAL n’avait pas élaboré de procédures d’intégration des téléphones intelligents aux fins d’utilisation en cours de vol par les équipages de conduite.

    1.18.3 Quantité de carburant

    Les exigences relatives à la quantité de carburant de réserve indiquées dans le manuel d’exploitation de la compagnie de PAL correspondent à celles indiquées dans le RAC : [traduction]Note de bas de page 36

    1. IFR [règles de vol aux instruments] : Un aéronef en vol IFR doit transporter une quantité de carburant suffisante pour permettre :
      1. dans le cas d’un avion à hélice, lorsqu’un aérodrome de dégagement est indiqué dans le plan de vol ou l’itinéraire de vol, d’effectuer le vol jusqu’à l’aérodrome de destination, d’y effectuer une approche et une approche interrompue, de poursuivre le vol jusqu’à l’aérodrome de dégagement et d’y atterrir, et de poursuivre le vol pendant 45 minutes;Note de bas de page 37

    Cette réserve de carburant permet d’exécuter des stratégies d’atténuation qui nécessitent une autonomie de vol accrue en cas de retard de l’atterrissage à l’aéroport de dégagement, par exemple en raison de circonstances imprévues à cet aéroport.

    Dans le cas du vol à l’étude, l’aéroport de dégagement désigné était l’aéroport J.A. Douglas McCurdy de Sydney (CYQY), en Nouvelle-Écosse. La quantité de carburant consignée dans le plan de vol opérationnel répondait aux exigences. Ce plan indiquait que la réserve de carburant requise pour un vol de 45 minutes était de 894 livres. À CYJT, le personnel de maintenance de PAL a consigné le jaugeage de carburant après l’atterrissage, qui était d’environ 600 livres.

    1.18.4 Inspection quotidienne

    Bombardier n’exige pas d’inspection quotidienne de l’appareil dans le cadre des travaux de maintenance réguliers.

    Bombardier exige la réalisation d’une inspection de maintenance en ligne tous les 12 jours ou toutes les 50 heures de vol, selon la première occurrence.Note de bas de page 38 PAL a créé une liste de vérification de maintenance en ligne (aussi appelée L-check) fondée sur la liste des éléments exigés par Bombardier.Note de bas de page 39 La partie de cette vérification qui se rapporte à l’extérieur de l’aéronef dresse la liste des éléments particuliers de la gouverne, du fuselage, du moteur, de l’hélice et du train d’atterrissage à inspecter et, s’il y a lieu, les critères d’inspection à utiliser par le personnel de maintenance. Le bon état de fonctionnement de ces éléments est essentiel pour assurer la sûreté du vol.

    PAL a également créé une liste de vérification d’inspection (aussi appelée vérification en escale) que le personnel de maintenance peut utiliser lorsque l’appareil passe la nuit à l’une de ses bases de maintenance. Cette liste de vérification sert à inspecter les éléments essentiels à la sécurité du vol entre deux L-check.

    Les L-check et les vérifications en escale comprennent toutes deux l’inspection de la jambe à amortisseur du train d’atterrissage afin d’y relever la présence de fuite, de vérifier son état et de confirmer que la hauteur est correcte.

    Aucune anomalie de la jambe à amortisseur du train avant n’a été notée au cours des L-check et des vérifications en escale réalisées entre le 9 octobre 2018, date à laquelle on a corrigé la faible hauteur de la jambe à amortisseur, et la date de l’événement.

    Lorsqu’un aéronef passe la nuit à un endroit où aucun membre du personnel de maintenance de l’entreprise n’est basé, comme à CZUM, la vérification pré-vol réalisée par l’équipage de conduite constitue la seule inspection de l’appareil.

    1.18.5 Vérification pré-vol

    Bombardier exige qu’on effectue, à titre de vérification pré-vol, l’inspection extérieure de l’aéronef. Dans la section sur les procédures normales du manuel de vol du Dash 8 propre à cet aéronef, Bombardier prévoit les inspections pré-vol suivantes pour les procédures sur l’aire de trafic [traduction] :

    4.1.1 AVANT DE MONTER DANS L’AVION. Réalisez une inspection extérieure de l’appareil, ce qui comprend les tâches suivantes :

    1. Retirez les goupilles de sécurité du train d’atterrissage principal.
    2. Déverrouillez le train avant.
    3. Vérifiez le disque indicateur de décharge d’oxygène.
    4. Vérifiez les disques indicateurs de l’extincteur.

    Marche à suivre si on a installé des dispositifs de verrouillage des portes :

    1. Retirez les dispositifs de verrouillage externes des portes de l’escalier et des soutes à bagages.

    Lorsque vous montez dans l’avion :

    1. Retirez tous les dispositifs de verrouillage internes des portes avant, des portes de sortie d’urgence à mi-cabine ainsi que la porte de service arrière droite.Note de bas de page 40

    Bombardier compte sur les exploitants aériens pour déterminer les éléments particuliers de la gouverne, du fuselage, du moteur, de l’hélice et du train d’atterrissage à inspecter dans le cadre des listes de vérification pré-vol, ainsi que les critères à utiliser lors de ces inspections.

    Les pilotes de PAL ont appris comment réaliser une vérification pré-vol au cours de leur formation au sol initiale pour ce type d’aéronef. Au moment de l’événement, les SOP en vigueur à PAL exigeaient l’exécution d’une vérification pré-vol approfondie au cours de l’inspection extérieure. Cependant, il n’existait aucune liste précisant les éléments à inspecter ou les critères à suivre.

    Aucune anomalie relative à la jambe à amortisseur du train avant n’a été relevée au cours de l’une ou l’autre des vérifications pré-vol réalisées par le P/O le jour de l’événement ou de toute autre vérification pré-vol effectuée depuis le dernier entretien.

    1.18.6 Listes de vérification

    1.18.6.1 Utilisation générale des listes de vérification

    Dans le cas d’un aéronef complexe à équipage multiple, comme le Dash 8, les capacités décisionnelles des membres de l’équipage se fondent sur une formation structurée combinée aux aptitudes de pilotage (c.-à-d., compétences et jugement) acquises avec l’expérience. Le rendement de l’équipage est appuyé par des systèmes d’avionique conçus pour alléger la charge sur les ressources cognitives des pilotes en affichant des indications particulières axées sur la logique, par exemple les indications relatives à la position et à l’état du train d’atterrissage.Note de bas de page 41 Les indications qui affichent des états indésirables exigent que l’équipage pose des gestes de mémoire ou consulte des listes de vérification.

    Une liste de vérification constitue un moyen simple de normaliser les procédures de poste de pilotage. Même si la fonction première d’une liste de vérification est de garantir que l’équipage configure correctement l’avion pour tout segment de vol donné, elle a également d’autres fonctions :

    1. elle sert de fondement normalisé pour la vérification de la configuration d’un aéronef, dans le but d’éliminer tout amoindrissement de l’état physique et psychologique de l’équipage de conduite;
    2. elle offre un cadre séquentiel permettant de respecter les exigences opérationnelles à l’intérieur et à l’extérieur du poste de pilotage;
    3. elle permet aux membres de l’équipage d’assurer une supervision mutuelle (contre-vérification);
    4. elle définit les tâches de chaque membre de l’équipage en vue d’optimiser la coordination entre eux et de faciliter la répartition logique de la charge de travail dans le poste de pilotage;
    5. elle favorise un concept d’équipe de la configuration de l’avion en tenant tous les membres de l’équipage informés;
    6. elle sert d’outil de contrôle de la qualité utilisé par les services de gestion des vols et les organes de réglementation gouvernementaux à l’égard des équipages de conduite.Note de bas de page 42

    Les SOP de PAL décrivent la structure normale des listes de vérification et exigent que la liste de vérification relative à l’approche et à la descente soit effectuée selon la méthode « lecture et exécution », où chaque élément de la liste est lu à voix haute. La liste de vérification pour l’atterrissage combine la méthode « lecture et exécution » à des éléments de type « question et réponse ».

    Dans de nombreux cas, les listes de vérification sont conçues selon un ordre qui définit le déroulement des actions. Le déroulement des actions est la marche à suivre par un membre d’équipage pour que les éléments de la liste de vérification (interrupteurs, leviers, instruments) soient manipulés dans un ordre précis.

    Chez PAL, les listes de vérification normales relatives à l’approche et à l’atterrissage reposent sur l’exécution de certaines actions dans un ordre bien précis avant la lecture de la liste à haute voix.

    1.18.6.2 Listes de vérification relatives au train d’atterrissage figurant dans le manuel de référence rapide

    Lorsqu’une situation anormale survient, les SOP de PAL exigent que l’équipage évalue le problème, prenne les mesures appropriées de mémoire, puis consulte le manuel de référence rapide (QRH).

    Dans cet événement, lorsque la sortie du train d’atterrissage a été commandée, le voyant jaune d’avertissement du système de référence air-sol (WT ON WHEELS), le voyant de signalisation rouge de train avant non verrouillé (NOSE) et les voyants de signalisation jaunes de portes de train avant ouverte (N DOOR) et de train d’atterrissage en mouvement étaient tous allumés. Le voyant vert de train avant en position sortie et verrouillée (NOSE) n’était pas allumé.

    En cas d’avertissement du système de référence air-sol, la section du QRH relative aux défaillances du train d’atterrissage ne précise aucune mesure procédurale à effectuer. Elle fournit un avertissement expliquant qu’il se peut que le train d’atterrissage ne puisse pas rentrer de même qu’une remarque indiquant que lorsque cet avertissement s’affiche, il faut effectuer des travaux de maintenance avant le prochain vol (voir l’annexe A). La section du QRH relative aux défaillances du train d’atterrissage présente également diverses autres indications relatives au train d’atterrissage et divers scénarios de défaillance des portes du train d’atterrissage, sans toutefois offrir de procédure précise pour la combinaison d’indications survenue.

    Les instructions du QRH exigent d’exécuter la liste de vérification ALTERNATE LANDING GEAR EXTENSION (système de secours de sortie du train d’atterrissage) pour toute défaillance indiquée ne faisant l’objet d’aucune procédure particulière dans la section sur les défectuosités du train d’atterrissage. La liste de vérification (à l’annexe B) comprend une note indiquant que la force à exercer sur la poignée de commande de déverrouillage du train avant pour dégager les verrous train rentré peut s’élever à 41 kg et qu’il peut être nécessaire de tirer sur ce levier à plusieurs reprises afin d’obtenir l’indication de train d’atterrissage en position sortie et verrouillée.Note de bas de page 43

    La liste de vérification LANDING GEAR FAILS TO EXTEND (train d’atterrissage qui refuse de sortir) du QRH stipule [traduction] :

    cette liste de vérification doit être utilisée lorsque, après avoir exécuté la liste ALTERNATE LANDING GEAR EXTENSION en combinaison avec les mesures de dépannage indiquées par le contrôle de maintenance, l’équipage de conduite ne peut pas confirmer que le train d’atterrissage est en position sortie et verrouilléeNote de bas de page 44.

    La liste de vérification LANDING GEAR FAILS TO EXTEND porte sur les considérations générales associées aux conditions non sécuritaires du train d’atterrissage, ainsi que sur la condition particulière d’un atterrissage alors que le train d’atterrissage principal est sorti mais que le train avant ne l’est pas ou est dans une position non sécuritaire.

    La liste de vérification LANDING GEAR FAILS TO EXTEND indique qu’il est possible d’atterrir de façon sécuritaire avec le train avant rentré, et que les hélices n’entreront pas en contact avec le sol si le train d’atterrissage principal est en position sortie et verrouillée (annexe C). La liste de vérification présente d’autres éléments dont il faut tenir compte pour l’atterrissage, notamment choisir une piste avec peu de vents latéraux, effectuer l’atterrissage avec les volets réglés à 35° et prendre certaines mesures au toucher des roues si le train avant n’est pas sorti ou s’il s’affaisse.

    1.18.7 Gestion des ressources de l’équipage

    Les principes de gestion des ressources de l’équipage (CRM) prévoient notamment de mettre l’accent sur les compétences cognitives et interpersonnelles afin de réduire le nombre d’erreurs humaines en aviation. Lorsqu’ils travaillent à deux, les pilotes doivent réussir à interagir entre eux, avec leur appareil et avec leur environnement en vue d’assurer une gestion efficace des menaces, des erreurs et des états d’aéronef indésirables qui peuvent survenir.

    Du point de vue de la CRM, de bonnes communications sont essentielles pour permettre à l’équipage d’avoir une conscience situationnelle commune. Toutefois, il faut exercer et renforcer les compétences en communication pour qu’elles soient efficaces, particulièrement en périodes de volume de travail élevé, comme au cours d’une approche aux instruments ou d’une situation anormale.

    Les programmes de CRM modernes mettent en évidence les entraves à des communications efficaces et présentent de multiples stratégies de communication, de sorte que les membres de l’équipage peuvent adopter la stratégie la plus appropriée en fonction de la gravité de la situation, du temps disponible et des autres personnes participant au processus de communication.

    Par conscience situationnelle, on entend l’extraction continue d’information de l’environnement, la fusion de cette information avec les connaissances déjà acquises pour former une image cohérente, et l’utilisation de cette image pour orienter la perception de nouvelles informations et anticiper les événements futursNote de bas de page 45.

    Les gestes posés par l’équipage de conduite doivent se fonder sur une compréhension commune de l’état actuel de l’aéronef, du plan de vol prévu et des menaces pesant sur ces activités, afin de travailler de façon coordonnée, efficace et sécuritaire. Cette compréhension commune des membres de l’équipage s’appelle conscience situationnelle commune ou d’équipeNote de bas de page 46,Note de bas de page 47. Lorsque cette compréhension est uniforme, les membres de l’équipage sont davantage en mesure d’anticiper et de coordonner efficacement leurs actions afin d’atteindre leur but commun.

    L’équipage acquiert et maintient cette conscience situationnelle commune en adoptant un certain nombre de comportements ponctuels et continus. Parmi les comportements ponctuels, notons les exposés en vol et la détermination des jalons importants du vol, comme ceux transmis dans le cadre des listes de vérifications relatives à la descente, à l’approche et à l’atterrissage. Ces activités constituent des points de contrôle planifiés qui décrivent l’état actuel et les plans futurs, en plus de fournir une occasion de s’assurer que tous les membres de l’équipage possèdent la même compréhension.

    Parmi les comportements continus, notons la gestion des menaces et des erreurs, l’annonce des changements à l’état de l’aéronef, du mode ou du réglage des instruments, ainsi que la communication des changements apportés aux plans. Ces comportements garantissent la bonne communication des renseignements et des changements d’état entre les membres de l’équipage, de façon à mettre constamment à jour la conscience situationnelle commune.

    L’enquête sur une collision avec le relief qui a eu lieu à Grand Manan (Nouveau‑Brunswick), le 16 août 2014, a permis de déterminer que les 2 pilotes ne pouvaient pas communiquer efficacement, car seul le commandant portait un casque d’écoute. Le BST a conclu que cette communication inefficace entre le commandant et le P/O avait contribué à l’accident en empêchant l’équipage d’avoir une conscience situationnelle communeNote de bas de page 48.

    1.18.8 Tendance à s’en tenir au plan

    La tendance à s’en tenir au plan est un phénomène qui peut se produire dans un environnement dynamique lorsqu’une personne tente de rectifier une situation anormale en respectant la marche à suivre établie, même si l’évolution de la situation exige une approche différente. Au cours de situations anormales dans un environnement de vol dynamique, l’évaluation continue par le pilote des mesures correctives consécutives prises au fil de l’évolution de la situation remplace souvent ce que l’on considère comme le processus décisionnel conventionnel, fondé sur des critères prédéfinis (c.-à-d. une liste de vérification qui oriente les actions en fonction de leur résultat). À mesure que le pilote exécute activement le plan d’action choisi, en vérifiant continuellement l’efficacité des mesures correctives, l’enchainement des mesures qu’il choisit a une incidence sur la possibilité de maintenir le plan d’origine.Note de bas de page 49

    En d’autres mots, la tendance à s’en tenir au plan constitue un processus de résolution de problème linéaire, qui fait abstraction de toute autre option disponible même si la situation nécessite l’exécution d’un tout autre plan.

    1.18.9 Processus décisionnel

    Les décisions prises par l’équipage de conduite en situation d’urgence reposent en partie sur son interprétation des indices externes dans des conditions qui peuvent se détériorer progressivement et de façon ambiguë. L’exactitude avec laquelle l’équipage perçoit ces indices repose en outre sur le contexte opérationnel et sur les considérations relatives à la responsabilité.

    Une dérogation à la liste de vérification constitue une forme d’adaptation dans laquelle les pratiques s’écartent de la procédure écriteNote de bas de page 50. Cela peut se produire lorsqu’un groupe de personne s’écarte d’une logique convenue fondée sur des règles et emploie plutôt une procédure élaborée localement et fondée sur les tâches.

    La conversation téléphonique entre le commandant et l’équipe de CYYT au sol était inhabituelle en ce sens qu’il s’agissait d’une communication directe avec des membres du personnel de la compagnie possédant à la fois des titres opérationnels et des rôles en gestion, dont les opinions ne sont généralement pas prises en compte dans le processus décisionnel de l’équipage. Cette équipe de cadres s’est greffée à l’équipage de conduite, ce qui peut avoir créé un environnement permissif dans lequel l’expérimentation pouvait remplacer le respect des listes de vérification écrites.

    1.19 Techniques d’enquête utiles ou efficaces

    Sans objet.

    2.0 Analyse

    La perte de pression statique de la jambe à amortisseur du train avant lui a permis de se compresser, poussant les pneus du train avant en travers des portes arrière du train avant, comme lors d’un incident antérieur mettant en cause le Dash 8. L’analyse portera sur les problèmes techniques associés à la sortie partielle du train avant.

    Elle portera également sur les risques associés à l’ajout de membres du personnel de gestion de PAL Airlines Ltd. (PAL) à l’aéroport international de St. John’s (CYYT) aux ressources du poste de pilotage de même qu’aux communications accrues qui en ont découlé, notamment leur incidence sur la gestion des ressources de l’équipage (CRM) et sur l’exploitation de l’aéronef au-delà des limites de certification.

    En outre, l’analyse traitera des risques associés à l’élaboration et à l’utilisation de listes de vérification pré-vol par le fabricant et l’exploitant.

    2.1 Jambe à amortisseur du train avant

    La jambe à amortisseur du train d’atterrissage avant a été réparée lors de sa première révision, réalisée à une installation inconnue par un exploitant antérieur de l’aéronef, aux États-Unis. Aucun dossier n’était disponible au sujet de cette révision.

    En 2014, Safran Landing Systems, Canada inc. a réalisé une deuxième révision de cette jambe, au cours de laquelle aucun réusinage ni aucune réparation de l’alésage inférieur du cylindre interne n’a été effectué. Puisque l’interface entre l’alésage du cylindre interne et le palier inférieur constitue un joint statique, la vérification de leurs dimensions n’a normalement lieu que si une condition qui les rend inutilisables est constatée, par exemple la présence d’usure ou de corrosion. Toute réparation exigeant des pièces surdimensionnées doit être indiquée de façon permanente sur les pièces réusinées.

    Pour des raisons indéterminées, une réparation antérieure du cylindre interne de la jambe à amortisseur du train avant n’avait pas été signalée par une marque permanente, comme l’exige le manuel d’entretien des composants approuvé, ce qui a entraîné l’installation d’un palier de taille standard plutôt qu’un palier surdimensionné. Cela a engendré un espace excessif entre le palier installé et l’alésage inférieur du cylindre interne. L’étanchéité réduite découlant de l’installation d’un palier plus petit que nécessaire a probablement causé une fuite dans la jambe à amortisseur du train avant.

    Comme lors d’un événement antérieur mettant en cause un train d’atterrissage avant partiellement sorti sur un Dash 8 (événement de transport aérien A98W0008 du BST), il a été déterminé que la diminution du volume de liquide hydraulique, combinée à une fuite possible d’azote, avait entraîné une réduction de la pression statique interne de la jambe à amortisseur du train avant, lui permettant de se compresser partiellement alors qu’elle était rentrée. L’écoulement aérodynamique en vol l’a compressée davantage à la sortie du train avant, poussant les pneus en travers des portes arrière du train d’atterrissage et coinçant ainsi le train avant en position partiellement sortie.

    En fonctionnement normal, une traction sur la poignée de déverrouillage du train avant déverouille les portes avant du train avant et dégage le train avant de la position rentrée et verrouillée. Lors de l’événement à l’étude, puisque le train avant était déjà déverrouillé et était coincé en position partiellement sortie, le fait de tirer sur la poignée de déverrouillage du train avant n’a eu aucun effet.

    2.2 Gestion des ressources de l’équipage

    Les procédures d’utilisation normalisées sont conçues pour optimiser les communications, et donc la CRM, de l’équipage de conduite. La participation d’un tiers en cas d’urgence peut être utile. Cependant, PAL n’avait pas élaboré de procédures concernant la prestation de conseils par un tiers à l’équipage de conduite au moyen de téléphones intelligents. Par conséquent, l’inclusion du personnel de PAL à l’aéroport CYYT (l’équipe de CYYT) comme autre voie de communication pour une période prolongée a diminué la conscience situationnelle commune de l’équipage au cours des phases critiques du vol et a donc perturbé l’exécution des listes de vérification et la coordination normalement requise pour exécuter efficacement ces listes. L’absence de procédures officielles pour permettre à l’équipage de conduite de consulter des tiers en vol au moyen de téléphones intelligents augmente le risque de distraction, ce qui peut entraîner une rupture dans la CRM au cours des phases critiques du vol.

    De plus, le personnel de conduite a improvisé des moyens de communication; le commandant a appelé l’équipe de CYYT au moyen de son casque d’écoute Bluetooth alors que le P/O a utilisé une application pour connecter son téléphone intelligent à un autre téléphone intelligent dans cette salle. Pendant la descente et l’approche, la connexion du téléphone intelligent du P/O s’est rompue, pendant que le commandant poursuivait la conversation avec l’équipe de CYYT. Cela a provoqué une rupture des communications dans le poste de pilotage, obligeant le commandant à suivre 2 conversations à la fois et le P/O à répéter plusieurs fois ses questions et ses messages au commandant pendant des phases critiques du vol.

    Si les membres de l’équipage ne peuvent pas communiquer efficacement entre eux, ils sont moins aptes à anticiper et à coordonner leurs actions, ce qui pourrait compromettre la sécurité du vol.

    2.3 Autonomie de vol et report du déroutement

    L’équipage a quitté l’aéroport de Churchill Falls (CZUM), à Terre-Neuve et Labrador (T.‑N.‑L.), avec une quantité de carburant suffisante pour effectuer son vol aux instruments (IFR) jusqu’à l’aéroport de Deer Lake (CYDF), à T.-N.-L., l’aéroport de dégagement désigné étant l’aéroport J.A. Douglas McCurdy de Sydney (CYQY), en Nouvelle-Écosse. Après avoir interrompu son approche à CYDF en raison de l’indication de train non verrouillé, l’équipage a effectué un circuit d’attente afin de dépanner le problème de train d’atterrissage. Pendant ce circuit d’attente, l’équipage a appris qu’un autre avion de la compagnie avait interrompu son approche en raison d’une mauvaise visibilité à CYDF. L’équipage de l’événement à l’étude a continué à essayer de faire sortir le train d’atterrissage pendant environ 25 minutes, avant de décider de se dérouter vers l’aéroport de Stephenville (CYJT), à T.-N.-L.

    Les discussions de dépannage entre le commandant et l’équipe de CYYT ont duré plus de 66 minutes, au cours desquelles l’équipage a continué de suivre la liste de vérification ALTERNATE LANDING GEAR EXTENSION (système de secours de sortie du train d’atterrissage) et de tenter de faire sortir le train d’atterrissage au moyen de la poignée de déverrouillage du train d’atterrissage avant, en vain.

    La liste de vérification comprend une note indiquant qu’il peut être nécessaire de tirer sur la poignée à plusieurs reprises pour obtenir une indication de train d’atterrissage en position sortie et verrouillée; toutefois, l’insistance de l’équipage à suivre le même plan d’action sans réussir à changer l’état du train d’atterrissage relève de la tendance à s’en tenir au plan. Le fait de recevoir une rétroaction de l’équipe des cadres de CYYT a peut-être incité davantage le commandant à déroger aux listes de vérification écrites et à prolonger la durée du vol.

    Le temps consacré par l’équipage à tenter de faire sortir le train d’atterrissage, avant de décider de se dérouter, leur avait fait consommer une partie de leur carburant de réserve. Si les pilotes tardent à décider de se dérouter, il risque de ne pas leur rester suffisamment de carburant pour assurer l’autonomie de vol nécessaire à l’atténuation des circonstances imprévues à l’aéroport de dégagement.

    2.4 Dépassements des limites de vitesse de vol

    Le fait que l’équipage s’en soit tenu à son plan pour déloger le train avant a retardé l’exécution de la liste de vérification LANDING GEAR FAILS TO EXTEND ainsi que l’examen des possibilités de déroutement. En outre, les conseils en temps réel de l’équipe de CYYT peuvent avoir créé un environnement permissif propice à l’expérimentation, incitant le commandant à déroger aux procédures établies dans les listes de vérification.

    L’équipage a commencé à improviser des procédures qui, à son avis, permettraient de déloger le train d’atterrissage de sa position partiellement sortie. En raison de ces manœuvres en tangage, l’appareil a dépassé les limites de vitesse anémométrique. Si les aéronefs sont exploités au-delà des limites de vitesse anémométriques, il y a un risque que l’aéronef soit soumis à des forces suceptibles de l’endommager ou de causer des blessures aux occupants.

    2.5 Vérification pré-vol

    La jambe à amortisseur du train d’atterrissage avant avait déjà subi une fuite dans le passé, et sa faible hauteur avait été corrigée par un entretien.

    La jambe à amortisseur du train avant a subi une autre fuite puis s’est bloquée au cours de cet événement. L’enquête n’a pas permis de déterminer quand la fuite ayant causé le blocage du train avant s’était produite, ni s’il aurait été possible de détecter cette fuite au cours d’une vérification pré-vol.

    Les travaux de maintenance réguliers de Bombardier exigent l’inspection de l’aéronef tous les 12 jours ou toutes les 50 heures de vol et comprennent l’examen de la jambe à amortisseur. Entre ces inspections, l’équipe de maintenance de PAL effectue une procédure de vérification en escale, élaborée à l’interne, lorsque l’appareil se trouve à une base de maintenance. Lorsque l’aéronef n’est pas à une base de maintenance, la seule inspection effectuée est la vérification pré-vol réalisée par les pilotes. Au moment de l’événement, l’équipage de conduite avait effectué sa vérification pré-vol alors qu’il n’existait aucune liste de vérification officielle.

    Bombardier exige la réalisation d’une inspection extérieure en guise de vérification pré-vol de l’aéronef, ce qui comprend la désactivation ou le retrait des dispositifs de verrouillage de sécurité ainsi que l’examen de 2 disques indicateurs. Pour ce qui est de l’état de fonctionnement d’autres éléments essentiels à la sécurité du vol, comme des éléments particuliers de la gouverne, du fuselage, du moteur, des hélices et du train d’atterrissage, Bombardier compte sur les exploitants aériens pour qu’ils élaborent leurs propres listes de vérification et déterminent les critères à utiliser pour l’examen de ces éléments. Si les fabricants exigent l’examen d’éléments de l’aéronef essentiels à la sécurité du vol sans fournir de liste de vérification des éléments à inspecter et des critères d’inspection, il y a un risque que les exploitants ne détectent pas certains éléments inutilisables ou certaines défaillances.

    2.6 Enregistreur de conversations de poste de pilotage

    La durée du vol à l’étude était de 3 heures, et le train avant s’est coincé en position partiellement sortie environ 1 h 32 minutes avant l’atterrissage. Cependant, l’enregistreur de conversations de poste de pilotage (CVR) a été conçu pour enregistrer et stocker les 30 dernières minutes des sons du poste de pilotage au cours d’un vol. De plus, le CVR n’avait pas enregistré les transmissions vocales de l’équipe de CYYT pendant leur conversation par téléphone intelligent avec l’équipage de conduite.

    Si les enregistrements des voix et des sons du poste de pilotage ne sont pas disponibles lors d’une enquête, cela peut empêcher l’identification et la communication des lacunes de sécurité afin d’améliorer la sécurité des transports.

    3.0 Faits établis

    3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

    Il s’agit des conditions, actes ou lacunes de sécurité qui ont causé l’événement ou y ont contribué.

    1. Pour des raisons indéterminées, une réparation antérieure du cylindre interne de la jambe à amortisseur du train avant n’avait pas été signalée par une marque permanente, comme l’exige le manuel d’entretien des composants approuvé, ce qui a entraîné l’installation d’un palier de taille standard plutôt qu’un palier surdimensionné.
    2. L’étanchéité réduite découlant de l’installation d’un palier plus petit que nécessaire a probablement causé une fuite dans la jambe à amortisseur du train avant.
    3. La diminution du volume de liquide hydraulique, combinée à une fuite possible d’azote, avait entraîné une réduction de la pression statique interne de la jambe à amortisseur du train avant, lui permettant de se compresser partiellement alors qu’elle était rentrée.
    4. L’écoulement aérodynamique en vol a compressé davantage la jambe à amortisseur lors de la sortie du train avant, poussant les pneus en travers des portes arrière du train d’atterrissage et coinçant ainsi le train avant en position partiellement sortie.

    3.2 Faits établis quant aux risques

    Il s’agit des conditions, des actes dangereux, ou des lacunes de sécurité qui n’ont pas été un facteur dans cet événement, mais qui pourraient avoir des conséquences néfastes lors de futurs événements.

    1. L’absence de procédures officielles pour permettre à l’équipage de conduite de consulter des tiers en vol au moyen de téléphones intelligents augmente le risque de distraction, ce qui peut entraîner une rupture dans la gestion des ressources de l’équipage au cours des phases critiques du vol.
    2. Si les membres de l’équipage ne peuvent pas communiquer efficacement entre eux, ils sont moins aptes à anticiper et à coordonner leurs actions, ce qui pourrait compromettre la sécurité du vol.
    3. Si les pilotes tardent à décider de se dérouter, il risque de ne pas leur rester suffisamment de carburant pour assurer l’autonomie de vol nécessaire à l’atténuation des circonstances imprévues à l’aéroport de dégagement.
    4. Si les aéronefs sont exploités au-delà des limites de vitesse anémométriques, il y a un risque que l’aéronef soit soumis à des forces suceptibles de l’endommager ou de causer des blessures aux occupants.
    5. Si les fabricants exigent l’examen d’éléments de l’aéronef essentiels à la sécurité du vol sans fournir de liste de vérification des éléments à inspecter et des critères d’inspection, il y a un risque que les exploitants ne détectent pas certains éléments inutilisables ou certaines défaillances.
    6. Lorsque les enregistrements des voix et des sons du poste de pilotage ne sont pas disponibles lors d’une enquête, cela peut empêcher l’identification et la communication des lacunes de sécurité afin d’améliorer la sécurité des transports.

    3.3 Autres faits établis

    Ces éléments pourraient permettre d’améliorer la sécurité, de régler une controverse ou de fournir un point de données pour de futures études sur la sécurité.

    1. Puisque le train d’atterrissage avant était déjà déverrouillé et était coincé en position partiellement sortie, le fait de tirer sur la poignée de déverrouillage du train avant n’a eu aucun effet.

    4.0 Mesures de sécurité

    4.1 Mesures de sécurité prises

    4.1.1 Safran Landing Systems, Canada inc.

    Après le démontage et l’examen de la jambe à amortisseur du train avant, le 18 décembre 2018, Safran Landing Systems, Canada inc. (SafranLS) a publié un document interne le 19 décembre 2018, à savoir l’alerte sur la qualité no 50633. Cette alerte indiquait aux membres du personnel de maintenance, de réparation et de révision de vérifier la possibilité qu’on ait reçu des composants ayant subi des réparations qui n’ont pas été convenablement indiquées.

    Le 28 février 2019, on a publié la révision 13 du manuel d’entretien des composants 32-20-01 pour le train d’atterrissage avant, qui comporte une note additionnelle dans la section sur l’assemblage. Cette note avise les utilisateurs de la nécessité de vérifier les dimensions du cylindre interne pour s’assurer que les bonnes pièces sont installées.

    Le 25 avril 2019, SafranLS a publié la lettre de service SLDHC8-32-7sur son site de publications techniques. La lettre de service présentait le contexte relatif à cet événement et soulignait l’importance de suivre toutes les instructions fournies dans le manuel d’entretien des composants, notamment les instructions associées à la méthode d’identification des composants après réparation. Cette lettre avisait également les exploitants et les techniciens qu’une note avait été ajoutée à la section sur l’assemblage du manuel, indiquant aux utilisateurs de vérifier les dimensions des composants avant leur assemblage pour s’assurer que les pièces installées s’ajustent convenablement.

    4.1.2 PAL Airlines Ltd.

    Le 23 novembre 2018, PAL Airlines Ltd. (PAL) a modifié sa procédure de vérification en escale du Dash 8, élaborée à l’interne, afin de mettre l’accent sur la mesure du débattement minimal et maximal de la jambe à amortisseur du train avant. En outre, la modification exigeait que le personnel de maintenance consigne la mesure du débattement de la jambe à amortisseur lors de l’inspection du train d’atterrissage avant.

    Le 30 novembre 2018, PAL a modifié la section 3.4 de ses procédures d’utilisation normalisées afin d’y inclure une liste de vérification officielle des éléments à inspecter lorsque les pilotes réalisent l’inspection extérieure d’un aéronef Dash 8 dans le cadre de la vérification pré-vol.

    Le 13 décembre 2018, immédiatement après avoir été informée par le BST d’une situation d’excès de vitesse en vol, PAL a réalisé une inspection pour excès de vitesse sur l’aéronef à l’étude, qui n’a révélé aucune défaillance.

    Le présent rapport conclut l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été officiellement publié le .

    Annexes

    Annexe A – Liste de vérification de référence air-sol (WT ON WHEELS)

    Annexe A Liste de vérification de référence air-sol (WT ON WHEELS)
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    Liste de vérification de référence air-sol</a> (WT ON WHEELS)

    Source : PAL Airlines Ltd., Dash 8 Quick Reference Handbook, DASH 8 315, révision 31 (décembre 2018).

    Annexe B – Manuel de référence rapide pour l’avion Dash 8 – Listes de vérification ALTERNATE LANDING GEAR EXTENSION (circuit de secours de sortie du train d’atterrissage) et LDG GEAR INOP (train d’atterrissage non fonctionnel)

    Annexe B Manuel de référence rapide pour l’avion Dash 8 – Listes de vérification ALTERNATE LANDING GEAR EXTENSION (circuit de secours de sortie du train d’atterrissage) et LDG GEAR INOP (train d’atterrissage non fonctionnel)
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    Manuel de référence rapide pour l’avion Dash 8 – Listes de vérification ALTERNATE LANDING GEAR EXTENSION (circuit de secours de sortie du train d’atterrissage) et LDG GEAR INOP (train d’atterrissage non fonctionnel)

    Source : PAL Airlines Ltd., Dash 8 Quick Reference Handbook, DASH 8 315, révision 31 (décembre 2018).

    Annexe C – Manuel de référence rapide pour l’avion Dash 8 – train d’atterrissage qui refuse de sortir

    Annexe C Manuel de référence rapide pour l’avion Dash 8 – train d’atterrissage qui refuse de sortir
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    Manuel de référence rapide pour l’avion Dash 8 – train d’atterrissage qui refuse de sortir

    Source : PAL Airlines Ltd., Dash 8 Quick Reference Handbook, DASH 8 315, révision 31 (décembre 2018).