Gestion de la sécurité
Certains transporteurs aériens, maritimes et ferroviaires ne gèrent pas efficacement leurs risques en matière de sécurité, et plusieurs ne sont toujours pas tenus de mettre en œuvre des processus formels pour la gestion de la sécurité. De plus, les transporteurs qui ont mis en œuvre un système de gestion de la sécurité (SGS) formel ne sont pas toujours en mesure de démontrer qu’il fonctionne et qu’il permet d’améliorer comme prévu la sécurité.
Transcription
Les transporteurs sont responsables de la conformité aux règlements et de la gestion de la sécurité de leurs activités. Toutefois, le simple fait de se conformer aux règlements et aux normes ne suffit pas. En l’absence d’un système efficace, il est peu probable que les exploitants soient capables de cerner des dangers et de gérer efficacement les risques.
Cela peut compromettre la sécurité des personnes, des biens et de l’environnement.
Puis, même si une bonne gestion de la sécurité peut permettre de cerner les risques de façon proactive, ce ne sont pas tous les exploitants aériens et maritimes qui sont tenus de mettre en œuvre des processus formels pour la gestion de la sécurité. De plus, ce ne sont pas tous les exploitants ferroviaires qui sont tenus d’avoir un système de gestion de la sécurité (ou SGS) qui ont bien cerné et réduit les risques.
L’enjeu de la gestion de la sécurité restera sur la Liste de surveillance jusqu’à ce que : tous les exploitants commerciaux aériens et maritimes sont tenus d’avoir; de mettre en œuvre des processus formels pour la gestion de la sécurité. De plus, des exploitants ferroviaires démontrent à l’organisme de réglementation que leur SGS est efficace pour réduire les risques.
Pour en savoir plus sur la Liste de surveillance 2022, consultez ce site : bst.gc.ca/Surveillance.
Contexte
Un SGS est un cadre reconnu à l’échelle internationale qui permet aux entreprises de cerner les dangers, de gérer les risques et d’améliorer la sécurité de leurs activités, idéalement avant que ne survienne un accident. Bien que l’enjeu de la gestion de la sécurité figure sur la Liste de surveillance depuis 2010 et que la sensibilisation du secteur à l’égard des SGS ait lentement augmenté depuis lors, les rapports d’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) continuent de faire état de lacunes et de préoccupations dans trois secteurs de transport.
Transport aérien
Il n’y a eu que peu de progrès pour étendre l’utilisation des SGS au-delà des exploitants assujettis à la sous-partie 705 du Règlement de l’aviation canadien (RAC). Les exigences en matière d’utilisation de SGS ne s’appliquent toujours pas aux exploitants assujettis aux sous-parties 702, 703 et 704 du RAC, aux unités de formation au pilotage (assujetties à la sous-partie 406 du RAC) ou aux exploitants d’aérodromes non certifiés. Ensemble, les exploitants assujettis aux sous-parties 702, 703 et 704 du RAC représentent plus de 90 % de tous les exploitants aériens commerciaux au Canada.
Transport maritime
À ce jour, seuls les navires canadiens qui effectuent des voyages internationaux et qui sont assujettis au chapitre IX de la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer (SOLAS) sont tenus de se conformer au Règlement sur la gestion pour la sécurité de l’exploitation des bâtiments. Ce règlement ne s’applique pas à plus de 99 % des navires commerciaux canadiens (ou « navires non visés par la convention »), bien qu’une récente proposition « échelonnée » de Transports Canada (TC) en élargirait l’applicabilitéNote de bas de page 1. Toutefois, même lorsque les exploitants ont effectivement mis en place des processus de gestion de la sécurité, ils ne sont pas toujours en mesure de démontrer que des dangers sont cernés et que des mesures efficaces d’atténuation des risques sont mises en œuvre.
Transport ferroviaire
Les compagnies de chemin de fer de compétence fédérale doivent avoir un SGS depuis 2001, et les exigences réglementaires ont été considérablement améliorées en 2015. Toutefois, le secteur n’a pas encore montré les changements en matière de culture de sécurité et d’amélioration de la sécurité attendus à la suite de la mise en œuvre des SGS. Depuis la Liste de surveillance 2020, les enquêtes du BST continuent de relever des dangers dont les exploitants ne sont pas toujours conscients et n’évaluent pas toujours les risques en vue de pouvoir prendre des mesures d’atténuation des risques efficaces Note de bas de page 2. En conséquence, le BST a déterminé que les SGS des compagnies de chemin de fer ne permettent pas encore de cerner efficacement les dangers et d’atténuer les risques dans le secteur du transport ferroviaire.
Risques pour les personnes, les biens et l’environnement
Transport aérien
À l’heure actuelle, plus de 90 % des exploitants aériens commerciaux au Canada ne sont pas tenus d’avoir un SGS. Sans l’aide d’un SGS, ces exploitants, dont beaucoup sont plus modestes, continuent de manquer des occasions d’améliorer la sécurité. Par conséquent, la probabilité d’un plus grand nombre de décès et de blessures graves demeure élevéeNote de bas de page 3.
Transport maritime
Le problème dans ce secteur comporte deux facettes : premièrement, en l’absence d’une exigence réglementaire, la majorité des compagnies maritimes et navires commerciaux du Canada peuvent ne pas mettre en œuvre de processus formels de gestion de la sécurité. Deuxièmement, comme l’ont établi les enquêtes du BST, même lorsqu’il existe des processus formels, ils ne sont souvent pas efficaces pour cerner les dangers ou réduire les risquesNote de bas de page 4. De nombreux navires et exploitants, spécialement les navires à passagers, ne peuvent donc pas bénéficier d’un système efficace de gestion de la sécurité.
Transport ferroviaire
Plus de 20 ans après la première mise en œuvre de la réglementation sur les SGS dans le secteur ferroviaire au Canada, les exploitants n’ont toujours pas démontré que leur SGS réduit les risques pour les personnes, les biens et l’environnement. Par exemple, le taux d’accident en voie principale Note de bas de page 5 en 2021 était de 2,8 accidents par million de trains-milles en voie principale (MTMVP), ce qui est supérieur au taux d’accident quinquennal précédent de 2,5 accidents par MTMVP. Jusqu’à maintenant, les compagnies ferroviaires de transport de marchandises n’ont pas démontré que leur SGS permet de cerner les préoccupations de sécurité et d’apporter des améliorations à la sécurité de manière fiable, ni que l’efficacité du SGS est mesurée. Les vérifications réalisées par TC ont consigné de manière générale le respect de la réglementation, mais TC ne mesure toujours pas régulièrement l’efficacité du SGS d’une compagnie de chemin de fer. Ainsi, même si une compagnie de chemin de fer respecte la réglementation, cela ne signifie pas qu’elle gère la sécurité de manière efficace.
Recommandations actives du BST
Neuf recommandations actives appuient cet enjeu (tableau 1)Note de bas de page 6.
Secteur de transport | Numéro de la recommandation | Le BST a recommandé que | Évaluation de 2022 |
---|---|---|---|
Aérien | A16-12 | « le ministère des Transports exige que tous les exploitants d’aviation commerciale au Canada mettent en œuvre un système de gestion de la sécurité en bonne et due forme ». | Évaluation impossible |
Aérien | A16-13 | « le ministère des Transports effectue des évaluations régulières des SGS pour déterminer la capacité des exploitants de gérer efficacement la sécurité ». | Attention en partie satisfaisante |
Aérien | A19-03 | « les associations du secteur (p. ex., ATAC, ACH, AQTA, FOA, NATA) prônent des processus de gestion proactive de la sécurité et une culture de sécurité auprès des exploitants de taxis aériens, pour corriger les lacunes de sécurité cernées dans cette enquête sur une question de sécurité, par la formation et par le partage de pratiques exemplaires, d’outils et de données sur la sécurité propres au secteur du taxi aérien ». | Évaluation impossible |
Maritime | M04-01 | « le ministère des Transports TC prenne des mesures pour assurer que les entreprises exploitant des petits navires à passagers aient un système de gestion de la sécurité en place ». | Intention satisfaisante |
Maritime | M17-01 | « le ministère des Transports s’assure que les exploitants de navires à passagers commerciaux sur la côte ouest de l’île de Vancouver déterminent quelles zones et quelles conditions sont propices à la formation de vagues dangereuses et adoptent des stratégies pratiques d’atténuation des risques pour réduire la probabilité qu’un navire à passagers se retrouve dans de telles conditions ». | Intention satisfaisante |
Maritime | M17-02 | « le ministère des Transports exige que les exploitants de navires à passagers commerciaux adoptent des processus explicites de gestion des risques et qu’il élabore des lignes directrices exhaustives pour aider les exploitants de navires et les inspecteurs de Transports Canada à mettre en œuvre et à surveiller ces processus ». | Intention satisfaisante |
Ferroviaire | R14-05 | « le ministère des Transports effectue des vérifications des systèmes de gestion de la sécurité des compagnies ferroviaires assez poussées et assez fréquentes pour confirmer que les processus nécessaires sont efficaces et que des mesures correctives sont mises en œuvre pour améliorer la sécurité ». | Intention satisfaisante |
Ferroviaire | R20-01 | « le ministère des Transports collabore avec le secteur ferroviaire et les représentants des travailleurs pour cerner les causes sous-jacentes des mouvements non contrôlés qui se produisent pendant les manœuvres sans frein à air, et pour élaborer et mettre en œuvre des stratégies ou des exigences réglementaires afin de réduire leur fréquence ». | Attention en partie satisfaisante |
Ferroviaire | R22-03 | « le ministère des Transports exige que la Compagnie de chemin de fer Canadien Pacifique démontre que son système de gestion de la sécurité permet de cerner efficacement les dangers résultant des opérations, en utilisant toute l’information disponible, y compris les signalements de dangers par les employés et les tendances des données; qu’il évalue les risques connexes; et qu’il mette en œuvre des mesures d’atténuation et en valide l’efficacité ». | Intention satisfaisante |
Mesures prises
Les enjeux inscrits à la Liste de surveillance sont complexes et difficiles à résoudre. Ils exigent la participation de nombreux intervenants, y compris des exploitants et de l’organisme de réglementation. Bien que certaines mesures puissent avoir été prises, il reste encore du travail à faire. Voici certaines des mesures prises à ce jour.
Transport aérien
Bien que des progrès aient été réalisés dans la réponse aux trois recommandations du BST sur cet enjeu, les travaux accomplis par l’organisme de réglementation et le secteur ont été sporadiques. TC réalise un examen de la politique sur les SGS qui aidera à formuler des recommandations visant à moderniser et à élargir les exigences relatives aux SGS. Cela pourrait comprendre entre autres des exigences applicables aux concepteurs et aux fabricants d’aéronefs. Il restera impossible de savoir si ces efforts corrigeront l’enjeu de la gestion de la sécurité dans le secteur du transport aérien tant que cet examen ne sera pas terminé et que TC n’aura pas mis en œuvre des changements aux exigences relatives aux SGS.
Entre-temps, certaines associations de l’industrie assurent la promotion et la prestation d’outils d’élaboration de SGS auprès de leurs membres. De plus, les commentaires des intervenants de l’industrie à l’intention du BST indiquent que les exploitants qui ne sont pas tenus d’avoir un SGS font néanmoins des efforts pour mettre en œuvre des versions de SGS à différentes échelles. Toutefois, TC ne surveille pas l’efficacité des SGS de ces exploitants, et les efforts des exploitants sont parfois entravés par le manque de ressources humaines ou d’expertise, le coût et la complexité.
Transport maritime
En 2010, TC a amorcé le processus de modification des règlements pour y inclure certaines catégories de navires non visés par la convention. Le Règlement sur le système de gestion de la sécurité maritime proposé s’appliquera à un plus grand nombre de navires commerciaux du Canada, qui seront divisés en cinq catégories, ayant chacune ses propres exigences en matière de SGS et de surveillance. En vertu de cette proposition, les navires d’une longueur de moins de 24 m, ceux d’une jauge brute de moins de 500, et ceux transportant moins de 50 passagers seraient tenus d’avoir un SGS. Toutefois, ces navires ne seraient pas assujettis à un examen ou une vérification externe de leur SGS, et l’efficacité de leur SGS ne serait contrôlée que dans le cadre d’inspections axées sur les risques par des inspecteurs de la sécurité maritime. Pendant que TC travaille à la modification de la réglementation, de nombreux exploitants de petits navires peuvent ne pas connaître les risques associés à l’exploitation de leur navire ni ne posséder les outils et l’expertise nécessaires pour gérer ces risques efficacement.
Un petit nombre d’exploitants ont adopté des SGS de leur plein gré; toutefois, TC ne surveille pas l’efficacité du SGS de ces exploitants et ces systèmes peuvent ou non faire l’objet d’une vérification externe. Sans vérification externe, il est impossible de savoir avec quelle efficacité et quelle précision ces systèmes permettent de cerner et d’atténuer les risques.
Transport ferroviaire
En septembre 2021, TC a lancé sa première ronde de vérifications pour mesurer l’efficacité des SGS, qui devait être terminée d’ici mars 2022. TC aborde activement toutes les recommandations du BST relatives à l’enjeu de la Liste de surveillance touchant la gestion de la sécurité; plus précisément, dans sa réponse à la recommandation R22-03, TC a déclaré que, à l’automne 2022, il lancerait des consultations sur des modifications possibles au Règlement de 2015 sur le système de gestion de la sécurité ferroviaire. Ces consultations garantiront que les leçons tirées des vérifications de l’efficacité des SGS par TC contribueront à l’élaboration d’exigences rigoureuses et modernes qui assureront que les SGS sont efficaces et appuient une culture de la sécurité ferroviaire améliorée.
Au début de 2022, l’Association des chemins de fer du Canada et des compagnies de chemin de fer de marchandises et de voyageurs et des compagnies de chemin de fer d’intérêt local sélectionnées ont offert au BST une mise à jour sur leur SGS. Même si certains exploitants ont fourni des détails correspondant à ce que l’on attendrait d’un SGS parvenu à maturité, aucun d’entre eux n’a inclus suffisamment de données pour permettre de déterminer s’il avait mis en œuvre des pratiques d’amélioration continue assurant le suivi de chaque mesure de sécurité ou l’efficacité de son SGS.
Quand TC aura terminé ses vérifications de l’efficacité des SGS, on devrait disposer de suffisamment de données pour déterminer à quel point les exploitants ferroviaires ont pris les mesures nécessaires pour aborder cet enjeu de la Liste de surveillance.
Mesures à prendre
Cet enjeu restera sur la Liste de surveillance des secteurs de transport aérien et maritime jusqu’à ce que
- TC mette en œuvre de la réglementation obligeant tous les exploitants commerciaux à adopter des processus formels pour la gestion de la sécurité;
- les transporteurs qui ont un SGS démontrent à TC qu’il fonctionne bien et qu’il permet donc de cerner les dangers et de mettre en œuvre des mesures efficaces pour atténuer les risques.
Cet enjeu restera sur la Liste de surveillance du secteur de transport ferroviaire jusqu’à ce que les transporteurs démontrent à TC que leur SGS est efficace.