Rapport d’enquête sur la sécurité du transport maritime M22P0259

Chavirement et naufrage subséquent
Bateau à passagers Island Bay
Baie Carpenter, Haida Gwaii (Colombie-Britannique)

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Table des matières

    Résumé

    Le 10 septembre 2022, l’Island Bay effectuait une excursion écotouristique avec 2 membres d’équipage et 5 passagers à bord lorsque l’équipage a signalé que le bateau prenait l’eau. L’équipage et les passagers ont par la suite abandonné le bateau dans la baie Carpenter, à Haida Gwaii (Colombie-Britannique). Au cours de l’abandon, 1 passager a été emporté par la mer et a été secouru. L’équipage et les passagers ont rejoint le rivage dans la baie Carpenter à l’aide de l’embarcation pneumatique à coque rigide du bateau. L’Island Bay a chaviré, a partiellement coulé, s’est échoué et a dérivé. L’équipage et les passagers ont été secourus sur le rivage le même après-midi. Le bateau a ensuite été récupéré et transporté à Prince Rupert (Colombie-Britannique).

    1.0 Renseignements de base

    1.1 Fiche technique du bateau

    Tableau 1. Fiche technique du bateau

    Nom du bateau

    Island Bay

    Numéro officiel

    372375

    Port d’immatriculation

    Prince Rupert (Colombie-Britannique)

    Pavillon

    Canada

    Type

    Passager

    Jauge brute (enregistrée)

    10,75

    Longueur réglementaire

    9,91 m

    Constructeur

    Raider Aluminum Ltd.

    Année de construction

    1979

    Matériau de construction

    Aluminium

    Propulsion

    Moteur Detroit Diesel 8V71 (177 kW) entraînant une seule hélice

    Équipage (conducteurs)

    2

    Passagers

    5

    Propriétaire et représentant autorisé

    Archipelago Ventures Ltd., Victoria (Colombie-Britannique)

    1.2 Description du bateau

    L’Island Bay (figure 1) était un bateau ponté avec une coque en aluminium soudée, équipé de paravanes d’amortissement du roulis (communément appelés stabilisateurs à paravane).

    Le bateau était équipé d’un rouf qui était surélevé d’environ 55 cm par rapport au pont principal. À l’intérieur du rouf se trouvaient le poste de barre, la cuisine et le gaillard d’avant. Le rouf comprenait des quartiers pour 8 personnes. Le gaillard d’avant avait une sortie de secours avec une écoutille étanche donnant sur le pont avant.

    Le poste de barre était situé à l’avant sur le côté tribord et était équipé d’un radar, d’un sondeur, d’un traceur de cartes électronique, d’un radiotéléphone à très haute fréquence avec système d’appel sélectif numérique (VHF-ASN), d’un pilote automatique et d’un GPS (système de positionnement mondial), ainsi que d’une console avec interrupteurs pour les feux de navigation et 4 pompes de cale.

    Le pont principal comportait des sabords de décharge de chaque côté, à environ 15 cm au-dessus de la ligne de flottaison. Sur le pont principal, il y avait des casiers de rangement à bâbord et à tribord, à côté de la porte non étanche de la cuisine. Une radiobalise de localisation des sinistres (RLS) à dégagement libre était installée sur une rambarde située sur le dessus du rouf. Une échelle permettait d’accéder au sommet du rouf, où se trouvaient un autre poste de barre, un radeau de sauvetage pour 8 personnes avec mécanisme de largage hydrostatique, des casiers à crabe et à crevettes, 2 boîtes de rangement en aluminium et une banquette en aluminium contenant 8 gilets de sauvetage. Une rallonge en aluminium située à l’arrière du dessus du rouf était équipée d’un support pour kayaks et vêtements de flottaison individuels (VFI). Une embarcation pneumatique à coque rigide (RHIB) était attachée à la poupe tribord du bateau. La RHIB servait au transport des passagers et comme embarcation de récupération d’urgence.

    Figure 1. Photo du Island Bay montrant l’embarcation pneumatique à coque rigide, le support pour kayaks et vêtements de flottaison individuels, des kayaks, les stabilisateurs à paravane, la passerelle haute et le rouf (Source : Gendarmerie royale du Canada, avec annotations du BST)
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    La coque était divisée par 4 cloisons étanches pour former les sections suivantes : le compartiment avant, le compartiment moteur, un compartiment contenant le réservoir d’eau douce et 3 réservoirs de carburant, le compartiment de l’appareil à gouverner contenant le réservoir de carburant auxiliaire, et la cambuse contenant une génératrice.

    On accédait aux compartiments avant, moteur et de citernes par des écoutilles situées à l’intérieur du rouf. On accédait au compartiment de l’appareil à gouverner par une écoutille étanche sur le pont principal. On pouvait accéder à la cambuse par 3 écoutilles non étanches sur le pont arrière. Le pont arrière était surélevé d’environ 25 cm par rapport au pont principal.

    1.2.1 Système d’assèchement des cales du bateau

    Le bateau était équipé de 4 pompes de cale submersibles Xylem Rule 2000, qui étaient en état de fonctionnement au moment de l’événement. Les pompes étaient utilisées pour évacuer l’eau des cales au moyen de vannes de coque individuelles.

    Deux pompes se trouvaient dans le compartiment moteur, sur l’axe longitudinal de la quille (à l’avant et à l’arrière), les vannes d’évacuation étant situées sur le côté bâbord du bateau. La vanne d’évacuation avant était située à 45,7 cm au-dessus de la ligne de flottaison et était équipée d’un robinet d’arrêt à soupapeUn robinet d’arrêt à soupape permet à l’eau de s’écouler dans les 2 sens lorsqu’il est ouvert et empêche l’eau de s’écouler lorsqu’il est fermé.. La vanne d’évacuation arrière était située à 7,5 cm au-dessus de la ligne de flottaison et était équipée d’un robinet d’arrêt à soupape et d’un clapet antiretourUn clapet antiretour à sens unique permet à l’eau de s’écouler dans un 1 seul sens; il permet donc de pomper l’eau de cale hors de la coque tout en empêchant l’eau de s’écouler à l’intérieur du navire..

    Une pompe de cale se trouvait dans le compartiment de l’appareil à gouverner, avec une vanne d’évacuation sur le côté tribord du bateau. La vanne d’évacuation était située à 8 cm au-dessus de la ligne de flottaison et était équipée d’un clapet antiretour.

    Une autre pompe de cale se trouvait dans le compartiment de la cambuse, avec une vanne d’évacuation du côté bâbord du bateau. La vanne d’évacuation était située à 46 cm au-dessus de la ligne de flottaison et était équipée d’un robinet d’arrêt à soupape.

    Au moment de l’événement, les interrupteurs des 4 pompes de cale étaient réglés au mode automatique. Ce réglage met les pompes en marche lorsque les cales se remplissent d’une quantité d’eau suffisante pour activer les interrupteurs à flotteur. Tous les robinets d’arrêt à soupape étaient en position ouverte.

    1.3 Déroulement du voyage

    Le 8 septembre 2022, vers 12 h 30Les heures sont exprimées en heure avancée du Pacifique (temps universel coordonné moins 7 heures)., 5 passagers sont montés à bord de l’Island Bay au havre Rose, à Haida Gwaii (Colombie-Britannique)Tous les emplacements se trouvent dans la province de la Colombie-Britannique, sauf indication contraire., pour une excursion de 6 jours au site du patrimoine haïda, prenant fin à Sandspit, à Haida Gwaii. Les 2 conducteurs du bateau, qui étaient à bord à la suite d’un voyage précédent, ont accueilli le nouveau groupe de passagers. Le conducteur 1 a fait visiter le bateau aux passagers et leur a donné un exposé sur les mesures de sécurité avant le départ. L’exposé sur les mesures de sécurité portait notamment sur l’emplacement des gilets de sauvetage et du radeau de sauvetage, ainsi que sur les procédures à suivre en cas de chute par-dessus bord. Les 1er et 2e jours de l’excursion se sont déroulés localement dans les environs du havre Rose.

    Le 10 septembre, le voyage prévu allait du havre Rose à l’anse Ikeda, avant de mouiller l’ancre au havre Bag (figure 2). Vers 6 h, les conducteurs ont écouté la radio VHF pour connaître les prévisions météorologiques locales et les conditions de mer. Ils ont ensuite discuté des conditions météorologiques et ont décidé de partir comme prévu afin de pouvoir suivre le courant de marée, dont la direction était similaire à celle du vent. Les 2 conducteurs ont déployé les stabilisateurs à paravane du bateau pendant que les passagers se reposaient à l’intérieur du rouf. Le conducteur 1 a détaché le bateau de la bouée d’amarrage, puis s’est rendu à la barre et a mis le bateau en pilotage automatique. Le conducteur 2 était de quart. 

    Figure 2. Trajectoire du bateau et lieu de l’événement (Source de l’image principale : Service hydrographique du Canada, carte composite de navigation électronique, avec annotations du BST. Source de la 1re image en médaillon : Google Maps, avec annotations du BST. Source de la 2e image en médaillon : Service hydrographique du Canada, carte 3853, avec annotations du BST)
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    Au départ, le vent et la mer étaient calmes. Vers 7 h 28, lorsque le bateau s’est approché de la pointe Benjamin, le courant de marée a commencé à couler vers le nord, s’opposant au vent du nord-ouest. Vers 7 h 42, le bateau a dépassé l’île Langtry et s’est approché de l’entrée de la baie Carpenter. La vitesse du vent a augmenté à environ 30 nœuds avec des vagues de 1 à 2 m sur la proue tribord du bateau, et le bateau a commencé à prendre de la bande sur bâbord d’environ 10°. À peu près à ce moment, le conducteur 1 a commencé à gouverner le bateau manuellement et en a réduit la vitesse.

    À partir de l’île Langtry, le bateau s’est dirigé vers le nord-ouest en direction de l’anse Ikeda. Le vent soufflait en rafales, créant de grosses vagues. Alors que le vent poussait sur le côté tribord du rouf du bateau, la bande sur bâbord s’est accentuée, et le bateau a embarqué de l’eau sur le pont par les sabords de décharge bâbord. Vers 7 h 57, les conducteurs ont révisé leur plan et ont viré sur bâbord pour aller mouiller l’ancre dans la baie Carpenter.

    En virant sur bâbord, le bateau a été soumis à de fortes rafales du nord-ouest et à des vagues de 2 m sur le travers du bateau. Alors que le bateau s’approchait du chenal entre les îles Rankine et la pointe Iron, les conducteurs ont constaté des rafales de vent de 40 à 50 nœuds, et des hauteurs estimées des vagues de 3 à 4 m. La bande sur bâbord a augmenté de telle sorte que les passagers ont dû s’agripper et que des objets à l’intérieur du rouf sont tombés des comptoirs et des étagères. Certains des orifices d’évacuation d’eau de cale du côté bâbord du bateau ont été submergés; de l’eau a commencé à s’infiltrer sur le pont et le bateau a gîté encore davantage sur bâbord.

    Alors que l’Island Bay entrait dans la baie Carpenter, le conducteur 1 s’affairait à manœuvrer le bateau dans les conditions de mer. Le conducteur 2 s’est rendu de la barre à la porte du rouf pour vérifier le pont. Le conducteur 2 a constaté que la quantité d’eau sur le pont principal augmentait à mesure que le bateau continuait à gîter sur bâbord. À ce moment, l’alarme de cale s’est déclenchée. Le conducteur 2 s’est rendu compte que le bateau ne se redressait pas et a ordonné à tout le monde d’abandonner le bateau et de monter à bord de la RHIB. Le conducteur 2 s’est alors rendu sur le pont arrière pour prendre des VFI dans le support à kayaks et les placer dans le rouf afin que les passagers les enfilent en se préparant à sortir du rouf. Le conducteur 2 et 4 passagers ont enfilé des VFI; 1 passager n’a pas pu enfiler son VFI avant que le VFI ne soit emporté par la mer. Le vent fort a poussé la RHIB contre le côté bâbord de l’Island Bay.

    Le conducteur 2 a tiré sur le câble de remorquage attaché à la RHIB afin de placer la RHIB sur la hanche tribord du bateau pendant que le conducteur 1 appelait la Garde côtière canadienne (GCC) sur le canal 16 VHF, pour lui indiquer la position du bateau et lui décrire brièvement la situation. Le conducteur 1 a ensuite ralenti le bateau et est allé aider le conducteur 2. Le conducteur 2 est entré dans la RHIB et l’a placée sur le côté tribord du bateau. À ce moment-là, la gîte avait augmenté à un point tel que l’eau recouvrait environ le tiers du pont et que le pavois côté bâbord se trouvait sous l’eau. Les passagers sont sortis du rouf pour accéder au pont principal par la porte de la cuisine.

    Les passagers ont eu du mal à accéder à la RHIB, car les conditions météorologiques défavorables, les mouvements de roulis du bateau et l’eau sur le pont entravaient leurs déplacements. L’évacuation des passagers du bateau vers la RHIB a été interrompue à un moment donné, quand 1 passager est entré dans l’eau et a été éloigné du bateau. Le conducteur 2 a récupéré le passager à l’aide de la RHIB et est retourné au bateau pour reprendre l’évacuation. Le conducteur 1 a été la dernière personne à monter à bord de la RHIB. Le moteur principal de l’Island Bay tournait toujours lorsque le conducteur 1 a abandonné le bateau, sans VFI.

    Une fois les 2 conducteurs et les 5 passagers à bord de la RHIB, ils se sont dirigés vers la rive nord de la baie Carpenter. Une fois sur la rive, les conducteurs ont fait un feu pour garder les passagers et eux-mêmes au chaud. Vers 14 h, le navire de la GCC Cape Kuper est arrivé, a secouru les passagers et les conducteurs, et les a ramenés au village de Daajing Giids.

    Après l’abandon, l’Island Bay a continué à être envahi par le haut, a partiellement coulé, a dérivé, puis s’est échoué. Le 16 septembre 2023, l’Island Bay a été récupéré à la pointe Kiju, placé sur un chaland et amené à Wainwright Marine Services Ltd., à Prince Rupert.

    1.4 Historique du bateau

    L’Island Bay a été construit en 1979 par Raider Aluminum Ltd. et a été immatriculé comme navire de pêche , sous le nom de Surfbird. Le Surfbird a été construit avec des quartiers pour 2 membres d’équipage. Les premiers propriétaires ont utilisé le bateau sous contrat avec Pêches et Océans Canada (MPO) pour rendre des services de garde-pêche, comme la surveillance des stocks de poissons à Haida Gwaii.

    En 1993, la stabilité du bateau a été évaluée au moyen d’un essai de période de roulisL’essai de période de roulis est une méthode simplifiée de vérification de la stabilité des petits navires qui permet de mesurer leur stabilité. On ne sait pas quel était l’état de l’Island Bay au moment de l’essai de période de roulis. qui a indiqué que le bateau avait une stabilité suffisante dans l’état où il se trouvait alors. Le bateau a subi d’importantes modifications en 1998. Ces modifications comprenaient l’augmentation de la longueur totale du bateau, l’agrandissement du rouf et l’augmentation de la capacité d’accueil des quartiers, passant de 2 à 8 personnes. La stabilité du bateau n’a pas été réévaluée après ces modifications.

    En mars 2001, le propriétaire a tenté d’inscrire le bateau au Programme de contrôle et d’inspection des petits bâtiments (PCIPB) de Transports Canada (TC) en tant que navire à passagersLe Programme de contrôle et d’inspection des petits bâtiments de Transports Canada a ensuite été renommé Programme de conformité des petits bâtiments (autres que les embarcations de plaisance) (PCPB).. Au cours de l’inscription, le bateau a été inspecté par un inspecteur de la sécurité maritime de TC. Le propriétaire s’est vu remettre une liste de mesures à prendre avant que l’inscription puisse être effectuée, dont les mesures suivantes :

    • installer des systèmes d’extinction d’incendie dans le compartiment moteur;
    • installer un détecteur de fumée et de chaleur dans les quartiers d’équipage;
    • installer des pompes de cale et des alarmes de haut niveau d’eau de cale dans le compartiment de l’appareil à gouverner et dans la cambuse;
    • augmenter la hauteur des pavois à environ 1 m.

    En avril 2001, le bateau a été vendu à Archipelago Ventures Ltd.Archipelago Ventures Ltd. est un fournisseur commercial de services d’affrètement et d’excursions d’aventure; il a fait appel à l’Island Bay pour emmener des passagers en excursions d’écotourisme et pour faire office de bateau-taxi dans la réserve de parc national et site du patrimoine haïda Gwaii Haanas. par l’entremise d’un courtier en bateaux, et les nouveaux propriétaires ont commencé à l’utiliser pour de l’écotourismeLa Société internationale d’écotourisme définit l’écotourisme comme [traduction] « un voyage responsable dans des zones naturelles qui préserve l’environnement, soutient la viabilité des populations locales et a une vocation d’interprétation et d’éducation »; Société internationale d’écotourisme, « What is Ecotourism? », à l’adresse https://ecotourism.org/what-is-ecotourism (dernière consultation le 20 août 2024).. Aucun dossier faisant état des modifications n’a été fourni aux nouveaux propriétaires. En mai 2001, TC a réinspecté le bateau, a émis un avis de visite et a inscrit le bateau au PCIPB avec les restrictions d’exploitation suivantes :

    • restrictions quant à ses voyages : opérations uniquement à moins de 10 milles du rivage;
    • restrictions météorologiques : opérations uniquement par temps convenable;
    • restrictions de capacité : maximum de 8 personnes à bord (minimum de 1 membre d’équipage).

    En juin 2003, Archipelago Ventures Ltd. a changé le nom du bateau pour celui d’Island Bay et a conservé le type d’immatriculation (navire de pêche). Le bateau a continué à effectuer des voyages écotouristiques.

    En mars 2012, l’Island Bay a été inscrit au Programme de conformité des petits bâtiments (PCPB) à titre de petit navire à passagers. Le PCPB est un programme volontaire qui aide les propriétaires de navires à comprendre la complexité de leurs obligations en vertu de la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada (LMMC 2001) et des règlements connexes. Le propriétaire de l’Island Bay a répondu au questionnaire du PCPB en indiquant que le bateau n’avait pas été modifié, qu’il était étanche et que les documents relatifs à la stabilité du bateau (essai de période de roulis) étaient conservés à bord.

    Avant de confirmer l’inscription au PCPB, TC a informé le propriétaire par courriel que si le bateau allait transporter des passagers, il devait être immatriculé en tant que navire à passagers. Après que le propriétaire du bateau eut confirmé que le type d’immatriculation serait modifié, TC a inscrit le bateau au PCPB et a délivré une vignette bleue indiquant qu’il était maintenant inscrit.

    En avril 2012, le propriétaire a demandé l’immatriculation du bateau à titre de navire à passagers. Un jaugeur a mesuré le bateau et a émis un rapport indiquant le type de navire et de propulsion; les sections du rapport relatives aux dimensions et à la jauge brute du bateau ont été laissées en blanc. TC a délivré un nouveau certificat d’immatriculation indiquant le nouveau type de navire (à passagers) ainsi que les dimensions et la jauge brute d’origine du bateau.

    En juin 2017, Archipelago Ventures Ltd. a été vendu à de nouveaux propriétaires, en même temps que le bateau. L’Island Bay a continué d’être exploité en tant que bateau écotouristique dans la réserve de parc national et site du patrimoine haïda Gwaii Haanas. En tant que propriétaire, Archipelago Ventures Ltd. était également le représentant autorisé (RA) du bateauLe paragraphe 14(1) de la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada stipule que tout navire canadien doit relever d’une personne responsable – le représentant autorisé (RA) – chargée au titre de la Loi d’agir à l’égard de toute question relative au navire dont aucune autre personne n’est responsable en vertu de la Loi. En droit canadien, une société est une personne morale distincte.; les 2 propriétaires de la compagnie (conducteur 1 et conducteur 2) étaient les conducteurs du bateau au moment de l’événement à l’étude.

    Les conducteurs effectuaient eux-mêmes l’entretien annuel du bateau, y compris en changeant les anodes de zinc, en vérifiant les pompes de cale et les vannes associées, et en peinturant la coque.

    1.5 Conditions environnementales

    Les prévisions météorologiques maritimes pour la moitié sud du détroit d’Hecate pour le matin du 10 septembre faisaient état de vents de 20 à 30 nœuds et de vagues de 1 à 2 m de hauteur, atteignant 2 à 3 m en après-midi. Les conditions météorologiques locales pour le cap St. James étaient « non disponibles » le matin de l’événement. Les stations météorologiques opérationnelles les plus proches se trouvaient à l’île Cumshewa et dans le sud du détroit d’Hecate; les 2 stations sont situées à environ 45 milles marins (NM) du havre Rose. Le matin de l’événement, les 2 stations signalaient des vents de 10 à 13 nœuds. La température de l’air et de l’eau dans le sud du détroit d’Hecate était d’environ 13 °C.

    Les conducteurs ont rencontré des rafales de vent de 40 à 50 nœuds et des vagues de 3 à 4 m en traversant l’entrée de la baie Carpenter.

    Selon les prévisions, le courant de marée dans la zone de l’événement devait changer pour s’opposer à la direction du vent à 8 h 08Pêches et Océans Canada, Stations marégraphiques et des niveaux d’eau – Rose Harbour, à l’adresse https://www.marees.gc.ca/fr/stations/09713/2022-09-10?tz=PDT&unit=ft (dernière consultation le 15 août 2024)..

    1.6 Brevets, certificats et expérience des membres d’équipage

    En 2017, chaque conducteur de l’Island Bay a obtenu un brevet de capitaine, avec restrictions, bâtiment d’une jauge brute de moins de 60, délivré par TC, qui était valide pour le bateau lorsque celui-ci était exploité dans les eaux côtières de la Colombie-Britannique à une distance maximale de 10 NM du rivage. Chaque conducteur avait suivi le cours de préparation aux examens de TC pour l’obtention du brevet de capitaine avec restrictionsUn certain nombre de fournisseurs de formation au Canada sont approuvés par Transports Canada (TC) pour aider les candidats à se préparer aux examens. La formation à laquelle les conducteurs de l’Island Bay ont participé ne comprenait pas d’instructions sur la stabilité..

    Le conducteur 1 a suivi un cours sur les fonctions d’urgence en mer (FUM), niveau A2 en novembre 2016 et était titulaire d’un certificat de formation de conducteur de petits bâtiments (CFCPB)Un certain nombre de fournisseurs de formation au Canada sont approuvés par TC pour offrir le cours du certificat de formation de conducteur de petits bâtiments (CFCPB), comme il est décrit dans le document TP 14692. Ce document répartit les 26 heures de formation par sujet; 1 heure est affectée au contenu sur la stabilité., d’un certificat restreint d’opérateur – maritime (CRO-M) et d’un brevet d’opérateur de machines de petits bâtiments avec restriction (OMPB-R) qui ont été délivrés entre 2016 et 2017. Le conducteur 1 comptait environ 25 années d’expérience de travail sur des navires commerciaux, principalement en tant que matelot de pont.

    Le conducteur 2 avait obtenu un CFCPB en novembre 2016. Il comptait environ 5 années d’expérience de matelot de pont sur des navires de pêche commerciale. Avant d’acheter le bateau, le conducteur 2 avait été matelot de pont pendant 2 voyages avec l’ancien propriétaire de l’Island Bay.

    Les 2 conducteurs travaillaient à bord de l’Island Bay depuis qu’ils étaient devenus propriétaires d’Archipelago Ventures Ltd. en 2017.

    1.7 Certificats du bateau

    En tant que bateau à passagers exploité à titre commercial ayant une jauge brute de 15 ou moins et transportant 12 passagers ou moins, l’Island Bay était tenu de respecter les règlements et les normes applicables en vertu de la LMMC 2001, y compris le Règlement sur les petits bâtiments, le Règlement sur le personnel maritime et le Règlement de 2020 sur la sécurité de la navigation.

    L’Island Bay n’était pas tenu d’être certifié par TC et n’avait donc pas à faire l’objet d’inspections périodiques en vue de sa certificationLe Règlement sur les certificats de sécurité de bâtiment de TC indique que les navires ayant une jauge brute de 15 ou moins qui transportent plus de 12 passagers, ou les navires ayant une jauge brute de plus de 15, doivent faire l’objet d’une inspection et d’une certification par TC. Voir Transports Canada, DORS/2021-135, Règlement sur les certificats de sécurité de bâtiment (modifié le 23 juin 2021)..

    1.8 Permis et inspections du bateau

    1.8.1 Permis d’exploitation de commerce à Gwaii Haanas

    De nombreux voyagistes offrent des expéditions touristiques dans la réserve de parc national, réserve d’aire marine nationale de conservation et site du patrimoine haïda Gwaii Haanas de Parcs Canada. Les voyagistes doivent obtenir un permis d’exploitation de commerce auprès du parc pour exercer des activités à Gwaii HaanasParcs Canada, « Des voyagistes : Réserve de parc national, réserve d’aire marine nationale de conservation et site du patrimoine haïda Gwaii Haanas », à l’adresse https://parcs.canada.ca/pn-np/bc/gwaiihaanas/visit/voyagistes-operators (dernière consultation le 20 août 2024)..

    Pour obtenir un permis, les propriétaires de navires doivent s’assurer que les conducteurs des navires ont obtenu les brevets requis de TC, que l’immatriculation de leur navire est à jour et qu’ils sont couverts par une assurance. L’administration du parc s’attend à ce que les voyagistes respectent toute la réglementation applicable en vertu de la LMMC 2001, y compris les exigences en matière de stabilité des navires et d’équipement de sauvetage. Les permis sont délivrés annuellement et les voyagistes doivent présenter une nouvelle demande chaque année.

    Le 6 mai 2022, Archipelago Ventures Ltd. a obtenu un permis d’exploitation de commerce du parc l’autorisant à proposer des excursions à Gwaii Haanas pour la saison 2022.

    1.8.2 Inspection par la Gendarmerie royale du Canada

    TC a délégué le pouvoir d’effectuer des inspections de navires en son nom à de nombreux services d’application de la loi au paysGouvernement du Canada, Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada (L.C. 2001, ch. 26), paragraphe 12(1)., dont la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et Conservation et protection, Pêches et Océans Canada, région du Pacifique. L’autorisation est limitée à la vérification de la conformité avec les exigences des parties 2, 3, 4 et 11 de la LMMC 2001, ainsi qu’avec les règlements pris en vertu de ces parties, en ce qui concerne les navires d’une longueur maximale de 24 m, sans toutefois inclure les exigences relatives à la construction des navires.

    Le 3 juillet 2022, la GRC a inspecté l’Island Bay. Un agent de la GRC est monté à bord du bateau et a rempli un formulaire d’inspection des petits navires de pêche, utilisé pour tous les contrôles de conformité des petits navires commerciaux effectués par la GRC. Même si la procédure opérationnelle normalisée des Services maritimes de la côte Ouest de la GRC prévoit d’aviser les exploitants de navires de l’objet d’une inspection, le formulaire rempli n’indiquait pas l’objet ou la portée de l’inspection. Le formulaire indiquait que les CRO-M et les brevets des conducteurs ne se trouvaient pas à bord. L’agent de la GRC a signé le formulaire et l’a remis aux conducteurs pour qu’ils le conservent dans leurs dossiers.

    1.8.3 Inspection d’assurance

    Dans toute l’industrie maritime, il est d’usage que les navires fassent l’objet d’une inspection avant d’être acceptés pour une couverture d’assurance ou son renouvellement. La fonction principale d’une inspection d’assurance est de déterminer l’état du navire ainsi que sa valeur actuelle et sa valeur de remplacement. Les lacunes relevées pendant une inspection sont signalées aux propriétaires et aux assureurs, et la réalisation de mesures correctives est souvent une condition de l’assurance.

    Il n’existe pas d’accréditation obligatoire pour les inspecteurs de navires, et ces inspecteurs ne sont pas tenus de respecter de normes précisesL’enquête a permis de déterminer que l’expert qui avait inspecté l’Island Bay en 2015 tout comme l’expert qui avait inspecté le bateau en 2022 étaient membres de sociétés d’experts maritimes reconnues.. Les assureurs n’ont pas de normes communes concernant la portée des inspections des navires, et suivent donc leurs propres critères. C’est pourquoi les inspections diffèrent d’un inspecteur à un autre et d’une compagnie à une autre, tout comme les critères pour contracter une assurance. Les caractéristiques de stabilité et les modifications du navire peuvent ne pas être évaluées, et des vices cachés peuvent ne pas être décelés. De nombreux rapports d’inspection d’assurance contiennent une mise en garde indiquant que le seul but de l’inspection est de contribuer à déterminer la qualification d’un navire pour une couverture d’assurance, et que le rapport d’inspection ne doit pas être utilisé à d’autres fins (c.-à-d. qu’il ne doit pas être considéré comme une mesure de l’état de navigabilité d’un navire)Tel que rapporté antérieurement dans les rapports d’enquête sur la sécurité du transport maritime M20P0229 et M12W0054 du BST..

    L’Island Bay a été inspecté à des fins d’assurance en mars 2015 et en mai 2022.

    L’inspection de 2015 a été réalisée alors que le bateau était à flot. Le rapport d’inspection recommandait l’installation de boucles ventilées antisiphonnementUne boucle ventilée placée à la bonne hauteur empêche le contresiphonnement de l’eau et maintient l’intégrité de l’étanchéité. sur les pompes de cale situées dans les compartiments de la cambuse et de l’appareil à gouverner.

    Le rapport d’inspection de 2022 indiquait que l’expert avait évalué le bateau en fonction des normes et des lignes directrices suivantes de l’industrie :

    • le TP 1332 de TC, Normes de construction pour les petits bâtiments (incorporé par renvoi dans le Règlement sur les petits bâtiments);
    • les normes de l’American Boat & Yacht Council (ABYC);
    • la norme Standard for Pleasure and Commercial Motor Craft [norme de protection contre les incendies pour les embarcations de plaisance et les embarcations commerciales] de la National Fire Protection Association;
    • le Guide de sécurité nautique de TC.

    Le rapport d’inspection de 2022 faisait état d’un certain nombre de lacunes qui exigeaient l’attention immédiate du propriétaire du bateau et la prise des mesures suivantes pour assurer la sécurité et de la navigabilité générale du bateau :

    • remplacer le système d’échappement de la génératrice;
    • installer une prise à disjoncteur de fuite de terre dans le local mécanique;
    • installer un fil de mise à la terre du châssis de l’onduleur conformément aux normes de l’ABYC;
    • faire l’entretien du feu de mât;
    • enlever la tuyauterie en chlorure de polyvinyle attachée à la vanne de coque;
    • boucher correctement la vanne de coque;
    • installer un détecteur de monoxyde de carbone dans le gaillard d’avant.

    Des enquêtes antérieures du BST ont révélé qu’en l’absence d’une inspection de sécurité périodique par TC, il se peut que les exploitants de navires commerciaux se fient à des inspections indépendantes pour déterminer l’état de navigabilité de leurs naviresRapports d’enquête sur la sécurité du transport maritime M15P0035, M12W0054 et M08W0189 du BST..

    1.9 Stabilité du bateau

    La stabilité d’un navire est la tendance d’un navire à revenir à sa position initiale après s’être incliné sous l’effet de forces extérieures telles que le vent ou les vagues. La stabilité d’un navire constitue un élément fondamental de la navigabilité; il est dans l’intérêt de tous les propriétaires et exploitants de navires de comprendre la stabilité et de s’assurer que leur navire possède un degré de stabilité satisfaisant pour assurer sa sécurité et celle des personnes à bord.

    La capacité d’un navire à revenir à la verticale après avoir été incliné par une force extérieure dépend de l’emplacement de 3 points : le métacentre (M), le centre de gravité (G) et le centre de flottaisonLa flottabilité est une force vers le haut exercée par un fluide qui s’oppose au poids d’un objet immersé partiellement ou complètement. Il s’agit d’une poussée vers le haut qui permet à un corps de flotter au-dessus d’un fluide sans couler. (B) (figures 3 et 4). M est le point auquel une ligne verticale imaginaire qui traverse B et une ligne verticale imaginaire qui traverse G se rencontrent à un angle peu prononcé. G est le point auquel le poids d’un navire agit verticalement vers le bas. G reste au même endroit sauf si le poids se déplace en raison d’un mouvement de roulis. B est le point où la force de flottabilité de l’eau agit vers le haut. En équilibre, G et B sont alignés verticalement. 

    Figure 3. Coupe transversale d’un navire en position verticale, illustrant la stabilité (Source : BST)
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    Figure 4. Coupe transversale d’un navire incliné par une force externe, illustrant la stabilité (Source : BST)
    Image
     

    Lorsqu’un navire subit un mouvement de roulis, , B se déplace, car le volume immergé de la coque change. Les forces de B et G sont toujours équivalentes, et elles continuent d’agir verticalement. Le nouvel emplacement de B porte l’étiquette B1. La ligne perpendiculaire entre G et la ligne verticale passant par B1 est appelé Z. La distance entre G et Z est appelée le bras de redressement ou le levier de redressement (GZ). Le levier de redressement et le poids du navire créent le moment de redressement, qui est la force qui ramène le navire à la verticale après son inclinaison. En général, le levier de redressement augmente jusqu’à une certaine valeur maximale, puis diminue si la bande du navire continue d’augmenter.

    1.9.1 Perception de la stabilité et de la sécurité des navires par les conducteurs

    Dans le cas des navires dont la stabilité n’a pas été formellement évaluée, la perception de la stabilité par le conducteur découle souvent des mouvements du navire dans différentes conditions d’exploitation et différents états de la mer. Toutefois, seule une évaluation formelle de la stabilité permet de déterminer avec exactitude la stabilité d’un navire.

    La perte de stabilité représente un risque important qui doit être géré lorsqu’un navire est en service. Cependant, les conducteurs ne comprennent pas toujours ce risque. Plusieurs facteurs contribuent à la perception qu’en ont les conducteursLe risque est l’évaluation du potentiel de conséquences négatives découlant d’un danger. Il s’agit de la probabilité qu’au cours d’une période d’activité déterminée, la condition dangereuse entraîne un accident aux conséquences définissables, c.-à-d. la probabilité que le potentiel de préjudice du danger se réalise.. L’expérience personnelle de situations dangereuses peut influer sur la perception du danger; une personne qui exécute de manière répétée une action à haut risque sans subir de conséquences négatives peut finir par se désensibiliser au risqueJ. Inouye, Risk Perception: Theories, Strategies, and Next Steps (National Safety Council, Campbell Institute), à l’adresse https://www.thecampbellinstitute.org/wp-content/uploads/2017/05/Campbell-Institute-Risk-Perception-WP.pdf (dernière consultation le 20 août 2024).. Les conducteurs qui pensent que leur navire et eux sont entièrement prêts pour les activités prévues peuvent ne pas cerner les risques ou comprendre pleinement le niveau de risque auquel ils sont confrontés; ils peuvent également estimer qu’il n’y a guère d’avantage à cerner les dangers et atténuer les risques connexes. Le sentiment de maîtrise personnelle d’une situation peut atténuer l’anxiété et amener un conducteur à devenir plus laxiste à l’idée de se livrer à des comportements dangereuxD. Krallis et A. Csontos, « From Risk Perception to Safe Behaviour » (Deloitte Touche Tohmatsu), à l’adresse http://www.deloitte.com.au/media/docs/au_Deloitte_from_risk_perception_to_safe_behaviour.pdf (dernière consultation le 16 août 2024)..

    Des enquêtesEnquêtes sur la sécurité du transport maritime M21A0065, M20P0229, M19A0025, M09Z0001, M04N0086 et M02W0147 du BST. antérieures du BST ont révélé que la perception de la stabilité des navires par les conducteurs peut être influencée par un certain nombre de facteurs, y compris :

    • des années passées sans accident, ce qui renforce la perception de la sécurité et de l’efficacité de la conduite du navire, faisant que le conducteur surestime la stabilité du navire;
    • les certificats, les permis et les inspections des navires par les gouvernements, les associations et les assureurs, qui peuvent être perçus plus largement comme une approbation générale de la capacité du navire à être exploité de façon sécuritaire;
    • la confiance des conducteurs en leurs propres compétences, actions et expériences.

    Avant l’événement à l’étude, l’Island Bay :

    • comptait plus de 20 années de voyages réussis, et ses conducteurs avaient des expériences positives antérieures relativement à l’utilisation de stabilisateurs à paravane pour réduire le roulis du bateau;
    • avait été approuvé par TC pour une capacité à bord de 8 personnes, et pour une exploitation comme navire à passagers;
    • possédait une copie des résultats d’un essai de période de roulis effectué en 1993;
    • avait été inspecté à plusieurs reprises dans le passé par un inspecteur de TC;
    • avait été inscrit au PCIPB et au PCPB de TC;
    • avait reçu un formulaire de résultats d’inspection de la part de la GRC;
    • avait fait l’objet d’une inspection d’assurance et avait été approuvé pour une assurance;
    • avait obtenu un permis d’exploitation à Gwaii Haanas.

    1.9.2 Facteurs de risque touchant la stabilité

    Plusieurs facteurs peuvent nuire à la stabilité d’un navire, comme le franc-bord et la réserve de flottabilité, les effets des modifications apportées au navire et les forces externes créées par les conditions de vent et de mer.

    1.9.2.1 Franc-bord et réserve de flottabilité

    Le franc-bord est la distance entre la ligne de flottaison du navire et le pont de travail. La réserve de flottabilité est le volume de l’espace clos d’un navire situé au-dessus de la ligne de flottaison qui peut être rendu étanche. Une augmentation du franc-bord accroît également la réserve de flottabilité d’un navire, ce qui améliore la stabilité. Une augmentation du poids diminue le franc-bord, ce qui diminue la réserve de flottabilité.

    Des modifications ont été apportées à l’Island Bay lors d’un changement de l’exploitation prévue du bateau, qui est passé de navire de pêche à navire à passagers. Ces modifications ont ajouté du poids au bateau, ce qui a réduit le franc-bord et la réserve de flottabilité.

    1.9.2.2 Modifications à un navire

    Il n’est pas rare que des navires soient modifiés plusieurs fois au fil des ans, en particulier les petits navires commerciaux et les petits navires de pêcheRapports d’enquête sur la sécurité du transport maritime M21A0065, M19A0025, M17P0098, M12W0062, M12W0054 et M08W0189 du BST.. Si une modification change les caractéristiques du navire, elle doit être signalée au registraire en chefLa Loi sur la marine marchande du Canada et la loi qui lui a succédé, la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada (LMMC 2001), exigeaient, et exigent toujours, que les propriétaires ou les représentants autorisés de navires avisent le registraire en chef du Registre canadien d’immatriculation des bâtiments, à Transports Canada, de tout changement aux détails figurant dans le certificat d’immatriculation de leur navire. « Si un bâtiment canadien est modifié au point de n’être plus conforme à la description qui en est faite au certificat d’immatriculation ou aux détails qui y sont indiqués, le représentant autorisé en avise le registraire en chef au plus tard trente jours après la modification et lui fournit les renseignements et documents utiles. » Voir Gouvernement du Canada, Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada (L.C. 2001, ch. 26), paragraphe 58(2).. Depuis qu’il est entré en vigueur en 2010, le Règlement sur les petits bâtiments exige aussi que les propriétaires de navires avisent le ministre des Transports lorsqu’ils apportent des modifications importantesTransports Canada, DORS/2010-91, Règlement sur les petits bâtiments (modifié le 20 décembre 2023), paragraphe 710(2)..

    Les modifications peuvent contribuer de façon négative aux facteurs de risque en matière de stabilité. En règle générale, les modifications augmentent le poids total du navire et réduisent le franc-bord initial et la réserve de flottabilité; la répartition de la masse ou un changement de la forme de la coque ont une incidence sur la capacité du navire à rester à la verticale. Les modifications peuvent également compromettre l’étanchéité du navire, ce qui augmente le risque d’envahissement par le haut. Pour ces raisons, à la suite du chavirement du bateau de pêche Tyhawk, le Bureau a recommandé que les modifications apportées aux navires soient évaluées, consignées et déclarées au ministre des TransportsRapport d’enquête sur la sécurité du transport maritime M21A0065 du BST..

    L’enquête a permis de déterminer que l’Island Bay avait subi d’importantes modifications (figure 5) depuis sa construction :

    • La longueur totale a été augmentée à 12,58 m, avec un allongement de la coque de 1,85 m vers l’arrière, tandis que la largeur est demeurée la même. Cet allongement a augmenté la jauge brute du bateau.
    • Le rouf d’origine du bateau a été remplacé et agrandi.
    • Trois écoutilles non étanches ont été installées pour donner accès à la cambuse ajoutée.
    • La porte étanche d’origine de la cuisine a été remplacée par une porte non étanche.
    • Le dessus du rouf a été transformé en passerelle haute.
    • Des stabilisateurs à paravane amortissant le roulis et le gréement associé ont été installés.
    • Six boîtes de rangement en aluminium ont été ajoutées, réparties dans tout le bateau.
    • Un treillis d’abordage et de plongée en aluminium de 0,5 m sur 2,7 m a été ajouté.
    • Un support de rangement pour kayaks a été ajouté sur le pont principal, les kayaks étant placés à la même hauteur que le dessus du rouf.

    Les modifications apportées au bateau ont augmenté sa jauge brute, sa longueur totale et son poids, en plus d’altérer l’intégrité de son étanchéité à l’eau et sa stabilité. L’enquête a permis de déterminer que la majorité des modifications ont été apportées en 1998. L’enquête n’a pas permis de déterminer où les modifications avaient été effectuées et par qui, ni si des normes avaient été respectées. Les modifications n’ont pas été signalées à TC, et le certificat d’immatriculation a continué d’indiquer les détails initiaux du bateau.

    Le bateau a changé de propriétaire en 2001 et en 2017, et dans les deux cas, les nouveaux propriétaires n’étaient pas au courant de l’ampleur des modifications apportées par le passé à la conception d’origine du bateau. L’Island Bay n’a jamais fait l’objet d’une évaluation complète de sa stabilité, et la réglementation ne l’exigeait pasLa Loi sur la marine marchande du Canada était en vigueur lorsque l’Island Bay a été construit. Bien que la loi ne contenait pas d’exigences particulières concernant la stabilité des navires, l’article 391 exigeait que les propriétaires et les capitaines utilisent tous les moyens raisonnables pour s’assurer que les navires étaient en bon état de navigabilité. Voir Gouvernement du Canada, Loi sur la marine marchande du Canada, LRC 1985, ch. s-9, à l’adresse https://www.canlii.org/fr/ca/legis/lois/lrc-1985-c-s-9/32084/lrc-1985-c-s-9.html (dernière consultation le 20 août 2024). .

    Figure 5. Diagramme comparant la configuration d’origine de l’Island Bay et sa configuration après modifications (Source : BST)
    Image

    Légende : (1) pont, (2) mât, (3) stabilisateurs (bâbord et tribord), (4) casiers, (5) support avec kayaks et VFI, (6) réservoir de carburant auxiliaire, (7) sabords de décharge, (8) génératrice, (9) orifice d’évacuation de la cambuse, (10) treillis d’abordage et de plongée, (11) cambuse, (12) poste de barre, (13) radeau de sauvetage pour 8 personnes, (14) boîtes de rangement, (15) évier et cuisinière, (16) porte de la cuisine, (17) placard, (18) table/couchette, (19) écoutille du compartiment de l’appareil à gouverner, (20) rangement pour les gilets de sauvetage, (21) 3 écoutilles non étanches sur la cambuse. Les éléments et les zones colorés et hachurés représentent des ajouts.

    1.9.2.3 Augmentation du poids

    Le poids total d’un navire et de son contenu ont une incidence directe sur le centre de gravité (G), qui est un point clé influençant la capacité du navire à se redresser. Une augmentation du poids réduit le franc-bord d’un navire, ce qui peut diminuer sa stabilité. De plus, la réduction du franc-bord rapproche également le ou les points d’envahissement par le haut du navire de la ligne de flottaison. Il est donc important de surveiller l’évolution du poids du navire au fil du temps. Dans le cas des petits navires (d’une jauge brute de 15 ou moins) dont le poids est relativement faible au départ, l’ajout de petites quantités de poids au fil du temps, comme  de l’équipement  et des provisions, peut avoir un effet cumulatif; des petits ajouts successifs entraînent à la longue une augmentation notable du poids du navire.

    L’Island Bay avait subi d’importantes modifications structurelles, telles que l’allongement de la coque et du rouf, qui ont augmenté le poids du bateau. Plusieurs autres ajouts ont également contribué à augmenter le poids du bateau, comme l’équipement pour l’écotourisme, y compris les kayaks et leur support de rangement.

    1.9.2.4 Élévation du centre de gravité

    Bien que les effets de l’augmentation du poids d’un navire soient importants, l’emplacement d’une augmentation de poids, quelle qu’elle soit, est un facteur déterminant pour le maintien de la stabilité du navire. L’ajout de poids en hauteur sur un navire, par exemple sur la superstructure, peut relever le centre de gravité. Ce centre de gravité élevé affecte le bras de redressement. Une des bonnes pratiques en matière nautique consiste à placer l’équipement lourd le plus bas possible à bord du navire afin de conserver un centre de gravité bas. Un centre de gravité bas augmente le bras de redressement et améliore la stabilité du navire.

    Les modifications apportées à l’Island Bay en vue de sa nouvelle exploitation ont eu pour effet de relever son centre de gravité.

    1.9.2.4.1 Paravane d’amortissement du roulis

    Les paravanes d’amortissement du roulis, communément appelés stabilisateurs à paravane, sont composés d’un aileron en forme de delta suspendu à l’extrémité d’une perche, de chaque côté du navire, qui est reliée à la partie supérieure d’un mât de paravane sur le pont principal (figure 6). Ces paravanes relèvent le centre de gravité du navire en raison de l’ajout de poids en hauteur (mât et gréement) et de la force de traînée créée par les ailerons. Ces facteurs font en sorte d’amortir le mouvement de roulis du navire, ce qui améliore le confort de l’équipage et des passagers et donne l’impression, y compris aux conducteurs de l’Island Bay, que la stabilité du navire est améliorée. 

    Figure 6. Illustration de stabilisateurs à paravane (Source : BST)
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    Légende : A) aileron en forme de delta, B) mât, C) perches, D) gréement reliant les perches au mât

    L’Island Bay était connu pour son roulis lent, et il lui fallait du temps pour se redresser. Lorsque ses stabilisateurs à paravane étaient déployés par temps venteux, le bateau prenait régulièrement de la bande sur un côté.

    En 2000, TC a publié un bulletin de la sécurité des naviresTransports Canada, Bulletin de la sécurité des navires no 15/2000 : Utilisation de systèmes d’amortissement de roulis à paravane (stabilisateurs à paravane), 20 novembre 2000, à l’adresse https://tc.canada.ca/fr/transport-maritime/securite-maritime/bulletins-securite-navires/bulletin-no-15-2000 (dernière consultation le 19 août 2024). prévenant les propriétaires de navires des risques associés à l’utilisation des stabilisateurs à paravane et du fait qu’ils n’améliorent pas la stabilité d’un navire. L’enquête a permis de déterminer que les conducteurs de l’Island Bay ne connaissaient pas la publication de TC.

    1.9.2.5 Étanchéité à l’eau et envahissement par le haut

    L’intégrité de l’étanchéité à l’eau constitue un élément important de la stabilité des navires. Les aménagements de coque étanches et les joints pour portes et écoutilles empêchent l’eau de pénétrer dans le navire. L’envahissement par le haut est l’entrée d’eau de mer par une ouverture dans la coque ou la superstructure d’un navire en raison de la bande, de l’assiette ou de l’immersion du navireUnited States Coast Guard Marine Safety Center, MSC Guidelines for Review of Passenger Safety Vessel Stability (Subchapters K and H) (27 octobre 2017), à l’adresse https://www.dco.uscg.mil/Portals/9/MSC/PRG/PRG.H2-03.2017.10.27.Passenger_Vessel_Stability_(K-H).pdf?ver=2017-11-09-095449-127#:~:text=Downflooding%3A%20The%20entry%20of%20seawater,or%20submergence%20of%20the%20vessel (dernière consultation le 19 août 2024).. L’accumulation d’eau par suite de l’envahissement par le haut alourdit le navire et réduit son franc-bord. Le point d’envahissement par le haut est le point le plus bas où l’eau peut pénétrer. Ce point diffère selon la construction et l’étanchéité à l’eau du navire.

    Pour éviter l’envahissement par le haut, les Normes de construction pour les petits bâtiments de TCTransports Canada, TP 1332F, Normes de construction pour les petits bâtiments (2010), section 9.3.3.2, à l’adresse https://tc.canada.ca/fr/transport-maritime/securite-maritime/tp-1332-normes-construction-petits-batiments2010 (dernière consultation le 19 août 2024). exigent que le système de pompage de cale d’un navire soit conçu de manière à éviter tout contresiphonnement et à empêcher l’eau de pénétrer dans le navire par les vannes d’évacuation des pompes. Il existe plusieurs façons d’y parvenir, par exemple en utilisant des boucles ventilées ou des clapets antiretourLe manuel d’instructions du fabricant des pompes de cale Xylem Rule 2000 recommande d’utiliser des boucles ventilées dans l’installation du système, si la distance entre les orifices d’évacuation et la ligne de flottaison est inférieure à 30 cm en position verticale. Xylem Inc., Rule-Mate Instruction Manual (2023), p. 9, à l’adresse https://www.xylem.com/siteassets/brand/rule/resources/manual/rule-mate-iom-950-0528a_rev_g.pdf (dernière consultation le 19 août 2024)..

    Le BST a calculé que lorsque le bateau a atteint un angle de bande de 12° sur bâbord, il a commencé à embarquer de l’eau sur le pont principal par les sabords de décharge (figure 7). À environ 16°, l’eau a commencé à envahir le compartiment moteur avant et la cambuse par les vannes d’évacuation, s’accumulant dans le bouchain vif bâbord du bateauLe bouchain d’un navire est le point d’intersection ou la ligne entre le fond de la coque (la partie immergée du navire) et les côtés (la partie supérieure) de la coque, là où la coque du navire change de direction ou de courbure.. À 37°, l’eau a commencé à déborder des pavois et à remplir la cambuse par ses écoutilles non étanches, entraînant une gîte supplémentaire et alourdissant le bateau. Le livet de pont longeant le rouf a aussi été immergé à cet angle.

    Figure 7. Diagramme illustrant la pénétration d’eau sur l’Island Bay avec un angle de bande de 37° et une gîte sur bâbord (Source : BST)
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    1.9.2.6 Effet de carène liquide

    Lorsqu’un poids peut se déplacer librement avec le mouvement d’un navire, que ce soit dans les citernes, sur le pont ou en raison d’eau accumulée dans la coque par suite d’envahissement par le haut, il déplace le centre de gravité du navire vers le côté bas du navire, faisant que le navire reste incliné plus longtemps avant de revenir à la verticale. Ce mouvement libre du poids est appelé l’effet de carène liquide. La gravité de l’effet de carène liquide augmente en fonction du poids déplacé et de la distance du déplacement. L’effet de carène liquide peut facilement réduire le levier de redressement au point où le navire peut chavirer.

    L’enquête a permis de déterminer qu’environ 50 % de l’eau et du carburant stockés dans les citernes de l’Island Bay avaient été consommés avant l’événement. L’enquête a aussi permis de déterminer que de l’eau s’était accumulée sur le pont juste avant le chavirement.

    1.9.2.7 Forces externes
    1.9.2.7.1 Remorquage

    La force de traînée de la charge remorquée varie en fonction des conditions de mer et elle s’exerce sur le point où la ligne de remorquage est reliée au navire. Si le point de connexion est situé au-dessus du centre de gravité du navire remorquant, le centre de gravité du navire s’élèvera. Si le point de connexion est situé près de l’arrière du navire, la force de la charge réduira également le franc-bord arrière, ce qui augmentera les risques d’immersion du livet de pont. Si la mer est sur le travers ou la hanche du navire, il est possible que la force de remorquage s’éloigne de l’axe longitudinal du navire.

    Au moment de l’événement à l’étude, l’Island Bay remorquait une embarcation pneumatique à coque rigide (RHIB) alors qu’il était exposé au vent et à des vagues à environ 90° par rapport à son cap (mer de travers). La RHIB de 5 mètresLa RHIB pesait environ 300 kg. était attachée à la rambarde arrière du côté tribord du bateau.

    1.9.2.7.2 Effets du vent, de la marée et des conditions de mer

    La surface exposée au vent d’un navire se situe normalement au-dessus de son centre de gravité et comprend toutes les surfaces directement exposées au vent, comme la superstructure. Plus la surface exposée au vent est grande et élevée, plus les effets sur la stabilité du navire sont importants. La vitesse et la direction du vent par rapport au cap du navire influent également sur la force exercée par le vent.

    Dans l’événement à l’étude, l’allongement et la surélévation du rouf du bateau, ainsi que l’allongement de la coque vers l’arrière, ont contribué à augmenter la surface exposée au vent.

    Les navires naviguant dans une mer de travers sont exposés à des vagues qui peuvent créer de grands angles de roulis et augmenter la quantité d’eau embarquée sur le pont, ce qui accroît le risque de chavirement du navire. Ces angles de roulis importants modifient la forme sous-marine de la coque qui crée la force de flottabilité nécessaire pour maintenir le navire en position verticale. Les angles de roulis importants créent également la possibilité d’une immersion du livet de pont, qui peut également contribuer à l’envahissement par le haut d’un navire et qui est plus susceptible de se produire si un navire est exploité avec un franc-bord réduit ou dans des conditions météorologiques défavorables.

    De plus, les marées et les courants exercent une force, normalement en dessous du centre de gravité du navire, sur la partie immergée de la coque du navire. Lorsque la force du vent agit sur un navire d’un côté et que la force du courant de marée agit sur le côté opposé, une force de chavirement est créée. Pendant le voyage à l’étude, le vent du nord-ouest soufflait perpendiculairement au côté tribord du bateau lorsque celui-ci a viré pour entrer dans la baie Carpenter. La marée montait vers le nord, ce qui s’opposait au vent du nord-ouest.

    1.10 Représentants autorisés

    Depuis le 1er juillet 2007, la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada confère la responsabilité de la sécurité des navires au représentant autorisé (RA)Gouvernement du Canada, Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada (L.C. 2001, ch. 26, modifié le 22 juin 2023), article 106.. Au moment de l’événement à l’étude, le RA était généralement le propriétaire (ou 1 des propriétaires, dans le cas d’une copropriété). Les responsabilités du RA sont énumérées dans la Loi et les règlements applicables, et les RA doivent s’assurer que ces règlements sont respectés. Par exemple, une stabilité adéquate doit être assurée pour les opérations prévues d’un navire, les éléments essentiels de sécurité doivent être maintenus, et tout changement apporté aux caractéristiques du navire doit être signalé. La propriété du navire est la seule condition pour devenir RADepuis cet événement, la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada a été modifiée pour introduire le concept de « personne qualifiée ». Dans les cas où le propriétaire a conclu une entente avec une personne qualifiée, cette personne peut être désignée comme étant le RA..

    Il est important que les RA connaissent les exigences réglementaires s’appliquant à leur navire et s’informent de toute modification. Dans d’autres domaines, il existe des rôles comparables à celui du RA, dans lesquels 1 personne se voit attribuer certaines responsabilités en application de lois fédérales ou provinciales. Pour aider les personnes ayant ces rôles à assumer leurs responsabilités, certains ministères et associations de sécurité ont mis au point des formations, des manuels, des bulletins d’information et des ressources en ligneTransports Canada, « Programme et bulletins des personnes autorisées », à l’adresse https://tc.canada.ca/fr/aviation/instructeurs-vol-personnel-aviation/programme-bulletins-personnes-autorisees (dernière consultation le 19 août 2024).. Par exemple, à Terre-Neuve-et-Labrador, WorkplaceNL exige que tout lieu de travail comptant moins de 6 employés ait un représentant désigné de santé et sécurité au travailGouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador, Occupational Health and Safety Act (modifiée en 2022), article 42.1 : Workplace designate.. Les responsabilités du représentant désigné de sécurité sont énoncées dans la loi provinciale et sont similaires à celles du RA d’un navire, en ce sens qu’il est responsable de la santé, de la sécurité et du bien-être des personnes employées sur son lieu de travail. La Newfoundland and Labrador Fish Harvesting Safety Association (NL-FHSA)Newfoundland and Labrador Fish Harvesting Safety Association (NL-FHSA), « The Fishing Vessel Safety Designate Program », à l’adresse https://www.nlfhsa.com/fvsd (dernière consultation le 19 août 2024). a mis au point une formation en ligne gratuite de 6 heures, approuvée par WorkplaceNL, à laquelle les représentants désignés de sécurité doivent participer.

    Le fait que TC se fie aux RA ne donne pas toujours les résultats escomptés, et les exigences réglementaires minimales ne sont pas toujours respectées. Des enquêtes antérieures ont permis au BST d’établir que la capacité d’un RA de respecter les exigences réglementaires minimales dépend de ses connaissances, de son expérience, de sa formation, ainsi que de sa sensibilisation et sa compréhension relativement à ses responsabilitésRapports d’enquête sur la sécurité du transport maritime M20P0229 et M21A0065 du BST..

    1.10.1 Préparation aux situations d’urgence

    Les règlements de TC concernant la préparation aux situations d’urgence des navires comprennent, entre autres, l’obligation de transporter de l’équipement de sauvetage et des dispositifs d’alerte de détresse et de prévoir des procédures sur la façon d’exploiter le navire de façon sécuritaire et de faire face aux situations d’urgencesGouvernement du Canada, Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada (L.C. 2001, ch. 26, modifiée le 30 juillet 2019), paragraphe 106(1).,Transports Canada, DORS/2020-216, Règlement de 2020 sur la sécurité de la navigation (modifié le 6 octobre 2021).. Les RA sont responsables de s’assurer que ces exigences sont respectées et que :

    • les personnes à bord connaissent l’emplacement et l’utilisation de l’équipement de sécurité;
    • les passagers reçoivent une formation en matière de sécurité;
    • des mesures sont prises pour protéger les personnes à bord.

    Afin de prévenir les autorités de recherche et sauvetage en cas de détresse du navire, TC exige que les petits navires commerciaux de moins de 12 m de long effectuant des voyages à proximité du littoral, classe 2 (à moins de 25 NM de la côte dans les eaux côtières), soient équipés d’une balise de localisation personnelle (BLP) ou d’une radiobalise de localisation des sinistres (RLS) à dégagement libre ou à activation manuelleTransports Canada, DORS/2020-216, Règlement de 2020 sur la sécurité de la navigation (modifié le 6 octobre 2021), article 209..

    En cas d’urgence, la présence d’une RLS opérationnelle à bord d’un navire peut réduire considérablement le temps nécessaire aux opérations de recherche et sauvetage, et améliorer les chances de survie. Des enquêtes précédentesRapports d’enquête sur la sécurité du transport maritime M21A0315, M20A0258, M20A0160, M98F009 et M97W0236 du BST. du BST ont permis de constater que la présence à bord d’un dispositif d’alerte de détresse peut contribuer à sauver des vies. Entre 2015 et 2021, 15 événementsÉvénements sur la sécurité du transport maritime M21A0412, M21A0161, M20A0258, M20A0160, M19P0242, M19A0090, M19A0082, M18P0394, M18P0184, M18A0303, M18A0078, M18A0076, M16A0327, M16A0140 et M15A0189 du BST. ont été signalés au BST, lors desquels 34 personnes ont perdu la vie et aucun signal de dispositif d’alerte de détresse n’a été reçu du navire ou de ses occupants.

    Au moment de l’événement, l’Island Bay transportait de l’équipement de sauvetage, y compris des VFI, des gilets de sauvetage et une RLS. L’enquête n’a permis de trouver aucun dossier de procédures d’urgence ou d’exercices de sécurité pour le bateau. Un exposé oral de sécurité a été effectué à l’intention des passagers avant le voyage à l’étude. L’enquête n’a pas permis de localiser la RLS après l’événement et n’a donc pas permis de déterminer pourquoi un signal de détresse automatique n’avait pas été reçu après le chavirement.

    1.11 Transports Canada

    1.11.1 Surveillance réglementaire

    TC est le ministère fédéral responsable du programme de réglementation visant la sécurité de tous les navires et du personnel maritime; cette responsabilité comprend l’élaboration de règlements et de normes pour les navires et les équipages, qui précisent les exigences minimales de sécurité qui doivent être respectées, en plus de servir de protection contre les dangers connus dans l’industrie du transport maritime. TC est également responsable de l’application de ces règlements et normes.

    La Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada est la loi qui régit la sécurité des navires et du personnel maritime. Dans le cas des navires commerciaux d’une jauge brute de 15 ou moins, il n’y a pas d’exigences en matière de certification et d’inspection de sécurité périodique. Pour ces navires commerciaux, TC considère que la sécurité des navires est une responsabilité partagée entre les propriétaires de navires, les conducteurs, l’industrie et le gouvernement, où tous ont un rôle à jouerTransports Canada, TP 14070, Guide de sécurité des petits bâtiments commerciaux (2010), à l’adresse https://tc.canada.ca/fr/transport-maritime/securite-maritime/introduction-3 (dernière consultation le 19 août 2024).. TC et ses partenaires de l’application de la loi cherchent à accroître la sensibilisation à la sécurité et la compréhension d’exigences complexes chez ceux qui travaillent à bord et avec des petits navires commerciaux.

    Selon le Système de recherche d’informations sur l’immatriculation des bâtiments de TC, le nombre total de navires commerciaux immatriculés qui ont une jauge brute de 15 ou moins et qui n’ont pas à être certifiés par TC est d’environ 29 400Ce nombre provient du Système de recherche d’informations sur l’immatriculation des bâtiments de TC, à l’adresse https://wwwapps.tc.gc.ca/Saf-Sec-Sur/4/vrqs-srib/fra/immatriculation-des-batiments (dernière consultation le 20 août 2024). Jusqu’à récemment, l’immatriculation de certains des navires listés dans le système de recherche était renouvelée automatiquement. L’enquête a révélé qu’il y a des immatriculations actives pour de nombreux navires perdus en mer., en plus de quelque 16 000 dont l’immatriculation a été suspendueL’immatriculation d’un navire peut être suspendue pour plusieurs raisons, dont l’inexactitude des coordonnées du RA du navire ou le non-renouvellement de l’immatriculation.. Ces petits navires commerciaux sont à environ 50 % des navires de pêche, à 30 %, des navires de travail, à 15 %, des navires à passagersIl se peut que certains navires à passagers d’une jauge brute de 15 ou moins transportent plus de 12 passagers et doivent donc être certifiés., et à 5 %, des remorqueurs. L’enquête a permis de déterminer que le nombre de navires dans le registre ne reflète pas avec exactitude le nombre de navires commerciaux actifs au CanadaLe BST a examiné la fiabilité des immatriculations des navires de pêche dans l’enquête M20A0160 en comparant les données sur les permis du ministère des Pêches et des Océans avec celles du registre de TC et a relevé une différence d’environ 4000 petits navires de pêche, uniquement pour Terre-Neuve-et-Labrador. En l’absence d’une autre source de données équivalente pour d’autres types de navires commerciaux, le BST ne peut pas déterminer le nombre possible de petits navires autres que des navires de pêche qui effectuent des opérations commerciales..

    Depuis 2022, TC affirme qu’il se concentre davantage sur la conformité des petits navires. Le ministère a mis en place de nouveaux outils pour appuyer les inspecteurs dans leur travail, notamment des bases de données pour les dossiers d’inspection et les suivis, de même que des procédures et des politiques détaillées.

    La conformité réglementaire est l’obligation légale du RA d’un navire, et la conformité des petits navires commerciaux d’une jauge brute de 15 ou moins est surveillée par les inspecteurs de TC dans le cadre d’un programme d’inspections fondées sur le risque, qui comprend certaines des inspections effectuées au cours d’une campagne d’inspection concentrée (CIC). Les activités nationales de surveillance exercées par TC du 1er avril 2022 au 31 mars 2023 incluaient des inspections de 981 navires commerciaux ayant une jauge brute de 15 ou moins, ce qui représente 2 à 3 % des navires qui ne sont pas tenus d’être certifiés. TC a constaté de nombreux cas de non-conformité avec la réglementation et a émis des avis de défaut lors de 84 % des inspections effectuées.

    En 2023, dans la région du Pacifique, les activités de surveillance liées aux petits navires commerciaux d’une jauge brute de 15 ou moins comprenaient des inspections de 212 navires. Des défauts ont été trouvés pour 50 % des navires inspectés. Cette activité de surveillance a également touché 2 à 3 % des navires pour lesquels une certification n’est pas exigée dans la région du Pacifique.

    1.11.2 Campagne d’inspection concentrée

    Dans le cadre de ses activités de surveillance, TC effectue des CIC au moins tous les 2 ans. Lors de sa CIC de 2023, TC a ciblé 3 types de navires pour l’inspection : les navires à passagers, les remorqueurs et les navires de pêche. La CIC a mis l’accent sur des questions liées à l’exploitation sécuritaire de ces navires, notamment les protocoles de sécurité, l’immatriculation des navires, les modifications aux navires et les rapports remorqueur-remorqué. Les inspecteurs de TC ont également posé des questions supplémentaires aux RA de navires lors de leurs inspections afin de cerner les raisons de cas de non-conformité.

    Au total au cours de la CIC, 605 inspections ont été effectuées sur des navires de toutes les tailles, dans 5 régions. Parmi ces navires inspectés, 217 étaient des navires commerciaux d’une jauge brute de 15 ou moins qui ne nécessitent pas d’inspection de sécurité périodique pour la certification, et 388 étaient des navires commerciaux d’une jauge brute de plus de 15 qui nécessitent une inspection de sécurité périodique pour la certification.

    En novembre 2023, TC a communiqué une mise à jour dans laquelle il a souligné ces observations :

    • Des avis de défaut pour des raisons de non-conformité ont été émis à 66 % de tous les navires inspectés, bien que les défauts trouvés n’étaient pas tous reliés au point central de départ de la CIC, qui était la sécurité des opérations des navires.
    • La principale raison de la non-conformité était que les RA n’étaient pas au courant des exigences. C’était la raison le plus souvent citée par les répondants avec des navires de pêche.

    1.11.3 Programme de conformité des petits bâtiments

    TC reconnaît que les RA ont besoin d’outils simplifiés et accessibles pour les aider à respecter leurs responsabilités réglementaires et pour vérifier leur conformité de façon proactive. C’est pourquoi en 2011, TC a lancé son Programme de conformité des petits bâtiments (PCPB) pour les navires à passagers. À l’heure actuelle, le programme cible 3 types de navires d’une jauge brute de 15 ou moins : les navires de travail et navires à passagers; les navires de pêche; et les remorqueurs. Le programme offre aux RA de ces navires une explication simplifiée et globale des exigences réglementaires applicables, comme celles visant les procédures de sécurité, les opérations, l’équipement, la maintenance et la préparation aux situations d’urgence.

    TC n’effectue pas d’inspections systématiquement lors de l’inscription d’un navire au PCPB. L’inscription est valide pour une période de 5 ans, au cours de laquelle le RA remplit un rapport annuel pour démontrer la conformité du navire aux exigences réglementaires, dont celle de signaler tout dommage ou toute modification structurelle ou mécanique dans son rapport de conformité annuel, qui est soumis à un bureau local de TC aux fins d’examen.

    TC reconnaît que le PCPB a certains défis à relever :

    • Ce ne sont pas tous les petits navires commerciaux qui sont immatriculés auprès de TC.
    • Les RA ne savent pas que le programme est disponible ou qu’il existe.
    • L’inscription est volontaire.
    • Les RA peuvent ne pas comprendre en quoi le programme peut améliorer les pratiques de sécurité.
    • Les RA peuvent considérer la sécurité comme un fardeau financier pour les opérations.
    • Les RA peuvent estimer que l’inscription et la participation au programme sont fastidieuses et complexesDepuis qu’il a lancé le PCPB, TC a indiqué qu’il a mis à jour ses processus d’inscription sur support papier et par Internet pour les rendre plus faciles à utiliser. Toutefois, le BST continue d’entendre de la part de certains RA qu’il est difficile de s’inscrire au programme et d’y participer..
    • L’industrie participe peu à la promotion du programme« Transport Canada’s Small Vessel Compliance Program (SVCP) », présenté en mai 2022 au Canadian Board of Marine Underwriters, à l’adresse https://cbmu.com/sites/default/uploads/files/RDIMS-%2318290882-v4-SMALL_VESSEL_COMPLIANCE_PROGRAM_(SVCP)_-_CBMU_PRESENTATION.pdf (dernière consultation le 19 août 2024). TC a donné cette présentation au Canadian Board of Marine Underwriters pour encourager l’industrie de l’assurance maritime à appuyer les efforts de promotion des inscriptions au Programme de conformité des petits bâtiments (PCPB)..

    En novembre 2023, les dossiers de TC indiquaient que des vignettes du PCPB avaient été émises pour 4573 (environ 16 %) des quelque 29 000 petits navires commerciaux admissibles au CanadaLes petits navires commerciaux admissibles sont ceux qui détiennent un certificat d’immatriculation de TC valide..

    L’inscription de l’Island Bay au PCPB a expiré en 2017 et n’a pas été renouvelée. TC n’a pas mis en place de processus de suivi en cas de non-renouvellement de l’inscription au PCPBEn 2024, dans le cadre de ses efforts visant l’amélioration continue du programme du PCPB, TC mettra à l’essai un processus de rappel uniforme pour les renouvellements au PCPB..

    1.11.4 Exigences de stabilité

    Les propriétaires de tous les navires commerciaux d’une jauge brute de 15 ou moins, tels que l’Island Bay, ne sont pas tenus de soumettre les navires à une évaluation complète de la stabilité. Pour ces navires commerciaux, la stabilité doit être estimée au stade de la conception afin que le concepteur ou l’architecte naval soit certain que le navire flottera de façon sécuritaire une fois construit.

    Le Règlement sur les petits bâtiments de 2010 exige qu’un navire ait une stabilité adéquate pour que son exploitation prévue soit sécuritaire, et que le propriétaire ou le RA de ce navire en fasse la démonstration au ministre des Transports sur demandeTransports Canada, DORS/2010-91, Règlement sur les petits bâtiments (modifié le 23 juin 2021), paragraphes 716(1) et 716(2).. Le Règlement précise que les propriétaires et les RA de navires construits avant le 1er avril 2005, comme l’Island Bay, doivent s’assurer que leurs navires sont conformes à ces éléments essentiels de sécurité, conformément à l’édition 2004 des Normes de construction des petits bâtimentsTransports Canada, DORS/2010-91, Règlement sur les petits bâtiments (modifié le 23 juin 2021), partie 7, paragraphes 708(1) et 708(8).. Les normes énumèrent plusieurs éléments essentiels de sécurité pour les petits navires, dont : l’intégrité de l’étanchéité à l’eau de la coque, des ponts et de la superstructure; la flottabilité et la stabilité; la pénétration de la coque sous l’eau; et l’installation de pompes de cale dans tous les espaces. Le RA de l’Island Bay n’était pas au courant des exigences contenues dans les règlements ou les normes.

    1.11.5 Connaissances sur la stabilité requises pour obtenir un brevet de capitaine, avec restrictions

    TC exige que les conducteurs de navires possèdent des connaissances sur un certain nombre de sujets, dont la stabilité. Pour obtenir un brevet, un candidat subit une évaluation de ces connaissances au moyen d’une série d’examens. Pour le brevet de capitaine, avec restrictions, les candidats peuvent être certifiés pour un navire d’une jauge brute de moins de 60 ou de plus de 60. En ce qui concerne les navires d’une jauge brute de moins de 60, les sujets suivants liés à la stabilité sont pris en compte :

    • les principes de base de la stabilité;
    • l’application pratique des principes de stabilité à un navire;
    • l’effet de surface libreTransports Canada, TP 2293F, Examens des navigants et délivrance des brevets et certificats, révision 8 (novembre 2021), chapitre 12, tableau : « Norme de compétence minimale pour l’obtention d’un brevet de capitaine, avec restrictions », article 8, p. 217..

    TC fournit une liste de références dans le document TP 2293, Examens des navigants et délivrance des brevets et certificats, que tous les candidats au brevet de capitaine, avec restrictions, peuvent consulter afin de se préparer en vue de leurs examens. La liste des références comprend la publication Petits bateaux de pêche – Manuel de sécurité, les « manuels de stabilité de bâtiments », les « publications portant sur la stabilité » et la « formation »TC prévoit mettre à jour sa liste de références à des publications techniques pertinentes lorsque le nouveau Règlement sur le personnel maritime sera publié dans la Gazette du Canada.. L’une des références indiquées par TC date de plus de 20 ans, et certaines des autres peuvent ne pas être applicables aux opérations du candidat.

    Un certain nombre de fournisseurs de formation au pays offrent le cours du certificat de formation de conducteur de petits bâtiments (CFCPB). Dans le programme de cours du CFCPB (TP 14692), on explique que le cours doit permettre aux participants d’acquérir une compréhension de base des dangers, ainsi que les connaissances et les compétences nécessaires pour exploiter de façon sécuritaire un petit navire autre qu’une embarcation de plaisance dans des conditions d’exploitation normales. Une heure est consacrée au thème de la stabilité et souligne l’importance de l’intégrité de l’étanchéité à l’eau et de la réserve de flottabilité, mais ne précise pas en quoi les modifications apportées à un navire peuvent influencer la stabilité.

    En 2010, TC a publié le Guide de sécurité des petits bâtiments commerciaux (TP 14070), qui résume en langage clair et simple les exigences réglementaires applicables aux propriétaires et aux conducteurs de petits navires commerciaux comme l’Island Bay. Parmi d’autres sujets, le guide réitère la nécessité d’informer TC lorsque des modifications importantes sont apportées à un navire et décrit comment exploiter un navire dans ses limites de conception pour maintenir la stabilité. Le guide fournit 5 signes avant-coureurs d’instabilité :

    • La conduite du navire change (le navire semble réagir moins rapidement aux gouvernes ou roule plus lentement).
    • Le navire prend de la gîte ou est plus lourd de l’avant ou de l’arrière que d’habitude.
    • Il y a une perte de franc-bord par rapport à la normale.
    • Les pompes de cale fonctionnent plus souvent que d’habitude.
    • L’alarme de cale retentitTransports Canada, TP 14070, Guide de sécurité des petits bâtiments commerciaux (2010), chapitre 8 : La stabilité de votre bâtiment, à l’adresse https://tc.canada.ca/fr/transport-maritime/securite-maritime/chapitre-8-stabilite-votre-batiment (dernière consultation le 19 août 2024)..

    1.12 Prise de décision et conscience situationnelle

    La prise de décision est un processus cognitif qui aboutit au choix d’un plan d’action parmi diverses options. Dans un environnement dynamique, la prise de décision peut être urgente. La prise de décision peut être influencée par plusieurs facteurs, notamment les buts et objectifs, les connaissances, l’expérience, les capacités, les compétences et la formation. La conscience situationnelle est une composante essentielle de la prise de décision et comprend des étapes de traitement de l’information. La conscience situationnelle est [traduction] « la perception des éléments dans un environnement au cours d’une période et dans un espace donnés, la compréhension de leur signification et la projection de leur état dans un avenir rapprochéM. Endsley, « Toward a Theory of Situation Awareness in Dynamic Systems », Human Factors: The Journal of the Human Factors and Ergonomics Society, vol. 37, numéro 1 (1995), p. 36. ».

    Un conducteur perçoit constamment divers facteurs au fil d’un voyage; il développe une compréhension de leur signification et prédit leurs effets sur l’issue du voyage. Les lacunes qui peuvent survenir au cours de ces étapes du développement de la conscience situationnelle peuvent se traduire par une perception incomplète ou inadéquate de la situation. Les personnes peuvent restreindre leur attention de manière involontaire, en se concentrant sur les renseignements et les tâches qui semblent les plus importants à ce moment-là.

    1.13 Événements antérieurs

    Le BST a déjà mené des enquêtes sur plusieurs événements, dont un grand nombre ont mis en cause de petits navires commerciaux et mis en évidence des lacunes de sécurité semblables à celles présentes lors de l’événement de l’Island Bay.

    Diverses lacunes de sécurité sont pertinentes dans l’événement à l’étude : le fait que la formation et la certification ne permettent pas aux marins d’acquérir les compétences techniques nécessaires pour bien comprendre les principes de stabilité et les effets des modifications apportées aux navires; le fait que les propriétaires de navires se fient aux inspections d’assurance comme évaluation de la sécurité des navires; et le fait que la surveillance réglementaire de TC est réactive et compte sur ce que les RA comprennent leurs responsabilités et assurent le respect de la réglementation. L’annexe A présente une liste détaillée d’événements antérieurs.

    1.14 Recommandations du BST

    Plusieurs enquêtes antérieures sur des petits navires commerciaux ont conduit le Bureau à formuler des recommandations relatives aux modifications importantes, à la surveillance réglementaire, à l’immatriculation des navires et aux renseignements sur la stabilité. Même si ces recommandations concernaient des navires de pêche et des remorqueurs plutôt que des navires à passagers, la présente enquête a permis de constater que les mêmes problèmes se posaient dans l’événement à l’étude.

    1.14.1 Modifications importantes

    En avril 2021, le petit navire de pêche Tyhawk a chaviré. Un membre d’équipage est mort et, au moment de la publication du rapport sur le Tyhawk (novembre 2023), le capitaine était toujours porté disparu. L’enquête a permis de déterminer que la stabilité du Tyhawk avait été compromise en partie par l’ajout d’un pont amovible. Comme dans le cas de l’Island Bay, les modifications apportées au Tyhawk n’avaient pas été évaluées quant à leur incidence sur la stabilité du navireRapport d’enquête sur la sécurité du transport maritime M21A0065 du BST.. Les organismes de réglementation ont un rôle à jouer pour faciliter la détermination systématique des modifications importantes en fournissant des critères précis, mesurables et compréhensibles. Par conséquent, le Bureau a recommandé que

    le ministère des Transports établisse des critères objectifs pour définir les modifications importantes apportées aux petits bateaux de pêche et autres petits bâtiments commerciaux.

    Recommandation M23-06 du BSTRecommandation M23-06 du BST : Définition des modifications importantes apportées aux petits bateaux de pêche et autres petits bâtiments commerciaux, à l’adresse https://www.tsb.gc.ca/fra/recommandations-recommendations/marine/2023/rec-m2306.html (dernière consultation le 5 septembre 2024).

    Au moment de la rédaction du présent rapport, la réponse la plus récente de TC avait été reçue en février 2024. Le Bureau considère que la réponse à la recommandation M23-06 dénote une intention satisfaisanteIbid.

    Pour aider les RA, les capitaines et les inspecteurs de TC à vérifier que la stabilité des navires est suffisante, le Bureau a recommandé que

    le ministère des Transports exige que les modifications prévues aux petits bateaux de pêche et autres petits bâtiments commerciaux soient évaluées par une personne compétente, que tous les registres des modifications apportées à ces bateaux soient tenus à jour et que les registres soient mis à la disposition du ministère.

    Recommandation M23-07 du BSTRecommandation M23-07 du BST : Évaluation des modifications importantes apportées aux petits bateaux de pêche et autres petits bâtiments commerciaux, à l’adresse https://www.tsb.gc.ca/fra/recommandations-recommendations/marine/2023/rec-m2307.html (dernière consultation le 5 septembre 2024).

    Au moment de la rédaction du présent rapport, la réponse la plus récente de TC avait été reçue en février 2024. Le Bureau considère que la réponse à la recommandation M23-07 dénote une attention en partie satisfaisanteIbid..

    1.14.2 Surveillance réglementaire des remorqueurs d’une jauge brute de 15 ou moins

    En février 2021, le remorqueur Ingenika a couléRapport d’enquête sur la sécurité du transport maritime M21P0030 du BST.. L’opération de recherche et sauvetage a permis de retrouver 1 membre d’équipage survivant sur terre et de récupérer les corps des 2 autres membres d’équipage dans l’eau. Comme l’Island Bay, l’Ingenika était un navire commercial d’une jauge brute de 15 ou moins et n’était pas soumis à des inspections de sécurité périodiques. De même, l’événement de l’Ingenika a mis en évidence les risques d’une surveillance réglementaire inadéquate, ainsi que les problèmes liés au fait que TC compte sur ce que les RA comprennent la réglementation et en assurent le respect. L’enquête a permis d’établir que sans une surveillance adéquate de la part de TC, les lacunes dans la gestion de la sécurité et l’exploitation des remorqueurs d’une jauge brute de 15 ou moins continueront de ne pas être corrigées, ce qui entraînera des accidents. Par conséquent, le Bureau a recommandé que

    le ministère des Transports élargisse son programme de surveillance pour y inclure des inspections régulières des remorqueurs d’une jauge brute de 15 ou moins afin de vérifier si ces navires respectent les exigences réglementaires.

    Recommandation M23-01 du BST

    Au moment de la rédaction du présent rapport, la réponse la plus récente de TC avait été reçue en juin 2023. Le Bureau estime que la réponse à la recommandation M23-01 dénote une attention en partie satisfaisanteRecommandation M23-01 du BST : Surveillance réglementaire des remorqueurs d’une jauge brute de 15 ou moins, à l’adresse https://www.bst.gc.ca/fra/recommandations-recommendations/marine/2023/rec-m2301.html (dernière consultation le 20 août 2024)..

    1.14.3 Immatriculation du bateau

    En mai 2020, on a signalé que le bateau de pêche Sarah Anne, avec 4 personnes à bord, était en retard. Des recherches ont été lancées et les corps des 4 membres d’équipage ont été retrouvés. Le bateau n’a pas été retrouvéRapport d’enquête sur la sécurité du transport maritime M20A0160 du BST.. Comme l’Island Bay, le Sarah Anne avait été immatriculé auprès de TC, mais les détails du certificat d’immatriculation n’avaient pas été tenus à jour.

    Puisque l’immatriculation à jour et exacte auprès de TC est la première étape de la surveillance de la sécurité pour les navires de pêche commerciale, le Bureau a recommandé que

    le ministère des Pêches et des Océans exige que tout navire canadien utilisé pour la pêche commerciale des ressources marines ait une immatriculation à jour et exacte auprès de Transports Canada.

    Recommandation M22-01 du BST

    Depuis la publication de cette recommandation, le BST a assuré un suivi annuel auprès de TC sur les mesures prises pour y donner suite. Au moment de la rédaction du présent rapport, la réponse la plus récente de TC avait été reçue en novembre 2023. Le Bureau estime que la réponse à la recommandation M22-01 dénote une attention en partie satisfaisanteRecommandation M22-01 du BST : Exigence d’immatriculation des navires auprès de Transports Canada avant l’émission d’un permis de pêche par Pêches et Océans Canada, à l’adresse https://www.bst.gc.ca/fra/recommandations-recommendations/marine/2022/rec-m2201.html (dernière consultation le 20 août 2024)..

    1.15 Liste de surveillance du BST

    La Liste de surveillance du BST énumère les principaux enjeux de sécurité qu’il faut s’employer à régler pour rendre le système de transport canadien encore plus sûr.

    La surveillance réglementaire figure sur la Liste de surveillance 2022.

    Au Canada, il existe un nombre inconnu de navires commerciaux d’une jauge brute de 15 ou moins qui ne sont pas tenus d’être certifiés et qui ne font donc pas l’objet d’une surveillance réglementaire périodique, comme l’Island Bay. TC utilise un programme d’inspection fondé sur les risques pour superviser ces navires. Cependant, en 2022 et en 2023, seulement 2 à 3 % de ces navires ont été inspectés.

    MESURES À PRENDRE

    L’enjeu de la surveillance réglementaire dans le transport maritime demeurera sur la Liste de surveillance jusqu’à ce que TC assure une plus grande surveillance des processus d’inspection des navires commerciaux en démontrant que sa supervision et sa surveillance sont efficaces pour veiller à ce que les représentants autorisés et les organismes reconnus s’assurent que les navires respectent les exigences réglementaires, et que TC démontre une augmentation de la surveillance proactive.

    La gestion de la sécurité figure sur la Liste de surveillance 2022.

    Au moment de la rédaction du présent rapport, les petits navires à passagers transportant 12 passagers ou moins étaient exemptés de la réglementation exigeant un système de gestion de la sécurité. Bien que l’article 106 de la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada exige que les navires disposent de procédures de sécurité écrites, l’enquête a permis de déterminer que l’Island Bay, comme beaucoup d’autres petits navires commerciaux, ne disposait pas de procédures écrites sur la manière d’exploiter le navire de façon sécuritaire et de gérer les situations d’urgence.

    MESURES À PRENDRE

    L’enjeu de la gestion de la sécurité dans le transport maritime demeurera sur la Liste de surveillance jusqu’à ce que

    • TC mette en œuvre de la réglementation obligeant tous les exploitants commerciaux à adopter des processus formels pour la gestion de la sécurité;
    • les exploitants qui ont un système de gestion de la sécurité démontrent à TC qu’il fonctionne bien et qu’il permet donc de cerner les dangers et de mettre en œuvre des mesures efficaces pour atténuer les risques.

    1.16 Rapports de laboratoire du BST

    Les pompes de cale et les vannes de l’Island Bay ont été envoyées au Laboratoire d’ingénierie du BST, à Ottawa (Ontario), pour y être analysées. Le laboratoire du BST a évalué le fonctionnement des pompes et des vannes et a déterminé l’angle de bande du bateau auquel l’envahissement par le haut a commencé.

    Le BST a produit les rapports de laboratoire suivants dans le cadre de la présente enquête :

    • LP012/2023 – Bilge pumps analysis [analyse des pompes de cale]
    • LP110/2022 – 3D modelling and analysis [modélisation tridimensionnelle et analyse]   

    2.0 Analyse

    La présente analyse portera sur les causes sous-jacentes et les facteurs qui ont contribué à cet événement, en particulier l’intégrité de l’étanchéité à l’eau du bateau, les effets des modifications sur la stabilité initiale de l’Island Bay et les autres facteurs de risque qui ont contribué à la perte de stabilité et au naufrage. L’analyse portera également sur les facteurs qui ont affecté la perception par les conducteurs de la stabilité du bateau et qui ont influencé leur prise de décisions.

    De plus, cette analyse comprendra un examen de l’efficacité de la surveillance exercée par Transports Canada (TC) et de l’importance de la compréhension par les représentants autorisés (RA) de leurs responsabilités en ce qui concerne les exigences réglementaires applicables.

    2.1 Réduction de la stabilité initiale du bateau

    Un navire est conçu dans un but précis, et sa stabilité est estimée au stade de la conception afin qu’il puisse flotter de façon sécuritaire une fois construit. Toutefois, pendant la durée de vie d’un navire, des modifications peuvent être apportées au navire ou à son équipement pour répondre aux besoins opérationnels. Ces modifications peuvent nuire à la stabilité du navire.

    Par exemple, l’ajout d’équipement, d’engins et d’autres matériaux peut entraîner des modifications importantes du poids ou de la répartition du poids qui ont une incidence sur le centre de gravité du navire et sur sa capacité de redressement. Sans une évaluation complète de la stabilité, les effets de ces modifications sont inconnus, et le navire peut être exploité avec une stabilité réduite, ce qui peut compromettre la sécurité du navire et de son équipage. Voilà pourquoi les modifications doivent être consignées, signalées et évaluées en ce qui concerne leurs effets sur la stabilité du navire.

    Cette enquête a permis de déterminer que pendant toute la durée de vie de l’Island Bay, une série de modifications avaient été apportées au bateau en raison de l’évolution des besoins opérationnels. L’Island Bay a été allongé à l’arrière. Le rouf a été allongé, et on a ajouté des espaces de rangement permanents, de l’équipement et des engins. Cette augmentation de poids a réduit le franc-bord du bateau, ce qui a entraîné une diminution de la hauteur d’envahissement du bateau.

    L’allongement du rouf a également augmenté la surface exposée au vent du bateau, ce qui l’a rendu vulnérable à la bande lorsqu’il a été exposé aux forts vents de travers qui ont touché le bateau pendant le voyage à l’étude.

    L’effet cumulatif des modifications a relevé le centre de gravité du bateau, ce qui a compromis la capacité du bateau à se redresser après avoir donné de la bande sous l’effet de forces externes, comme le vent et le courant de marée. La mesure dans laquelle ces modifications avaient altéré la stabilité du bateau n’était pas connue, car aucune documentation relative aux modifications apportées par le propriétaire précédent n’avait été transmise aux nouveaux propriétaires, et aucune évaluation de la stabilité n’avait été effectuée depuis que ces modifications avaient été apportées. En l’absence de documentation sur les modifications, les conducteurs n’étaient pas au courant des changements apportés à l’Island Bay et de leurs effets subséquents sur sa stabilité.

    En l’absence d’une évaluation complète de la stabilité, l’Island Bay ne disposait pas d’un manuel de stabilité que les conducteurs auraient pu consulter pour déterminer les limites de stabilité du bateau. De plus, les modifications apportées au bateau pendant sa durée de vie n’avaient pas été signalées à TC. En outre, les dossiers d’entretien n’avaient pas été transférés lors de la vente du bateau, ce qui n’est pas exigé. Par conséquent, les conducteurs ne connaissaient pas l’ampleur des modifications apportées au bateau, ne comprenaient pas leur incidence sur la stabilité initiale du bateau et prenaient des décisions opérationnelles sans connaître les limites de stabilité du bateau.

    2.2 Bande, envahissement par le haut et chavirement du bateau

    Lorsque l’Island Bay, parti de l’île Langtry, traversait l’entrée de la baie Carpenter (Colombie-Britannique), la force du vent sur le travers du bateau, combinée à la force du courant de marée agissant dans le sens opposé et à l’utilisation de stabilisateurs à paravane, a fait en sorte que le bateau prenne de la bande sur bâbord. Les conducteurs de l’Island Bay avaient régulièrement constaté une bande lorsque les stabilisateurs à paravane étaient déployés dans des conditions venteuses; ils ont donc considéré la bande sur bâbord comme normale et acceptable. L’expérience antérieure des conducteurs à bord du bateau dans cette condition les a rendus moins conscients des effets additionnels du vent et de la mer sur le bateau pendant la traversée.

    Lorsque le bateau traversait l’entrée de la baie Carpenter, la bande a surpassé ce que les conducteurs avaient l’habitude de connaître, ce qui les a incités à revoir leur plan initial et à se diriger vers les eaux abritées de la baie. Une fois que le bateau a viré sur bâbord, le changement de cap s’est traduit par une augmentation de la force exercée par le vent qui soufflait perpendiculairement au côté tribord du bateau. Combinée au courant de marée dans la direction opposée, cette force a aggravé la bande. Alors que l’Island Bay poursuivait son voyage, la vitesse du vent a augmenté jusqu’à une vitesse estimée à 50 nœuds, ce qui a encore accentué la bande du bateau. Simultanément, l’action du vent et des vagues sur l’embarcation pneumatique à coque rigide a créé une force de remorquage plus importante.

    La bande persistante a fait en sorte que de l’eau s’est infiltrée sur le pont principal par les sabords de décharge. Lorsque la bande a atteint environ 16° sur bâbord, les très faibles hauteurs d’envahissement ont permis à l’eau de pénétrer dans le compartiment moteur avant et dans la cambuse par les vannes d’évacuation des pompes de cale.

    L’eau s’est accumulée dans le bouchain vif bâbord du compartiment moteur et de la cambuse du bateau; en raison de la bande continue et de l’emplacement des pompes de cale sur l’axe longitudinal du bateau, les pompes n’ont pas pu évacuer l’eau du bouchain vif.

    L’envahissement par le haut a donné au bateau une gîte sur bâbord qui s’est ajoutée à la bande provoquée par le vent et les vagues. L’eau accumulée a augmenté le poids du bateau, ce qui a réduit davantage le franc-bord et la réserve de flottabilité. En plus de l’eau qui s’était accumulée dans la cale, l’eau douce et le carburant restant dans les réservoirs du bateau pouvaient y circuler librement et ont probablement créé des effets de carène liquide qui ont fait déplacer le centre de gravité du bateau et accentué sa gîte sur bâbord.

    Même si les conditions se détérioraient, les indices de la situation n’étaient pas suffisamment impérieux pour que les conducteurs changent à nouveau de cap. L’arrivée en eaux abritées étant prévue à peine quelques minutes plus tard, et un point d’ancrage calme étant en vue, les conducteurs ont cherché à manœuvrer le bateau dans l’état de la mer et à atteindre les eaux abritées.

    Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

    En poursuivant sa route vers les eaux abritées de la baie Carpenter, le bateau a continué à être exposé au vent et à des conditions de mer de travers, ce qui a fait en sorte qu’il donne de la bande et ce qui l’a rendu plus vulnérable à l’infiltration d’eau.

    Dans l’événement à l’étude, le plan des conducteurs consistant à atteindre les eaux abritées de la baie Carpenter a été influencé par leur compréhension de la stabilité du bateau, leur expérience antérieure en mer et les voyages réussis qu’ils avaient effectués par le passé. Toutefois, cette expérience ne leur a pas conféré les compétences techniques nécessaires pour comprendre pleinement les conséquences de la pénétration d’eau sur la stabilité et, par conséquent, pour reconnaître l’urgence de la situation.

    Au fur et à mesure que le livet de pont du bateau était immergé et que l’eau s’écoulait par-dessus les pavois, la capacité de redressement du bateau diminuait. La présence d’eau s’accumulant sur le pont a incité les conducteurs à réévaluer leur compréhension de la situation, ce qui a amené le conducteur 2 à se rendre sur le pont arrière. Le conducteur 2 y a constaté que la quantité d’eau sur le pont principal augmentait et que le bateau était en train de chavirer. En même temps, l’alarme de cale a sonné. Ces nouveaux renseignements ont été suffisamment convaincants pour que les conducteurs abandonnent leur plan d’atteindre des eaux abritées et commencent à abandonner le bateau. L’Island Bay a fini par perdre sa réserve de flottabilité et a chaviré pendant l’abandon.

    Fait établi quant aux causes et aux facteurs contributifs

    Soumis à la combinaison du vent, des vagues et de la marée, le bateau a pris une bande importante et a embarqué de l’eau sur le pont. L’eau accumulée a ensuite fait gîter le bateau, exacerbant la bande, ce qui a entraîné un envahissement par le haut. Par conséquent, l’Island Bay a perdu sa réserve de flottabilité et a chaviré.

    2.3 Perception de la sécurité du bateau

    La perception qu’a un conducteur de la sécurité de son navire, y compris de sa stabilité, a une influence sur ses décisions opérationnelles. Cette perception dépend de plusieurs facteurs, comme les connaissances, l’expérience et la formation. Elle dépend aussi des certificats, des brevets, des permis et des inspections des navires par les gouvernements, les associations et les assureurs, qui peuvent tous être perçus plus largement comme une approbation générale de la capacité à exploiter le navire de façon sécuritaire. Les conducteurs qui pensent être pleinement informés des risques dans leur environnement de travail sont plus susceptibles de prendre des risques en raison de cette connaissance perçue. Par conséquent, pendant les opérations, ils prennent ou acceptent souvent des risques à un degré plus élevé que ce qui est acceptable pour les organismes de réglementation, les membres d’équipage ou les passagers.

    Dans l’événement à l’étude, la perception par les conducteurs de la sécurité et de la stabilité de l’Island Bay a probablement été influencée par plusieurs facteurs :

    • Les conducteurs avaient obtenu des brevets de TC pour l’exploitation de leur bateau, et ils avaient suivi une formation supplémentaire qui n’était pas exigée, comme le cours du certificat de formation de conducteur de petits bâtiments (CFCPB).
    • Les conducteurs savaient que le bateau avait fait l’objet d’un certain type d’évaluation de la stabilité, et ils utilisaient régulièrement les stabilisateurs à paravane en croyant qu’ils amélioraient la stabilité du bateau.
    • L’Island Bay avait été approuvé par TC pour une capacité à bord de 8 personnes et pour être exploité comme navire à passagers. Le bateau a ensuite été exploité pendant près de 20 ans comme navire à passagers sans incident.
    • La demande officielle de l’exploitant visant à modifier le type d’immatriculation du bateau, pour passer de la catégorie de navire de pêche à celle de navire à passagers, a été examinée et acceptée par le registraire en chef du Registre canadien d’immatriculation des bâtiments de TC.
    • Les conducteurs faisaient l’entretien annuel du bateau.
    • L’Island Bay était immatriculé auprès de TC, avait été accepté dans le cadre du Programme de conformité des petits bâtiments (PCPB) et avait reçu un permis d’exploitation de commerce délivré par Parcs Canada.
    • Dans le cadre de ses activités à Gwaii Haanas, l’Island Bay avait fait l’objet d’une inspection par la Gendarmerie royale du Canada (GRC).
    • L’Island Bay avait été inspecté et accepté pour une couverture d’assurance, ce qui a donné l’impression aux propriétaires que le bateau était sûr pour les opérations auxquelles il était destiné.

    Abstraction faite des lacunes de sécurité mentionnées lors de l’inspection d’assurance et dans le rapport de la GRC, ces facteurs ont validé la perception par les propriétaires de la sécurité et de la stabilité du bateau, ce qui les a amenés à conclure que le bateau pouvait être exploité de façon sécuritaire et était stable.

    De plus, ces facteurs ont confirmé aux conducteurs qu’ils possédaient les connaissances, l’expérience et les compétences suffisantes pour exploiter leur bateau.

    Fait établi quant aux risques

    Si les décisions opérationnelles sont prises en fonction d’une perception de la sécurité du navire plutôt que de limites validées, il se peut qu’un navire soit exploité alors que sa sécurité est compromise.

    2.4 Responsabilité de la sécurité

    La réduction réussie de l’exposition aux dangers repose sur le partenariat entre l’industrie et les organismes gouvernementaux, où les organismes de réglementation assurent le soutien et travaillent ensemble avec les RA pour déterminer les dangers systémiques et s’assurer que les risques qui y sont associés sont atténués. Le tout exige une approche équilibrée quant à la façon dont la sécurité est gérée, reconnaissant que la réglementation (comme moyen de défense contre les dangers) n’assure qu’un niveau minimum de sécurité. Comme l’ont démontré des enquêtes et des recommandations antérieures du BST, la surveillance exercée par TC n’a pas été efficace à elle seule pour améliorer la sécurité des opérations de la flotte des petits navires commerciaux, non plus que la délégation de toute la responsabilité aux RA. En même temps, le PCPB de TC – le seul programme de TC devant fournir le soutien dont les RA de petits navires ont besoin – ne fournit pas de soutien efficacement : les inscriptions au programme sont peu nombreuses, et l’appui de l’industrie dans la promotion du programme est minime, les processus sont astreignants et peu de RA connaissent l’existence du programme.

    TC n’inspecte pas périodiquement les navires commerciaux d’une jauge brute de 15 ou moins, et il n’y a donc pas d’interaction requise entre TC et le RA d’un navire au-delà du maintien de l’immatriculation du navire. La surveillance réglementaire des petits navires commerciaux comme l’Island Bay est donc peu fréquente. Bien que ce ne soit pas le cas avec la grande majorité des petits navires commerciaux, TC s’est rendu à bord du navire à plusieurs reprises et a eu des interactions avec ses propriétaires tout au long de la durée de vie du navire, ce qui a donné à TC autant d’occasions de constater, en communiquant avec le RA, que l’Island Bay avait subi des modifications importantes et d’exiger une évaluation complète de la stabilité afin d’en évaluer les effets :

    • Les propriétaires ont demandé l’inscription de l’Island Bay au Programme de contrôle et d’inspection des petits bâtiments en tant que navire à passagers. Dans le cadre de cette inscription, TC a inspecté le bateau à 2 reprises. À la suite de ces inspections, TC a émis un avis d’inspection permettant à l’Island Bay d’être exploité en tant que navire à passagers, sans changer le type de navire indiqué sur le certificat d’immatriculation.
    • Les propriétaires ont demandé à ce que le bateau soit inscrit au PCPB et ont rempli le questionnaire d’inscription en indiquant que le bateau n’avait pas été modifié, qu’il était étanche et que les documents relatifs à la stabilité du bateau étaient conservés à bord. L’enquête a permis de déterminer que certains de ces renseignements étaient inexacts, ce qui indique que le processus d’examen de TC n’a vérifié ni l’exactitude des réponses du propriétaire ni la conformité avec la réglementation, dont l’article 708 du Règlement sur les petits bâtiments. Les conducteurs de l’Island Bay n’ont pas renouvelé l’inscription du bateau au PCPB, et TC n’a pas assuré de suivi pour en déterminer la raison.
    • Au cours du processus d’inscription de l’Island Bay au PCPB, TC a constaté que l’Island Bay était exploité comme navire à passagers; il a donc exigé que le certificat d’immatriculation du bateau passe de la catégorie de navire de pêche à celle de navire à passagers. Les propriétaires ont par la suite demandé au registraire en chef de TC de changer le type de navire. Le registraire en chef a examiné la demande et a délivré au bateau un nouveau certificat d’immatriculation portant les caractéristiques initiales du bateau plutôt que les caractéristiques du bateau à ce moment-là, ce qui indique que les modifications apportées au bateau n’ont pas été constatées.

    Les facteurs de risque pour la stabilité cernés dans l’événement à l’étude n’ont été relevés dans aucune des interactions entre TC et le RA de l’Island Bay. Le bateau a donc continué à naviguer en présence de facteurs de risque pour la stabilité, tels que des modifications du bateau qui avaient une incidence négative sur la stabilité du bateau, une intégrité de l’étanchéité à l’eau compromise (sans prévention du contresiphonnement et sans panneaux d’écoutille étanches), et sans avoir jamais fait l’objet d’une évaluation complète de la stabilité.

    Tout en n’étant pas entièrement conscients du rôle et des responsabilités d’un RA, les conducteurs de l’Island Bay se sont efforcés d’exploiter leur bateau de façon sécuritaire. Les conducteurs avaient reçu des brevets de capitaine, avec restrictions, ce qui prouve qu’ils avaient acquis les connaissances en matière de stabilité nécessaires pour réussir les examens de TC. Cependant, le fait de satisfaire à cette exigence n’a pas conféré aux conducteurs les compétences techniques nécessaires pour déterminer les risques liés à la stabilité et s’assurer que le bateau était suffisamment stable pour être exploité comme prévu. Le respect des exigences réglementaires minimales n’est donc pas toujours suffisant pour assurer la sécurité d’un navire, de ses passagers et de son équipage.

    Depuis qu’il a lancé le PCPB en 2011, TC a élargi le programme en vue d’aider les RA à comprendre et à respecter leurs responsabilités réglementaires. Depuis 2022, TC a reconnu l’importance de renforcer les mesures prises pour assurer la conformité réglementaire des petits navires commerciaux; il rapporte avoir centré ses efforts sur l’amélioration des outils de surveillance, les bases de données d’inspections, la vérification des immatriculations de navires et des procédures de sécurité à bord, le suivi des modifications aux navires et l’examen des rapports remorqueur-remorqué. Toutefois, l’efficacité de ces initiatives n’est pas encore certaine. Par ailleurs, on ne prévoit pas communiquer ou collaborer davantage avec les RA dans le but de les aider à comprendre leur rôle et à assumer leurs responsabilités. De plus, le PCPB continue de fonctionner sur une base volontaire, et aucune interaction entre TC et les RA n’est requise après l’immatriculation d’un navire.

    En comparaison, d’autres organisations ont reconnu l’importance d’apporter un soutien aux personnes qui, comme les RA, se sont vu confier des responsabilités liées à la sécurité. De nombreux ministères et organismes ont élaboré et fourni des lignes directrices et, dans certains cas, de la formation pour les personnes qui remplissent de tels rôles.

    Le régime de surveillance actuel de TC tient les RA légalement responsables de la conformité avec les exigences de sécurité, comme le prévoient la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada et les règlements connexes. Cependant, TC doit encore démontrer qu’il exerce un niveau de surveillance assurant la conformité réglementaire des navires commerciaux qui ne sont pas tenus d’être certifiés. TC a d’ailleurs reconnu lui-même que des améliorations au régime actuel sont nécessaires.

    Fait établi quant aux risques

    Si la surveillance et les programmes de TC concernant les navires commerciaux qui ne sont pas tenus d’être certifiés continuent d’être insuffisants pour aider les RA à comprendre leurs responsabilités, il y a un risque que les RA exercent leurs activités sans assurer un niveau de sécurité suffisant.

    3.0 Faits établis

    3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

    Il s’agit des conditions, actes ou lacunes de sécurité qui ont causé l’événement ou y ont contribué.

    1. Les effets cumulatifs des modifications apportées à l’Island Bay ont réduit la stabilité initiale du bateau, le rendant vulnérable à l’inclinaison, à l’envahissement par le haut et au chavirement.
    2. En poursuivant sa route vers les eaux abritées de la baie Carpenter, le bateau a continué à être exposé au vent et à des conditions de mer de travers, ce qui a fait en sorte qu’il donne de la bande et ce qui l’a rendu plus vulnérable à la pénétration d’eau.
    3. Soumis à la combinaison du vent, des vagues et de la marée, le bateau a pris une bande importante et a embarqué de l’eau sur le pont. L’eau accumulée a ensuite fait gîter le bateau, exacerbant la bande, ce qui a entraîné un envahissement par le haut. Par conséquent, l’Island Bay a perdu sa réserve de flottabilité et a chaviré.

    3.2 Faits établis quant aux risques

    Il s’agit des conditions, des actes dangereux, ou des lacunes de sécurité qui n’ont pas été un facteur dans cet événement, mais qui pourraient avoir des conséquences néfastes lors de futurs événements.

    1. Si les décisions opérationnelles sont prises en fonction d’une perception de la sécurité du navire plutôt que de limites validées, il se peut qu’un navire soit exploité alors que sa sécurité est compromise.
    2. Si la surveillance et les programmes de Transports Canada concernant les navires commerciaux qui ne sont pas tenus d’être certifiés continuent d’être insuffisants pour aider les représentants autorisés à comprendre leurs responsabilités, il y a un risque que les représentants autorisés exercent leurs activités sans assurer un niveau de sécurité suffisant.

    3.3 Autres faits établis

    Ces éléments pourraient permettre d’améliorer la sécurité, de régler une controverse ou de fournir un point de données pour de futures études sur la sécurité.

    1. La liste des références de Transports Canada figurant dans le TP 2293 n’a pas été mise à jour pour inclure toutes les publications de sécurité pertinentes, comme le Guide de sécurité des petits bâtiments commerciaux (TP 14070). 

    4.0 Mesures de sécurité

    4.1 Mesures de sécurité prises

    Le Bureau n’est pas au courant de mesures de sécurité prises à la suite de l’événement à l’étude.

    Le présent rapport conclut l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le 26 juin 2024. Le rapport a été officiellement publié le 12 septembre 2024.

    Annexes

    Annexe A – Événements antérieurs

    Des événements antérieurs concernant des navires commerciaux d’une jauge brute de 15 ou moins, dont des petits navires de pêche, présentaient des problèmes similaires à ceux relevés lors de l’enquête sur l’événement de l’Island Bay :

    M21A0065 (Tyhawk) – En avril 2021, le bateau de pêche Tyhawk a quitté Chéticamp (Nouvelle-Écosse) en direction des lieux de pêche pour y poser des casiers à crabes. Le capitaine et 4 membres d’équipage se trouvaient à bord. Sur la route vers les lieux de pêche, le bateau a chaviré. Le capitaine et 1 membre d’équipage ont été emportés par le courant; les 4 membres d’équipage ont finalement été secourus, mais le capitaine n’a pas pu être retrouvé. La mort d’un des membres d’équipage a été prononcée plus tard.

    Cette enquête a donné lieu à 3 recommandations et a mis en évidence les risques liés au fait de modifier un navire sans avoir une compréhension de la stabilité du navire fondée sur une évaluation en règle de la stabilité.

    M21P0030 (Ingenika– En février 2021, le remorqueur Ingenika, avec 3 membres d’équipage à bord, remorquait le chaland chargé Miller 204 dans le canal Gardner. Le remorqueur a coulé à environ 16 milles marins (NM) à l’ouest-sud-ouest de la baie Kemano (Colombie-Britannique). Le chaland a ensuite dérivé et s’est échoué à environ 2,5 NM au sud-ouest de l’endroit où le remorqueur avait coulé. L’opération de recherche et sauvetage a permis de retrouver 1 membre d’équipage survivant sur terre et de récupérer les corps des 2 autres membres d’équipage dans l’eau. Le chaland a été récupéré; le remorqueur n’a pas été retrouvé.

    Cet événement a mis en évidence les risques d’une surveillance réglementaire inadéquate, ainsi que les problèmes liés au fait que Transports Canada (TC)présume que les représentants autorisés (RA) comprennent et respectent la réglementation.

    M20P0229 (Arctic Fox II– En août 2020, le bateau de pêche Arctic Fox II, avec 3 membres d’équipage à bord, a signalé qu’il prenait l’eau. L’équipage a abandonné le bateau à environ 77 NM à l’ouest-sud-ouest de Bamfield, sur l’île de Vancouver (Colombie-Britannique). La United States Coast Guard et la Garde côtière canadienne (GCC) ont lancé des opérations de recherche et de sauvetage. Le seul membre d’équipage survivant a été retrouvé dans le radeau de sauvetage du bateau, et les corps du capitaine et de l’autre membre d’équipage ont été repêchés.

    Cet événement a mis en évidence les problèmes liés au fait que TC présume que les RA comprennent et respectent la réglementation.

    M20A0160 (Sarah Anne En mai 2020, le bateau de pêche Sarah Anne a quitté St. Lawrence (Terre-Neuve-et-Labrador) pour effectuer une sortie de pêche au crabe des neiges dans la baie Placentia, avec 4 personnes à bord. Le même jour en soirée, le centre des Services de communication et de trafic maritimes de Placentia (Terre-Neuve-et-Labrador) a reçu un rapport de retard. Une recherche a été lancée à l’aide de plusieurs navires et aéronefs. Les corps de 3 membres d’équipage ont été retrouvés le jour suivant. Le corps du 4e membre d’équipage a été retrouvé sur le rivage le 6 juin 2020. Le bateau n’a pas été retrouvé.

    Cet événement a mis en évidence l’importance de maintenir l’immatriculation des navires à jour et exacte auprès de TC.

    M19A0025 (Captain Jim) – En janvier 2019, le bateau de travail Captain Jim, avec 2 membres d’équipage et 1 passager à bord, a commencé à prendre l’eau et est devenu désemparé à 2,8 NM d’Eastern Passage (Nouvelle-Écosse). Peu après, le bateau a coulé rapidement. Un des membres de l’équipage et le passager ont réussi à monter à bord du radeau de sauvetage du bateau, et ils ont ensuite été secourus par un bateau-pilote du port d’Halifax et emmenés à Halifax (Nouvelle-Écosse). Des plongeurs ont retrouvé le corps de l’autre membre de l’équipage dans la timonerie du bateau plus tard dans la journée.

    Cet événement a mis en évidence l’effet négatif d’un franc-bord réduit sur la stabilité d’un navire à la suite de modifications du navire. Le rapport indique également que le service en mer du capitaine de l’événement ne lui avait pas permis d’acquérir les compétences techniques nécessaires pour bien comprendre les conséquences de la pénétration d’eau dans la coque du bateau sur le plan de la stabilité.

    M17P0098 (Catatonic– En avril 2017, le bateau de pêche sportive Catatonic a pris l’eau et a partiellement coulé près de Tofino (Colombie-Britannique). Le conducteur et les 4 passagers ont été secourus par 2 navires venus à leur rescousse, puis transportés à un hôpital local. La mort de 2 des occupants du bateau a été constatée par la suite. Plus tard, le bateau a été remorqué, vidé de son eau, puis amarré à un quai local à Tofino.

    Cet événement a mis en évidence l’importance du respect de la réglementation et d’une bonne compréhension des effets des modifications apportées aux navires.

    M12W0062 (Pacific Siren) – En mai 2012, le petit bateau de pêche Pacific Siren, chargé d’engins de pêche à la crevette, a pris de la bande sur tribord et a chaviré au large de l’île Banks (Colombie-Britannique). Les 3 membres d’équipage ont abandonné le bateau à bord d’un petit bateau gonflable et sont restés naufragés sur l’île Banks pendant 9 jours jusqu’à ce que la GCC vienne à leur rescousse.

    Cet événement a mis en évidence l’importance de comprendre les effets cumulatifs d’un poids supplémentaire au-dessus du centre de gravité d’un navire, l’importance d’évaluer les modifications apportées au navire, et les problèmes liés à l’absence d’une évaluation complète de la stabilité du navire. L’enquête a aussi permis de déterminer que la formation sur la stabilité suivie par le capitaine dans l’événement à l’étude n’avait pas été suffisante pour lui permettre d’acquérir les compétences techniques nécessaires pour bien comprendre les principes de stabilité et pour reconnaître les conséquences néfastes de l’utilisation de stabilisateurs à paravane.

    M02W0147 (Cap Rouge II) – En août 2002, le bateau de pêche Cap Rouge II se dirigeait vers l’entrée du fleuve Fraser (Colombie-Britannique). Alors que le bateau se trouvait à environ 2 NM au sud du phare de Sand Heads, il a chaviré avec 7 personnes à bord. Deux personnes ont abandonné le bateau et ont pris place à bord d’une yole qui était remorquée par le bateau de pêche. Cinq personnes, dont 2 enfants, sont restées dans la coque retournée et se sont noyées.

    Cet événement a mis en évidence l’importance d’une évaluation de la stabilité et les conséquences néfastes d’une connaissance limitée des principes de stabilité de base. L’enquête a permis de déterminer que les risques liés aux modifications du bateau et au remorquage de la yole n’avaient pas été pris en compte.

    M02C0030 (Lady Duck) – En juin 2002, le véhicule amphibie Lady Duck a pris l’eau sur la rivière des Outaouais au cours d’une visite touristique sur terre et sur l’eau de la région de la capitale nationale. Le véhicule a coulé rapidement par la proue dans 8 m d’eau. Parmi les 12 personnes à bord, 6 passagers, le conducteur et le guide touristique sont parvenus à s’échapper du véhicule et ont été récupérés par une embarcation privée qui se trouvait sur les lieux au moment du naufrage. Quatre passagers, qui étaient coincés dans le véhicule en train de couler, se sont noyés.

    Cet événement a mis en évidence la complexité des règlements, des normes et des programmes qui s’appliquent aux petits navires à passagers, ce qui réduit l’efficacité du cadre de réglementation pour aider à assurer la sécurité.